Viol collectif
Un viol collectif, viol en réunion ou parfois « tournante », est un viol commis par plusieurs personnes agissant comme auteurs ou complices. Lorsqu'il est commis au cours d'un conflit armé, il s'agit de viol de guerre, relevant des crimes de guerre, voire de crimes contre l'humanité lorsqu'ils ont un caractère systématique.
Droit par pays
modifierAu Canada
modifierEn droit pénal canadien, il n'existe ni infraction de viol, ni infraction aggravée d'agression sexuelle collective, car les situations factuelles de viol sont englobées dans l'infraction large d'agression sexuelle (art. 271 du Code criminel[1]) et les infractions aggravées de l'agression sexuelle ne concernent que l'agression sexuelle armée (art. 272 C.cr.[2]) et l'agression sexuelle grave (art. 273 C.cr.[3]). En outre, les principes de détermination de la peine du Code criminel ne mentionnent pas le caractère collectif d'un crime comme un facteur aggravant (art. 718.2 C.cr.) [4], mais en vertu des règles de la common law, le ministère public peut néanmoins suggérer des facteurs aggravants au tribunal qui ne sont pas directement dans le Code criminel[5].
Cependant, le régime des participants à une infraction des articles 21 et suivants du Code criminel[6] permet de réprimer efficacement le phénomène du viol collectif car ces règles prévoient que « (1) participent à une infraction : a) quiconque la commet réellement; b) quiconque accomplit ou omet d’accomplir quelque chose en vue d’aider quelqu’un à la commettre; c) quiconque encourage quelqu’un à la commettre ». Les prévenus peuvent subir leur procès seul ou ensemble en vertu du régime des coaccusés de la Loi sur la preuve au Canada[7].
Par ailleurs, la jurisprudence de la Cour suprême du Canada en matière de participants à une infraction traite directement d'affaires de viols collectifs. Dans l'arrêt Dunlop et Sylvester c. La Reine[8], concernant le viol collectif allégué d'une adolescente par des membres d'un club de motards, la Cour a jugé que la simple présence de l'accusé sur les lieux d'un acte criminel n'est pas suffisante pour condamner la personne pour avoir aidé et encouragé un acte criminel. Dans l'arrêt R. c. Briscoe[9], concernant la participation de trois adolescents et deux adultes à l’enlèvement, au viol et au meurtre brutal d'une jeune fille, la Cour suprême a précisé l’exigence de la mens rea dans l'expression « en vue de » à l’al. 21(1)b) du Code criminel.
En France
modifierEn droit français, le viol collectif est un viol commis par plusieurs personnes agissant comme auteurs ou complices.
Selon les cas, de multiples circonstances aggravantes sont envisageables : sur personne mineure ou personne vulnérable, en concours avec d'autres viols commis sur d'autres victimes, lorsqu'un mineur était présent et y a assisté.
En Suisse
modifierL’affaire des viols de Pré-Naville en 1981 à Genève marque un tournant dans le traitement des affaires de viol. Lorella Bertani, juge suppléante auprès du tribunal de Genève, écrit en 2018 dans un article intitulé « Code lourd et drague pénale » que : « pour la première fois on entendait vraiment les victimes et on condamnait les auteurs »[10].
Dans leur travail sur les réponses données aux violences faites aux femmes dans le canton de Genève, Marta Roca I Escoda et Marylene Lieber affirment que ce procès a été « le premier procès politique en matière de viol soutenu par un comité, largement suivi par le public et amplement couvert par la presse », et que les condamnations ont été « d’une rare sévérité à Genève en matière de viol à l’époque ». L’un des buts de l’association Viol-Secours créée à la suite de cette affaire a été de « faire reconnaître le viol en bande comme une circonstance aggravante »[11].
Déjà en 1983, la conseillère nationale genevoise socialiste Amélia Christinat dépose une motion « invitant le Conseil fédéral à envisager une modification du Code pénal suisse afin d’introduire la notion de circonstances aggravantes pour les viols commis par les individus agissant en bande ». Les condamnations prononcées dans l’affaire de Pré-Naville ont visé des auteurs individuels, sans que le tribunal ne puisse retenir la circonstance aggravante d’avoir agi en groupe[12].
Le entre en vigueur une révision du Code pénal en ce qui concerne les infractions contre l'intégrité sexuelle. Un des points concerne l’introduction d'une circonstance aggravante permettant de punir plus sévèrement les auteurs d'un viol commis en commun par plusieurs personnes[13].
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifier- Viol
- Samira Bellil
- Le joueur de foot Brésilien Robinho condamné en 2014 pour viol en réunion avec cinq amis
- Chronologie du statut des femmes (en France)
- 1972-2013 : Affaire des viols collectifs de Rotherham (Angleterre)
- 1981 : Affaire des viols de Pré-Naville (Genève, Suisse)
- 1983 : Viol collectif sur Cheryl Araujo à New Bedford dans le Massachusetts (Etats-Unis)
- 2004 : Viol collectif de Miryang (Corée du Sud)
- 2012 : Affaire du viol collectif de New Delhi (Inde)
- 2013 : Viol collectif en 2013 à l'université Vanderbilt (États-Unis)
- 2014 : viol collectif d'Hanna Lalango (Éthiopie)
- 2016 : Agressions sexuelles du Nouvel An 2016 en Allemagne
Lien externe
modifier- Dossier du Collectif féministe contre le viol sur les « Viols collectifs de mineur(e)s »
Notes et références
modifier- Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 271, <https://canlii.ca/t/ckjd#art271>, consulté le 2023-02-06
- Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 272, <https://canlii.ca/t/ckjd#art272>, consulté le 2023-02-06
- Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 273, <https://canlii.ca/t/ckjd#art273>, consulté le 2023-02-06
- Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 718.2, <https://canlii.ca/t/ckjd#art718.2>, consulté le 2023-02-06
- R. c. Cadotte, 2019 QCCS 1987
- Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 21, <https://canlii.ca/t/ckjd#art21>, consulté le 2023-02-06
- Loi sur la preuve au Canada, LRC 1985, c C-5, art 4, <https://canlii.ca/t/ckjh#art4>, consulté le 2023-02-06
- [1979] 2 RCS 88
- [2010] 1 RCS 411
- Lorella Bertani, « Code lourd et drague pénale », La Lettre du Conseil, no 65, , p. 70-75 (lire en ligne, consulté le ).
- Marta Roca I Escoda et Marylene Lieber, « La mise en œuvre et les mutations d'un problème public : les violences faites aux femmes dans le Canton de Genève », Onati Socio-legal Series, vol. 5, no 2, , p. 11-12 (lire en ligne, consulté le ).
- Amélia Christinat, « Motion contre le viol en bande », Femmes suisses et le Mouvement féministe : organe officiel des informations de l'Alliance de Sociétés Féminines Suisses, vol. 71, no 5, , p. 7 (lire en ligne, consulté le ).
- Anne-Marie Barone, « Grève des femmes - Neuf ans après... : Viol, harcèlement sexuel - Qu'est-ce que les années 90 ont apporté aux femmes ? », Solidarités-INFO, no 110, , p. 8 (lire en ligne, consulté le ).