Vladimir Boukovski

écrivain russe et dissident soviétique

Vladimir Konstantinovitch Boukovski ou Boukovsky (en russe : Владимир Константинович Буковский), né le à Belebeï et mort le à Cambridge (Royaume-Uni)[1], est un écrivain, défenseur des droits de l'homme et ancien dissident soviétique naturalisé britannique qui a passé douze ans de sa vie emprisonné (camp Perm-36, prison, hôpital psychiatrique).

Vladimir Boukovski
Vladimir Boukovski en 1987.
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom de naissance
russe : Владимир Константинович Буковский
Nationalités
britannique (à partir de )
russeVoir et modifier les données sur Wikidata
Formation
Activités
Père
Konstantin Bukovsky (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Parti politique
Solidarnost (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Lieux de détention
Site web
Distinction
Médaille de la liberté Truman-Reagan (en) ()Voir et modifier les données sur Wikidata
Vue de la sépulture.

Il est le premier à dénoncer l'utilisation de l'emprisonnement psychiatrique contre les prisonniers politiques en URSS. En 1976, il est échangé contre le dirigeant communiste chilien Luis Corvalán.

En 2015, il a été poursuivi au Royaume-Uni pour possession de matériel pédopornographique, mais il est tombé malade et est décédé avant la fin du procès.

Biographie

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Jeunesse

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Vladimir Boukovski est né en 1942 à Belebeï, ville de la République socialiste soviétique autonome bachkire (actuellement Bachkortostan), où sa famille est évacuée (alors qu'elle vivait à Moscou) durant la Seconde Guerre mondiale. En 1959, il est expulsé de l'école de Moscou pour avoir créé et édité un magazine non autorisé.

Militantisme et arrestations

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De à , Boukovski est envoyé dans un hôpital psychiatrique pour avoir organisé des rencontres de poésie dans le centre de Moscou (près de la statue de Vladimir Maïakovski), en application de l'article 70-1 du Code pénal soviétique. En , il est de nouveau arrêté et emprisonné pour avoir organisé une manifestation pour la défense d'Alexandre Ginsburg, Iouri Galanskov et d'autres dissidents (article 190-1, 3 ans d'emprisonnement), malgré la défense assurée par Dina Kaminskaïa[réf. souhaitée]. Il est relâché en 1970.

En 1971, il réussit à faire parvenir à l'Ouest 150 pages qu'il a écrites sur l'utilisation et l'instrumentalisation de la psychiatrie à des fins politiques de répression dans les hôpitaux psychiatriques de l'URSS. Ces informations soulèvent l'indignation des défenseurs des droits de l'homme dans le monde et à l'intérieur du pays, ce qui est alors un prétexte pour une nouvelle arrestation en . Officiellement, le motif est « contacts avec des journalistes étrangers », « possession et distribution de samizdats » (article 70-1, 7 ans d'emprisonnement plus 5 ans d'exil).

Avec son compagnon de cellule de la prison de Vladimir, le psychiatre Semion Glouzman (en), il coécrit un Manuel de psychiatrie pour les dissidents, afin d'aider les autres dissidents à lutter contre les mauvais traitements infligés par les autorités soviétiques dans les hôpitaux psychiatriques.

Déportation

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Le destin de Boukovski et des autres prisonniers politiques en Union soviétique, fréquemment porté à l'attention des associations de défense des droits de l'Homme et des diplomates occidentaux, est une cause d'embarras et d'irritation pour les autorités soviétiques[2]. En , alors qu'il est emprisonné, Boukovski est échangé contre l'ancien chef communiste chilien, Luis Corvalán.

Au Royaume-Uni

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À partir de 1976, Boukovski vit à Cambridge, en Angleterre, où il se concentre sur l'écriture et la neurophysiologie. Il a obtenu un master en biologie et a écrit plusieurs livres et essais politiques. En plus de critiquer le régime communiste soviétique, il s'est attaqué à ce qu'il a appelé la « crédulité occidentale », un manque de position ferme du libéralisme contre les abus communistes. A la fin des années 1970, avant même l'intervention soviétique en Afghanistan, il appelle dans une tribune du Monde au boycottage des Jeux Olympiques de Moscou. En France peu après le , il a une altercation télévisée à l'Emission Apostrophes avec Simone Signoret, lorsqu'il sous-entend que la victoire de la gauche aux élections législatives du mois de pourrait déboucher sur l'instauration d'une dictature. En 1983, avec Vladimir Maximov et Édouard Kouznetsov, il fonde l'organisation internationale antitotalitaire Resistance International l'Internationale de la Résistance, dont il devient le président[réf. souhaitée].

Jugement à Moscou

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En , Vladimir Boukovski fait un voyage à Moscou, pour la première fois depuis sa déportation. Lors de l'élection présidentielle de 1991, Boris Eltsine considère Boukovski comme un potentiel vice-président (parmi notamment Galina Starovoïtova et Gennady Bourboulis)[réf. nécessaire]. Finalement, la vice-présidence est offerte à Alexandre Routskoï. En 1992, après la dislocation de l'Union soviétique, le gouvernement de Boris Eltsine invite Boukovski à servir d'expert à la Cour constitutionnelle de la fédération de Russie lors d'un procès devant déterminer si le Parti communiste de l'Union soviétique était une organisation criminelle. Pour préparer son témoignage, Boukovski eut accès à un très grand nombre de documents issus des archives soviétiques. Il numérisa certains documents classés confidentiels et les rassembla dans un livre publié deux ans plus tard sous le titre de Jugement à Moscou.

Après 1992

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En 1992 des députés du Conseil de la ville de Moscou proposent à Boukovski de se présenter aux élections municipales, à la suite de la démission de l'ancien maire Gavriil Popov. Mais Boukovski refuse cette offre. Début 1996, c'est un groupe d'académiciens, de journalistes et d'intellectuels qui lui suggère de se présenter à l'élection présidentielle, en tant qu'alternative au président sortant, Boris Eltsine, et à son adversaire communiste, Guennadi Ziouganov. Cette proposition n'a pas eu de suite.

En , il s'associe avec Garry Kasparov, Boris Nemtsov, Vladimir Kara-Mourza et d'autres personnalités politiques d'opposition pour fonder le Comité 2008, une organisation démocrate russe dont le but est de garantir une élection présidentielle « libre et juste » en 2008. En 2005, à la suite des diverses révélations concernant Guantanamo, Abou Ghraib et les prisons secrètes de la CIA, Boukovsky critique la rationalisation de la torture.

La même année, il évoque un point commun entre l'Union européenne et l'URSS : le totalitarisme[3]. Il développe sa thèse dans un essai au titre évocateur[4]: L'Union européenne, une nouvelle URSS ? L'ouvrage a été écrit en collaboration avec Pavel Stroïlov et traduit de l'anglais et du russe par Pierre Lorrain.

Candidature à l'élection présidentielle russe de mars 2008

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Le , de nombreuses personnalités, réunies dans un « Groupe d'initiatives », ont proposé à Boukovski de se présenter à l'élection présidentielle de 2008, offre qu'il a acceptée. Sa candidature reste toutefois incertaine du fait de sa longue absence de Russie[5] et de sa double nationalité russo-britannique (disposition rajoutée à la loi fédérale en 2006, dont la validité est actuellement discutée à la Cour constitutionnelle).

Boukovski a déposé début les documents nécessaires au renouvellement de son passeport russe, lui permettant ainsi de revenir en Russie. Au mois de décembre, Boukovski avait collecté les documents nécessaires à l'enregistrement de sa candidature mais celle-ci a été annulée par la Cour constitutionnelle de la fédération de Russie parce qu'il n'avait pas résidé en Russie lors des dix années précédentes et qu'il avait une double nationalité[6].

Procès en 2015

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En 2015, il est poursuivi au Royaume-Uni pour possession de matériel pédopornographique de catégorie A (une activité sexuelle avec pénétration avec un enfant et/ou une activité sexuelle d'un enfant avec un animal ou du sadisme à l'égard d'un enfant)[7],[8].

Il impute cette accusation aux services de sécurité russes, mais ne convainc pas la justice[9]. Tombé malade, il meurt avant la fin du procès.

Vladimir Boukovski meurt le dans un hôpital de Cambridge au Royaume-Uni à la suite d'un arrêt cardiaque[10].

Influence

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Son ouvrage ...et le vent reprend ses tours a influencé Marie Holzman pour appréhender la dissidence[11]. Elle compare ses photos à celles de Wei Jingsheng[12]

Publications

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Notes et références

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  1. [1], sur vladimirbukovsky.com
  2. Anne Applebaum, Goulag, trad. par P.-E. Dauzat, Gallimard, 2003, p. 871 (ISBN 9782070348725)
  3. (en) « Former Soviet Dissident Warns For EU Dictatorship », The Brussels Journal.
  4. L'édition originale de cet ouvrage a été publiée en France, en langue française.
  5. La Constitution russe exige que le président ait vécu 10 ans sur le territoire russe.
  6. « Présidentielle russe : Vladimir Boukovski ne sera pas candidat », RIA Novosti, 19 décembre 2007.
  7. « Vladimir Bukovsky to be prosecuted over indecent images of children »(en) « Vladimir Bukovsky indecent images not put on PC 'remotely' », BBC News,
  8. (en) « Vladimir Bukovsky to be prosecuted over indecent images of children » [archive du ], Government of the United Kingdom (consulté le ).
  9. (en) « Vladimir Bukovsky indecent images not put on PC 'remotely' », BBC News,
  10. « Boukovski, dissident russe emblématique, est mort », TDG,‎ (ISSN 1010-2248, lire en ligne, consulté le )
  11. « Marie Holzman, sinologue militante. Coups de cœur », La Croix, 1er juin 2013.
  12. Romain Franklin, « Pour sauver Wei Jingsheng de la mort Noël Mamère et Marie Holzman: «Chine, on ne bâillonne pas la lumière» Editions Ramsay, 377 pages, 119 francs. », Libération, 29 octobre 1996

Voir aussi

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Article connexe

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Liens externes

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