Abram Brazer (en russe : Абра́м Ма́ркович Бра́зер) né le à Chișinău, (en russe : Kichinev), en Bessarabie (actuelle Moldavie), mort fusillé dans le ghetto de Minsk[1] en 1942. Sculpteur soviétique, graphiste et peintre de l'avant-garde russe. Membre éminent parmi les artistes de la RSS de Biélorussie (1940).

Abram Brazer
Автопортрет А. Бразера/ Autoportrait de Brazer 1939
Naissance
Décès
Nationalité
Activités
Formation
Alexandru Plămădeală Arts College (d) (jusqu'en )
École nationale supérieure des beaux-arts (-)Voir et modifier les données sur Wikidata
Maître
Окушко Володимир Фульгентійович (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Distinction
Artiste d'honneur de la RSS biélorusse (en) ()Voir et modifier les données sur Wikidata

Membre de la société des amateurs d'art de Bessarabie (Chișinău, 1903—1916), de la société juive d'encouragement des arts (Petrograd, 1915—1919)[2].

Biographie

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C'est à Kichinev (capitale de l'actuelle Moldavie) qu'il obtint en 1910 le diplôme de l'École d'art de la ville. De 1912 à 1916, il étudia à Paris à l'École nationale supérieure des beaux-arts. Trois de ses œuvres furent exposées au Salon d'automne de 1913. Il vivait à La Ruche (cité d'artistes) où vivait aussi à la même époque, Marc Chagall, originaire de Vitebsk[3]. Le facteur de mobilité, décisif pour les Juifs au début du siècle, fut enrichissant pour tous les peintres de Vitebsk et de Russie en général[4]. Ceux qui ne partaient pas pour l'École de Paris partaient à Moscou ou Saint-Pétersbourg ou encore en Allemagne à Berlin (ou à Munich, comme Kandinsky).La Révolution russe avait supprimé les zones de résidences et accordait davantage de droits et d'égalité que la Russie tsariste, facilitant les voyages.

 
Ivan Loutsévitch. Pseudonyme : Ianka Koupala. 1926.

Après ce séjour à Paris, Abram Brazer retourna en Russie, à Pétrograd, en 1916 et participa à l'exposition de Mir Iskousstva la même année, puis en 1918, à l'exposition des artistes juifs organisées par Chagall à Vitebsk. En 1919, Marc Chagall et Abram Brazer organisèrent une exposition qui présentait les travaux des élèves de l'École artistique de Vitebsk et d'autres peintres à Vitebsk. Marc Chagall (en 1919) avait remplacé Iouri Pen à la tête de cette école de Vitebsk et attirait de nombreux amis artistes dans la ville : Brazer, Ilia Tchachnik et puis Malevitch. Puis, de novembre à décembre 1919, toujours à Vitebsk, Brazer et Chagall organisèrent encore une autre exposition de "peinture contemporaine" qui comprenait pas moins de 90 tableaux en provenance de Moscou. Les moscovites étaient hésitants parce que la ville de Vitebsk était sur le point de tomber aux mains des forces polonaises. Ils réussirent finalement à exposer outre les œuvres des artistes locaux comme Iouri Pen, Abram Brazer, des tableaux des chefs de file de l'avant-garde ventant de Moscou : Kandinsky, Bourliouk, Natan Altman, Rodtchenko, Exter, Robert Falk. En tout 240 productions de 41 peintres dont 90 en provenance de Moscou[5].

Vitebsk, au début des années 1920, était devenue un centre avant-gardiste important en Russie. On a souvent parlé de "renaissance vitebskoise". Les artistes pouvaient donner libre cours à leur créativité. Mais les instants de liberté totale ne se sont pas prolongés longtemps pour tous. Par contre ils ont permis aussi, à des centaines de jeunes gens, de révéler et de confirmer leur vocation artistique[6].

De 1914 à 1920 les recherches des Juifs dans le domaine artistique arrivèrent à maturation. Lissitzky et Rybak partirent explorer à Moguilev, près des rives du Dniepr, les sources primitivistes populaires juives dans les synagogues, sur les pierres murales, les pierres tombales. Natan Altman cherchait lui, dans le nord de l'Ukraine, sa région natale les traces de la culture juive dans la culture populaire. En 1918 Broderzon créa un "Cercle de l'Esthétique nationale juive". À Moscou ce cercle était représenté par Lissitzky et à Pétrograd par Chagall et Brazer. En le Cercle organisa une exposition de 233 travaux de 41 artistes juifs[7].

Brazer joua un rôle important dans la vie artistique de la ville : il donna cours dans les locaux de l'École artistique de Vitebsk, dans les "ateliers libres d'État" (1920-1921) puis à l'"Institut pratique d'art" (1922-1923), au "Teknikhoum artistique" (1922-1924). Il s'occupait de l'organisation d'expositions, de débats sur le thème de l'art contemporain, de l'organisation d'un musée des arts modernes, de la création d'esquisses pour embellir la ville lors des fêtes anniversaires de la Révolution d'Octobre 1917.

Il est l'auteur d'un monument en l'honneur du pédagogue suisse Johann Heinrich Pestalozzi créé à Vitebsk en 1920 et détruit par les bombardements durant la Seconde Guerre mondiale. À partir de 1922 A. Brazer enseigna à l'École artistique de Vitebsk, et organisa des spectacles au théâtre juif de Vitebsk. À partir de 1923, Brazer vécut à Minsk, il fit partie de l'"association des artistes de Biélorussie" et de l'"organisation révolutionnaire des artistes". Il écrivit des articles sur le thème des arts plastiques dans les revues du pays.

En juin 1941, quelques jours avant le début de la Seconde Guerre mondiale et l'invasion de l'URSS par les Allemands, s'ouvrit une exposition consacrée à A. Brazer. Tous les travaux de l'artiste qui figuraient dans cette exposition furent détruits par les Allemands après la prise de la ville. Quant à Brazer il fut fusillé en mars 1942 avec sa famille dans le Ghetto de Minsk à la suite d'une accusation d'espionnage[8].

Postérité

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Les œuvres de Brazer qui subsistent, (le portrait de Iouri Pen, 1921 ; le buste de l'acteur juif Solomon Mikhoels (1926) et d'autres encore, sont conservés au Musée national des beaux-arts de Biélorussie à Minsk. Le 2 juillet 1999 , fut éditée une série de quatre timbres-poste dédiée à l'école artistique de Vitebsk ; sur un des timbres figure le portrait du fondateur de l'école de Vitebsk, Iouri Pen, qui est l'œuvre d'Abram Brazer.

Élevé dans les traditions de l'art européen, Brazer avait adopté un style classique, teinté d'impressionnisme. Il fut aussi le premier d'une génération de sculpteurs biélorusses (Azgour, Bembeln, Glebov)[9]

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Bibliographie

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  • Claire Le Foll: "L'école artistique de Vitebsk" (1897-1923) L'Harmattan. 2002. (ISBN 2-7475-2067-6).
  • Шишанов В. А. Витебский музей современного искусства: история создания и коллекции. 1918—1941. — Минск: Медисонт, 2007. — 144 с. Chichanov V.A Musée de Vitebsk d'art contemporain: histoire des collections.
  • Шишанов, В. А. «Путем яркого штриха и глубоко прочувствованной линии…» [О витебском периоде художника А. М. Бразера] / В. А. Шишанов // Мишпоха. — 2009. — № 25. — С.57-62.[1]Chichanov V A : sur la période vitebskoise de Brazer.

Notes et références

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  1. Claire Le Foll: L'école artistique de Vitebsk (1897-1923) L'Harmattan. p. 206
  2. membre également de l'union des artistes de toute la Biélorussie (1927—1932), de l'organisation révolutionnaire des artistes-peintres de Biélorussie (1929—1932), de l'Union des artistes de Biélorussie (depuis 1940)
  3. Claire Le Foll: L'école artistique de Vitebsk (1897-1923) L'Harmattan. p. 71
  4. Claire Le Foll: L'école artistique de Vitebsk (1897-1923) L'Harmattan. p. 191
  5. Claire Le Foll: L'école artistique de Vitebsk (1897-1923) L'Harmattan .p. 125
  6. Claire Le Foll: L'école artistique de Vitebsk (1897-1923) L'Harmattan .p. 128-129
  7. Claire Le Foll: L'école artistique de Vitebsk (1897-1923) L'Harmattan .p. 161
  8. « Найденная в архивных материалах минского гетто докладная записка коменданта от 4 марта 1942 года сообщает, что известный художник и скульптор А. Бразер был арестован по обвинению в шпионаже. Ему вменялось в вину, что работая над портретами немецких офицеров он занимался сбором информации для подпольного партизанского движения ». Traduction : « Les archives du ghetto de Minsk comprennent des documents qui établissent que le sculpteur Brazer fut arrêté et accusé d'espionnage. On l'accusa de réunir des informations destinées aux mouvements des partisans en même temps qu'il travaillait au buste d'un officier allemand. »
  9. Claire Le Foll: "L'école artistique de Vitebsk" (1897-1923) L'Harmattan.2002.p. 714 (ISBN 2-7475-2067-6).