Nanomatériau

matériau de structure nanométrique
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Un nanomatériau est un matériau (sous forme de poudre, aérosol ou quasi-gaz, suspension liquide, gel) possédant des propriétés particulières à cause de sa taille et structure nanométrique. Les nanomatériaux sont — au sens commun du terme — habituellement issus de la nanotechnologie, à la différence des nanoparticules qui peuvent être d'origine naturelle ou résulter de processus tels que le soudage, le fumage, le polissage. Le , la Commission européenne publie ses recommandations relatives à la définition des nanomatériaux (recommandation 2011/696/UE)[1] : « on entend par nanomatériau un matériau naturel, formé accidentellement ou manufacturé contenant des particules libres, sous forme d’agrégat ou sous forme d’agglomérat, dont au moins 50 % des particules, dans la répartition numérique par taille, présentent une ou plusieurs dimensions externes se situant entre 1 et 100 nm ».

L'utilisation de ces produits a connu un développement rapide (« En 2012, 500 000 tonnes de nanomatériaux ont été produites, importées et distribuées en France, selon les résultats de la déclaration annuelle 2013, devenue obligatoire à l'échelle nationale. Deux cent quarante catégories de substances différentes sont ainsi utilisées »[2]). En 2016, 1 827 produits contenant des nanomatériaux ont été référencés dans le monde contre seulement 54 en 2005[3].

Vue en rotation d'une sphère de fullerène de type Buckminsterfullerène, nanoproduit considéré comme toxique (C60).

De nombreux matériaux font l'objet de recherches visant à les produire sous forme de nanoparticules (métaux, céramiques, matériaux diélectriques, oxydes magnétiques, polymères divers, carbones, etc.), seuls ou en formes ou structures composites.

On parle également de nanocomposites (et nanocomposite de polymère) qui sont par exemple des matériaux dits « nanostructurés » (en surface ou en volume), ou « nanorenforcés ».

Avec la mise au point de techniques permettant d’élaborer des matériaux dont les dimensions sont nanométriques, un champ considérable s’est ouvert pour des matériaux nouveaux et des propriétés ont été découvertes qui relèvent de la physique (optique, électronique, magnétisme), avec déjà un ensemble très important d’applications industrielles, de la catalyse ou de la mécanique, avec toutefois, pour les matériaux structuraux, une limitation liée à la difficulté à accéder à des quantités de matière ou à des coûts pertinents. Parallèlement se sont développées des technologies permettant de façonner, par modulation de la composition ou par usinage à l’échelle nanométrique, des systèmes de matériaux et, de là, d’inventer des dispositifs nouveaux en microélectronique et en informatique.

Historique

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L’utilisation des nanoparticules par l’humanité remonte au début des temps civilisés. En effet, de façon inconsciente, certaines civilisations ont eu du succès dans divers domaines (métallurgie et médecine), à l’aide des nanomatériaux. C’est d’abord par l’optimisation empirique de certaines technologies, sur plusieurs décennies, à travers un système d’artisan et d’apprenti, qu’ils ont mis à profit des nanostructures. Le succès des médecines traditionnelles chinoises, ou encore la production des aciers de Damas n’est rien de moins que l’œuvre d’un changement dans la matière à l’échelle nanométrique[4]. En effet, à titre d’exemple illustrant ces faits, des nanofils encapsulés dans des nanotubes ont été identifiés dans une épée originale du XVIIe siècle, identifiée comme étant faite de cet acier mythique. Les méthodes de fabrication avaient été modulées par les artisans de l’époque, jusqu’à la production d’acier qui avait des propriétés bien supérieures à celles de la cémentite[5].

Philosophiquement, ce n’est que récemment qu’une civilisation ait jeté les bases scientifiques des nanotechnologies. En effet, c’est dans les années 1950, que Richard Feynman, qui a, par ses présentations de « Plenty of room at the bottom », établi qu’il est théoriquement possible de construire atome par atome, des structures avec des propriétés spécifiques. Avec la découverte par Richard Smalley du fullerène, une nanosphère de carbone (C60), ainsi que la possibilité technique de les caractériser et de les fabriquer, les nanomatériaux étaient devenus une réalité qui avait le potentiel de révolutionner toutes les sphères de la science[6].

Avec la découverte de l’ADN, l’humanité allait devoir se doter d’outils et de techniques pour pouvoir construire, créer et modifier ce type de structure fondamentale. La conception d’instruments tels que le microscope à force atomique, le microscope à balayage électronique et la spectrométrie à diffraction de rayon x, combiné à leur amélioration, ont permis de faire progresser rapidement la recherche dans les nanomatériaux. Les microscopes à force atomique et les microscopes à balayage électronique ont permis aux scientifiques de « voir » et de constater un univers nanologique de la même façon que les microbiologistes du XVIIe siècle ont découvert les mécanismes intimes des cellules avec le développement du microscope optique.

L’accélération de la recherche dans les méthodes de synthèses et l’augmentation de la disponibilité des nanoparticules de toute sorte, ont permis à l’humanité de ce qui sera possiblement rapporté dans le futur comme le début de l’âge du « nano »[4]. Aujourd’hui, c’est le caractère multidisciplinaire des nanotechnologies qui intéresse des chercheurs dans des domaines visant à trouver des solutions aux grands problèmes énergétiques, aux problèmes de santé, à l’optimisation de technologies existante et les promesses de ce contrôle intime de la matière sont nombreuses.

Synthèse et mise en œuvre

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Deux approches existent[7], qui consistent à :

  • assembler des atomes dans un « réacteur » ou autre système pour produire des nanoparticules : Approche bottom-up ;
  • dégrader de la matière en particules nanométriques : approche top-down. Cette approche sert davantage à élaborer des dispositifs nanométriques que de synthétiser les nanomatériaux proprement dits. La nanolithographie de circuits électroniques en est un exemple.

Voir ci-bas un aperçu de quelques techniques de synthèse pour des nanomatériaux d'actualité. Il est important de noter que la modulation des paramètres de synthèse sert principalement à contrôler la morphologie et la taille de particules et que chaque technique donne des résultats variables au niveau de la pureté et de l'homogénéité du produit. De plus, certaines techniques sont applicables en laboratoire mais difficilement exportables à grande échelle.

Synthèse de nanoparticules d’oxyde de zinc

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Les nanomatériaux d’oxyde de zinc sont souvent fabriqués selon deux méthodes : la méthode du dépôt de vapeurs chimiques et la méthode de précipitation hydrothermale. La première comporte plusieurs variantes, mais le principe est toujours le même : l'évaporation des réactifs et la condensation du produit en contrôlant les paramètres pour obtenir la morphologie désirée. La deuxième permet un grand contrôle sur la cristallisation en milieu aqueux.

Méthode de dépôt de vapeurs chimiques

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L’une des plus populaires est l’évaporation de l’oxyde de zinc à très haute température (> 1 050 °C) dans une atmosphère d’azote et d’oxygène gazeux avec un catalyseur d’argent pour ensuite être condensé sur un substrat à pression et température (620 à 680 °C) contrôlée pour l’obtention de différentes morphologies[7],[8]. Afin d’éviter l’utilisation d’un catalyseur, d’excellents résultats dans la production de nanofils ont été obtenus par le dépôt chimique en phase vapeur organométallique. La croissance des nanofils dépend des débits gazeux, de la pression du précurseur, de la température du substrat et de sa position dans le réacteur. La qualité du film obtenu se compare favorablement aux autres méthodes[9].

Méthode de la précipitation en solution (hydrothermale)

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Cette méthode consiste en la précipitation en milieu aqueux à des températures d’un maximum de 350 °C à des pressions élevées d’environ 5 MPa durant plusieurs heures à pH contrôlé. Les réactifs donnent l’oxyde de zinc, qui en fonction de la température, la pression, le pH et le temps de réaction, cristallisera en différentes formes, de différentes grosseurs[10],[8]. À la suite de la réaction, il ne suffit que de récupérer les cristaux par filtrage, rinçage et séchage. Quoique cette description soit extrêmement triviale, la littérature contient un nombre incalculable d’articles exposant les marches à suivre pour obtenir des nanomatériaux ayant les caractéristiques morphologiques souhaitées.

Synthèse de nanoparticules de titanate de baryum

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Le titanate de baryum est une substance déjà utilisée à grande échelle pour ses propriétés piézoélectriques. Depuis quelques années, plusieurs articles ont fait état de la façon de le fabriquer sous forme de nanoparticules. La méthode des oxydes mixtes, qui consiste grossièrement en la réaction de deux oxydes dans des ratios stœchiométriques appropriés suivie de broyages et calcinations successives pour faire « croitre » des cristaux du pérovskyte[10],[4],[11]. La méthode de synthèse hydrothermale est souvent employée pour le titanate de baryum. Cependant, l’intérêt dans plusieurs domaines de nanoparticules de titanate de baryum en grandes quantités et de grande qualité ont poussé les chercheurs à trouver une méthode de synthèse à grande échelle[12]. Ould-Ely et al. ont récemment réalisé ceci avec une méthode sol-gel de production de nanoparticules de titanate de baryum, à température de la pièce, en s’inspirant de la biosilification, un processus biologique misant sur la polycondensation en milieu aqueux. La synthèse mise sur le mélange d’un précurseur de BaTi(OCH2CH(CH3)OCH3)6 et de methoxyproanol/1-butanol dans l’eau distillée exposée à une vapeur d’eau et d’acide chlorhydrique. Lors de la synthèse semi-continue, ils ont obtenu des nanoparticules de 6 à 8 nm avec un rendement de 90 %. En utilisant un procédé en continu, les particules ont augmenté de taille à 30 nm. Dans les deux cas la synthèse dure de un à dix jours en fonction de la température de cristallisation choisie (à 80 °C plutôt qu’à température de la pièce, la cinétique chimique s’en trouve augmentée)[12]. Malheureusement, en ce qui concerne son utilisation dans le domaine biomédical, la stabilité du titanate de baryum en milieu aqueux à pH variable pose plusieurs problèmes entre autres par la formation d’ions de Ba+[13],[14]. C’est pourquoi il faut, selon les applications, enrober le nanomatériau avec un polymère. Dans la section sur la biocompatibilité du titanate de baryum, des exemples d’enrobages sont expliqués pour des applications précises.

Synthèse de nanoparticules de nitrure de bore

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Les nanotubes de nitrure de bore sont plus ou moins l’équivalent des nanotubes de carbones auxquels on a substitué le carbone par des atomes d’azote et de bore alternativement. Ce nanomatériau attire de plus en plus les chercheurs puisqu’il démontre, en comparaison avec sa contrepartie en carbone, une meilleure résistance thermique, une résistance électrique uniforme et une bande interdite d’environ 5 eV. Depuis leur première synthèse au début des années 1990, plusieurs méthodes ont été documentées pour la production de nanotubes de nitrure de bore. Les méthodes de dépôt de vapeurs chimiques, la décharge d’arcs et l’ablation laser normalement employées avec les nanotubes de carbone ne donnent pas de résultat satisfaisant au niveau de la pureté et du rendement de production. En effet, dans le cas de production par décharge électrique les nanotubes sont d’une remarquable qualité, mais en quantité insuffisante par rapport aux réactifs qui subsistent majoritairement sous forme de flocons. Dans le cas de l’ablation au laser, les conclusions furent les mêmes et d’une expérience à l’autre, les nanotubes s’aggloméraient différemment sans l’obtention systématique d’une seule paroi ouverte. Pour la déposition de vapeur chimique, de meilleurs résultats ont été obtenus quant à la qualité des nanotubes, mais la quantité reste marginale. D’autant plus qu’avec cette technique, la route chimique impose la modulation de réactifs précurseurs[15],[16]. La première étape de production consiste en la pulvérisation mécanique de cristaux de bore dans un moulin avec des billes de carbure de tungstène de diamètre de 5 mm pour 24 heures sous un vide de 0,2 kPa d’azote gazeux. Les particules de bore sont donc passées d’une grosseur micrométrique à une grosseur nanométrique. Ces nanoparticules de bore ont ensuite été mélangées avec des microparticules d’oxyde de fer et d’oxyde de magnésium dans un ratio molaire de 2:1:1 avant d’être placées sur un creuset d’alumine dans un tube de quartz. L’étape subséquente, une étape de recuit donnant lieu à une déposition thermique de vapeur chimique sur substrat placé au-dessus du creuset et une réaction chimique directe dans le creuset, à 1 200 °C pour six heures dans une atmosphère d’azote et d’ammoniac, 95 v%, 5 v%. Les résultats obtenus ont permis de conclure qu’il est possible de fabriquer simultanément des nanotubes de nitrure de bore, des nanotubes encapsulés multi-parois dans le cas de la réaction directe et des nanotubes multi-parois cylindriques par déposition de vapeurs[15]. Il reste néanmoins que, aussi prometteur soit-il pour ses propriétés uniques et sa proximité avec sa contrepartie en carbone, ce nanomatériau n’a pas profité d’autant de recherche de la communauté scientifique. Il est toujours difficile d’obtenir des articles rapportant une méthode de synthèse donnant une uniformité et un rendement suffisants pour l’élaboration d’applications à grande échelle[16].

Synthèse de nanoparticules de titano-zirconate de plomb

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Le titano-zirconate de plomb (PZT) est une céramique piézoélectrique très répandue dans l’industrie. En fait, lorsqu’on parle céramique piézoélectrique, c’est cette substance qui est souvent mise de l’avant dans la littérature. Il convient donc d’affirmer que ce fut l’un des premiers matériaux piézoélectriques pour lesquels des méthodes de synthèse ont été développées pour en faire un nanomatériau. Cela se traduit donc en une abondante littérature pour ses méthodes de synthèse.

Une des méthodes de synthèse est la coprécipitation chimique. Au début des années 2000, des Coréens, Kim et al., ont développé une méthode de coprécipitation dans la production de nanoparticules de PZT afin de complémenter les méthodes déjà employées avec succès : sol-gel, mécanochimique et oxydation[10],[11],[17]. Leur technique permet entre autres d’obtenir une meilleure stœchiométrie à un cout moindre avec un procédé exportable à grande échelle.

Ils ont obtenu la poudre de PZT dans un moulin ayant des concentrations stœchiométriques d’oxyde de titane, nitrate de plomb(II) et de zirconium oxynitrate en solution aqueuse. Après 30 minutes de broyage, l’hydroxyde d’ammonium a été ajouté et le broyage poursuivi pour un 2 heures supplémentaire, durant lesquelles, les hydroxydes de plomb et de zirconate précipitaient avec l’oxyde de titane. Après rinçage, les cristaux récupérés ont été calcinés à des températures de 400 à 850 °C avant d’être broyés à nouveau durant 20 heures. Durant cette étape, des nanoparticules de PZT d’environ 50 nm sont obtenues, effectuant la dernière manœuvre à 500 °C avec des balles de broyage de 1 mm. Cette méthode améliore aussi les propriétés de frittage du PZT, même sans calcination préalable[17].

Morphologies de nanomatériaux actuellement étudiés ou exploités

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Les plus souvent évoqués sont :

  • nanotubes de carbone ou de nitrure de bore ;
  • nanoparticules métalliques : sphères métalliques de taille nanométrique. Ces nano-objets peuvent être synthétisés par voie chimique (croissance) ou physique (jets moléculaires). ex. : Nanoargent désinfectant ou désodorisant dans les chaussettes et autres vêtements, ciment autonettoyant au dioxyde de titane ; crème solaire au dioxyde de titane, etc. ;
  • nanopoudres de céramique (silicates ou oxyde de titane) : obtenus en vaporisant des précurseurs métalliques et/ou organiques dans une flamme à très haute température. Ces nanopoudres ont des propriétés dans le traitement de surface de matériaux (durcissement), les matériaux biocompatibles (implants osseux) et les polymères conducteurs notamment ;
  • nanofibre, notamment de carbone : ces matériaux ont des propriétés qui intéressent le domaine de la conductivité électrique, de la résistance mécanique et des implants biocompatibles (muscles artificiels). Elles peuvent également servir à stocker efficacement l'hydrogène ;
  • nanofeuille de verre : leur usage est envisagé dans le domaine des disques optiques. La densité d'informations pourrait être multipliée par 4 par ce procédé, mettant en œuvre le dépôt d'oxyde de cobalt sur la surface du disque. Des procédés mettant en œuvre du chrome, du zirconium et du cobalt laissent espérer des densités encore plus importantes ;
  • nanofilm d'ADN : ces films ont des propriétés filtrantes, exploitables notamment dans le domaine environnemental ;
  • nanocristal : par exemple, diamant artificiel ayant des propriétés électriques permettant de fabriquer de nouveaux microprocesseurs. Les cristaux naturels, comme l'opale ou le saphir, sont soumis à des recherches. Nanocristaux de semi-conducteurs fluorescents ;
  • nanocomposites : des matériaux composites ayant des propriétés de dureté et de résistance à l'usure ;
  • nanoproduits pour l'alimentation ; antiagglomérant pour sucre de table à la silice (avis réservé de l'AFSSA[18] en France qui demande un étiquetage spécifique).

Intérêt dans le domaine médical

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Il a été observé qu'au moins deux tissus biologiques importants sont manifestement stimulés par l’électricité : les tissus nerveux qui étendent leurs réseaux d’axones et dendrites en présence de micro courant, et les tissus osseux, qui semblent avoir des propriétés piézoélectriques, quand une culture cellulaire osseuse serait stimulée par cette caractéristique. Les tissus musculaires et le cartilage bénéficient aussi d’une stimulation électromécanique et les nanomatériaux piézoélectriques peuvent être employés pour favoriser une meilleure culture in vitro[10].

La stimulation électrique avec des électrodes, quoique très avancée, pose certains problèmes. Entre autres, le contact avec des électrodes n’est pas optimal et des complications peuvent survenir à la suite de leur implantation[19],[20],[21],[22]. D’autre part, depuis une trentaine d’années, des chercheurs ont confirmé l’intérêt d’employer des matériaux piézoélectriques, allant du polyfluorure de vinylidène aux céramiques, in vitro et in vivo, pour favoriser l’ostéogénèse[23],[24],[25]. On peut donc comprendre que des nanomatériaux piézoélectriques employés à bon escient peuvent jouer un rôle clé dans la conception de ces tissus.

Conception de tissus osseux

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Une des composantes du tissu osseux, l’hydroxyapatite, un minéral biologique qui régule le métabolisme osseux et qui maintient son intégrité, est piézoélectrique. La piézoélectricité de ce matériau a été démontrée ainsi que son rôle dans la régénération des os, lorsque soumis à une stimulation électrique. Dans les années 1990, la composition d’une céramique biologique d’ingénierie a été faite par un mélange de l’hydroxyapatite et du titanate de baryum, pressé en cylindre de 2 × 4 mm à 1 200 °C pour ensuite être polarisé dans le sens de la longueur. Le matériau, nommé HABT, a été implémenté dans la mâchoire de chiens sur plusieurs directions. Des paires de chiens ont ensuite été euthanasiées toutes les semaines pendant cinq semaines permettant de caractériser l’apport du matériau dans la régénération des os. Les résultats ont démontré que l’ostéogenèse était améliorée, donnant une semaine d’avance sur les mâchoires traitées par HABT en comparaison à l’hydroxyapatite seule. De plus, le sens de la polarisation avait un effet perpendiculaire à l’implant (mais non à celui du tissu) dans l’augmentation de l’ostéogenèse[26].

Afin de raffiner ce concept, une équipe de chercheurs a récemment expérimenté avec des céramiques composites d’oxyde de titane (particules de 10 nm) et de titanate de baryum (< 100 nm) avec des proportions de la deuxième composante variant de 0 à 20 %. Les échantillons ont été pressés en disques de 10 × 2 mm à 1 000 °C et une série a été polarisée à 2 500 V pour déterminer l’effet de la polarisation sur l’ostéogenèse. Les échantillons ont été mis sur un plateau de culture avec des cellules osseuses de rat et pressés mécaniquement afin de produire la piézoélectricité dans les cellules environnantes[27].

Le résultat fut que la concentration de titanate de baryum, le temps et la polarisation sont les facteurs principaux favorisant l’ostéogenèse. Cependant, les auteurs de cette étude ont observé un matériau tiers, le BaO(TiO2)2 lorsque le titanate de baryum est à 10 %, auquel ils attribuent une baisse d’ostéogenèse à ce pourcentage. Par contre le résultat qui est intéressant est l’employabilité des nanoparticules de titanate de baryum dans la fabrication de tissu osseux, ce qui est manifeste : plus précisément le caractère piézoélectrique de ce dernier. Il reste maintenant à déterminer l’effet que pourraient avoir différentes formes (nanotube, nanofils, etc. ) de ce matériau sur l’ostéogenèse.

Conception de tissus nerveux

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Une équipe de recherche italienne estime que, quoiqu’il y ait beaucoup de recherche dans le domaine des nanomatériaux à base de carbone dans le domaine biomédical, il n’y en a pas avec ceux faits à partir du nitrure de bore. Le nitrure de bore permettrait d’obtenir des nanostructures similaires à celles du carbone, avec le bénéfice d’une réactivité moindre en milieu biologique[28]. De plus, ce nanomatériau présente d’excellentes caractéristiques piézoélectriques lorsqu’il est sous forme de nanotube[29].

Avec cette idée en tête, ils ont dispersé des nanotubes de nitrure de bore de 50 nm de diamètre et de 200 à 600 nm de longueur à l’aide de glycol-chitosan. La solution a été appliquée sur des cultures cellulaires PC12 et la cytotoxicité a été évaluée, telle qu’expliquée à la section 4.3.

Les cultures cellulaires ont ensuite été exposées à des concentrations 0, 5 et 10 μg/mL de nanotube de nitrure et leur internalisation endoplasmique confirmée par différentes méthodes de microscopie électronique. Afin de provoquer l’effet piézoélectrique du nanomatériau, la moitié des cultures a été exposée à des ultrasons en guise de stimulation mécanique. Les résultats après 72 heures d’incubation ont la fois démontrée que les nanotubes de nitrure de bore stimulent la prolifération des cellules nerveuses, mais que cet effet est amplifié par la soumission des cultures aux ultrasons[20].

Risques

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Les risques toxicologiques et écotoxicologiques sont liés à la taille très petite (100 000 fois plus petit qu'une cellule humaine moyenne) de ces matériaux, qui fait qu'ils se comportent comme des gaz et passent au travers des muqueuses et de la peau et de toutes les barrières (y compris méninges protégeant le cerveau, et placenta).
Les risques sont donc potentiellement liés à :

Le risque varie selon le nanomatériau considéré (selon la taille, la quantité, la structure, la surface spécifique et réactivité de surface, la toxicité chimique, une éventuelle radioactivité, les capacités d'agrégation, la réactivité, le comportement dans l'eau ou l'air, la présence éventuelle d'un surfactant ou d'un solvant, etc.).
Un même matériau présente une toxicité accrue lorsqu'il est à une dimension nanométrique, à cause d'une réactivité accrue.

Un des principaux risques identifiés concerne l'air inhalé (les nanoparticules libres se comportent comme des gaz plus que comme des aérosols ; Certains métaux (aluminium, lithium, magnésium, zirconium) ou des produits combustibles peuvent, à l'état de nanoparticules, former dans l'air des nuages explosifs. Ils doivent être entreposés sous atmosphère inerte (azote par exemple).
D'après certaines sources[31] :

  • une particule de 1 nm ne peut pas atteindre les alvéoles pulmonaires ;
  • une particule de 5 nm se dépose aléatoirement au niveau du nez et du pharynx, de la trachée et des bronches ou encore au niveau des alvéoles ;
  • une particule de 20 nm se dépose dans plus de 50 % des cas au niveau alvéolaire.

Les nanoparticules insolubles présentent également des propriétés de translocation leur permettant de se déplacer dans l’organisme. Ces particules peuvent passer des poumons au sang, puis être distribuées dans l’ensemble de l'organisme. Ces particules intéressent également la pharmacologie pour leur capacité à atteindre le cerveau, à franchir les barrières intestinales, cellulaires et placentaires[31].

Un rapport IRSST[32] regroupe les connaissances toxicologiques spécifiques aux nanoparticules disponibles à cette époque. Les risques peuvent concerner des travailleurs (plusieurs centaines de personnes exposées, au Québec, à des nanoparticules[31]) ou encore des utilisateurs de produits finis. Le nombre de personnes exposées devrait augmenter avec l'usage accru de ces produits.

Concernant les risques, certains en appellent au principe de précaution et demandent des études d'impacts poussées avant toute mise sur le marché, mais de nombreux produits sont déjà sur le marché, et les évaluer coûterait cher « Les tests sur seulement 2 000 substances par an pourraient coûter 10 milliards de dollars, et nécessiteraient le sacrifice d'un nombre considérable d'animaux de laboratoire chaque année afin de réaliser les essais de toxicité in vivo » selon le centre d'analyse stratégique (CAS) qui estimait en 2013 que « ce n'est plus envisageable »[33]. Parmi les solutions évoquées figure l'écoconception[34] avec une notion de « sécurité intrinsèque par le design » (safe by design)[35]. L'approche safe by design pose à son tour un certain nombre de questions qui peuvent porter à controverse[36].

Nanodéchet, un déchet « émergent »

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Un sujet émergent au début du XXIe siècle est celui de la collecte, du stockage et de la gestion des nanodéchets issus du développement de la production et utilisation de nanoproduits[37] que l'on va par exemple potentiellement retrouver dans les lixiviats de décharge, refioms ou cendres d'incinération de déchets[38].
Un projet NANOFlueGas a cherché (2013) à caractériser les émissions particulaires issues de l'incinération de déchets contenant des nanomatériaux ou certains nanoproduit[39]. Le projet Nanosustain WP5 étudie le comportement et relargage de NTC lors de l’incinération de composites époxy-NTC et recherche des méthodes d'évaluation du potentiel de relargage lors de la combustion. Le projet InnanoDep mesure les dégagements de nanoparticules quand des nanomatériaux manufacturés sont incinérés alors que le projet NanoFlueGas et porte sur les nanoparticules présentes ans les gaz issus de l'incinération des déchets contenant des nanomatériaux[38].
Le projet Nanosustain WP5 s'intéresse aussi :

  • au comportement du monoxyde de zinc nanoparticulaire associées au verre lors de son recyclage (en 2012, le Programme Riskcycle avait déjà évoqué la question du recyclage et des nanoproduits (Bilitewski et al., 2011 et 2012)[38] ;
  • à la biodégradabilité de certaines nanoparticules lors du processus de compostage (l'exemple pris est la nanocellulose) ;
  • aux risques de migrations de nanoproduits/nanoparticules qui seraient stockés en ISDND vers les lixiviats et en particulier au risque de diffusion à travers les membranes de fond ; L'université de Lund University a également un programme Toxlix (toxicité des lixiviats d’ISDND) sur les polluants organiques émergents dans les lixiviats[38].


L'Ademe et l'Ineris s'intéressent aux effets des micropolluants (certains comme le nanoargent sont biocides) en station d'épuration ou en installations de méthanisation car ils pourraient inteférer avec les processus d'épuration/fermentation et éventuellement diminuer l'efficacité des procédés de traitement de l'eau ou des biodéchets. En particulier un programme ARMISTIQ porte sur les micropolluants dans les STEP, porté par l'INERIS et l'ONEMA pour écrire un premier guide de recommandations techniques sur la mesure des micropolluants dans les rejets canalisés[38].

Dans le domaine de la santé

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Les nanomatériaux présentent certaines propriétés les rendant potentiellement intéressants pour la médecine. En 2012, des nanotechnologies et des nanomatériaux sont déjà utilisés dans divers domaines, dont dans celui des médicaments et de la médecine, certains parlant déjà de nanomédecine[40]. Trois champs principaux d'utilisation sont le diagnostic, la délivrance de médicaments et la médecine régénérative. Des applications intéressent aussi la chirurgie et la thermothérapie[41]).

Cependant les nanomatériaux pourraient aussi être source de risques nouveaux pour la santé. Concernant les nanoimplants ou matériels médicaux contenant des nanoproduits, l'Afssaps a produit en France une première évaluation en 2011[42].

En Europe le SCENIHR a demandé un avis scientifique à ce propos, et en particulier concernant :

  • l'usage de nanotubes de carbone dans certains produits (ciments) de reconstruction osseuse[43] ;
  • l'utilisation de nanopoudre d'hydroxyapatite[44] dans les pâtes destinées à remplir des vides dans l'os[43] ;
  • l'usage de polymère contenant des nanoparticules dans le cadre de résines de remplissage dentaires[43] ;
  • l'usage de nanocéramiques polycristallines dans les matériaux de restauration dentaires[43] ;
  • l'intégration de nanoparticules d'argent ou d'autres nanomatériaux dans les revêtement de cathéters et d'implants[43] ;
  • l'utilisation de nanoparticules d'argent comme agent antibactérien, dont dans les pansements (Wijnhoven et al., 2009)[43].

Des retours d'expérience existent déjà sur l'utilisation de nanoparticules d'oxyde de fer injectées dans des cellules tumorales ensuite chauffée par rayonnement pour par champ magnétique externe[45]. De tels produits peuvent être utilisés dans le réseau sanguin[46] ou en neurochirurgie (neuroprothèses)[47], reconstitution de réseau neuronal[48].

Il reste de nombreuses lacunes en matière d'évaluation des risques, même pour des produits déjà très répandus tels que le nano-argent[49], et les usages médicaux des nanoparticules ou nanoproduits ne sont pas clairement encadrés par la législation sur la médecine ni sur les implants et matériels médicaux et en dépit d'avis donnés en 2006[50], 2007[51] et 2009[52], le SCENIHR souhaite en 2012 éclaircir certains points non encore abordés, notamment concernant les implants (dont produits de remplissage dentaire)[43].

L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), « face aux incertitudes scientifiques et aux interrogations sociétales suscitées par les potentiels risques sanitaires des nanomatériaux », a installé en , un groupe d'experts dit «Groupe de travail pérenne nano»[53] notamment chargé d'assurer une veille scientifique « en temps réel » sur les risques émergents (sanitaires et environnementaux) et les dangers liés aux expositions aux nanomatériaux manufacturés pour tous leurs usages. De plus, l'appel à projets de recherche en santé-environnement-travail (APR-EST) de l'ANSES peut soutenir la recherche dans ce domaine[54]. L'Agence a conclu en 2014, face au déploiement rapide de ces produits et en raison des risques toxicologiques identifiés pour certains d'entre eux, qu'un encadrement réglementaire européen renforcé est nécessaire. Cet encadrement pourrait prendre place dans le cadre des règlements Reach et CLP[2].

Dans le domaine de l'environnement

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Des données parcellaires font état d'effets potentiels préoccupants sur la faune et la flore[55] mais les conditions d'expérimentation sont souvent très éloignées de celles rencontrées dans la réalité. Les concentrations rencontrées dans l'environnement sont extrêmement faibles, de l'ordre du μM (10−6 mol/l) au non détectable (<10−9 mol/l) et la faible quantité d'information actuellement disponible sur les effets néfastes des nanomatériaux ne permet pas d'établir des modèles fiables.

Les premiers essais pour déterminer les mécanismes d'assimilation et de toxicité des nanoparticules ont été réalisés à partir du Modèle du Ligand Biotique (BLM)[56] pour prévoir les phénomènes dose-réponses.

Des études éco-toxicologiques[57],[58] portant sur des micro-algues (ex : Chlamydomonas reinhardtii) exposées à des nanoparticules d'argent (5 à 29 nm) ont mis en évidence le rôle important de la paroi cellulaire et des transporteurs de métaux (notamment Cu) dans l'assimilation de ces nanomatériaux et que le BLM ne pouvait pas s'appliquer dans ce cas.

Les effets observés pour décrire la toxicité des nanoparticules sur ces algues sont :

  • l'inhibition de la croissance ;
  • la baisse du rendement photosynthétique ;
  • la baisse de la production de chlorophylle ;
  • le stress oxydant (production de radicaux libres).

Définition légale

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Avoir une définition précise des nanomatériaux permet, entre autres, d’accorder des brevets, d’offrir des subventions pour les programmes liés aux nanomatériaux, de réguler les objets entrant dans cette définition, de permettre aux industriels de vendre le caractère nano et à certaines associations de diriger le choix des consommateurs ou même d’interdire certains produits. Il est donc nécessaire de mettre en place une définition la plus précise et la moins arbitraire possible, basée sur la science. Pour cela, il faut définir les critères sur lesquels cette définition se reposera[59]. C’est l’International Standardization Organization (ISO), organisme international chargé de la normalisation internationale, qui s’est occupé de cette définition au niveau international. En 2007 à l’intérieur de l’ISO, le Technical Commitee 229 (TC229), chargé des nanotechnologies, est créé à la demande des responsables des programmes de soutien aux nanotechnologies et d’industriels. Ce comité est composé de trois groupes de travail (WG, pour working group) :

  • le WG1, chargé de définir les substances ;
  • le WG2, chargé de les mesurer ;
  • le WG3, ayant pour but d’évaluer leurs risques.

Le plan du WG1 pour définir les nanomatériaux est de commencer par définir la base, qui est l’échelle nanométrique, pour ensuite définir les nano-objets et finalement les nanomatériaux.

Le WG1 commence donc en définissant l’échelle nanométrique, pour cela il définit d’abord la limite supérieure à 100 nm. Cette borne supérieure facilite le financement des programmes des nanomatériaux.

Il est aussi nécessaire de définir la borne inférieure, afin d’éviter que toutes les petites molécules organiques, comme celles de la pétrochimie, ne soient incluses dans les nanomatériaux. En effet, si beaucoup trop d’éléments sont inclus dans la définition, elle perdrait en spécificité et en précision, et donc, en importance. Cette limite inférieure fût fixée à 1 nm, afin d’exclure les petites molécules. Cependant, une difficulté apparait : les fullerènes, molécules à base de carbones en forme de ballons ou de tubes, découvertes par Richard Smalley (prix Nobel de chimie en 1996) qui est considéré comme l’un des pères des nanotechnologies. En effet, certains fullerènes ont une taille inférieure à 1 nm et se verraient donc exclus de la définition des nanomatériaux. Cela n’a pas lieu d’être, les fullerènes étant le point de départ des recherches sur les nanomatériaux et étant à la base des nanomatériaux carbonés. L’échelle nanométrique doit donc ne pas être trop rigide et est fixée à environ 1-100 nm, excluant ainsi les petites molécules organiques et incluant les fullerènes.

Après avoir défini l’échelle nanométrique, les nano-objets sont définis comme étant des substances ayant au moins une composante à l’échelle nanométrique et feront donc partie des nanomatériaux[60]. La question d’inclure les matériaux nano-structurés, matériaux présentant des régularités à l’échelle nanométrique dans leur structure, est en proie à de fortes oppositions surtout de la part de la délégation allemande. Car cela conduit à l’inclusion d’agrégats et d’agglomérations de nano-objets, par exemple la farine culinaire, ce qui signifie que des objets plus grand que 100 nm, mais contenant une certaine quantité de nano-objets pourraient être inclus. Ainsi, si des études étaient demandées pour chaque nanomatériau, cela engendrerait des coûts pour les producteurs de ces agrégats de nano-objet. Finalement après un vote, les délégations opposées sont minoritaires d’une voix et les matériaux nanostructurés sont inclus dans la définition. Cette opposition montre certains des enjeux liés à la définition des nanomatériaux et montre aussi que les critères de la définition pourraient engendrer des règlementations pour les industriels, alors que la définition doit réduire au mieux son caractère politique.

Il faut donc des critères se reposant le plus possible sur la science et non sur la politique pour définir les nanomatériaux, même si cela reste très compliqué.

Un critère lié aux propriétés des substances a été proposé, mais n’a pas eu de suite. En premier lieu, car les propriétés sont très variables et dépendent de beaucoup de facteurs. De plus, les instruments de mesure suffisamment précis manquent et les méthodes présentent trop de variations. Il faudrait donc choisir un seul instrument pour empêcher ces variations dans les mesures, mais cela favoriserait les possesseurs de cet instrument. Et pour finir, accepter un critère basé sur les propriétés impliquerait de lier le WG1 et le WG2, et donc signifierait remettre en question la séparation des Working Groups et pourraient induire le fait que définition et risques sont liés, alors que c’est ce que l’ISO veut éviter.

Toutes ces raisons sont les causes du rejet du critère lié aux propriétés au profit du critère lié à la taille, car il est possible de définir précisément la taille d’un objet et évite de s’attarder sur chaque cas de matériaux.

C’est le fait que le critère de taille soit fondé le plus possible sur la science et le moins possible sur la politique, qui fixe la limite à environ 1-100 nm comme étant la définition des nanomatériaux selon l’ISO.

Législation et réglementation

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Depuis , fabricants, importateurs et distributeurs de nano-produits ont en France l'obligation de déclarer l'identité, les quantités et les usages des nanomatériaux[61]. Cette démarche implique notamment l'expertise de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses).

Au niveau européen, plusieurs réglementations encadrent les nanomatériaux, dans les cosmétiques[62], dans les produits biocides[63] ou dans l'alimentation[64]. Mais elles sont jugées globalement insuffisantes par les associations de protection des consommateurs, de la santé, de l’environnement et des travailleurs[65]. Appuyés par de puissants groupes d'influence, les géants de la chimie ou de l’agroalimentaire retardent l’application de contraintes réglementaires visant à une meilleure traçabilité, comme le catalogue des « nanos » utilisés dans les cosmétiques, attendu depuis longtemps. En 2016, la Commission européenne a renvoyé aux calendes grecques la création d'un registre européen qui aurait fait l’inventaire des produits à base de nanos commercialisés dans l’UE. Bruxelles a jugé plus utile son projet de « nano-observatoire », un site web de vulgarisation présenté le . La plateforme est basée sur les informations que les industriels fourniront volontairementà l'Agence européenne des produits chimiques (AEPC). La Commission a également repoussé à 2018 la modification de la réglementation d'enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques de l’Union européenne (« Reach ») pour l’adapter aux particularités des poudres nanométriques, très légères : en dessous d'une tonne importée ou fabriquée, elles échappent à la surveillance de l'AEPC et sont mises sur le marché sans information de toxicité. Une trentaine d'entreprises (quatre implantées en France) ont même entamé une procédure juridique, au motif du secret industriel, contre l'Agence européenne qui les questionne sur leur utilisation du dioxyde de titane et de la nanosilice[66],[67].

Le dioxyde de titane (additif E171), qui expose particulièrement les enfants au travers des sucreries, fait l'objet d'évaluations de toxicité[68], ainsi que la silice (E 551), déjà autorisée dans les aliments en poudre. Selon Mathilde Detcheverry, auteure de Nanomatériaux et risques pour la santé et l'environnement[69], « sans moyen de traçage des nanomatériaux, l'information se dilue dans la chaîne de fabrication », ce qui entrave le processus d'étiquetage et donc l'information au consommateur[66]. Bien qu'obligatoire, l'étiquetage est loin d'être généralisé sur les emballages des produits cosmétiques et antibactériens. Depuis , les entreprises de l'agroalimentaire rechignent à afficher la mention nano dans la liste des ingrédients ou même à répondre lorsqu’on leur demande si leurs produits contiennent, ou non, des nanoparticules, au motif que cela relèverait du secret industriel[70]. D'ailleurs, selon l'avocat du Ciel (Center for International Environmental Law), David Azoulay, « les détails de l'obligation d'étiquetage sont rédigés de manière suffisamment floue pour que dans les faits, son application soit très limitée et peu contraignante pour les industriels qui souhaitent éviter sa mise en œuvre. »[66]

En France, l'INRS a publié des éléments de définition ds nanomatériaux[71] et invite à la prudence[72] Il a publié en 2014 un guide pour faciliter le repérerage dans notre environnement des nanomatériaux et précise sous forme de fiches la nature de ces matérieux, leurs applications, propriétés ou fonctionnalités afin d'« aider les préventeurs de terrain qui sont amenés à identifier des opérations potentiellement exposantes aux nanomatériaux en entreprise »[73].

Notes et références

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  1. Recommandation de la Commission du 18 octobre 2011 relative à la définition des nanomatériaux, Journal officiel de l’Union européenne, 20 octobre 2011, p. 40
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  60. Charlotte Halpern, Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès, L'instrumentation de l'action publique : Controverses, résistances, effets (lire en ligne)
  61. La déclaration annuelle des « substances à l’état nanoparticulaire » en France, obligatoire depuis 2013, veillenanos.fr, 2012-2013
  62. Quelle réglementation des nanomatériaux dans les cosmétiques en Europe ?, sur veillenanos.fr, 2012
  63. Quelle réglementation des nanomatériaux dans les biocides en Europe ?, sur veillenanos.fr, 2012
  64. Quel encadrement des nanomatériaux dans l'alimentation en Europe ?, sur veillenanos.fr, 2013
  65. Lettre ouverte de la société civile à la Commission européenne : pas d'innovation nano sans protection de notre santé et de notre environnement !, sur veillenanos.fr, octobre 2012
  66. a b et c Lucile Morin, « Nanomatériaux : un non à particules », Libération, 20 mai 2016.
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  68. « Nanoparticules de dioxyde de titane dans l’alimentation (additif E 171) : des effets biologiques qui doivent être confirmés », Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), 12 avril 2017
  69. [vidéo] Le point avec Mathilde Detcheverry, auteure de Nanomatériaux et risques pour la santé et l'environnement, À Bon Entendeur, RTS, 3 mai 2016
  70. Jean-Marc Manach, « Nanotechnologies : le syndrome OGM », Le Monde, 10 avril 2009.
  71. INRS, « Les nanomatériaux. Définitions, risques toxicologiques, caractérisation de l'exposition professionnelle et mesures de prévention » [PDF], 2012, 48 p.
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Voir aussi

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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