Assassinat ciblé
Un assassinat ciblé (anglais : targeted killing) est une exécution extra-judiciaire, perpétré par un état et réalisé le plus souvent soit par l'armée, soit par les services secrets, en dehors d'une zone de front ou d'un champ de bataille. La personne ciblée est considérée par l'état qui commet l'assassinat comme un combattant ou comme une menace générale pour la sécurité.
Description
modifierLa tactique est souvent associée à la guerre asymétrique et est utilisée dans de nombreux cas contre des personnes qui se trouvent dans des pays où le déploiement de forces armées conventionnelles n'est pas possible et où les autorités locales sont insuffisamment structurées pour imposer de poursuites pénales ou de droit international à l'encontre de la personne concernée. Depuis la fin des années 2000, les États-Unis ont de plus en plus utilisé des véhicules aériens sans pilote (drones) pour tuer des personnes dans d'autres pays avec des missiles air-sol, tuant également des personnes non visées (cf. dommages collatéraux). Le nombre de personnes tuées par les états-unis seuls se compte en milliers.
Dans le monde
modifierEtats-Unis
modifierCette pratique fait l'objet d'un débat public à bas bruit aux États-Unis[1]qui ont généralisé la pratique notamment au Yémen, contre des cibles accusées d'appartenir à Al-Qaïda à la suite des attentats du 11 septembre 2001[2], et au Pakistan dans le cadre du conflit armé du Nord-Ouest.
France
modifierSous le mandat de François Hollande, au moins une quarantaine de High Value Targets ont été exécutées à l’étranger entre 2013 et 2016[3],[4].
Iran
modifierUne enquête du réseau de médias European Investigative Collaborations révèle que l'Iran a eu recours aux assassinats ciblés de personnes de la population civile ou religieuse en Europe et aux États-Unis, en recrutant des tueurs à gages au sein des réseaux de narcotrafiquants ; l'Iran dément[5],[6].
Israel
modifierCette pratique fait l'objet d'un débat public à bas bruit en Israël où la pratique est courante[1]
Analyse
modifierMalgré ces controverses, la procédure semble généralement tolérée par les États occidentaux et leurs alliés. Des critiques tels que Thomas Fischer décrivent souvent la procédure comme fondamentalement illégale et comme un meurtre sanctionné par l'État , et le terme « meurtre ciblé » en conséquence comme un euphémisme. Dans un passé récent, cette pratique a conduit à des tensions politiques parfois considérables, par exemple entre les États-Unis et le Pakistan mais aussi plus récemment la Chine[7], principalement pour avoir intensifié les frappes de drones au Pakistan, ce qui a eu pour effet que la population générale des zones concernées à développé une haine des américains[8],[9]. Selon des études indépendantes, plusieurs centaines de civils innocents sont morts rien qu'au Pakistan et l'usage extensif des drones par l'administration Obama (plus de 25 000 attaques orchestrées pendant sa présidence) a eu pour effet d'accélérer le recrutement de terroristes, et a rendu les terroristes plus sympathiques aux yeux de la population générale [10].
Bibliographie
modifier- Amelie Ferey, Assassinats ciblés. Critique du libéralisme armé, CNRS, (ISBN 978-2-271-13321-2, lire en ligne)
- Anna Goppel (2013): Killing Terrorists. A Moral and Legal Analysis. De Gruyter, Berlin.
- Jordan, Jenna. 2019. Leadership Decapitation: Strategic Targeting of Terrorist Organizations. Stanford University Press.
- Thomas, Ward J. 2001. The Ethics of Destruction: Norms and Force in International Relations. Cornell University Press.
- Jeremy Scahill and The Staff of The Intercept (2016). The Assassination Complex: Inside the Government’s Secret Drone Warfare Program. Simon & Schuster. (ISBN 9781501144134)
- Jean-Paul Chagnollaud, « Les assassinats ciblés ou comment détruire un processus politique », Confluences Méditerranée, 2013/3 (N° 86), p. 89-102. DOI : 10.3917/come.086.0089. URL : lire en ligne
- Alexandre Vaillant, « Eye in the sky : les drones armés dans la politique d’assassinats ciblés des États-Unis », Revue Défense Nationale, 2018/9 (N° 814), p. 126-132. DOI : 10.3917/rdna.814.0126. lire en ligne
- JEANGèNE VILMER Jean-Baptiste, « Légalité et légitimité des drones armés », Politique étrangère, 2013/3 (Automne), p. 119-132. DOI : 10.3917/pe.133.0119. URL : https://www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2013-3-page-119.htm
- C. Martin, « Going medieval: targeted killing, self-defense and the jus ad bellum regime », in Targeted killings: Law and Morality in an Asymmetrical World, sous la direction de C. Finkelstein, J.D. Ohlin, A. Altman, Oxford, Oxford University Press, 2012, pp. 223 et
Références
modifier- « Le feu vert de Barack Obama aux assassinats ciblés fait polémique aux Etats-Unis », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Yemen Deaths Test Claims of New Drone Policy », New York Times,
- Vincent Nouzille, Erreurs fatales: comment nos présidents ont failli face au terrorisme, J'ai lu, coll. « J'ai lu », (ISBN 978-2-290-15362-8)
- « François Hollande et « le permis de tuer » », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- Matthieu Suc, « Comment l’Europe est redevenue le terrain de jeu des tueurs à la solde de l’Iran », sur Mediapart, (consulté le )
- Matthieu Suc, « Affaire « Marco Polo » : l’Iran projetait des assassinats dans la communauté juive française », sur Mediapart, (consulté le )
- « La Chine publie deux documents qui détaillent sa stratégie antiaméricaine », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Jouer à Dieu avec des drones », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- (en-US) Audrey Kurth Cronin, « Why Drones Fail », Foreign Affairs, (ISSN 0015-7120, lire en ligne, consulté le )
- (en) Christine Sixta Rinehart, Drones and Targeted Killing in the Middle East and Africa: An Appraisal of American Counterterrorism Policies, Lexington Books, (ISBN 978-1-4985-2648-7, lire en ligne)