Glacier du Giétro
Le glacier du Giétro (aussi orthographié Giétroz) se trouve en Suisse au sud-ouest des Alpes valaisannes à la hauteur du barrage de Mauvoisin. Il s'étend sur 4,5 kilomètres dans une vallée d'environ 1 500 mètres de large et couvre une surface de 5,3 km2[1].
Glacier du Giétro | |||
Vue du glacier du Giétro et du mont Blanc de Cheilon depuis la montée vers le col des Otanes. | |||
Pays | Suisse | ||
---|---|---|---|
Canton | Valais | ||
District | Entremont | ||
Massif | Alpes pennines (Alpes) | ||
Vallée | Val de Bagnes | ||
Cours d'eau | Dranse de Bagnes | ||
Type | Glacier de vallée | ||
Longueur maximale | 4,5 km | ||
Superficie | 5,3 km2 (2017) | ||
Altitude du front glaciaire | 2 750 m (2017) | ||
Coordonnées | 45° 59′ 25″ nord, 7° 23′ 28″ est | ||
Géolocalisation sur la carte : Suisse
Géolocalisation sur la carte : canton du Valais
| |||
modifier |
Toponymie
modifierLe mot giétro (ou giétroz, prononcé dzyètre) est en valaisan un nom commun signifiant « chalet » ou « abri », du latin jacitum, « gîte » ayant également donné dans le même dialecte les mots jetty, giète et zite[2].
Géographie
modifierIl est issu des névés accrochés à la Ruinette (3 875 mètres) et au mont Blanc de Cheilon (3 870 mètres). Dans sa partie supérieure, le glacier est relativement plat. Il s'écoule ensuite vers le nord le long du mont Rouge du Giétro puis bifurque vers l'ouest entre le Pleureur (3 704 mètres) et l'extrémité nord de la crête du mont Rouge du Giétro. Sur le dernier kilomètre, le glacier emprunte une pente de 40 % et un grand nombre de crevasses se forment. La langue glaciaire aboutit à une altitude d'environ 2 750 mètres. Une partie du glacier communique avec le glacier de Cheilon via le col de Cheilon à 3 243 mètres. L'eau du glacier s'écoule dans le lac de Mauvoisin et rejoint la Dranse de Bagnes, un affluent du Rhône.
Catastrophes
modifierLors du petit âge glaciaire, le glacier du Giétro était beaucoup plus étendu et volumineux. Entre le XVIe siècle et le XIXe siècle, le glacier a été à l'origine de plusieurs inondations surnommées les canonnades du Giétroz. Le glacier descendait en ce temps jusque dans la vallée, à l'emplacement actuel du barrage du Mauvoisin et bloquait les eaux de la Dranse. Ce barrage naturel engendrait un lac pouvant atteindre des dimensions critiques, et brisant à son tour de manière brutale la digue de glace. Ces débâcles glaciaires furent à l'origine de plusieurs catastrophes notoires.
En 1549, le glacier provoqua une inondation qui détruisit plusieurs ponts dans la vallée. Le , 140 personnes furent tuées par la crue brutale. Environ 500 maisons furent détruites[3],[4]. Selon les archives, une autre inondation moins importante aurait eu lieu en 1640. Entre 1805 et 1817, le glacier avança significativement et provoqua l'apparition d'un lac. En mai 1817, une brèche se forma mais l'écoulement des eaux n'eut pas de conséquences sérieuses.
Inondation de 1818
modifierEn 1818, le lac se reforma sur environ 3,5 kilomètres de long et une profondeur de 60 mètres[5],[6],[7]. L'ingénieur cantonal, Ignace Venetz, ordonna dès le mois de mai que l'on creuse une tranchée pour évacuer les eaux qui montaient dangereusement. Venetz avait estimé que le volume du lac était de l'ordre de 30 millions de m3 et que la digue de glace faisait quant à elle 10 millions de m3. L'opération fut en partie réussie puisque le lac atteint les deux tiers de son niveau mais la digue, affaiblie par l'érosion engendrée par l'écoulement, céda soudainement. Le , à 16 h 30, 20 millions de m3 d'eau se déversèrent ainsi brutalement dans la vallée[8]. La crue provoqua la mort de 34 à 44 personnes et de nombreux dégâts dans la région du val de Bagnes jusqu'à Martigny[9],[3].
Pour de nombreux géologues du XIXe siècle, cet incident et les analyses qui en découlèrent constituent une des bases fondatrices de la glaciologie[6]. L'incident fut qualifié d'« avallo » par les locaux parlant le patois[10].
Évolution
modifierDepuis le début des années 1960, le glacier a perdu 20 mètres d'épaisseur. Entre 1985 et 2015, le glacier s'est retiré de 535 mètres[6].
Le recul du glacier durant le siècle suivant a fait quasiment disparaître les risques de voir un nouveau barrage se former. Depuis la construction du barrage-voûte, les chutes de glace terminent leur course dans le lac artificiel. Le glacier reste toutefois sous étroite surveillance afin d'éviter qu'un bloc massif ne tombe dans le lac et ne fasse déborder ses eaux par-dessus le barrage. Le glacier du Giétro est sur ce point similaire à celui de l'Allalin qui avait provoqué une catastrophe au Mattmark en août 1965[11].
Références
modifier- (en) World Glacier Monitoring Service, « Glacier du Giétro, Alps », sur wgms.ch (consulté le )
- Jules Guex, « Noms de lieux alpins. II. Esquisse toponymique du Val de Bagnes », sur sac-cas.ch, Club alpin suisse, (consulté le )
- (en) Université d'Oslo - Département de Géosciences, « Giétro 1595 », sur mn.uio.no (consulté le )
- Florence Naaim-Bouvet et Didier Richard, Les risques naturels en montagne, Versailles, Éditions Quae, , 392 p. (ISBN 978-2-7592-2386-2, lire en ligne), p. 220-221
- Vincent Gillioz, « Victimes de l’avancée des glaciers - Giétro, mémoire d’une débâcle », Les Alpes, (lire en ligne)
- Xavier Lambiel, « Le glacier qui terrorisait le Valais est à l’agonie », Le Temps, (lire en ligne)
- Bernard Weissbrodt, Emmanuel Reynard, Jean-Henry Papilloud, Bertrand Deslarzes et Mélanie Hugon-Duc, « La débâcle du Giétro 1818 - 2018 », Aqueduc.info, (lire en ligne)
- (en) Wilfried Haeberli, « Frequency and characteristics of glacier floods in the Swiss alps », sur cambridge.org (consulté le )
- (de) Inventar gefährlicher Gletscher der Schweiz, « Glacier du Giétro », sur glaciology.ethz.ch (consulté le )
- Christian Moser, « La débâcle du Giétro (1818) et les origines de la théorie glaciaire », sur Sgeo-ge.ch, (consulté le )
- Antoine Lugon, « Effroyable catastrophe à Mattmark (30 aout 1965) », sur mediatheque.ch (consulté le )
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierFilmographie
modifier- 1818 - La débâcle du Giétro, documentaire sorti en 2018 et réalisé par Christian Berrut [voir en ligne].
Liens externes
modifier