Pseudo-koguryŏ
Le pseudo-koguryŏ (aussi appelé pré-koguryŏ ou vieux pseudo-koguryŏ[1],[2]) est le nom donné par le linguiste Alexander Vovin à une ancienne langue hypothétique non-attestée du centre de la Corée[3].
Pseudo-koguryŏ | |
Période | Possiblement Ier siècle avant J.-C. à VIIe siècle après J.-C. |
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Pays | Goguryeo |
Région | Anciennement centre de la Corée |
Classification par famille | |
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Carte | |
Carte des langues japoniques péninsulaires entre le Ier siècle avant J.-C. et le VIIe siècle après J.-C. environ. | |
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Nom
modifierChristopher Beckwith (2004) revendique que les toponymes d'origine japonique du Samguk Sagi au centre de la Corée représentent la langue du royaume de Goguryeo[4], elle-même apparentée au langues japoniques dans une famille de langues japono-koguryeoïque[5].
Alexander Vovin (2013), qui est opposé à cette théorie, argue que lesdits toponymes représentent en fait la langue des peuples que Goguryeo a conquis, et non la langue de Goguryeo lui-même. Il nomme cette langue "pré-koguryŏ", ce qui signifie qu'il s'agit de la langue parlée avant celle de Goguryeo (Koguryŏ en romanisation McCune-Reischauer). Il considère par ailleurs que le goguryeoan est une langue coréanique, dont des inscriptions et des emprunts dans le jurchen, le mandchou et le khitan (des langues voisines) soutiennent cette hypothèse[6]. Vovin (2017) utilise plus tard le terme "pseudo-koguryŏ" (ce qui signifie "faux" koguryŏ, idée qui représente le fait que ces toponymes ne reflètent pas la langue de Goguryeo)[7],[8],[9],[10],[11],[12].
Classification
modifierAinsi, selon Vovin, le pseudo-koguryŏ est une des langues japoniques péninsulaires, c'est-à-dire une langue du groupe de locuteurs japoniques qui seraient restés sur la péninsule de Corée, contrairement aux japoniques insulaires, qui se sont établis sur Kyūshū suivant la culture Yayoï[13],[14]. Il s'agirait d'une langue très proche du proto-japonique[15].
Vovin note que les toponymes sont principalement concentrés dans la région du bassin du fleuve Hangang, appartenant précédemment à Baekje, puis annexé par Goguryeo. De plus, le pseudo-koguryŏ ressemble énormément au paekche japonique, il en conclue donc qu'une telle différenciation est peut-être artificielle[16].
Cette langue aurait été responsable d'un substrat en coréen[17].
Sean Kim suggère que les langues japoniques insulaires et péninsulaires se seraient séparées vers le VIIIe – VIIe siècle av. J.-C. Il suggère aussi que le pseudo-koguryŏ se serait différencié des autres langues japoniques péninsulaires vers le IIe – IIIe siècle. Le pseudo-koguryŏ se serait éteint, assimilé aux langues coréaniques, au VIIe siècle[18].
Comparaison lexicale
modifierVovin (2017) compare certains glosses du pseudo-koguryŏ à plusieurs langues japoniques insulaires[19].
français | vieux japonais | proto-ryūkyū | proto-japonique insulaire | pseudo-koguryŏ |
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trois | mî-tu | *mi-tu | *mi-tu | *mit |
cinq | itu | *itu | *itu | *yuci |
sept | nana | *nana | *nana | *nanɘn |
dix | töwo | *too | *tɘwɘ | *tɘk |
vallée | tani | *tani | *tani | *tan |
eau | mî-ndu | *me-nzu | *me | *mɛ |
poireau | mîra | Hirara mizza | *mera | *mɛl |
lière | husaŋgî (en vieux japonais oriental : wosaŋgî) | *Osaŋgî | *wosaŋgi | *osegam |
bouche | kuti ~ kutu- | *kuti | *kutuy | *kuci |
banc | pê | -- | *pia | *piet |
plomb | namari | *namari | *namari | *namut |
profond | puka(-si) | *puka-sa-N | *puka | *pot-se |
entrer | ir- | *ir- ~ *i- | *ir- | *i- |
adjectif fini/attributif | -si | -- | *-se/i | *-se |
Références
modifier- (en) Roger Blench et Matthew Spriggs, Archaeology and Language: Correlating archaeological and linguistic hypotheses, Psychology Press, (ISBN 978-0-415-11761-6, lire en ligne)
- Robbeets (2007), p. 17
- Vovin (2013), p. 223
- Beckwith (2004), p. 19
- Beckwith (2004), p. 28
- Vovin (2013), p. 223-225 ; p. 237-238
- Cho et Whitman (2021), partie 4.3.2
- (en) Giovanni Stary, Tumen Jalafun Jecen Aku: Manchu Studies in Honour of Giovanni Stary, Otto Harrassowitz Verlag, (ISBN 978-3-447-05378-5, lire en ligne)
- Pellard (2007), p. 4
- Vovin (2005), p. 116-117
- Vovin (2017), p. 7-8
- Vovin (2021), p. 219
- Whitman (2011), p. 157
- Vovin (2017), p. 6
- (en) Eurasian Studies Yearbook, Eurolingua, (lire en ligne)
- Vovin (2017), p. 32
- Vovin (2010), p. 239
- (en-US) Sean Kim, « The History of the Japonic Languages » , sur YouTube, (consulté le )
- Vovin (2017), p. 7
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- (en) Alexander Vovin, From Koguryo to Tamna: Slowly riding to the South with speakers of Proto-Korean, Korean Linguistics, (lire en ligne )
- (en) Alexander Vovin, Koguryǒ and Paekche: Different Languages or Dialects of Old Korean? The Evidence from Texts and Neighbors, Journal of Inner and East Asian Studies, (lire en ligne )
- (en) Alexander Vovin, Korea-Japonica: A Re-Evaluation of a Common Genetic Origin, Honolulu, University of Hawaii Press, (ISBN 978-0-8248-3278-0, lire en ligne )
- (en) Alexander Vovin, Origins of the Japanese Language, Oxford Research Encyclopedia of Linguistics, (lire en ligne )
- (en) Alexander Vovin et Sambi Ishisaki-Vovin, The Eastern Old Japanese Corpus and Dictionary, Brill, , 518 p. (ISBN 9789004471665, lire en ligne )
- (en) Christopher Beckwith, Koguryo, the Language of Japan's Continental Relatives, Brill, (ISBN 978-90-04-13949-7, lire en ligne )
- (en) John Whitman, Northeast Asian Linguistic Ecology and the Advent of Rice Agriculture in Korea and Japan, Rice, (DOI 10.1007/s12284-011-9080-0, lire en ligne)
- (en) Martine Robbeets, Koguryo as a Missing Link, Leiden, Korea in the Middle, (lire en ligne )
- (en) Sungdai Cho et John Whitman, The Cambridge Handbook of Korean Linguistics, Cambridge University Press, (ISBN 9781108311434, lire en ligne )
- (en) Thomas Pellard, Review: Christopher I. Beckwith (2004) Koguryo, the Language of Japan’s Continental Relatives: An Introduction to the Historical-Comparative Study of the Japanese-Koguryoic Languages with a Preliminary Description of Archaic Northeastern Middle Chinese, HAL open science, (HAL hal-00194111, lire en ligne )