Règlement sur l’intelligence artificielle (Union européenne)
Le règlement sur l'intelligence artificielle est un règlement européen qui introduit un cadre réglementaire et juridique commun pour l'intelligence artificielle (IA) au sein de l'Union européenne. Il vise en particulier à gérer les risques associés à l'IA, qu'il classe en fonction du type d'application (risque minime, limité, élevé ou inacceptable)[1], avec une catégorie spéciale pour l'IA à usage général comme ChatGPT[2]. Il est entré en vigueur le 1er août 2024, ses dispositions entrant progressivement en application au cours des 6 à 36 mois suivants[3].
Titre | Règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles harmonisée concernant l'intelligence artificielle (législation sur l'intelligence artificielle) et modifiant certains actes législatifs de l'Union |
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Abréviation | Règlement sur l’IA |
Référence | COM/2021/206 final |
Organisation internationale | Commission européenne |
Type | Proposition de règlement de l'Union européenne |
Branche | Droit de l'Union européenne, droit de l'informatique |
Signature |
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Cette législation interdit les applications d'IA dans des domaines considérés comme représentant un risque « inacceptable » tels que la notation sociale, n'impose pas de restriction pour le niveau de risque « minimal », et impose des obligations notamment de transparence pour les niveaux intermédiaires[4]. Les systèmes d'IA à usage général pouvant poser un risque systémique sont soumis à des obligations particulières, et doivent notamment faire l'objet d'une évaluation de sécurité[2].
Elle s'étend à toute entité fournissant un produit ou un service à base d'IA (avec quelques exceptions dont le secteur militaire[5]). Comme pour le Règlement Général de Protection des données (RGPD), la législation sur l'intelligence artificielle est extraterritoriale, s'appliquant aux produits utilisés dans l'Union Européenne mais ayant un impact indirect sur les fournisseurs étrangers[1].
Niveaux de risque
modifierLa législation sur l'intelligence artificielle classe les systèmes d'intelligence artificielle en quatre catégories, selon leur niveau de risque pour les droits fondamentaux dans l'Union européenne et la sécurité des personnes, des groupes, des sociétés et de la civilisation[1]. Cette classification des risques de l'intelligence artificielle vise à assurer un équilibre entre la promotion de l'innovation et la protection des droits et des intérêts des citoyens européens face aux défis posés par l'intelligence artificielle[6]. Les cinq catégories de risque sont :
- Inacceptable : Ce sont en général ceux qui portent atteinte aux valeurs et aux droits fondamentaux de l'Union européenne, tels que la dignité humaine, la démocratie ou l'État de droit. Ces systèmes sont interdits par la législation sur l'intelligence artificielle. Il s'agit par exemple des systèmes d'intelligence artificielle qui manipulent le comportement humain, des systèmes de notation sociale. Cela inclut aussi les systèmes d'identification biométrique (reconnaissance faciale notamment) dans des zones accessibles au public, s'ils fonctionnent en temps réel et à distance[7].
- Élevé : Cela concerne notamment les systèmes d'intelligence artificielle utilisés dans les secteurs de la santé, de l'éducation, du recrutement, de la gestion d'infrastructures critiques, du maintien de l'ordre ou de la justice[2]. Ces systèmes sont soumis à des exigences strictes en matière de qualité, de transparence, de supervision humaine et de sécurité[8]. Ils doivent être évalués avant leur mise sur le marché, ainsi qu'au cours de leur cycle de vie[2].
- IA à usage général : Cette catégorie a été créée en 2023 à la suite de la rapide montée en popularité de systèmes d'IA polyvalents comme ChatGPT. Les systèmes d'IA à fort impact et pouvant poser des risques systémiques doivent suivre un processus approfondi d'évaluation et rapporter tout incident grave à la Commission européenne, là où les systèmes plus faibles n'ont que des obligations de transparence[2].
- Limité : Ces systèmes sont soumis à des obligations de transparence visant à informer les utilisateurs qu'ils interagissent avec un système d'intelligence artificielle et et à leur permettre d'exercer leurs choix. Les intelligences artificielles concernées sont par exemple celles qui permettent de générer ou manipuler des images, du son ou des vidéos (deepfakes notamment)[2].
- Minimal : Cela concerne par exemple les systèmes d'IA utilisés pour les jeux vidéo ou les filtres anti-spam. Ces systèmes d'IA ne seront pas soumis à des obligations, mais les fournisseurs sont incités à suivre un code de conduite pouvant notamment traiter de durabilité environnementale, d'accessibilité aux personnes handicapées[7].
Chronologie
modifierLa neuvième législature du Parlement européen commence en 2019 et se termine en 2024.
En février 2020, la Commission européenne publie le document « Livre blanc sur l'intelligence artificielle – Une approche européenne axée sur l’excellence et la confiance »[9]. En octobre 2020 a lieu une période de débats entre dirigeants de l'Union Européenne. Le 21 avril 2021, la législation sur l'intelligence artificielle est officiellement proposée. Le 6 décembre 2022 le Conseil européen adopte l'orientation générale, ce qui permet d'entamer les négociations avec le Parlement européen. Le 9 décembre 2023, après trois jours de « négociation-marathon », le Conseil et le Parlement ont conclu un accord[10]. Le 24 janvier 2024, la Commission européenne crée le Bureau européen de l’intelligence artificielle[11]. Le 13 mars 2024, le projet de règlement européen est adopté par la neuvième législature du Parlement européen, par 523 voix pour et 46 contre[12]. Le 21 mai 2024, les 27 ministres de l'Union européenne réunis en Conseil de l'Union européenne ont adopté le texte, ce qui permettra sa publication au Journal Officiel de l'Union Européenne[13]. L'entrée en vigueur est survenue le 1er août 2024[3]. La mise en application se fait ensuite progressivement :
- En février 2025, le chapitre I correspondant aux dispositions générales et le chapitre II correspondant à la pratique interdite en matière d'IA c'est-à-dire les applications d'IA à risque « inacceptable » s'appliqueront.
- En août 2025, le chapitre III section 4 (Autorités notifiantes et organismes notifié), le chapitre V (modèles d'IA à usage général), le chapitre VII (gouvernance), le chapitre XII (sanctions) contenant l'article 78 (confidentialité) s'appliqueront, à l'exception de l'article 101 (Amendes applicables aux fournisseurs).
- En août 2026 : l'ensemble du règlement s'applique, à l'exception de l'article 6, paragraphe 1 du chapitre III et des obligations correspondant aux catégories de systèmes d'IA à risque « élevé ») ;
- En août 2027, tout le règlement s'applique[14],[15].
Références
modifier- Julien Lausson, « Minime à inacceptable : l'Europe définit quatre niveaux de risques pour l'IA », sur Numerama, (consulté le )
- (en) « EU AI Act: first regulation on artificial intelligence », sur www.europarl.europa.eu, (consulté le )
- Stéphanie Bascou, « L'AI Act, le règlement européen sur l'IA, entre en vigueur ce jeudi 1er août : qu'est ce que ça change ? », sur 01net.com, (consulté le )
- Lucie Lequier, « Tout comprendre à l’IA Act, le texte européen de réglementation de l’intelligence artificielle », sur Numerama, (consulté le )
- Léna Corot, « L’Europe prend les devants en régulant l'intelligence artificielle », L'Usine Nouvelle, (lire en ligne, consulté le )
- Alex McFarland, « Disséquer la loi sur l'intelligence artificielle de l'UE : implications et réaction de l'industrie », sur Unite.ai, (consulté le )
- Guillaume Renouard, « Intelligence artificielle : l’UE prévoit des garde-fous pour les applications les plus dangereuses », sur La Tribune, (consulté le )
- « Proposition de cadre réglementaire sur l’intelligence artificielle », sur digital-strategy.ec.europa.eu (consulté le )
- « Livre blanc sur l’intelligence artificielle - Une approche européenne axée sur l’excellence et la confiance », Commission européenne, (lire en ligne [PDF])
- « Chronologie - Intelligence artificielle », sur www.consilium.europa.eu
- « Décision de la commission du 24 janvier 2024 créant le Bureau européen de l’intelligence artificielle », sur eur-lex.europa.eu,
- « Les eurodéputés adoptent une loi encadrant l'intelligence artificielle, une législation unique au monde », sur Le Figaro, (consulté le )
- Célia Séramour, « Le Conseil de l'UE donne le feu vert final à l'AI Act », L'Usine Digitale, (lire en ligne, consulté le )
- (en) « Artificial Intelligence Act: MEPs adopt landmark law », sur Parlement Européen, (consulté le )
- (en) Emilia David, « The EU AI Act passed — now comes the waiting », sur The Verge, (consulté le )
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifier- Réglementation de l'intelligence artificielle
- Législation sur les services numériques
- Législation sur les marchés numériques
- Modèle de fondation
- Intelligence artificielle
- Impact environnemental du numérique
- Éthique de l'intelligence artificielle
- Révolution numérique
- Biais algorithmique
- Institut du numérique responsable
- VIGINUM
- Gestion des droits numériques
- Humanités numériques
- Informatique durable
- Sobriété numérique