Langdon Warner

explorateur américain

Langdon Warner, né le à Cambridge dans le Massachusetts et décédé le , dans sa ville natale, est un historien de l'art américain qui a été professeur à l'université Harvard et conservateur au Fogg Art Museum.

Langdon Warner
Description de cette image, également commentée ci-après
Détail de la stèle dédiée à Langdon Warner (gare de Kamakura)
Naissance
Drapeau des États-Unis Cambridge (Massachusetts)
Décès (à 73 ans)
Drapeau des États-Unis Cambridge (Massachusetts)
Nationalité Drapeau des États-Unis Américaine
Profession
Professeur d'université, historien de l'art, conseiller étranger au Japon
Formation
Distinctions
Conjoint
Lorraine Roosevelt

Les Japonais le considèrent comme un bienfaiteur : il aurait sauvé les villes japonaises historiques de Kyoto et Nara des bombardements américains lors de la Seconde Guerre mondiale. Durant toute sa carrière universitaire, il a contribué à éveiller la compréhension du public américain à l'art et la culture du Japon.

Biographie

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Jeunesse

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Descendant d'un passager du Mayflower, ce navire marchand d'où débarquèrent, en 1620, les premiers colons britanniques venus de la vielle Europe et à l'origine de ce qui deviendra les États-Unis d'Amérique, et d'un signataire de la Déclaration d'indépendance des États-Unis en 1776, Langdon Warner est né le à Cambridge dans l'État du Massachusetts, aux États-Unis. Son père, Joseph Bangs Warner (1848 – 1923), est un avocat diplômé de l'université Harvard[1]. Éduqué dans une famille de l'élite universitaire américaine, il étudie l'art bouddhique et l'archéologie au Harvard College, d'où il sort diplômé en 1903[2],[3]. La même année, renonçant à une formation doctorale[4], il quitte sa ville natale, et part réaliser son premier voyage d'exploration archéologique à travers l'Asie. Sur le continent asiatique, il visite les villes historiques de Samarcande, Boukhara et Khiva, en Ouzbékistan[5].

Un homme de musées

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En 1906, il entre comme stagiaire au département des arts asiatiques, dans le musée des beaux-arts de Boston ; il y travaille sous la direction d'un érudit japonais de vingt ans son aîné : Okakura Tenshin, l'un des fondateurs de l'École des beaux-arts de Tokyo en 1890[6]. Deux ans plus tard, il part au Pays du Soleil levant, suivre l'enseignement artistique de Niiro Chūnosuke, un restaurateur d'art des temples Tōdai de Nara et Hōryū d'Ikaruga[7],[8]. En 1909, il y retrouve Okakura, son mentor japonais, et l'aide à préparer un catalogue présentant les trésors nationaux du Japon et destiné à l'exposition anglo-japonaise de Londres, l'année suivante[1].

 
Intérieur de l'une des grottes de Mogao.

En 1913, avant de prendre la direction de l'école américaine d'archéologie de Pékin, une antenne de la Smithsonian Institution en Chine[7],[9], il effectue une tournée des plus grandes collections d'art asiatique, de Londres à Saint-Pétersbourg, en passant par Paris et Berlin[5]. En 1917, il accède au poste de directeur du Philadelphia Museum of Art puis, en 1922, il intègre le Fogg Art Museum pour conduire des expéditions scientifiques dans diverses régions d'Asie[3],[10]. L'année suivante, il prend la tête d'une expédition sur la Route de la soie, en route pour les grottes des mille Bouddhas, un site historique près de Dunhuang, dans la province de Gansu en Chine. Sur ce lieu sacré du bouddhisme, dont la construction remonte au IVe siècle, il vole des fresques murales, prétendant les emporter en Amérique pour les préserver du vandalisme. De retour sur le site, deux années plus tard, avec son équipe encadrée par des militaires chinois, il est refoulé par une foule en colère[11],[12],[5].

Selon l'historienne d'art américaine Patricia J. Graham, Warner avait très tôt assimilé la vision muséale de Denman Waldo Ross, l'un de ses proches, administrateur du musée des beaux-arts de Boston. Ce dernier se faisait le promoteur d'un courant d'idées né à la fin du XIXe siècle et qui considérait le musée d'art comme le lieu d'exposition d'œuvres d'art pouvant servir de source d'inspiration pour les artistes et stylistes du monde occidental[13].

Dans les années 1930, Warner effectue de nombreuses missions scientifiques en Asie, notamment en Chine et au Japon, pour le compte du musée d'art Nelson-Atkins de Kansas City (Missouri) dont il enrichit les collections d'œuvres d'art japonaises[2],[14]. Cette période d'intense activité d'exploration des arts asiatiques culmine en 1939, à San Francisco en Californie, avec sa participation à l'exposition internationale du Golden Gate au cours de laquelle il présente une exhibition publique d'œuvres des arts de plus de trente cultures différentes[15].

Les années de guerre

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Après l'engagement de son pays dans la Seconde Guerre mondiale fin 1941, Warner rejoint le service des affaires civiles de l'armée américaine en tant qu'instructeur en langue, culture et histoire du Japon[2]. En 1946, il s'installe à Tokyo et apporte son expertise en arts japonais au service des arts et des monuments[note 1], une branche de l'administration du Commandement suprême des forces alliées. Sa mission civile sur le sol nippon ne dure que quelques mois ; il retourne à Cambridge en [2].

Fin de carrière

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À près de 70 ans, en 1951, Warner prend sa retraite du Fogg Art Museum. Retiré de la vie académique, l'ancien professeur d'université publie en 1952 une introduction à l'art, la religion et la culture du Japon : The Enduring Art of Japan[16],[2].

Le , il décède à Cambridge, sa ville natale[2].

Vie familiale

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En 1910, Langdon Warner se marie avec Lorraine Roosevelt de la famille Roosevelt, qui compte parmi ses membres Théodore Roosevelt et Franklin D. Roosevelt, deux présidents des États-Unis[1].

Postérité

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Stèle dédiée à Langdon Warner devant la gare de Kamakura[17].

Des années 1920 jusqu'à l'après-guerre, Langdon Warner a contribué à éveiller la compréhension du public américain à l'art et à la culture du Japon, et, plus largement, de l'Asie de l'Est[6]. En poste au Fogg Art Museum, il a formé de nombreux experts en arts asiatiques et des conservateurs de musée[8].

Son vol de peintures murales bouddhiques des grottes de Dunhuang lui vaut, en Occident, une tenace réputation de pilleur de trésors historiques, bien qu'il ait toujours affirmé sa volonté de sauver de la négligence et de l'oubli ces reliques historiques[13]. Cependant, au Japon, il est révéré comme l'« érudit américain qui a sauvé Kyoto et Nara des bombardements aériens durant la Seconde Guerre mondiale »[7],[4]. Quatre stèles commémoratives lui rendent hommage : une au temple Hōryū de Nara[7],[18], depuis 1957, une autre à l'Abe Monju-in de Sakurai (préfecture de Nara), depuis 1959, une à l'institut Izura d'art et de culture de l'université d'Ibaraki (Kitaibaraki), depuis 1970, et une quatrième dans un square public, près de la gare de Kamakura (préfecture de Kanagawa), depuis 1987[4],[19].

« Légende Warner »

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En , dernière année de la Seconde Guerre mondiale, lors d'une réunion du « Comité des objectifs », à Los Alamos, une ville de l'État du Nouveau-Mexique, aux États-Unis, des responsables du Projet Manhattan établissent la liste des cibles d'un bombardement nucléaire sur le territoire japonais. Comme première ville à rayer de la carte, ils choisissent Kyoto. La ville portuaire de Hiroshima est retenue en deuxième choix. L'ancienne capitale impériale est, par la suite, retirée de la liste[20]. Lorsque, plus tard, les détails de l'affaire sont diffusés auprès du grand public, deux personnalités sont désignées comme les inspirateurs de cette dernière décision : l'historien Edwin O. Reischauer et Langdon Warner[21].

En particulier, dans un article de l'édition du du quotidien national Asahi Shinbun, l'historien de l'art Yukio Yashiro, un ami de Warner, manifeste sa reconnaissance à un « fin connaisseur des beaux-arts japonais, conseiller de l'ombre des forces armées américaines » pour être intervenu dans le choix des responsables militaires américains de ne pas bombarder les villes de Nara, Kyoto et Kamakura[22],[19]. Ainsi naît la « légende Warner », amplifiée à sa mort en 1955, après sa promotion au rang de 2e classe de l'ordre du Trésor sacré par le gouvernement japonais[22],[19].

Malgré ses fermes dénégations et le rétablissement de la vérité historique (l'intervention décisive a été le fait de Henry Lewis Stimson, le secrétaire à la Guerre), Warner reste au Japon le « sauveur de Nara et Kyoto »[23],[24],[21]. Ainsi, par exemple, chaque année, le jour anniversaire de son décès, une cérémonie se déroule en son honneur à l'Abe Monju-in de Sakurai[19].

Ouvrages

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Langdon Warner a signé de nombreuses publications de facture universitaire durant sa carrière d'historien de l'art, notamment les quatre ouvrages suivants :

  • Japanese sculpture of the Suiko period (1923) ;
  • The long old road in China (1927) ;
  • The Craft of the Japanese Sculptor (1936) ;
  • The Enduring Art of Japan (1952)[16].

Distinctions honorifiques

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En , le Premier ministre du Japon en place : Ichirō Hatoyama, promeut, à titre posthume, le citoyen américain Langdon Warner à la distinction de 2e classe de l'ordre du Trésor sacré[2],[22],[19].

Notes et références

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  1. The Arts and Monuments division.

Références

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  1. a b et c Graham 2015, p. 5.
  2. a b c d e f et g (en) Monuments Men Foundation for the Preservation of Art, « Warner, Langdon » [« Warner Langdon »], sur www.monumentsmenfoundation.org (consulté le ).
  3. a et b Rosenbaum 2015, p. 80.
  4. a b et c Graham 2015, p. 4.
  5. a b et c Svetlana Gorshenina, Explorateurs en Asie centrale : voyageurs et aventuriers de Marco Polo à Ella Maillart, Genève, Editions Olizane, , 533 p. (ISBN 978-2-88086-295-4 et 2880862957, OCLC 57307716, lire en ligne), p. 258.
  6. a et b (en) Musée des beaux-arts de Boston, « Langdon Warner, Impassioned Advocate of Japanese Art And Culture » [« Langfon Warner : l'avocat passionné de l'art et de la culture japonaises »], sur MFA.org, (consulté le ).
  7. a b c et d Wood 2004, p. 216.
  8. a et b Graham 2015, p. 6.
  9. Graham 2015, p. 7.
  10. Graham 2015, p. 8.
  11. Wood 2004, p. 219-221.
  12. Rosenbaum 2015, p. 83.
  13. a et b Graham 2015, p. 3.
  14. Graham 2015, p. 13.
  15. EFEO, « Chronique de l'année 1939 », dans George Cœdès, Nguyên Van Huyên et al., Bulletin de l'École française d'Extrême-Orient, vol. 39, t. 2 (revue), Paris, EFEO, (ISSN 0336-1519, DOI 10.3406/befeo.1939.3727, lire en ligne [PDF]), p. 336.
  16. a et b (en) Langdon Warner, The enduring art of Japan [« L'art permanent du Japon »], Cambridge, Harvard University Press, , 113 p. (OCLC 563157879).
  17. La stèle porte l'inscription la culture doit primer sur la guerre (文化は戦争に優先する, bunka wa sensō ni yūsen suru?), un message qu'aurait adressé Langdon Warner au président américain Franklin Delano Roosevelt.
  18. (en) John H. Martin et Phyllis G. Martin, Nara : A Cultural Guide to Japan's Ancient Capital [« Nara : un guide culturel sur l'ancienne capitale »], Rutland, Tuttle Publishing, , 184 p. (ISBN 978-0-8048-1914-5 et 0804819149, OCLC 30370751), p. 154-155.
  19. a b c d et e (en) Hiroshi Chida, « Scholar still honored for saving Japanese cultural treasures », sur www.stripes.com, Stars and Stripes, (consulté le ).
  20. introduction par Hans Blix et Venance Journé, Commission sur les armes de destruction massive (trad. de l'anglais), Armes de terreur : débarrasser le monde des armes nucléaires, biologiques et chimiques [« Weapons of terror: freeing the world of nuclear, biological and chemical arms »], Paris, Harmattan, , 247 p. (ISBN 978-2-296-11586-6 et 2-296-11586-1, OCLC 631653525, lire en ligne), p. 14.
  21. a et b (en) Hiroaki Satō, « Who saved Kyoto from the atomic hellfire? », sur www.japantimes.co.jp, The Japan Times LTD, (consulté le ).
  22. a b et c (ja) 戦争と平和の資料館ピースあいち, « 「文化は戦争に優先する」というウォーナー伝説の真偽 » [« « La culture doit prévaloir sur la guerre », la vérité sur la « légende Warner » »], extrait du volume no 50 du webzine de l'association Peace Aichi, sur www.peace-aichi.com,‎ (consulté le ).
  23. (en) Mariko Oi, « The man who saved Kyoto from the atomic bomb » [« L'homme qui sauva Kyoto de la bombe atomique »], BBC News, (consulté le ).
  24. (en) James Cahill, « An Alan Priest Story » [« Une anecdote d'Alan Priest »], sur jamescahill.info (consulté le ).

À voir aussi

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Articles connexes

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Bibliographie

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Liens externes

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