Bataille de La Horgne

Bataille

Le combat de La Horgne est livré le , pendant la bataille de France, entre les forces allemandes et françaises.

Combat de La Horgne
Description de cette image, également commentée ci-après
Vue sur le fleuve de la Meuse.
Informations générales
Date 15 mai 1940
Lieu La Horgne, France
Issue Victoire allemande
Belligérants
Drapeau de la France France Drapeau de l'Allemagne nazie Reich allemand
Commandants
Colonel Olivier Marc Colonel Krüger
Pertes
50 tués
150 blessés (environ)
86 prisonniers
31 tués
102 blessés
environ 10 engins blindés neutralisés

Seconde Guerre mondiale,
Bataille de France

Batailles




Percées de la Meuse et rupture du front belge :


Tentatives de contre-attaques alliées :


Défense des ports de la Manche et rembarquement britannique à Dunkerque :


Effondrement de la Ligne Weygand, avancée allemande sur la Seine et évacuation des troupes alliées :


Front italien et percée allemande dans le Sud :
Coordonnées 49° 37′ 40″ nord, 4° 40′ 16″ est
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Combat de La Horgne

Au cours de ce combat, la 3e brigade de spahis affronte dans le village de La Horgne un bataillon d’infanterie motorisée renforcé de chars, appartenant à la 1re Panzerdivision allemande.

Préambule

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Le 13 mai 1940, le 19e corps blindé du général Guderian, après avoir traversé la Belgique et le Luxembourg, attaque les Français et franchit la Meuse dans la région de Sedan.
Le 14 mai, tandis que la 10e Panzerdivision, passant à l'est de Sedan, tente une action vers le sud, Guderian infléchit vers l'ouest l'axe d'attaque des 1re et 2e Panzerdivisions, ouvre une brèche de 8 kilomètres entre les IIe et IXe armée françaises, entre Poix-Terron et Baâlons, et s'apprête à foncer en direction de Rethel.

Le combat

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Dans la nuit du 14 au 15 mai 1940, la 3e brigade de spahis qui est déjà au combat depuis cinq jours, reçoit l'ordre de constituer un point d'appui au carrefour de La Horgne pour y freiner l'ennemi et permettre à d'autres unités de monter en ligne pour colmater la brèche. Laissant leurs chevaux à couvert, les spahis des 2e régiment de spahis algériens et 2e régiment de spahis marocains s'installent à La Horgne, construisent immédiatement des barricades, et les bâtiments sont transformés en blockhaus, avec des moyens de combat restreints (2 canons antichars de 25 mm et un canon de 37 mm).

Le vers h, un bataillon du schützen regiment 1 de la 1re Panzerdivision venant de Singly est accueilli par des tirs nourris. Les Spahis sont alors attaqués, d'abord par des sections de Schützen et leurs véhicules de combat d'infanterie (SdKfz 251), et en fin d'après midi par des blindés (12 Panzers III et 8 Panzers IV), tandis que des avions de reconnaissance rapprochée Henschel 126 (dits "mouchards") surveillent le secteur.

 
La légende invente après le combat une contre-attaque montée menée contre les Panzers par les Marocains. Illustration de spahis du 3e RSM chargeant à cheval en mai 1940.

Le combat fait rage mais les Spahis réussissent néanmoins à tenir, malgré les assauts allemands. Le rapport des forces, relativement équilibré initialement, bascule vers 14 h 30, lorsque les Allemands reçoivent le soutien de 4 obusiers d'artillerie de 105 mm FH18. Vers la fin de l’après-midi, deux compagnies légères et une compagnie moyenne de Panzer entrent en jeu. Les Allemands contournent les positions de résistance des Spahis avec leurs chars. Les Spahis tirent le reliquat de leurs munitions avant de décrocher comme ils le peuvent. La légende évoque la charge à cheval contre les chars allemands, sabre au clair, du 3e Escadron de Spahis Marocains du lieutenant Dugué Mac Carthy. Cet épisode inventé de toutes pièces a été repris à l'envi dans la littérature : "On ne saura jamais comment les spahis de Marrakech ont été jetés en holocauste aux chars"[1]. En 1940, la cavalerie française se déplace à cheval mais combat à pied. L'Escadron Mac Carthy a contre-attaqué à pied en fin de journée mais a été cloué sur place par les forces allemandes largement supérieures. Blessé par éclats de grenade, le lieutenant Mac Carthy est alors fait prisonnier[2].

Le colonel Olivier Marc, commandant la 3e Brigade de Spahis (3e BS), est blessé et fait prisonnier. Le colonel Emmanuel Burnol, chef de corps du 2e RSA, est tué pendant l'exfiltration, quand il se heurte à la section de protection de l'état-major du lieutenant-colonel allemand Balck, commandant le Schützen-Regiment 1 (SR 1). Le colonel Émile Geoffroy, chef de corps du 2e RSM, est tué dans le village alors qu'il fait le coup de feu avec les derniers Spahis sur une barricade.

Le soir, après 10 heures de combats, totalement encerclés, épuisés et à court de munitions dans le village en flammes, n'ayant pas été rejoints par les renforts attendus, les survivants se résignent à cesser le combat. Certains réussiront à décrocher, en ordre dispersé et, dans des conditions très difficiles, ils réussiront à regagner les lignes françaises et poursuivront la lutte ; d'autres sont faits prisonniers et reçoivent sur le terrain les honneurs militaires de leurs vainqueurs[3].

Composition de la 3e brigade de spahis en mai-juin 1940

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Brigadier-chef du 2e régiment de spahis algériens lors de la bataille de La Horgne

Durant la bataille de France, trois brigades de spahis à deux régiments sont constituées. La 1re brigade comprend le 6e RSA et le 4e RSM, la 2e brigade les 7e et 9e RSM et la 3e brigade le 2e RSA et le 2e RSM[4].

La 3e Brigade de Spahis est créée en Afrique française du Nord en octobre 1939 par regroupement du 2e RSA venant de l’Oranais algérien (PC à Tlemcen) et du 2e RSM venant du Sud Marocain (PC à Marrakech). Chaque régiment comporte quatre escadrons de Spahis à cheval et un escadron d’appui équipé de mitrailleuses et de quatre canons légers antichars. Au total et en théorie, un régiment compte 25 % d'Européens et 75 % de Nord-Africains :

  • 39 officiers dont 5 Nord-Africains
  • 117 sous-officiers dont 30 % de Nord-Africains
  • 125 brigadiers dont 50 % de Nord-Africains
  • 977 spahis dont 85 % de Nord-Africains.

La légende du combat de La Horgne véhicule des pertes surévaluées au sein de la 3e Brigade de Spahis : plus de 700 Spahis tués[5] !

En 2010, le colonel Thierry Moné, pour qui « le combat de La Horgne constitue un beau fait d’armes... pour les deux belligérants », a revu à la baisse les estimations du nombre de tués du mercredi 15 mai 1940 à La Horgne et dans les environs immédiats[2]. En 2016, dans sa thèse de doctorat soutenue à la Sorbonne, il précise les pertes françaises et allemandes :

" La 3e Brigade de Spahis a perdu exactement 50 tués et environ 150 blessés pour interdire La Horgne pendant la journée du 15 mai 1940. Si l’on se place du point de vue de l’appartenance à chacun des deux régiments, les Spahis du 2e Algériens ont payé le prix fort avec 42 tués (84 %) contre 8 tués au 2e Marocains (16 %). Si l’on considère l’origine de ces hommes, on dénombre 16 tués (32 %) d’origine française, 28 tués (56 %) d’origine algérienne, et 6 tués (12 %) d’origine marocaine. Enfin, au niveau des corps d’appartenance, on dénombre 5 officiers tués (tous d’origine française, dont les deux chefs de corps : le colonel Emmanuel Burnol commandant le 2e RSA et le colonel Émile Geoffroy commandant le 2e RSM), 6 sous-officiers tués (2 d’origine française et 4 d’origine algérienne), et 39 gradés et Spahis tués (9 d’origine française, 24 d’origine algérienne et 6 d’origine marocaine). Les Spahis de la 3e BS tués à La Horgne et dans ses environs, représentent un peu moins de 2 % des quelque 2 600 hommes de la brigade. L’histoire est donc fort éloignée d’une mémoire véhiculant la légende de 740 Spahis tués, qui auraient représenté plus de 28 % de l’effectif de la 3Brigade de Spahis.

Les Allemands de la 1. Panzer-Division ont perdu 31 tués et 102 blessés pour s’emparer de La Horgne, un petit village ardennais placé bien malgré lui sur l’axe principal d’effort opératif allemand, le Schwerpunkt du général Guderian. La résistance de La Horgne n’a pas changé le sort de la bataille de France mais a constitué une bien mauvaise surprise pour la 1. Panzer-Division qui n’aurait jamais imaginé devoir déployer à cet endroit l’un de ses deux groupements de combat (le Gefechtsgruppe Krüger). Sur les 399 tués enregistrés par la 1. Panzer-Division au mois de mai 1940, les 31 tués de La Horgne (2 officiers, 5 sous-officiers et 24 militaires du rang) représentent un peu moins de 8 %, c’est dire si cet engagement ne fut pas anodin. "

Cimetière

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Carré militaire de La Horgne

À la Horgne, un carré militaire regroupe les sépultures chrétiennes et musulmanes des Spahis y compris celles des deux chefs de corps, le colonel Emmanuel Burnol et le colonel Émile Geoffroy qui reposent au milieu de leurs Spahis.

Notes et références

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  1. Louis Aragon, Les communistes, 1949 - Extrait - Louis Aragon sert comme médecin auxiliaire pendant la campagne de 1940
  2. a et b Ardennes, 15 mai 1940...Les SPAHIS de la HORGNE, La Charte, novembre-décembre 2010
  3. Pierre Ordioni, Mémoires à Contretemps 1945-1972, 2000 - Ouvrage en ligne
  4. Anthony Clayton, Histoire de l’Armée française en Afrique 1830-1962, Albin Michel, 1994, p. 340
  5. Jean-Dominique Merchet, « Combats de mai 40 : quand la "mémoire" exagère les pertes des Spahis », Secret Défense, (consulté le )

Bibliographie

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  • Thierry Moné, Les Spahis de La Horgne, 2011
  • Le 5 septembre 2016, le colonel (er) Thierry Moné a soutenu à la Sorbonne une thèse de doctorat d’histoire moderne et contemporaine intitulée : « 15 mai 1940, le mercredi de La Horgne : de la mémoire à l’histoire. La campagne de mai-juin 1940 de la 3e Brigade de Spahis. » Cette thèse a obtenu la mention « Très honorable avec félicitations du jury ». L’intégralité de cette thèse de plus de 1 300 pages est consultable en ligne et téléchargeable gratuitement, ici : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01468845

Liens externes

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