Économie de la Bretagne

L'économie de la Bretagne se caractérise par une agriculture intensive extrêmement productive, une filière d'élevage très compétitive (particulièrement de porc), et doit également une partie son activité au tourisme.

Historique

modifier

Liens commerciaux au XVe siècle

modifier

D'une façon générale la Bretagne occupait une position géographique centrale entre l'Espagne, l'Angleterre et la Hollande. Les Bretons transportaient le vin de Bordeaux, le sel de Guérande et de Bourgneuf. La Bretagne exportait du beurre, du suif, des viandes salées, des porcs vivants, du poisson sec ou salé dans des barils et des produits manufacturés comme les toiles. En 1483, il y a 344 navires bretons dans le port d'Arnemuiden en Zélande. Au XVe siècle, la Bretagne était riche.

La guerre de succession

modifier

Le duché de Bretagne s'enrichit pendant la guerre de Cent Ans mais finit par sombrer dans une guerre de succession qui marque le début de la fin de la prospérité bretonne. Après l'union du duché de Bretagne au royaume de France en 1488, les Anglais attaquent les ports et les villes bretonnes. En 1522 Morlaix est pillé.

Les conséquences de l'intégration avec la France

modifier

Les riches mécènes et les artistes renommés, après le mariage d'Anne de Bretagne, déserteront la cour ducale de Bretagne.

Le traité d'union de 1532 rattache le duché de Bretagne à la France. Cette période, du milieu du XVe siècle au milieu du XVIIe siècle, sera la plus prospère de l'histoire du duché.

Le développement portuaire

modifier

Le XVIIe siècle voit la création ou la rénovation des principaux ports bretons : le port de Lorient est fondé par Colbert en 1660. Il sera le siège de la Compagnie française des Indes orientales. Le port de Brest se voit doter d’un arsenal par Richelieu, à partir de 1683. Le port de Saint-Malo envoie ses pêcheurs jusqu’à Terre-Neuve.

Les Bretons fourniront un important contingent de colons à destination des Antilles et de l’Amérique du Nord.

Au XVIIIe siècle les ports bretons poursuivent leur développement notamment Nantes, qui prospère grâce au commerce triangulaire.

Les conflits avec les Anglais puis les Britanniques

modifier

Les blocus, les attaques des ports et des vaisseaux bretons par la marine anglaise/britannique, et les réarmements des navires marchands bretons à des fins militaires ruinèrent le commerce breton mais firent la fortune des ports corsaires.

1200 Anglo-Hollandais débarquent au Conquet en 1588. Brest est attaqué en 1594. En 1693 et 1695, les Anglais attaquent Saint-Malo. En 1746, les Britanniques assiègent Lorient et pillent Quiberon. En 1758, ils attaquent de nouveau Saint-Malo, débarquent à Cancale, brûlent les villages aux alentours et 55 navires. Les Britanniques occupent Belle-Île-en-Mer de 1760 a 1763. En 1806, ils s'empareront même des Glénan. La plupart des îles bretonnes y compris Batz, Houat, Hoëdic sont occupées à un moment ou à un autre par les Britanniques qui en font des bases pour lancer des attaques sur les ports bretons et empêcher tout commerce en capturant ou coulant les navires qui passent à portée de canon. Probablement des milliers de bateaux marchands basés dans des ports bretons furent capturés ou détruits par les vaisseaux de sa majesté au cours de toutes ces guerres.

La monarchie française fait construire de nouveaux vaisseaux (la forêt centrale ou Argoat aurait été détruite pour construire la marine royale et impériale) et y recruter des marins pour la flotte et des colons pour les colonies. Si Colbert choisit d'établir un port à Lorient c'est que Le Havre est dans la Manche et trop menacé par les Britanniques bien qu'il aurait préféré Le Havre car les épices des Indes pouvaient remonter jusqu'à Paris par la Seine.

La conserve et la boîte de fer-blanc furent inventées au début du XIXe siècle donnant à la Bretagne une nouvelle industrie et des produits à (faible) valeur ajoutée.

Époque contemporaine

modifier

L'économie de la Bretagne est tournée vers l'agriculture et les industries agroalimentaires, le tourisme estival (principalement sur la côte), ainsi que des pôles technologiques de télécommunication (Rennes, Lannion)[1].

Sciences et technologies

modifier

La Bretagne possède trois grands pôles de compétitivité labellisés par l'État en 2005[2] :

Agriculture

modifier

Très importante pour la vie économique de la Bretagne, l’agriculture est bien marquée dans la région en particulier dans les secteurs des productions laitières, porcines, de volaille (œuf et chair), maraîchère, tout ça avec 6 % de la totalité de la Surface Agricole Utilisée (SAU) de France.

Mais l’agriculture en Bretagne cache de nombreux problèmes : depuis les années 60, les fermes n’ont cessées de s’agrandir, tout comme les champs qui se sont affranchis pour une partie du bocage traditionnel qui les entourent ; même s’ils ont tendance à revenir à une agriculture respectueuse de l’environnement, ces années ont été le décollage de l’agriculture intensive et conventionnelle, cause de nombreux problèmes environnementaux et de santé publique. La pollution engendrée par toutes ces années est encore très présente dans les cours d’eau, dans les sols, affecte la faune et la flore et détruit l’image de la région. Malgré les efforts consentis ces dernières années pour une agriculture meilleure, il reste encore un grand bout de chemin à parcourir pour une agriculture écologique, juste, durable et de qualité[6].

Production agricole des principaux aliments fabriqués dans la région[7]:

Production Tonnes Part

Bretagne / France

Porcins 1 240 000 58 %
Poulets 388 000 33 %
Œufs 5 940 M (nb) 43 %
Gros bovins 123 000 10 %
Veaux 35 000 20 %
Lait 5 400 L (en M) 23 %
Lapins 10 000 22 %
Maïs fourrage 4 200 000 24 %
Blé 2 000 000 6 %
Choux fleurs 216 000 83 %
Artichauts 37 000 79 %

Chasse : la Bretagne recense 4 % des chasseurs français (55 009 chasseurs en 2006)

« Présents dans l'imaginaire collectif comme un peuple de marins, les Bretons ont en fait bien souvent ignoré la mer[8] ». S'il existe des pêcheries d'estran en bois dès le Mésolithique en Europe, des barrages à poissons en pierres[9] barrant en biez (parcs ou écluses à poissons) ou en bois (bouchots) sont attestés en Armorique dès le Néolithique[10]. Bien que la Bretagne soit située au centre de trois régions maritimes d'importance (le golfe de Gascogne, la Mer Celtique et la Manche) et qu'elle ait une certaine vocation maritime du temps du peuple antique des Vénètes jusqu'aux Carolingiens, « aucun déterminisme géographique n'a jamais poussé les Bretons vers l'eau salée[11] ». Pour la plus grande partie du Moyen Âge, la Bretagne armoricaine fait en effet son deuil de la mer matricielle qui fait systématiquement office de « dépotoir » de tous les monstres de l'hagiographie bretonne[12] et perd ses traditions maritimes au profit de l'Argoat marqué par l'empaysannement médiéval qui s'impose jusqu'au XIVe siècle[13].

Il y existe une intense activité de pêche bretonne, non pas à partir du XIXe siècle comme il est couramment admis, mais au moins depuis le XVe siècle[14] qui voit la mise en place d'un système halieutique structuré (capture, transformation et commerce) notamment pour la pêche à la sardine[15] et la pêche à la morue (Terre-neuvas)[16].

L'ostréiculture et la mytiliculture se développent au cours de la seconde moitié du XIXe siècle[17].

Le développement des conserveries et du chemin de fer à la fin du XIXe siècle permet à la filière bretonne d'accéder au marché national et de devenir la première région de pêche maritime de France[18].

« La pêche en mer — toutes les pêches sauf la Grande pêche — perdure pendant la Seconde Guerre mondiale sur le littoral atlantique. Les pêches côtières connaissent même un réel renouveau[19] ».

Dans la seconde moitié du XXe siècle, à l'exception d'un armement malouin de grande pêche qui prend le large vers les eaux africaines, c'est à partir des ports du Sud Bretagne que se développe un effort de pêche en coopération avec les pays en développement africains d'abord, puis dans l'océan indien[18].

Au début du XXIe siècle, la Bretagne représente la première région de pêche de France, totalisant 51 % de la production nationale en volume et près du tiers des premières ventes (29 % en 2008) de la pêche française selon les chiffres de l'Ifremer[20]. Une flotte de 1 448 bateaux embarquant près de 3 500 marins-pêcheur assure la moitié de la prise de poissons en France et les deux tiers de la production française de crustacés et de coquillages[21], ce qui représente un chiffre d'affaires de 317 millions d'euros en 2008[20]. La région compte douze quartiers maritimes et treize halles à marée[22].

Après un épisode de surcapacité de pêche en 2000 et 2001, les autorités ont renforcé la politique générale de réduction de l'effort de pêche, ce qui se traduit par une diminution de la flotte de pêche bretonne et de l'emploi à la pêche, et suscite des inquiétudes au sein des collectivités bretonnes et des professionnels des filières pêche et aquaculture qui doivent de plus répondre aux défis de la concurrence et des impacts écologiques de leur secteur d'activité[23].

La diversité de la pêche bretonne reste importante en matière de taille des navires et des espèces halieutiques ciblées, de la dimension géographique et de la forme juridique des armements[24]. Elle cherche à s'adapter aux nécessités de la pêche actuelle en misant sur « le dynamisme des armements, et l'énergie des hommes, qui sont le moteur d'une évolution permanente[25] ».

Port Nombre
de navires
Nombre
de marins
Nombre
de mareyeurs
Pêche principale Tonnage
Audierne 49 119 3 bar, lotte 969
Brest 152 290 4 lotte, maquereau 1225
Concarneau 155 650 18 lotte, cabillaud 15 204
Douarnenez 30 81 10 sardine, maquereau 3994
La Turballe 84 300 8 anchois, maquereau 9625
Le Croisic 41 120 1 langoustine, sole 2955
Le Guilvinec 131 586 14 lotte, langoustine 19 154
Lesconil 21 54 2 lotte, merlu 492
Loctudy 83 280 14 langoustine, lotte 8494
Lorient 135 733 20 merlu, langoustine 27 349
Quiberon 150 460 5 bar, sole 1171
Roscoff 116 300 6 lotte, raie 2983
Baie de Saint-Brieuc 193 542 10 coquille Saint-Jacques, baudroie 22 865
Saint-Guénolé 92 326 11 langoustine, lotte 14 076
Saint-Malo 65 537 8 coquille Saint-Jacques, seiche 1710
(Source : Groupement Normapêche Bretagne, 2004)

Filière algues

modifier

Avec ses 700 km de côtes, sa position[26] et son climat océanique extrêmement doux, la Bretagne constitue le plus grand champ d'algues européen, où se côtoient 25 à 30 000 espèces de macroalgues. Elle abrite une des plus grandes biodiversités au monde avec plus de 700 espèces d’algues différentes recensées. La superficie des champs d'algues bretons a été évaluée à 2 000 km2, portant une biomasse de 10 millions de tonnes fraîches, soit 10 kg au m2, produisant 8,2 millions de tonnes fraîches, 1,5 million de tonnes sèches par an[27].

La Bretagne récolte près de 70 000 t/an de macroalgues fraîches[28] (90 % de la production française[29]), une infime partie (50 tonnes) étant produite en culture en mer. 70 % de la récolte des macroalgues française provient de l'archipel de Molène[30]. En 2015, ce secteur d'activité[31] génère 1 700 emplois, avec près de 80 entreprises de transformation et de commercialisation (groupe Roullier, Goëmar…), pour une valeur estimée à 424 M€ (plus de 50 % dans la cosmétique)[32].

Les microalgues dont le marché est encore faible, ont un fort potentiel (santé, cosmétique, biocarburant, biobitume, écologie industrielle).

Notes et références

modifier
  1. Les grands établissements employeurs bretons
  2. Les pôles de compétitivité en France
  3. Pôle Mer Bretagne
  4. Pôle Images et Réseaux
  5. Pôle Valorial
  6. Florence Gourlay - Ronan Le Délézir, Atlas de la Bretagne
  7. « chiffres-clés - Bretagne », pdf,‎ (file:///C:/Users/Bureau/AppData/Local/Temp/chiffres-cles-commerce-2020_-_page_double_0.pdf)
  8. Jean-Christophe Cassard, Les Bretons et la mer au Moyen Âge, Presses universitaires de Rennes, , préface
  9. Ces barrages sont souvent associés à un toponyme breton explicite, Ar gored ou Ar goured (pluriel Ar c'horejoù) signifiant « pêcherie » ou « parc à poissons », « plus exactement l'espace de grève délimité par une clôture artificielle servant à piéger le poisson ». Cf Marie-Yvane Daire, Loïc Langouët, Catherine Bizien-Jaglin, Les pêcheries de Bretagne : archéologie et histoire des pêcheries d'estran, Centre régional d'archéologie d'Alet, , p. 118
  10. Marie-Yvane Daire, Loïc Langouët, Catherine Bizien-Jaglin, Les pêcheries de Bretagne : archéologie et histoire des pêcheries d'estran, Centre régional d'archéologie d'Alet, , 144 p.
  11. Jean-Christophe Cassard, Les Bretons et la mer au Moyen Âge, Presses universitaires de Rennes, , p. 12
  12. Bernard Merdrignac , « Jean-Christophe Cassard, Les Bretons et la mer au Moyen Âge. Des origines au milieu du XIVe siècle [compte-rendu] », Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, t. 106, no 4,‎ , p. 131 (lire en ligne)
  13. Jean-Christophe Cassard, Les Bretons et la mer au Moyen Âge, Presses universitaires de Rennes, , p. 75
  14. Dominique Robin, Pêcheurs bretons sous l'Ancien Régime. L'exploitation de la sardine sur la côte atlantique, Presses universitaires de Rennes, , 387 p.
  15. Dominique Robin, Penn sardin : deux siècles de pêche à la sardine, Ouest-France, , 124 p.
  16. Alain Croix, André Lespagnol, Les Bretons et la mer. Images et Histoire, éditions Apogée, , p. 53-58
  17. Olivier Levasseur, Histoire de l'huître en Bretagne, Skol Vreizh, , p. 7
  18. a et b Yannick Pelletier, Histoire générale de la Bretagne et des Bretons, Nouvelle librairie de France, , p. 305
  19. Jean-Christophe Fichou, Les pêcheurs bretons durant la Seconde Guerre mondiale, Presses universitaires de Rennes, , préface
  20. a et b Panorama du secteur des pêches en Bretagne. Synthèse et chiffres clés, fiche technique du pôle halieutique de l'Agrocampus Ouest
  21. Gersende de Villeneuve, Petit dictionnaire insolite du breton et des Bretons, Larousse, , p. 112
  22. Pascal le Floc'H, Les pêches maritimes françaises : 1983-2013, Presses universitaires de Rennes, , p. 25-28
  23. Catherine Talidec, Jean Boncoeur et Jean-Pierre Boude, Les pêches côtières bretonnes. Méthodes d'analyse et aménagement, éditions Quæ, , p. 25-42
  24. Catherine Talidec, op. cit., p.23-24
  25. Yannick Pelletier, Histoire générale de la Bretagne et des Bretons, Nouvelle librairie de France, , p. 306
  26. La Bretagne est située dans l'écorégion marine tempérée de l'Atlantique offrant une grande diversité d'habitats. Cf (en) Spalding MD, Fox HE, Allen GR, Davidson N, Ferdaña ZA, Finlayson M, Halpern BS, Jorge MA, Lombana A, Lourie SA, Martin KD, McManus E, Molnar J, Recchia CA, Robertson J, « Marine Ecoregions of the World: a bioregionalization of coast and shelf areas », BioScience, vol. 57, no 1,‎ , p. 573-583 (DOI 10.1641/B570707).
  27. Pierre Flatrès, La Bretagne, Presses universitaires de France, , p. 63.
  28. La récolte de laminaires sauvages en mer, effectuée par 35 bateaux goémoniers, représente 65 000 t par an, avec un chiffre d’affaires compris entre 1,7 et 2,7 millions d’euros (soit environ 45 €/tonne). Les algues de rives sont collectées à la main par 1 000 récoltants à pied professionnels (dont 500 saisonniers) qui en cueillent 6 000 t par an. Cf. Algues. 71 000 tonnes de laminaires récoltés chaque année en Bretagne, 8 décembre 2014, GREF Bretagne
  29. Les 10 % restants étant dans les Pays basques.
  30. Éloïse Levesque, « Finistère. Cinq chiffres qui montrent que l’algue est une filière en plein essor », sur ouest-france.fr, .
  31. La filière algues en Bretagne en 2013, Le Télégramme, 6 octobre 2013, p. 3
  32. Denis Sergent, « Dans le Finistère, des pionniers misent sur les algues  », sur la-croix.com, .

Voir aussi

modifier

Bibliographie

modifier
  • Yannick Le Bourdonnec, Le miracle breton, Calmann-Lévy, 1996

Article connexe

modifier

Lien externe

modifier