Vincenzo Manfredini

musicien italien

Vincenzo Manfredini[1] (né le à Pistoia près de Florence et mort le [2] à Saint-Pétersbourg) est un compositeur, théoricien de la musique et claveciniste italien du XVIIIe siècle, et enseigna par ailleurs le clavecin et le chant.

Vincenzo Manfredini

Naissance
Pistoia, Drapeau du Grand-duché de Toscane Grand-duché de Toscane
Décès (à 61 ans)
Saint-Pétersbourg, Drapeau de l'Empire russe Empire russe
Activité principale Compositeur
Style Musique baroque, opéra
Activités annexes Théoricien de la musique, claveciniste
Lieux d'activité Italie, Russie

Œuvres principales

  • Requiem à l’Impératrice Élisabeth
  • Semiramide (opéra)
  • Concerto pour clavecin
  • 6 Sonates pour clavecin
———
  • Regole armoniche (traité sur la musique)
  • Difesa della musica moderna (idem)

Biographie

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Fils du violoniste et compositeur Francesco Manfredini (16841762) et de Rosa degli Antonii, c’est auprès de son père que Vincenzo acquiert les fondements de la musique. Puis il suit l’enseignement de Giacomo Antonio Perti (16611756) à Bologne (qui fut aussi le maître de son père) et de Gian Andrea Fioroni (17161778) à Milan.

Lors de son séjour à Saint-Pétersbourg Vincenzo épouse la chanteuse Maria Monari. Un de leurs fils, Giovanni Manfredini (vers 1769– ?) a laissé une brève biographie manuscrite sur son père[3]. Une de leurs filles, Elisabetta Manfredini (vers 1786– ?) eut également une carrière musicale.

Le compositeur

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À fin 1757 début 1758 Vincenzo Manfredini accompagne son frère aîné Giuseppe à Saint-Pétersbourg avec la troupe de Giovanni Battista Locatelli. Là il devient maître de chapelle de Pyotr Fyodorovitch. Il compose alors son premier opéra, La Semiramide riconosciuta (« la Sémiramide reconnue »), sur un livret de Metastasio. La représentation a lieu dans la résidence impériale d’été d’Oranienbaum (Ораниенбаум), à l’extérieur de Saint-Pétersbourg.

Le du calendrier grégorien l’Impératrice Élisabeth Ire (Елизавета Петровна) meurt et Pyotr devient tsar sous le nom de Pierre III Fyodorovitch (Пётр III Фёдорович). Aussitôt Pierre nomme Vincenzo maître de chapelle de la troupe de l’opéra italien de la cour. La première œuvre qu’il compose dans cette nouvelle fonction est son Requiem à l’Impératrice Elisabeth. Peu après, le , il écrit la pastorale héroïque La pace degli eroi (« la paix des héros »), pour la célébration du Traité de paix russo-prussien signé le , une initiative politique majeure du nouveau tsar. Or, ce traité et d’autres initiatives du Tsar lui valent l’hostilité de l’armée et Pierre disparaît mystérieusement à la suite d’un coup d'État, le de la même année.

C’est son épouse Catherine II (17291796) (en russe : Екатерина II) qui lui succède. Catherine se sépare rapidement de la plupart des proches de Pierre, mais, dans un premier temps, confirme Vincenzo dans ses fonctions, et celui-ci compose des opéras (L'Olimpiade sur un livret de Pietro Metastasio, La finta ammalata sur un livret de Carlo Goldoni, Carlo Magno), et quelques pièces occasionnelles (dont le ballet Amour et psyché).

Avec l’arrivée de Baldassare Galuppi, en 1765, Vincenzo Manfredini est relégué à la composition de ballets servant à agrémenter les opéras de son rival (Les amants réchappés du naufrage, Le sculpteur de Carthage, La constance récompensée). Il assume en outre la charge de maître de musique et de clavecin de l’héritier au trône Pavel Petrovich, le futur empereur Paul Ier (en russe : Павел I Петрович).

En 1769, Vincenzo Manfredini retourne à Bologne, étant au bénéfice d’une pension du trône de Russie. Il compose une Armida sur le fameux livret de Giacomo Duranti (ou Durandi), dont la première représentation a lieu en mai 1770 dans le Nuovo Pubblico Teatro (le théâtre communal) de Bologne[4]. Le même opéra est représenté à Vérone en 1771[5]. Puis Manfredini compose son Artaserse, dramma per musica, dont la première a lieu pendant le Carnaval de Venise de janvier 1772 au Teatro San Benedetto[6]. Après ces deux tentatives de s’affirmer avec la musique d’opéra, Manfredini se consacre principalement à l’enseignement et à la publication d’écrits sur la théorie de la musique, tout en produisant encore quelques symphonies (commentées dans les Efemefidi letterarie di Roma, 1776) et des quatuors à cordes (1781 ?).

Lorsque son ancien élève Pavel accède au trône, il invite Vincenzo à revenir. Il arrive en , mais meurt l'année suivante sans avoir assumé de charges particulières.

Le théoricien de la musique

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C’est principalement pour ses ouvrages théoriques que Vincenzo Manfredini est connu aujourd’hui, sachant que la plupart de ses musiques sont perdues.

Le premier ouvrage théorique de Manfredini, les Regole armoniche, o sieno Precetti ragionati (1re édition, 1775), comporte deux parties : l’une relative aux éléments de la composition, et l’autre relative à l’accompagnement par le clavier, et porte principalement sur les drames musicaux (dramma per musica un synonyme pour l’opéra). Cet ouvrage qui fit autorité en son temps fut traduit en russe par le compositeur et directeur d’orchestre Stepan Degtyaryov (Степан Аникиевич Дегтярев) (1766-1813) et publié en 1805 à Saint-Pétersbourg, sous le titre « Правила гармонические и мелодические для обучения всей музыке » (Санкт-Петербург, 1805) ou en abrégé Гармонические правила. L'œuvre fut dédiée au tsarévitch Paul Petrovich et bénéficia du mécénat de ce dernier.

Les pensées de Manfredini quant à la méthode correcte d’enseignement du chant suscitèrent une critique vigoureuse d’un autre théoricien de la musique de l’époque, Giovanni Battista Mancini (1714 à Ascoli Piceno–1800 à Vienne). Dès lors, dans une seconde édition, de 1797, beaucoup plus volumineuse, Manfredini ajoute plusieurs sections relatives au chant et au contrepoint.

Dès 1785, Manfredini devient associé et rédacteur de la revue Giornale enciclopedico, ce jusqu’à la suspension de la production du Giornale en 1789. En il y publie une revue du premier volume d’un ouvrage de Esteban de Arteaga (1747-1799), Le rivoluzioni del teatro musicale (Bologna, 1783). La réponse virulente de de Arteaga ne se laisse pas attendre, ce qui incite Manfredi à publier un ouvrage plus circonstancié, la Difesa della musica moderna (Bologne, 1788), rédigé sur deux colonnes, l’une reproduisant les commentaires de de Arteaga et l’autre indiquant ses propres réponses. Cette querelle entre les anciens et les modernes doit être analyse à la lumière des changements sociaux-culturels intervenus à cette époque, qui a vu la place et le rôle de la musique et des musiciens évoluer considérablement. Le titre de l’ouvrage de Manfredini démontre qu’il avait pleine conscience de quel parti il défendait. Manfredini a démontré par ses écrits son intérêt pour le modernisme[7].

Œuvres

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Manfredini composa de nombreux opéras, des ballets, des cantates, de la musique sacrée (inclus un requiem), des symphonies, des concertos, des quatuors à cordes et autres œuvres de musique de chambre (musica da camera).

Ses principales œuvres sont les suivantes :

Opéras composés pour la cour impériale de Russie

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Autres opéras

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  • Armida, livret : Jacopo Duranti (ou Giacomo ; ou Durandi), (1762, Moscou ; 1770, Bologne, Nuovo Pubblico Teatro).
    (Sur le poème Gerusalemme liberata (Jérusalem libérée) de Le Tasse.)
  • Artaserse, livret : Pietro Metastasio, (1772, Venise, Teatro San Benedetto) (F-Pn; P-La).

Musiques sacrées

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Autres œuvres lyriques

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  • La pace degli eroi, cantate, livret : Lazzaroni, (, Saint-Pétersbourg).
  • Il consiglio delle muse, Sérénade, livret : Giovanni Battista Locatelli, 1763, Moscou, (incertain).
  • Le rivali, cantate, livret : Lazzaroni, (1765, Saint-Pétersbourg).
  • Duos, CZ-BER.
  • Canons, I-Nc.
  • Arias.

Ballets

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  • Amour et psyché (Амур и Психея), (, Moscou).
  • Les amants réchappés du naufrage, (1766, Saint-Pétersbourg).
  • Le sculpteur de Carthage, (1766, Saint-Pétersbourg).
  • La constance récompensée, (1767, Moscou).
  • Pygmalion, (1762, Saint-Pétersbourg) (балеты « Пигмалион », 1762, Петербург) ; (incertain).

Œuvres instrumentales

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  • Concerto pour clavecin, (La Haye & Amsterdam [RISM M 350], Londres [RISM M 348, M 349]). (Rééd. A, Toni, Milan, 1957.)
  • 6 Sonates pour clavecin, 1765 [RISM M 352]. (Rééd. A. M. Pernafelli, 1975.)
  • 6 Symphonies, Venise, 1776 [RISM M 345, M 346].
  • 14 Préludes pour clavecin contenus dans les Regole armoniche, cf. infra.
  • 6 Quartetti per 2 violini, viola, violoncello, [RISM M 351].
  • Fuga per clavicembalo, D-B.

Traités sur la musique

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  • Regole armoniche (Гармонические правила), aussi connu sous Tractus Regole armoniche :
    • (it) Première édition : Regole armoniche o siene precetti ragionati per apprendere i principj della musica, il portamento della mano, e l'accompagnamento del basso sopra gli strumenti da tasto, come l'organo, il cembalo ec. ; Dedicate a Sua Altezza Imperiale Paul Petrovicz ..., Appresso G. Zerletti (Venise), 1775, 78 p. 
    • (it) 2e édition : Regole armoniche o sieno, Precetti ragionati per apprender la musica. 2. ed., corr. ed accresciuta, Adolfo Cesare (Venise), 1797, 207 pp.
    • (it) Fac simile : Vincenzo Manfredini, Regole armoniche. A facsim. of the 1775 Venice Ed. Broude (New York) (Series Monuments of music and music literature in facsimile), 1966, 78 pp.
    • (ru) Traduction russe : Stepan Degtyaryov (Степан Аникиевич Дегтярев), « Правила гармонические и мелодические для обучения всей музыке », Санкт-Петербург, 1805.
  • Giornale enciclopedico d’Italie, Naples / Bologne, divers articles, 1785-1789.
  • Difesa della musica moderna (В защиту современной музыки) :
    • (it) Vincenzo Manfredini [et Esteban de Arteaga], Difesa della musica moderna e de' suoi celebri esecutori, Stamperia di Carlo Trenti, Bologne, 1788, in-8. 207 pp.
    • (it) Fac simile : Vincenzo Manfredini, Esteban de Arteaga, Difesa della musica moderna e de' suoi celebri esecutori, Ed. Forni (Bologna) (serie Bibliotheca musica Bononiensis, n. 73), 1972, 207 pp.
    • (en) Traduction anglaise : Vincenzo Manfredini, Esteban de Arteaga, A critical translation from the Italian of Vincenzo Manfredini's Difesa della musica moderna/In defense of modern music (1788), Patricia Howard (transl.), E. Mellen Press (Lewiston, N.Y), 2002, 166 pp.

Localisation des œuvres

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(Outre les indications mentionnées entre parenthèses ci-dessus.)

Bibliographie

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  • (it) Giovanni Manfredini, Alcune notizie biografiche di Vincenzo Manfredini, manuscrit, I-Baf.
  • (it) Giovanni Manfredini, lettres manuscrites, I-Fn.
  • (en) Jean Grundy Fanelli, The Manfredini Family of Musicians of Pistoia, 1684-1803, dans Studi musicali, 26 (1997), p. 187–232.
  • David J. Buch, Magic flutes and enchanted forests : The supernatural in eighteenth-century musical theatre, The University of Chicago Press, Chicago, 2008, 450 pp.
  • (it) A. Monici, « Delle regole più essenziali per imparare a cantare », secondo un vecchio autore (Vincenzo Manfredini), dans Rivista Musicale Italiana, XVIII (1911), p. 85–94.
  • (it) A. Monici, Di un nuovo metodo per apprendere l'accompagnamento del basso secondo un vecchio autore, dans Rivista Musicale Italiana, XXIII (1916), p. 453–490.
  • (it) La musica degli antichi e la musica dei moderni : Storia della musica e del gusto nei trattati di Martini, Eximeno, Brown, Manfredini, Autori e curatori: a cura di Michela Garda, Alberto Jona, Maria Titli ; Franco Angeli Edizioni, Roma, première édition 1988, 672 p. 
    • (it) Sic ars nova nata est. La « Querelle des anciens et des modernes » nella trattatistica musicale italiana del XVIII secolo, dans « La musica degli antichi e la musica dei moderni : Storia della musica e del gusto nei trattati di Martini, Eximeno, Brown, Manfredini », (cf. supra), 1989, p. 9–41.
    • (it) Il microscopio della ragione : Arteaga e Manfredini nella « querelle » tra antichi e moderni, introduzione a Vincenzo Manfredini, Difesa della musica moderna e de' suoi celebri esecutori (1787), edizione critica curata e annotata da Michela Garda, dans « La musica degli antichi e la musica dei moderni : Storia della musica e del gusto nei trattati di Martini, Eximeno, Brown, Manfredini  », (cf. supra), 1989, p. 591–615.
  • (it) Il ms 739 della Biblioteca nazionale Marciana di Venezia (1664): quali rapporti con le « Regole armoniche » di Vincenzo Manfredini (1775) ?, a cura di Raffaella Barbierato, Cremona, 1988.
  • (en) Julianne Baird, An 18th-Century Controversy About the Trill: Mancini vs. Manfredini, dans Early Music, xxv (1987), p. 36–45.
  • (it) D. Carboni, Alla corte imperiale di Pietroburgo: fortuna delle opere di Baldassarre Galuppi in Russia, Galuppiana : Venise, 1985, p. 113–126, esp. 124.
  • Robert-Aloys Mooser, Annales de la musique et des musiciens en Russie, 3 vol., Ed. Mont Blanc, Genève, 1948-51.
  • Robert-Aloys Mooser, Opéras, intermezzos, ballets, cantates, oratorios joués en Russie durant le XVIIIe siècle, Genève, 1945, 3/1964.
  • (en) Reinhard Strohm (éd.), The eighteenth-century diaspora of Italian music and musicians, Brepols Publishers, Turnhout, 2001, 356 p. 
    • (en) Marina Ritzarev (Rytsareva), Anna Porfireva, The Italian diaspora in eighteenth-century Russia, dans « The eighteenth-century diaspora of Italian music and musicians », (cf. supra).
  • (it) Enrico Fubini (ed.), Musica e cultura nel settecento Europa, EDT/Musica ed., Turin, 1986.
    • (it) Enrico Fubini, (supra) : traduit en anglais sous : Music and Culture in Eighteenth-Century Europe : a Source Book, Wolfgang Freis, Lisa Gasparonne, Michael Louis Leone (tranls.), University of Chicago Press, 1994.
  • (en) Oscar George Theodore Sonneck, Catalogue of Opera Librettos printed before 1800, 2 vol., Government printing Office, Washington, 1914.
  • (de) Jean Grundy Fanelli, Manfredini, Vincenzo, dans Die Musik in Geschichte und Gegenwart, Friedrich Blume, Ludwig Finscher ed., Kassel, 2004, p. 966–967.
  • (en) Michael Talbot, « Manfredini, Vincenzo », dans Stanley Sadie (éd.), The New Grove Dictionary of Music and Musicians, Londres, Macmillan, , 2e éd., 25 000 p., 29 volumes (ISBN 9780195170672, lire en ligne)
  • (en) Dennis Libby, Manfredini, Vincenzo, dans The Grove Dictionary of Opera, Macmilan, Londres, vol. 3, p. 182.

Notes et références

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  1. Nom et dates de Vincenzo Manfredini en russe : Винченцо Манфредини (* 22 X 1737, Пистоя, близ Флоренции ; † 5(16) VIII 1799, Петербург).
  2. Il est parfois indiqué la date du 5 août, mais il s'agit de la date exprimée dans le calendrier julien, en vigueur en Russie : le vendredi 16 août 1799 dans le calendrier grégorien correspond au vendredi 5 août 1799 dans le calendrier julien.
  3. « Alcune notizie biografiche di Vincenzo Manfredini » ; manuscrit conservé à l’Accademia Filarmonica di Bologna.
  4. D.J. Buch.
  5. Sonneck, p. 1241.
  6. Sonneck, p. 1328.
  7. Voir en particulier Talbot.

Voir aussi

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Liens externes

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