Affaire Dauphiné News
L'affaire Dauphiné News est une affaire politico-financière française ayant impliqué l'élu Alain Carignon, alors qu'il était maire de Grenoble.
Description
modifierLe , le juge Philippe Courroye ouvre une information contre X pour abus de biens sociaux et recel[1],[2].
L'affaire en question concerne les journaux News et Dauphiné News de Grenoble, journaux de facture luxueuse lancés quelques semaines avant les élections municipales de 1989 et qui font campagne pour le conseil municipal en place[2].
En mars 1989, Alain Carignon est réélu maire de Grenoble et les journaux disparaissent, laissant un passif de 10 millions de francs.
La Lyonnaise des eaux, dont une des filiales vient de remporter la gestion des eaux de Grenoble nouvellement privatisée par Alain Carignon, entre alors dans le capital de l'entreprise de presse, et bien que celle-ci n'ait plus d'activité, elle en éponge les dettes[2].
Condamnation
modifierAprès avoir pris connaissance de sa prochaine mise en examen, le , Alain Carignon annonce sa démission de son poste de ministre de la Communication du gouvernement[3].
Il est condamné le par un arrêt définitif de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Lyon à cinq ans de prison (dont 1 an avec sursis), 5 ans d'inéligibilité, et 400 000 francs d'amende pour corruption, abus de biens sociaux (pour avoir détourné à son usage personnel 19 073 150 francs, soit 2 907 683 euros), et subornation de témoins[4].
La commission d´application des peines de la maison d´arrêt de Villefranche-sur-Saône où il purge sa peine rend un avis positif sur sa demande de libération conditionnelle. Il est libéré en mai 1998[5].
« Attendu que Monsieur Alain CARIGNON, élu du peuple depuis vingt ans, a bénéficié de la confiance d'une part de ses concitoyens et d'autre part des plus hautes autorités de l'État qui l'ont appelé, à deux reprises, à occuper des fonctions ministérielles ; que les éminentes tâches, qui lui ont ainsi été dévolues, auraient dû le conduire à avoir un comportement au-dessus de tout soupçon ; qu'au lieu de cela il n'a pas hésité à trahir la confiance que ses électeurs lui manifestaient, en monnayant le pouvoir de maire qu'il tenait du suffrage universel, afin de bénéficier d'avantages matériels qui se sont élevés à 19 073 150 francs et de satisfaire ses ambitions personnelles ; qu'il a ainsi commis l'acte le plus grave qui puisse être reproché à un élu ; qu'un tel comportement est de nature à fragiliser les institutions démocratiques et à faire perdre aux citoyens la confiance qu'il doivent avoir en des hommes qu'ils ont choisis pour exercer le pouvoir politique ;
Attendu que, pendant l'information, Monsieur Alain CARIGNON a tenté, abusant des fonctions ministérielles qu'il exerçait alors, d'égarer la justice en usant de pressions sur un témoin afin qu'il modifie sa déclaration dans un sens qui lui était favorable ; qu'un tel comportement venant d'un représentant de l'État, est d'une particulière gravité ;
Attendu enfin que l'attitude de Monsieur Alain CARIGNON au cours de l'information et lors des débats devant la cour, qui a consisté à mettre en cause d'autres hommes politiques, élus ou anciens ministres, et à leur imputer des faits similaires à ceux dont il s'est rendu coupable, ne peut que contribuer à fragiliser dans l'opinion l'image des hommes chargés de conduire la politique de la nation et à déstabiliser les institutions de l'État ;
Attendu qu'il est justifié, qu'en répression de tels faits, soit prononcée à son encontre une peine d'emprisonnement en partie ferme ; que la totalité de la peine infligée par le tribunal sera confirmée mais que la partie ferme sera augmentée dans sa durée ; que la peine d'amende et la peine complémentaire d'interdiction des droits de vote et d'éligibilité sera confirmée ;
Attendu que la gravité des faits, dont Monsieur Alain CARIGNON a été déclaré coupable, et la persistance de son comportement troublent encore l'ordre public fondé sur la confiance que chaque citoyen doit avoir envers les institutions, politiques et sociales qui, établies par la loi, régissent l'État, et les hommes qui ont reçu mandat d'en être les garants ; qu'il convient d'y mettre fin en assurant l'exécution immédiate de la décision et de décerner, Monsieur Alain CARIGNON étant absent à la lecture de la décision, un mandat d'arrêt à son encontre ;
(...)
En répression, condamne les prévenus à :
3.1.2.1. Monsieur Alain CARIGNON
- 5 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis
- 400 000 francs d'amende
- prononce à son encontre l'interdiction du droit de vote et d'éligibilité pour une durée de 5 ans
- décerne à son encontre un mandat d'arrêt »
Conséquences
modifierLe , et dans un contexte où Alain Carignon prépare une candidature aux prochaines élections municipales de Grenoble, son adversaire historique Raymond Avrillier annonce la mise en ligne, en accès libre, de son ouvrage Le système Carignon[6].
Le système Carignon dévoile le détournement de plus de 19 millions de francs (près de 3 millions d'euros) à l'usage personnel d'Alain Carignon ou ses proches alors qu'il était Maire, Député ou Ministre. Par exemple, 122 vols (soit près de deux millions de francs) à bord des avions de la compagnie Grenobloise Sinair, ont été emprunté entre le 1er décembre 1984 et le 18 mars 1993 par Alain Corignon et/ou ses proches vers Paris ou des destinations touristiques comme la Corse, Barcelone ou Palma de Majorque, tous facturés au Groupe Merlin de Marc-Michel Merlin de la Lyonnaise des Eaux en autre[7] qui avait remporté la gestion des eaux de la ville de Grenoble[8]'[9]'[10]'[11]'[12]'[13]'[14]'[15]'[16].
Notes et références
modifier- « Alain Carignon démissionne du gouvernement Le financement de la campagne municipale de 1989 est à l'origine de l'enquête de la justice », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « LE CITOYEN CARIGNON DEVANT SON JUGE », sur L'Express, (consulté le )
- « Alain Carignon démissionne du gouvernement », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Alain Carignon a été condamné à quatre ans de prison ferme », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- Par Michel DELÃ?AN Le 2 mai 1998 à 00h00, « Alain Carignon va pouvoir quitter la prison », sur leparisien.fr, (consulté le )
- « Le système Carignon » (consulté le )
- Mireille DEBARD, « En appel, Carignon cherche sa défenseL'ex-maire de Grenoble tente de gagner sa liberté et de recouvrer son éligibilité. », sur Libération,
- ADES - Association démocratie écologie solidarité, « Qui a ruiné Grenoble : la corruption »,
- « Jour après jour, les grandes dates de l'affaire CARIGNON (1983-2003) », sur nonalaincarignon.free.fr
- « Racket à la grenobloise », sur L'Express,
- « Tribunal correctionnel de Lyon (6ème chambre du tribunal de grande instance) jugement du 16 novembre 1995 n° 7579 Ministère public c/ Frédéric B..., Jean-Jacques A..., Louis D..., Marc-Michel Z..., Alain X..., Jean-Louis Y..., Claudine Y... épouse C..., Pierre Z... », sur www.cace.fr
- « Devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Lyon Le parquet général a réclamé le maintien en détention de M. Carignon en raison d'un dossier " accablant " », Le Monde, (lire en ligne)
- « La Revue du Trésor : législation, jurisprudence, administration : organe d'études et d'informations professionnelles / dir. M. Cornillié », sur Gallica,
- Raymond Auteur du texte Avrillier et Philippe (1965- ) Auteur du texte Descamps, Le système Carignon / Raymond Avrillier, Philippe Descamps, (lire en ligne)
- Philippe Courroye, Reste la justice..., Michel Lafon, (ISBN 978-2-7499-3652-9, lire en ligne)
- L'Express, Presse-Union, (lire en ligne)