Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité

dirigeant de la diplomatie de l'Union européenne

Le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (HRAEPS) est une fonction de l'Union européenne (UE) instituée par le traité de Lisbonne (2007). Elle reprend les fonctions diplomatiques autrefois exercées par le secrétaire général du Conseil, le haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune et le commissaire européen aux Relations extérieures.

Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Image illustrative de l’article Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Emblème du SEAE.

Image illustrative de l’article Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
Titulaire actuelle
Kaja Kallas
depuis le
(17 jours)

Création
Mandant Conseil européen avec l'accord du président de la Commission européenne
Durée du mandat 5 ans
Premier titulaire Catherine Ashton
Rémunération 23 006,98 €/mois
Site internet eeas.europa.eu

Le haut représentant est nommé par le Conseil européen avec l'accord du président de la Commission européenne pour un mandat de cinq ans, la durée d'une législature du Parlement européen. Il est ex officio l'un des vice-présidents de la Commission. Il dirige le Service européen pour l'action extérieure (SEAE). La Britannique Catherine Ashton occupe le poste de 2009 à 2014, suivie de l'Italienne Federica Mogherini de 2014 à 2019, puis de l'espagnol Josep Borrell de 2019 à 2024[1]. Kaja Kallas en est la titulaire depuis le au sein de la commission 2024-2029 présidée par Ursula von der Leyen[2].

Contexte

modifier
 
La fonction de commissaire européen aux Relations extérieures (Benita Ferrero-Waldner, à gauche, avec la présidente argentine Cristina Kirchner en 2006) est fusionnée à celle de haut représentant par le traité de Lisbonne.

La Constitution européenne proposait de fusionner le poste de commissaire européen aux Relations extérieures à celui de haut représentant pour créer un ministre des Affaires étrangères de l'Union. Bien que la Constitution n'ait pas été ratifiée, le traité de Lisbonne qui la remplaça, retint ce changement sous un nom différent. Le nouveau haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité est le résultat de la fusion entre commissaire chargé des Relations extérieures et le haut représentant et, comme la Constitution le prévoyait, il est assisté par le Service européen pour l'action extérieure[3],[4]. La nouvelle fonction a aussi repris d'autres attributions liées aux affaires étrangères tel que le fait de siéger au conseil des affaires étrangères ou de représenter l'UE lors des forums internationaux. Ces rôles étaient auparavant exercés par le ministre des Affaires étrangères du pays exerçant la présidence tournante de l'Union européenne (conjointement avec son prédécesseur et son successeur dans la présidence tournante).

En dépit du changement de nom, beaucoup de médias font encore référence au ministre des Affaires étrangères. Lors des négociations il a été décidé que le haut représentant ne serait plus le secrétaire général du Conseil de l'Union européenne mais le vice-président de la Commission européenne[4]. La fusion des deux postes a été perçue comme la réponse à la question posée par Henry Kissinger : « Who do I call if I want to call Europe ? »

« La création d’un haut représentant en matière de politique étrangère ou, mieux encore, d’un ministre des Affaires étrangères serait un grand changement par rapport à la situation existante. Il mettrait fin au double emploi qui existe entre la fonction actuelle de M. Javier Solana, et celle assurée au sein de la Commission par Mme Benita Ferrero-Waldner, responsable de l’aide extérieure de l’Union européenne. Une seule et même personne traiterait ainsi les problèmes et répondrait aux fameux appels téléphoniques de Henry Kissinger : « je voudrais parler à l’Europe. »

— Valéry Giscard d'Estaing sur son blog, 5 juillet 2007[5]

Dans les domaines des affaires étrangères qui sont convenus entre les États membres de l'Union européenne, le haut représentant peut intervenir pour l'Union et ainsi il peut négocier au nom des États membres (forums internationaux, etc.). Le haut représentant est responsable des représentants spéciaux et des ambassadeurs de l'Union qui sont à la tête des délégations, et effectue certaines nominations telles que celles des coordinateurs anti-terroristes. Il coordonne la politique européenne de sécurité et de défense.

Il s'agissait en fait de fusionner les fonctions de diplomatie tenues par :

Dans ses fonctions, le haut représentant s'appuie sur une nouvelle structure administrative, le Service européen pour l'action extérieure (SEAE), dont il désigne les membres et contrôle le budget. Néanmoins, bien que le haut représentant puisse préparer des initiatives, les décisions doivent être adoptées par les États membres en Conseil.

Avec l'importance croissante du rôle du haut représentant, et de par leur exclusion du Conseil européen, les ministres des Affaires étrangères européens sont maintenant incertains de leur rôle face au haut représentant. Lors d'une rencontre en Finlande, il a été proposé qu'ils soient des envoyés spéciaux du haut représentant. Cela a été soutenu par Ashton qui a dit que, tant que l'UE parle d'une seule voix, peu importe qui parlait[7].

Désignation

modifier

Le haut représentant est élu par le Conseil européen à la majorité qualifiée. Toutefois, afin de tenir son rôle au sein de la Commission, en particulier en tant que vice-président, le haut représentant est auditionné par le Parlement européen avant d'être soumis à un vote d'approbation par les députés. La première titulaire de ce poste, Catherine Ashton, a été choisi le lors du sommet extraordinaire organisé à Bruxelles par la présidence suédoise avant l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne le suivant.

Titulaires

modifier

Le poste est créé avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne ; avant le , la fonction était occupée par le haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune.

Titulaire Pays d'origine Poste précédent Parti Début du mandat Fin du mandat Durée
  Catherine Ashton   Royaume-Uni Commissaire européen au commerce Européen : PSE
National : Labour
4 ans et 11 mois
  Federica Mogherini   Italie Ministre italienne des Affaires étrangères Européen : PSE
National : PD
5 ans et 29 jours
  Josep Borrell   Espagne Ministre espagnol des Affaires étrangères, de l'Union européenne et de la Coopération Européen : PSE
National : PSOE
5 ans
  Kaja Kallas   Estonie Première ministre d'Estonie Européen : ALDE
National : ERE
En fonction 17 jours

Catherine Ashton

modifier
 
Catherine Ashton avec la secrétaire d'État des États-Unis, Hillary Clinton en 2009.

Bien que Javier Solana ait au départ été choisi pour être le premier ministre des Affaires étrangères, les délais d'introduction du poste signifiait qu'après dix ans de service il allait être confronté à de nouveaux candidats. Après que de nombreux candidats ont été avancés, les dirigeants de l'Union se sont mis d'accord et ont désigné Catherine Ashton, originaire du Royaume-Uni, en tant que première titulaire des nouvelles fonction de haut représentant. Auparavant, elle était commissaire européen au commerce et n'avait, par conséquent, pas d'expérience dans les affaires étrangères. Ashton est arrivée au sommet de la liste des candidats sélectionnés quand elle a été nommée de manière unanime par les représentants de centre-gauche qui revendiquait ce poste[8],[9]. Après cette nomination, le Parlement européen dut confirmer le choix de Catherine Ashton avant que celle-ci ne put prendre ses fonctions. De même, lors du Conseil européen qui choisit Ashton, Pierre de Boissieu fut nommé secrétaire général du Conseil de l'Union européenne, distinguant définitivement les deux postes[10].

Lors du tremblement de terre en Haïti de 2010, Ashton présida une rencontre des experts en relations étrangères, en développement et en environnement du Conseil et du Centre de situation (SitCen). Ils s'accordèrent sur une aide de 3 millions d'euros, et s'engagèrent à chercher d'autres aides financières ainsi qu'à envoyer du personnel pour évaluer la situation et coordonner les actions des États membres. Elle présida ensuite une rencontre des ambassadeurs des États membres et joua le rôle de coordinateur, ainsi les contacts de l'ONU passaient par Ashton. Bien qu'elle se refuse à considérer ceci comme la première intervention extérieure, Ashton reconnait que c'est la première fois qu'il y a une telle coordination entre les nombreux acteurs des Affaires étrangères au sein de l'Union. Cependant, la majeure partie de l'aide était issue d'accord bilatéraux entre Haïti et les États membres[11]. Par ailleurs Ashton fut critiquée car elle est l'une des seules représentantes étrangères à ne pas s'être personnellement rendue en Haïti[12]. Malgré l'accord des ministres de l'Union pour le déploiement des gendarmes européens, Ashton fit de nouveau l'objet de critiques due au fait qu'elle n'aurait pas réussi à améliorer le profil international de l'Union lors des crises. Ashton répondit en disant que « There's been a recognition from the people of Haiti, the US, the UN and others of the extremely important role the EU has played. On the main issue, we should ask, have we tried to save lives, to support the people of Haiti? Yes we have[a],[13]. »

Parmi les autres critiques faites à Ashton se trouvent notamment : le fait qu'elle ne s'est pas rendue à une réunion sur la défense afin d'assister à l'investiture du Premier ministre ukrainien[14] parmi les officiels britanniques, son manque de compétence linguistique, et le risque de création qu'une querelle entre le Royaume-Uni et la France sur la création d'un siège pour la planification militaire de l'Union européenne[15].

Federica Mogherini

modifier
 
Federica Mogherini avec le secrétaire d'État des États-Unis, John Kerry en 2014.

Le , le président du Conseil italien, Matteo Renzi adresse une lettre au président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, formalisant la candidature de Federica Mogherini pour la charge de haut représentant[16]. Le , le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, annonce que le Conseil a décidé de la nommer[17]. Son mandat débute le malgré les critiques qui pèsent sur la position de son pays vis-à-vis de la Russie dans la crise russo-ukrainienne de 2013-2015, alors qu'elle était ministre des Affaires étrangères[18]. En contrepartie, c'est le Polonais Donald Tusk qui devient le nouveau président du Conseil européen, incarnant l'opposition et la fermeté vis-à-vis de la politique étrangère de Moscou en Europe de l'Est, au côté des pays baltes[18].

Josep Borrell

modifier

Le , à la suite des élections européennes, le Conseil européen propose l'Espagnol Josep Borrell comme prochain haut représentant[19]. Cette nomination doit être approuvée par le Parlement européen lorsque celui-ci approuvera le collège des commissaires (incluant le président de la Commission, les commissaires et le haut représentant)[20].

Kaja Kallas

modifier

Texte du traité

modifier

Le traité sur l'Union européenne, modifié par le traité de Lisbonne énonce à l'article 15-2 :

« Le Conseil européen est composé des chefs d'État ou de gouvernement des États membres, ainsi que de son président et du président de la Commission. Le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité participe à ses travaux. »

L'article 18 ajoute :

« Article 18

  1. Le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, avec l'accord du président de la Commission, nomme le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Le Conseil européen peut mettre fin à son mandat selon la même procédure.
  2. Le haut représentant conduit la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union. Il contribue par ses propositions à l'élaboration de cette politique et l'exécute en tant que mandataire du Conseil. Il agit de même pour la politique de sécurité et de défense commune.
  3. Le haut représentant préside le Conseil des affaires étrangères.
  4. Le haut représentant est l'un des vice-présidents de la Commission. Il veille à la cohérence de l'action extérieure de l'Union. Il est chargé, au sein de la Commission, des responsabilités qui incombent à cette dernière dans le domaine des relations extérieures et de la coordination des autres aspects de l'action extérieure de l'Union. Dans l'exercice de ces responsabilités au sein de la Commission, et pour ces seules responsabilités, le haut représentant est soumis aux procédures qui régissent le fonctionnement de la Commission, dans la mesure où cela est compatible avec les paragraphes 2 et 3. »

Éléments liés à la fonction

modifier

Le salaire mensuel de base du haut représentant est fixé à 130 %[21] (supérieur à un vice-président mais moins que le président de la Commission) du plus haut grade de la fonction publique de l'UE (grade 16, échelon 3)[b],[22] qui s'établit à 23 006,98 . Il existe d'autres allocations en plus de cela, du fait que toutes les autres conditions d'emploi pour le haut représentant sont alignés sur celles de la Commission[22].

  1. Traduction libre : « Le peuple haïtien, les États-Unis, l'ONU et d'autres ont reconnu le rôle extrêmement important que l'UE a joué. La principale question que nous devrions nous poser est si nous avons essayé de sauver des vies, de soutenir les gens de Haïti ? Oui. »
  2. Le salaire de base au grade 16, échelon 3 est de 17 697,68 euros (Commission européenne 2009).

Sources

modifier

Références

modifier
  1. Commission européenne, « Josep Borrell Fontelles », sur ec.europa.eu, (consulté le ).
  2. (en-GB) Jennifer Rankin, « ‘The EU wants Ukraine to win this war’: who is its new chief diplomat Kaja Kallas? », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  3. The Minister for Foreign Affairs
  4. a et b Mahony 2007
  5. « Quelques réponses (4) » (consulté le ).
  6. Gros-Verheyde 2009.
  7. Mahony 2010.
  8. Rettman 2009
  9. Mahony 2009
  10. Press release, European Council 2009-11-19
  11. Rettman 2009
  12. Mahony 2010
  13. Rettman 2010
  14. Banks 2010
  15. Traynor 2010
  16. (it) « Renzi candida ufficialmente Federica Mogherini quale Alto rappresentante PESC », sur Il Foglio.it
  17. (en) Communication du Secrétariat général du Conseil européen, Bruxelles, 30 août 2014.
  18. a et b Alain Salles, « Europe : les cinq raisons à la nomination de Federica Mogherini », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  19. Leblanc 2019
  20. Article 17(7) paragraphe 3 du TUE
  21. Décision no 2009/910/UE
  22. a et b Règlement no 422/67/CEE

Bibliographie

modifier
  • (en) David Spence et Jozef Bátora, The European External Action Service : European Diplomacy Post-Westphalia, Palgrave Macmillan, , 456 p. (ISBN 978-1-137-38304-4)
  • (en) Michael Smith, Stephan Keukeleire et Sophie Vanhoonacker, The Diplomatic System of the European Union : Evolution, Change and Challenges, vol. 116, Routledge, coll. « Routledge Advances in European Politics », , 310 p. (ISBN 978-1-317-53664-2, lire en ligne)
  • (de) Gisela Müller-Brandeck-Bocquet et Carolin Rüger, Die Außenpolitik der EU, De Gruyter, coll. « De Gruyter Studium », , 366 p. (ISBN 978-3-486-85706-1, lire en ligne)
  • (en) Commission européenne, « European Commission: Officials' salaries », (consulté le )
  • (en) Martin Banks, « Criticism of Ashton is 'unfair' », theParliament.com,‎ (lire en ligne)
  • (en) Honor Mahony, « EU leaders scrape treaty deal at 11th hour », EUobserver,‎ (lire en ligne)
  • (en) Honor Mahony, « EU chooses unknowns for new top jobs », EU Observer,‎ (lire en ligne)
  • (en) Honor Mahony, « Ashton under fire for not going to Haiti », EU Observer,‎ (lire en ligne)
  • (en) Honor Mahony, « EU foreign ministers ponder their post-Lisbon role », EU Observer,‎ (lire en ligne)
  • (en) Andrew Rettman, « EU foreign relations chief tests new powers in earthquake response », EU Observer,‎ (lire en ligne)
  • (en) Andrew Rettman, « Little-known British peer emerges as top candidate for EU foreign minister », EU Observer,‎ (lire en ligne)
  • (en) Andrew Rettman, « EU gendarmes to help build law and order in Haiti », EU Observer,‎ (lire en ligne)
  • (en) Ian Traynor, « Ashton defends start in EU foreign policy role », The Guardian,‎ (lire en ligne)
  • (en) « Table: officials, Article 66 » [PDF], Commission européenne, (consulté le ) « Le salaire de base du grade 16, au step 3 18 025,09 . 138% de 18 025,09  donne 24 874,62 . »
  • Nicolas Gros-Verheyde, « Les fonctions et pouvoirs du haut représentant, d’après le traité de Lisbonne », Bruxelles2,‎ (lire en ligne)
  • Décision  2009/910/UE du Conseil portant fixation des conditions d’emploi du haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, 32009D0910, adoptée le 1er décembre 2009, JO du 9 décembre 2009, p. 36, entrée en vigueur le 1er décembre 2009 [consulter en ligne, notice bibliographique]
  • Règlement  422/67/CEE du Conseil portant fixation du régime pécuniaire du président et des membres de la Commission, du président, des juges, des avocats généraux et du greffier de la Cour de justice, 31967R0422, adopté le 25 juillet 1967, JO du 8 août 1967, p. 1-5, entré en vigueur le 6 juillet 1967 [consulter en ligne, notice bibliographique]
  • Véronique Leblanc, « Josep Borrell fait son retour sur la scène européenne », La Libre,‎ (lire en ligne)

Compléments

modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes

modifier
Politiques
Relations
Commission
Conseil
Représentants
Défense et armée
Divers

Liens externes

modifier