République corse
La République corse (en corse : Ripublica Corsa, en italien : Repubblica Corsa) est un État autoproclamé institué en par Pascal Paoli et ses partisans, plus globalement par l’ensemble du peuple corse, par indépendance vis-à-vis de la république de Gênes.
Ripublica Corsa
Repubblica Corsa
1755 – 1769
(13 ans, 9 mois et 25 jours)
Hymne | Dio vi salvi Regina |
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Statut | République |
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Capitale | Corti |
Langue(s) | Corse, italien |
Religion | Catholicisme |
Monnaie | Soldo |
Population | ~150 000 habitants |
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Superficie | 8 778 km2 |
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Le général Pascal Paoli proclame l'indépendance de la Corse à l'égard de la république de Gênes. | |
La Constitution corse est votée. | |
Premier traité de Compiègne : Gênes fait appel à la France pour occuper Ajaccio, Saint-Florent et Calvi. | |
La République Corse frappe sa propre monnaie, le soldo. | |
Second traité de Compiègne : Gênes demande que les troupes françaises occupent également Bastia et Algajola. | |
Paoli fonde l'Université corse pour la formation de cadres dirigeants. | |
Traité de Versailles : Gênes cède « provisoirement » à la France la souveraineté sur l'île. | |
7-10 octobre 1768 | Bataille de Borgo : victoire contre les Français. |
8-9 mai 1769 | Bataille de Ponte-Novo : annexion par le royaume de France. |
Pascal Paoli quitte la Corse pour l'Angleterre. |
1755-1769 | Pascal Paoli |
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Entités précédentes :
Entités suivantes :
La République est installée via l'adoption par des représentants de la Constitution corse. Élaborée par Paoli, elle visait à donner une légitimité absolue au Gouvernement de la nation corse et à faire de ce territoire un État souverain, indépendant des Génois qui en revendiquaient la possession. Cette constitution est souvent considérée comme la première constitution démocratique de l'histoire moderne, basée sur la séparation des pouvoirs législatif et exécutif ainsi que sur le suffrage universel[1].
Succédant, dans le cadre du soulèvement contre les Génois, au royaume de Corse, la République corse a créé une éphémère administration, un système de justice, ainsi qu'une armée de quelques milliers d'hommes et une flottille. La défaite des Corses à la bataille de Ponte-Novo en 1769 signe la fin de ce projet politique et précède l'annexion de la Corse par le royaume de France.
Fondation
modifierGrâce à une série d'actions réussies, Paoli parvint à limiter la domination génoise à quelques villes côtières. Il se mit alors à réorganiser le gouvernement, introduisant de nombreuses réformes. Il crée un parlement national, ou Diète, composé de délégués élus dans chaque district pour un mandat de trois ans. Le suffrage est étendu à tous les hommes âgés de plus de 25 ans[2]. Traditionnellement, les femmes (veuves ou célibataires)[3] ont toujours voté lors des élections villageoises pour élire des responsables locaux[2] et il semblerait qu'elles aient aussi voté lors des élections nationales sous cette République[4].
La République a frappé sa propre monnaie à Murato en 1763, avec l'impression de la tête de Maure, symbole traditionnel de la Corse.
En 1764, Paoli fonde par édit une université à Corte qui ouvre les portes en 1765.
Longtemps, on a cru qu'un Ordre de Sainte-Dévote avait été créé en l'honneur de la sainte patronne de l'île, sainte Dévote[5]. Ceci n'est toutefois corrélé par aucune source et semble largement improbable.
Les idées de Paoli sur l'indépendance, la démocratie et la liberté, ont obtenu le soutien de philosophes de l'époque comme Jean-Jacques Rousseau, Voltaire, Raynal et Mably[6].
La publication par l’Écossais James Boswell en 1766 d'un « compte rendu sur la Corse » flatteur rend Paoli célèbre dans toute l'Europe.
Le Bey de Tunis[7] lui-même accorde sa reconnaissance diplomatique à la Corse.
Constitution
modifierLa Constitution corse, adoptée par des représentants corses le à la "Consulta generale di Corte", est considérée par certains auteurs comme étant la première constitution démocratique de l'histoire moderne[8],[9]. Rédigée en italien[10], elle organise les institutions de la République corse, proclamée au même moment.
Initiée par Pascal Paoli, elle avait été précédée par un règlement, voté au couvent Saint-Antoine de Casabianca le , quand avait été pour la première fois proclamée l'indépendance corse.
Fondée sur la séparation d'une part du pouvoir exécutif, d'autre part du pouvoir à la fois judiciaire et législatif, ainsi que sur un suffrage indirect par tous les chefs de famille, cette constitution fut en vigueur de 1755 à 1769 (bataille de Ponte-Novo et défaite militaire face aux troupes françaises). Elle visait à donner le pouvoir absolu au Gouvernement de la Nation corse.
Elle est considérée comme la première constitution au monde accordant le droit de vote aux femmes[11] lorsqu'elles deviennent chefs de famille, mais il n'y a pas eu d'élection jusque l'abrogation de 1769[12].
Cette thèse est cependant à nuancer : "Tous les hommes de plus de vingt-cinq ans sont électeurs. Le texte de 1755 ne le dit pas, car toute la tradition va déjà dans ce sens. Contrairement à ce que l'on dit souvent, "les femmes" en général ne votent pas. Certaines le font dans le cadre d'assemblée de village, quand le vote se fait par famille et que, veuves, elles représentent la leur. Leur rôle est donc déjà plus grand que dans bien des États d'alors, mais c'était déjà le cas avant Pascal Paoli"[13].
Annexion française
modifierEn 1767, la Corse prend l'île de Capraia aux Génois. Un an plus tard, désespérant de ne jamais pouvoir reprendre la Corse, ces derniers vendent leur revendication territoriale à la France lors du traité de Versailles.
L'armée française pénètre en Corse la même année, à la suite de quoi les forces de Paoli se battent désespérément pour leur nouvelle république contre les continentaux, remportant notamment la bataille de Borgo. Toutefois, en , à la bataille de Ponte-Novo, ils sont vaincus par des forces largement supérieures[réf. nécessaire] commandées par le comte de Vaux. Paoli se réfugie en Grande-Bretagne, son alliée. Le contrôle des Français a été consolidé sur l'île, et en 1770, la Corse est devenue officiellement une province française.
Notes et références
modifier- La Constitution de Pascal Paoli, La Marge.
- (en) Gregory Desmond, A history of the Anglo-Corsican Kingdom and its role in Britain's Mediterranean strategy during the Revolutionary War, 1793-1797, Rutherford, N. J./London ; Toronto, Fairleigh Dickinson University Press, , 211 p. (ISBN 0-8386-3225-4), p. 19.
- « 1755, la Constitution corse accordait déjà le droit de vote aux femmes », France 3 Corse ViaStella, (lire en ligne, consulté le ).
- Lucien Felli, M. Pasquale Paoli, père de la patrie corse, Paris, Albatros (lire en ligne), « La renaissance du paolisme », p. 29
« Il est un point où le caractère précurseur des institutions paolines est particulièrement accusé, c'est celui du suffrage en ce qu'il était entendu de manière très large. Il prévoyait en effet le vote des femmes qui, à l'époque, ne votaient pas en France. »
- Sainte Dévote, sur corsicanews
- (en) Oliver Zimmer, Power and the Nation in European History, Cambridge, Cambridge University Press, , 389 p. (ISBN 0-521-84580-7), p. 289.
- (en) Peter Adam, Pasquale Paoli : an enlightened hero 1725-1807, Archon Books, (ISBN 0-208-01031-9), p. 117.
- Dorothy Carrington (1973), "The Corsican Constitution of Pasquale Paoli (1755–1769)", The English Historical Review, 88:348 (July), p. 482.
- Ottaviani, T., La Corse pour les Nuls, First-Grün, Paris, 2010
- (en) Cedric J. Oliva, « Peripheral (Dis)Unity: The Italian Influences on Corsican Linguistic and Cultural Developments », Carte Italiane, vol. 2, no 8, (lire en ligne)
- Philippe-Jean Catinchi et Josyane Savigneau, « Les femmes : du droit de vote à la parité », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- Grégoire Bézie, « 1755, la Constitution corse accordait déjà le droit de vote aux femmes », France 3 Corse Via Stella, (lire en ligne, consulté le )
- Cf. Histoire de la Corse et des Corses, J-M Arrighi et O. Jehasse, Perrin édition, 2013, page 421