Wikipédia:Legifer/septembre 2018

Wikipédia:Legifer
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Wikipédia:Legifer/Archives#2018

Est il acceptable de citer dans un article des propos d'une personne poursuivie pouvant être retenus contre elle?

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Bonjour Legifer, je me rejouis que depuis quelques années on puisse parler avec vous de questions juridiques ne touchant pas uniquement le copyright. Ma question concerne dans l'immédiat la célèbre affaire Benalla mais de manière générale tout article concernant une affaire où les moindres réactions des personnes concernées (ici pour une histoire de convocation) seraient repris et amplifiés par les médias, mais aussi Wikipedia (ce qui est sans doute un précédent). Le détail de ma question est ici Discussion:Affaire_Benalla#Interview_téléphonique_(semi-off)_de_Benalla, et l'interview controversée est ici [1]. Noter que la personne a accepté que ces dires soient restranscrits par écrit, mais pas que sa voix soit diffusée à la radio et que ces propos sont tenus sans avocats. Faut-il citer l'interview (9 minutes et 50 lignes) in extenso? En faire un résumé "neutre" avec une hauteur d'analyse? Ou ne pas en parler? A noter aussi un problème de données privées dans la biographie Affaire_Benalla#Alexandre_Benalla, très détaillée et contenant même certains détails familiaux ou des opinions concernant son caractère. Cela peut être pertinent pour une personne faisant un métier public (politicien, acteur, auteur), voire pour un conjoint (cas Penelope_Fillon#Biographie). Est-ce pertinent ou même légal s'agissant d'un métier de sécurité, fut-il le garde du corps "particulier" d'un Président? Il y a d'ailleurs, suite à l'attentat de Magnanville, des clauses légales protégeant certaines données (adresse, famille) des policiers. Merci de votre analyse et de votre retour. --Xav [talk-talk] 13 septembre 2018 à 15:50 (CEST)[répondre]

Juste pour dire qu'au moins une personne a lu votre message. En ce qui me concerne, je suis désolé de ne pas pouvoir, pour l'instant, répondre à vos questions. --Éric Messel (Déposer un message) 13 septembre 2018 à 23:28 (CEST)[répondre]
Merci; Eric. Une jurisprudence .. de la CEDH, sur un sujet ne concernant uniquement les propos exprimés en commission parlementaire [2]. La CEDH estime qu'il est légal de transmettre les propos tenus sous serment en audition à un tribunal, à condition qu'ils "ne servent pas de fondement exclusif à la condamnation" et ne soient pas le « support exclusif des poursuites ». Il y a un risque, (notamment dans le cas de parjure, mais aussi d'injure ou de révélation de nouveaux faits ??), de ne pas "garantir le respect effectif des droits de se taire et de ne pas contribuer à sa propre incrimination". Cela peut éclairer le cas de Wikipedia .. ou pas. WP doit-elle ou peut-elle répéter des propos susceptibles de poursuite tenus en commission parlementaire, y compris quand le rapport n'a pas été bouclé? Et de manière connexe, des propos litigieux tenus en interview, sans avocat, doivent-ils être recopiés dans WP? ou sinon traités de quelle manière? (ex: le référencement sans citation dans un article WP de propos dans des articles de presse que la justice pourra décider d'utiliser ou pas, est-il une pratique acceptable, ne constituant pas de véritable délation?) --Xav [talk-talk] 14 septembre 2018 à 14:17 (CEST)[répondre]
Si d'ici une semaine tu n'as pas reçu de réponse, tu peux laisser un message sur Discussion Projet:Droit. --Éric Messel (Déposer un message) 14 septembre 2018 à 17:54 (CEST)[répondre]
Je ne savais pas si le projet était actif. Je mets une notification:   Projet:Droit. Merci. --Xav [talk-talk] 15 septembre 2018 à 10:56 (CEST)[répondre]
Rien n'est meilleur qu'on bon message en toutes lettres : souvent les notifications passent complètement inaperçues. --Éric Messel (Déposer un message) 15 septembre 2018 à 12:01 (CEST)[répondre]
Bonjour,   Xavier Sylvestre :
« Faut-il citer l'interview in extenso? » : clairement non, ce serait illégal.
A/ Ce que l'on dit dans une interview est une œuvre de l'esprit reflétant évidemment la personnalité de son auteur, et est à ce titre protégé par le droit de la propriété intellectuelle.
On peut présumer que cette interview a été publiée avec l'autorisation de son auteur. D'autre part, le droit d'auteur et en particulier l'article L122-5 CPI autorise « analyse et courte citation » (3°a) et même une reproduction même intégrale par des tiers, dans le cadre d'une revue de presse (3°b). Mais ça n'en fait pas pour autant du domaine public. Et le projet Wikipédia est un projet encyclopédique, pas un compte-rendu d'actualité ; donc ce qui est légitime pour la presse peut (parfois) devenir illégal pour nous.
Donc, pour nous, les règles concernant la reproduction sont les mêmes que pour un roman : une encyclopédie n'aura qu'un droit à courte citation, ce qui exclut de la reproduire entièrement, et même d'en reproduire une fraction significative. Et pour savoir ce que représente « une fraction significative », ça s'évalue par rapport au volume d'origine. (En terme de droit de courte citation, pour citer légitimement le mot de Cambronne on ne peut que dire « m.... », soit 20% de l’œuvre complète, et après attribution correcte ça représente une fraction encore plus faible de l'analyse  ).
B/ L'idée que « c'est paru dans la presse donc je référencie et c'est bon » est complètement fausse, pour deux raisons :
  1. le fait que ça a été publié dans une presse relève d'une autre légitimité, d'actualité, qui n'est pas encyclopédique ;
  2. la somme de citations individuellement légitimes parce que courtes peut finir par dépasser ce qu'il est raisonnable de citer, parce que au final ce n'est plus de la « courte » citation, mais ça se rapproche d'un in extenso « façon puzzle » (- encore une courte citation, tiens...).
Voilà pour le droit.
C/ Pour ce qui est de la discipline interne (donc à discuter sur WP:LB), sur le fond, l'article Affaire Benalla serait en réalité plus à sa place dans Wikinews que dans Wikipédia.
Il y a une tolérance de fait sur Wikipédia pour les sujets d'actualité, mais il faut être conscient que l'intérêt encyclopédique ne consiste pas en une exhaustivité des détails (ce que semblent croire les contributeurs actuels) mais en une mise en perspective de ce qui est significatif et essentiel. Et ça ne peut se faire qu'avec du recul. Pour faire un « bon article » sur l'affaire Benalla, il est nécessaire d'attendre que la poussière soit retombée avant de juger de ce qu'il faut en dire ; et ceci, de préférence, au moyen de sources qui font effectivement cette analyse - pas à travers des sources d'actualité.
Donc, pour en revenir à l'aspect juridique, on peut comprendre que le bandeau {{Affaire judiciaire en cours}} signifie précisément que l'article doit être compris comme une publication d'actualité et non comme une page encyclopédique, et dans ce cadre la communauté peut s'octroyer des licences par rapport à la question de licence (désolé pour le calembour - Oh, en fait, non, pas désolé du tout).
Mais il faut bien comprendre que par rapport au droit de la propriété intellectuelle, cette protection est fragile et peut se transformer en poison lent à long terme : que le sujet ne soit plus d'actualité, et l'excuse de la couverture d'un sujet d'actualité s'efface pour ne plus laisser qu'une page de facto encyclopédique ; et le jour où (d'ici un an ou dix?) quelqu'un retirera le bandeau, il prendra sans s'en rendre compte la responsabilité juridique de publier formellement sous forme encyclopédique ce qui n'était qu'une vieille page d'actualité.
Juridiquement, la seule protection contre ce type de dérive est que systématiquement, les pages portant un bandeau d'actualité soient "mises en quarantaine", et que l'admissibilité dans l'espace encyclopédique de la page traitant d'un sujet d'actualité (tout ce qui est étiqueté par un modèle de Catégorie:Modèle d'événement récent) soit discutée au plus tard avant le retrait du bandeau d'actualité. Techniquement, de ce point de vue, il serait prudent de dresser un WP:bot pour faire ce travail automatiquement, et il est normal (voire vital) que tout sujet d'actualité soit à ce stade traité en WP:PàS - voire présenté à nouveau s'il a déjà fait une évaluation de pertinence au titre de l'actualité. (Alternative : n'accepter les pages d'actualité que dans un espace dédié, l'espace principal ne comprenant qu'une redirection vers icelui).
Bonnes réflexions, Michelet-密是力 (discuter) 15 septembre 2018 à 13:53 (CEST)[répondre]
Bonjour,   Micheletb : et merci de la longue réponse!
Je vois bien pour le droit de la propriété intellectuelle, mais est-il possible d'avoir une réponse concernant le droit pénal et le droit de la presse?
Sur ce cas-là, le risque n'est pas le dommage "commercial" qu'on fait à la propriété que Benalla (ou une personne) a sur son interview, mais le dommage "pénal" (ie contributions à des poursuites pénales) que WP (ou j'imagine tout autre site en ligne, fut-il contributif) peut faire à la personne en répétant ses propos. Ex: injures ou critiques jugées offensantes contre un élu, un magistrat, un policier, voir un citoyen normal. Note que la règle (commerciale) de citation courte est contradictoire avec l'exigence de vérité pénale, car une citation limitée aux phrases injurieux introduit un biais en n'incluant pas d'autres phrases qui éclairent le contexte (là Benalla injure un sénateur -mais aussi les marquis et les personnes de petite taille!-, le reste de l'interview montre qu'il se sent stressé et menacé, la contestation des droits de sénateurs tient de l'agression verbale, mais aussi du droit de libre expression, y compris sur un fond juridique ..). Sur le droit de la presse, en général, dans quel cadre un media, y compris collaboratif, peut répêter des injures, d'une part, et accuser une personne, d'autre part.
Je sais que cette demande sur Legifer est inhabituelle. Merci d'avance pour vos idées et réflexions.--Xav [talk-talk] 15 septembre 2018 à 14:41 (CEST)[répondre]
Bonjour,   Xavier Sylvestre : voir Diffamation en droit français.
A/ Reproduire des injures publiques peut difficilement être un délit :
  • Si Benalla injurie publiquement telles ou telles personnes, c'est à lui d'en répondre le cas échéant devant la justice.
  • Ces injures ont été publiques et publiées. Le fait pour WP de citer des sources citant Bennala comme ayant commis ces injures n'est donc pas une Diffamation en droit français, parce qu'il y a trivialement, dans ce cas, une Exception de vérité en droit français de la diffamation. Ceci à deux niveaux de défense pour WP : (1) l'injure est publique et publiée, et (2) on rapporte non pas directement ce fait, mais le fait qu'elle a été publiée.
Bref, sur ce plan là au moins, tant que l'on respecte le principe fondateur de neutralité de WP, et que l'on suit la recommandation de citer ses sources, il n'y a pas de problème juridique par rapport à la loi sur la presse à reproduire sur Wikipédia y compris des injures ou des diffamations, à condition qu'elles aient été publiques. Si l'objet du délit n'est initialement pas public, le fait de le publier à la fois devient lui-même un délit vis-à-vis de la personne visée, et également constitue un tort causé à l'injurieur (cf Article 1240 du code civil), voire est par lui-même diffamatoire à son égard.
B/ D'autre part, tant que l'on respecte les règles de WP:NPOV, il ne peut pas y avoir de diffamation.
Il peut très théoriquement y avoir une diffamation dans ce que publie WP, si par exemple on utilise une citation des injures faites par Benalla pour en réalité injurier à nouveau la cible. Si par exemple (hypothétique) Benalla prétend que « le président Macron est un vieux con » c'est son problème, et on est tout à fait légitime de le signaler dans l'article Benella, si c'est d'un intérêt encyclopédique. Mais si l'article décrivant le président écrit (référence à l’appui) que « le président Macron, dont Mr Benella a pu dire qu'il était "un vieux con",... », l'article lui-même devient diffamatoire (et dans ce cas, j'imagine mal la forme que pourrait prendre l'exception de vérité). Donc, la question n'est pas ce que l'on répète ou pas, mais dans quel contexte et de quelle manière on fait cette citation. Et le problème reste en principe théorique, parce que tant que l'on respecte la règle de neutralité, il n'est évidemment pas possible de faire de telles insultes indirectes.
Pour qu'il y ait "diffamation" il faut au départ qu'il y ait une bonne réputation : avec un discours neutre, décrivant factuellement la situation, on ne peut pas tendre à donner une mauvaise réputation à quelqu'un dont la réputation est de facto déjà mauvaise après tout ce que la presse en dit. La mauvaise réputation résulte de la presse, pas du compte-rendu neutre que l'on en fait.
C/ Mais attention aux campagnes de presse diffamatoires, qu'il ne faut pas reprendre pour argent comptant.
Par exemple, François Fillon a été l'objet d'une campagne de diffamation particulièrement « soudaine » et violente lors de l'Élection présidentielle française de 2017, et idem pour Nicolas Sarkozi tant qu'il était susceptible de se présenter à cette même campagne. Diffamation au sens pénal du terme, indépendamment de savoir si les faits évoqués étaient vrais ou non, graves ou non, illégaux ou non : ça a ruiné leur réputation. Et le caractère diffamatoire est facile à repérer dans ce cas : instructions à charge uniquement, présentations partielles et partiales, non-neutres et qui à ce titre ne seraient jamais passées dans cette forme dans l'espace encyclopédique, et « celui qui insiste pour ne présenter qu'une face de la pièce est en train de te refiler de la fausse monnaie ».
Il est évidemment légitime d'en rendre compte (mais de manière neutre), mais ici encore, il y a une différence de traitement entre un article d'actualité neutre et un article encyclopédique neutre.
Pour être encyclopédique, dès que les jugements et procès instigués suite à ces campagnes permettent de "trier les patates", il n'est plus possible de reprendre verbatim ce qu'avait dit la presse à l'époque - pour le coup, ce serait de la calomnie, parce que ce ne serait plus neutre. Pour faire du bon travail encyclopédique, il faut supprimer tout ce qui ressemble à des "sources primaires", compléter l'histoire, en indiquant qui avait été à l'origine de la manipulation, quels étaient les intérêts en jeu, etc.
Ce genre d'article est empoisonnant à long terme, parce qu'il faut constamment le réactualiser au fur et à mesure que les éléments allégués se révèlent être des « fake news » téléguidés. Mais autant une campagne de diffamation abonde en références (très) primaires, autant la vérité met du temps à sortir de son puits et n'intéresse pas grand monde, donc est par nature plus difficilement accessible : écrire correctement l'histoire demande un très gros travail de rectification dans ce cas, et la facilité consiste à ne rien faire.
Si on ne fait pas ça, un article rendant compte d'une campagne de presse diffamatoire peut rapidement se transformer en article lui-même diffamatoire ; et une lourde responsabilité pèse sur celui qui retire un bandeau de la Catégorie:Modèle d'événement récent : il transforme un article d'actualité en un article encyclopédique potentiellement diffamatoire, ce qui peut le mener devant les tribunaux. Le plus simple est de supprimer d'un article d'actualité toute source primaire et voir ce qu'il reste...  
Bonnes réflexions, Michelet-密是力 (discuter) 15 septembre 2018 à 15:53 (CEST)[répondre]
Merci encore   Micheletb :de la longue réponse.
Si je comprends bien, il n'est pas diffamatoire de citer une interview intégrale, à condition de ne pas aborder le point de vue de l'auteur (par exemple en ne citant pas d'autres protagonistes). Ici, l'avocat de Benalla pourrait utiliser le véhicule -et ici sans doute prétexte- de la propriéte intellectuelle pour attaquer la diffusion de cette interview. Ou de citations longues, comme je l'ai fait. En revanche la citation courte initiale en fait de   Cheep : [3] ne serait pas attaquable, ni par les sénateurs, ni par l'avocat, à moins que celui-ci juge qu'elle porte préjudice à sa défense en étant incomplète.
Sur les sources primaires, et secondaires, on a eu le débat ailleurs, par exemple ici:Discussion:Affaire_Benalla#Utilisation_d'articles_divers_en_tant_que_sources_d'autorité.
J'exprimais à   Baldurar : qu'un journaliste qui prend position n'est plus une source secondaire, mais primaire. Ainsi le journaliste de l'Huma ici [4]. C'est d'ailleurs ce qu'on appelle la "presse d'opinion". Là, ce n'est pas "M.Macron, dont M. Benella a pu dire qu'il était "un vieux con" mais "L'Huma estime que l’Élysée veut minimiser l’impact de la commission sénatoriale en prenant le contrôle de la défense de Benalla". L'Huma peut être poursuivi par l'Elysée pour ce point de vue (mais traditionnellement c'est rare), et WP aussi si seul le point de vue de l'Huma était pris (le fameux WP:Proportion). A noter bien sûr, qu'il ne suffit pas de rajouter un autre point de vue, similaire mais venant de Valeurs actuelles ou même de l'Express, pour arriver à un équilibre.
Pour la diffamation que tu penses avoir eu lieu contre F.Fillon, je pense que c'est encore autre chose. Comme l'a dit lui-même A.Juppé, son système de défense était pour le moins étonnant. Je crois que les contributeurs ont repris les accusations contre lui (sorties par le Canard) une fois que chaque nouveau élément a été joint à l'enquête pour laquelle une mise en examen avait été prononcée. Un point était cependant douteux: la divulgation du remboursement (privé) des frais de mariage par les enfants, mais motivé car cette information était un élément de défense des enfants Fillon eux-mêmes mis en examen. Bien sûr, ces points n'ont pas pu être équilibrés, car la défense de F.Fillon constituait à critiquer l'enquête, et non pas à expliquer le fond du travail de son épouse.
Sur l'aspect protection de WP contre la diffamation, il y a un contre-exemple, qui est le démarrage de l'affaire UMP-Bygmalion, qui a été bloquée sur WP 4 mois, en fait jusqu'aux aveux télévisés de Lavrilleux et les premières mises en examen internes au parti. La création d'un paragraphe a été bloquée pendant plus de 3 mois, à tel point que des sources secondaires et tertiaires s'en sont étonnées [5]. Il y a un déséquilibre avec ce qui se passe en 2017, et surtout 2018. (leçon toutefois: la page à modifier d'abord n'était pas J.F.Copé, mais UMP)
Si on appliquait le même critère à l'affaire Benalla, il faudrait ne mettre que les faits qui ont fait l'objet d'une mise en examen, y compris les déclarations (Benalla, Beloubet, Bas, Castaner, L'Huma ..)
Cela renvoie sur un dernier point. Les déclarations des différentes personnes en commission parlementaire ou sénatoriales, faites sous serment et sans le conseil et la protection d'un avocat, peuvent-elles être recopiées dans WP? (on met de côté la question du caractère encyclopédique ..). Si on applique la jurisprudence Bygmalion 2014 ou Fillon 2017, il faudrait qu'elles aient donné lieu à une mise en examen.
Cordialement--Xav [talk-talk] 15 septembre 2018 à 19:37 (CEST)[répondre]
Bonsoir,   Xavier Sylvestre :
Sur le plan juridique, pour résumer, le seul et unique critère à discuter en interne, sur le plan juridique, est de savoir si la page se présente comme une page d'actualité (et, typiquement, affublée de l'un ou l'autre des bandeaux de Catégorie:Modèle d'événement récent), ou comme une page encyclopédique.
  • S'il s'agit d'un évènement récent traité en tant qu'actualité, et affiché comme tel, il y a de nombreuses tolérances juridiques qui ne seraient normalement pas admissibles (y compris sur le plan juridique) dans l'espace encyclopédique. Y compris de recopier des témoignages ou interviews. Mais du moment qu'on mentionne explicitement qu'il s'agit globalement d'un thème d'actualité, et que dans le détail les éléments cités le sont à partir de sources indépendantes, et que l'on respecte (y compris pour ces citations) les règles fondamentales de neutralité de point de vue, l'article ne fait que traduire des faits d'actualité et n'est pas susceptible d'attaque juridique.
  • S'il s'agit d'une page encyclopédique faisant le point sur une question historique, la quasi-totalité des sources primaires seront partiales, historiquement dépendantes, et de ce fait non pertinentes ou au mieux à prendre avec de longues pincettes. En particulier, la reproduction intégrale de témoignages ou d'interviews n'est plus légitime. Dans ce contexte nouveau, les laisser comme sources uniques d'un article encyclopédique peut être juridiquement contestable (y compris sur le plan pénal), parce que le résultat (indépendamment de sa partialité historiquement dépendante) peut être constitutif d'une calomnie, en particulier quand ça consiste à ré-afficher des fait qui entre temps ont été jugés insignifiants (par des sources secondaires pertinentes). Pour Wikipédia, la règle normale en ce qui concerne des articles encyclopédiques est de ne pas se fonder aveuglément sur des sources primaires (dépendant des enjeux de l'époque) mais de privilégier des sources secondaires (ayant -on l'espère- suffisamment de recul).
  • Formellement, la différence d'appréciation juridique basculera le jour où le bandeau de Catégorie:Modèle d'événement récent sera retiré de l'article, le transformant d'un article d'actualité en un article encyclopédique. S'il y a un problème juridique à ce transfert, la responsabilité en incombera à l'internaute supprimant le bandeau, et il y a de grandes chances qu'il ne soit pas conscient de ce problème. Donc, le retrait d'un bandeau de Catégorie:Modèle d'événement récent est un acte (potentiellement) juridiquement grave, et pour être juridiquement 100% clean, la communauté doit s'organiser pour que l'internaute qui le fait ne se trouve pas piégé par un acte qui de toute évidence le dépasse.
Une solution simple est qu'au retrait de ce bandeau, l'article soit débarrassé de toutes ses références primaires. Une solution alternative est de ne tolérer des articles d'actualité que dans un espace dédié, pas dans l'espace principal. Une autre solution procédurale (et/ou) est de soumettre tout article qui passe du champ "actualité" au domaine "encyclopédique" à une procédure de WP:PàS vérifiant que dans sa forme actuelle, il est effectivement admissible dans l'espace encyclopédique - avec les questions juridiques correspondantes.
Le reste n'est pas juridique. Cordialement, et bonnes réflexions, Michelet-密是力 (discuter) 15 septembre 2018 à 22:21 (CEST)[répondre]

Droit d'auteur, fouilles archéologiques récentes et plans

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Bonjour,

Je travaille sur l'article sur l'abbaye Saint-Martial de Limoges, abbaye aujourd'hui détruite. Il existe des plans anciens de l'église (XVIIIe siècle), mais pas des bâtiments conventuels, qui sont connus par des fouilles très récentes. La description de ces bâtiments dans l'article est rendue peu claire par l'absence d'un plan qui indique la localisation des différentes pièces. Je ne peux évidemment pas numériser et coller le plan de l'article qui rend compte des fouilles, car il relève du droit d'auteur du chercheur qui le publie. Puis-je récupérer un fond de carte "actuel" sur openstreetmap, y coller un plan ancien de l'église (jusque là pas de souci car tout est soit sous licence libre soit dans le domaine public) et redessiner ensuite les bâtiments conventuels sur le modèle du plan du chercheur, ou bien s'agit-il d'un "copier-coller manuel" qui violerait ses droits ? --Bahusate (discuter) 16 septembre 2018 à 12:56 (CEST)[répondre]

Bonjour,   Bahusate : question intéressante.
A/ En théorie, les cartes sont explicitement dans le champ du droit d'auteur (cf Article L112-2 CPI, 11°). Ceci étant dit, la ratio legis dans ce cas n'est pas très claire, parce que le droit d'auteur protège, en principe, une œuvre de l'esprit en tant qu'elle reflète la personnalité de son auteur.
Et dans le cas des cartes, c'est le cas - ou pas.
  • Autant un portulan ou la carte du Comté d'après Tolkien est clairement le reflet de la personnalité de son auteur ;
  • Autant une bonne vieille carte d'état-major à hachures implique pour son auteur l'art du dessin - mais c'est plus une intervention technique qu'artistique, donc de l'artisanat ;
  • Et autant le cas d'une carte IGN moderne est beaucoup plus discutable, et relève plutôt (du fait de son traitement informatique et de l'absence d'auteur humain) de la législation sur les bases de données, et pas de celle sur les cartes dessinées.
Certes, toutes ces œuvres sont formellement des « cartes », mais la capacité à refléter la personnalité de son auteur est très différente dans ces trois cas : présente / technique / absente.
La question de la ratio legis est importante dans ce cas, parce que si un litige est évoqué devant un tribunal, le juge (en droit français) ne juge pas simplement de la lettre de la loi, mais doit aussi (en principe) s'interroger sur son esprit réel. Donc, les cartes sont a priori dans le champ du droit d'auteur, mais en réalité, ça dépend au cas par cas. De même, finalement, qu'un truc littéraire imprimé relève a priori du droit d'auteur, mais que la nature particulière de ce qui a été publié peut faire que ça sort en réalité de ce cadre juridique.
B/ De ce fait, j'ai souvent pu dire qu'une carte moderne peut être "paraphrasée", c'est-à-dire que l'on peut en reprendre les données purement factuelles (contours, positions,...) à condition de modifier ce qui est susceptible de correspondre à un choix artistique (couleur, forme du symbole, etc.). En effet :
  • Les éléments qui relèvent de la partie factuelle de la carte sont, par définition, factuels, et ne reflètent pas un quelconque choix artistique. Il s'agit avant tout d'une présentation graphique de données, et leur traitement juridique relève donc de la protection des bases de données (et ce, d'autant plus que ces images auront été produites par un traitement automatique de bases de données géographiques). Sur le plan international, la protection juridique d'une base de données publiquement accessible est beaucoup plus faible que celle résultant du droit d'auteur ; et en particulier, on peut librement en recopier une « fraction non substantielle » (appréciée par rapport à la publication globale).
  • En revanche, tout ce qui peut relever de près ou de loin d'un choix artistique ne peut donc pas être librement reproduit, parce que ça reflète, d'une manière ou d'une autre, la personnalité de son auteur (ne serait-ce que dans le choix des couleurs).
C/ Par ailleurs, il est constamment admis sur le plan juridique que « les faits sont de libre parcours ». C'est-à-dire que si quelqu'un publie par exemple que « le plomb fond à 327,46°C », n'importe qui peut reprendre l'information (scientifique) et l'exploiter comme il veut, la reproduire, etc, sans considération aucune de questions sur le droit d'auteur, droit de base de données ou autre. Il peut y avoir des questions de plagiat si le rédacteur s'attribue induement l'information, mais c'est une autre question.
D/ Dans ce cadre juridique, et pour ce que j'en comprends :
  • « Puis-je récupérer un fond de carte "actuel" sur openstreetmap » : oui, au titre du droit de protection et de recopie des bases de données, du moment (pour mémoire) que ce qui a été récupéré ne constitue pas une fraction substantielle de la base.
  • « Puis-je y coller un plan ancien de l'église » : oui si l'âge du plan le rend domaine public.
  • « Puis-je redessiner ensuite les bâtiments conventuels sur le modèle du plan du chercheur » : il s'agit dans ce cas particulier non pas de l'extraction d'une base de données, mais de la reproduction de faits scientifiques « de libre parcours ». Donc, oui, à condition de ne reproduire que les faits, et non les choix (artistiques,...) retenus pour les représenter (cf. point B ci-dessus).
  • Et de toute manière, attribuer clairement l'information aux sources correspondantes, en particulier celles relatives aux fouilles.
Bonnes réflexions, Michelet-密是力 (discuter) 16 septembre 2018 à 19:42 (CEST)[répondre]
Merci   Micheletb : pour cette longue réponse très argumentée. J'y vois un peu plus clair maintenant. --Bahusate (discuter) 16 septembre 2018 à 20:26 (CEST)[répondre]