Vallée du Grand Rift

ensemble géologique africain constitué d'une série de failles, de dorsales et de rifts

La vallée du Grand Rift est le nom donné en 1894 par l'explorateur écossais John Walter Gregory[1], après son voyage en Afrique orientale britannique[2], à un ensemble géologique constitué d'une série de failles et de volcans, situé en Afrique de l'Est.

Vallée du grand rift
Géographie
Pays
Coordonnées
Longueur
4 830 kmVoir et modifier les données sur Wikidata
Géologie
Continent
Type
Comprend
Carte
Image satellite de la vallée du Grand Rift.

Également appelée rift est-africain ou « grande faille est-africaine », cette faille discontinue est constituée de plusieurs branches divisées en segments de faille, eux-mêmes divisés en ensembles plus petits, les bassins de faille. Cette complexité vaut à l'ensemble de la structure le nom de système de faille est-africain. L'association avec la faille de la mer Rouge, la faille du golfe de Suez et la faille du Levant forme le système de faille afro-arabique.

En réalité, l'ensemble de la faille tectonique s'étire en Afrique et en Asie mineure sur environ 7 000 kilomètres du nord au sud, et 30 à 100 km de largeur, du Liban jusqu'au Mozambique, en passant par la mer Rouge et les grands lacs africains[3]. Elle coupe en deux la Corne de l'Afrique : la plaque somalienne, à l'est, s'éloigne de la plaque africaine, à l'ouest. Elle se divise, au sud de l'Éthiopie, de part et d'autre de l'Ouganda. La branche occidentale (rift Albertin) s'échelonne le long des grands lacs africains, formés par l'accumulation de l'eau dans les dépressions de faille, tandis que la branche orientale (rift de Gregory) traverse le Kenya et la Tanzanie à l'est du lac Victoria, où elle forme un chapelet de lacs plus petits.

Grande faille afro-arabique sur la carte des provinces géologiques.
Schéma structural simplifié du système de faille est-africain.

Étymologie

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Rift est l'abréviation du mot anglais rift-valley : « fossé d'effondrement » en français [4].

Géologie

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Fracturation

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Du nord au sud, la faille tectonique est composée de la dépression de l'Afar (dont le golfe de Tadjourah et le bloc Danakil), la vallée de l'Awash, la vallée de l'Omo, le lac Turkana, après lequel la faille africaine se sépare en deux branches, formant les grands lacs africains à l'ouest et de petits lacs à l'est du lac Victoria, pour se réunir plus au sud dans le lac Malawi et la vallée de la Shire, au sud du Malawi.

La vallée du Grand Rift, la mer Rouge et le golfe d'Aden correspondent aux limites de trois plaques divergentes, limites disposées en étoile à partir d'un point triple localisé dans l'Afar[5]. La mer Rouge et le golfe d'Aden, qui séparent la plaque arabique de l'Afrique, sont des failles océanisées. Le tripoint de l'Afar, qui relie les trois structures, est une zone volcanique majeure, traversée par de nombreuses failles normales.

La fracturation est-africaine a débuté durant l'Oligocène, il y a au moins 25 millions d'années[6], et l'effondrement a entraîné dans les nombreux lacs ainsi formés (lac Kivu, lac Tanganyika, lac Malawi, etc.) une importante sédimentation lacustre (jusqu'à 8 000 m). La vitesse d'ouverture est de l'ordre de 1 cm/an et diminue vers le sud. Les deux branches de la faille sont reliées par une zone de fracturation importante, le linéament d'Assoua. Le Kilimandjaro et le mont Kenya sont situés à l'intersection entre la branche orientale et ce linéament.

Quand la faille s'élargit, son altitude diminue en raison de la subsidence thermique et tectonique. La dépression de l'Afar est l'une des régions les plus basses du monde : le lac Assal a une altitude de 153 mètres sous le niveau de la mer, ce qui est le point le plus bas du continent africain[7].

Si la fracturation se poursuit, la grande faille est-africaine peut engendrer une mer à trois branches[8], séparant l'Arabie, la plaque africaine, et une plaque somalienne insulaire à l'Est.

Activité volcanique

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La vallée du Grand Rift connaît une intense activité volcanique, d'une grande complexité que l'on ne voit nulle part ailleurs.

On peut noter quelques-uns des principaux volcans qui se trouvent le long de la faille (du nord au sud) :

Le Kilimandjaro et le mont Kenya, respectivement symboles de la Tanzanie et du Kenya, sont des volcans éteints.

Préhistoire

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Principaux sites à Australopithèques et Paranthropes sur le continent africain.

Historique

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Depuis 1959, la vallée du Grand Rift a livré de nombreux fossiles d'Hominina, qui ont fait avancer la connaissance de l'histoire évolutive de la lignée humaine[9]. La grande faille est-africaine présentait toutes les conditions requises pour créer, conserver, et livrer des fossiles. Les hautes terres à érosion rapide ont rapidement rempli la vallée de sédiments, créant un environnement favorable à la préservation des vestiges fossiles. Des millions d'années d'activité tectonique (fracturation et volcanisme) et de sédimentation relativement rapide ont enfoui, préservé et fait ressurgir à la surface les restes d'espèces qui habitaient jadis la région.

Si le premier hominine connu est décrit par Raymond Dart en 1925 en Afrique du Sud, de nombreux fossiles d'homininés et d'humains archaïques ont été depuis mis au jour le long de ce système de failles, par Louis et Mary Leakey à partir de 1959 dans les gorges d'Olduvaï, en Tanzanie, par Camille Arambourg et Yves Coppens en 1967 dans la vallée de l'Omo[10], par Donald Johanson et Yves Coppens à partir de 1973 dans la vallée de l'Awash, en Éthiopie, avec notamment Lucy, un squelette partiel d'Australopithecus afarensis daté de 3,18 millions d'années, et par Richard et Meave Leakey autour du lac Turkana, au Kenya, dans les années 1980 et 1990[11].

En 2007, deux espèces d'homininés ont été découvertes en Afrique de l'Est : Chororapithecus abyssinicus (8 Ma), trouvé dans l'Afar, en Éthiopie, probablement apparenté au Gorille, et Nakalipithecus nakayamai (10 Ma), trouvé au Kenya, qui serait peut-être un Hominini[12].

East Side Story

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La vallée du Grand Rift a longtemps été considérée par la communauté scientifique comme le berceau de la lignée humaine[13], car de nombreux fossiles d'hominines préhumains y ont été mis au jour. La découverte de Toumaï au Tchad en 2001 a toutefois remis en cause ce schéma[14].

Une théorie concernant l'apparition de la lignée humaine faisait jouer un rôle de premier plan à la formation de la grande faille africaine. Connue sous le nom d'East Side Story, elle a été proposée par A. Kortlandt[15], puis popularisée par Yves Coppens à partir de 1982[16],[17]. La formation de la faille aurait fini par conduire à une différenciation climatique et environnementale majeure entre la région située à l'ouest, humide et boisée, et la région située à l'est, beaucoup plus sèche et occupée par la savane. À partir d'une souche commune, deux lignées auraient divergé, aboutissant à l'ouest aux chimpanzés arboricoles, et à l'est aux premiers Hominina puis aux Australopithèques, groupe probablement à l'origine du genre Homo. La sélection de la bipédie serait une adaptation à la savane.

Ce modèle au départ séduisant a été remis en cause par le constat d'une locomotion encore largement arboricole des Australopithèques, et par les découvertes au Tchad d'Australopithecus bahrelghazali (en 1995) et de Sahelanthropus tchadensis (en 2001), 2 500 km à l'ouest du rift, par des missions dirigées par Michel Brunet[18]. L'émergence de la sous-tribu des Hominina apparaît aujourd'hui aux paléoanthropologues comme un processus bien plus complexe que la théorie développée au début des années 1980 par Yves Coppens.

Les découvertes de fossiles en Afrique du Sud, en Afrique de l'Est le long de la grande faille est-africaine, et au Tchad, s'expliquent en partie par un biais géologique et taphonomique. En effet, dans de nombreuses régions d'Afrique, la faible sédimentation, le couvert forestier actuel qui donne des sols acides, l'érosion et d'autres facteurs en ont empêché la fossilisation, la conservation, ou la mise au jour. Mais il est probable que de nombreuses régions d'Afrique aient été peuplées d'homininés dès le Pliocène[19].

Principales régions fossilifères

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En descendant le long de la grande faille est-africaine du nord vers le sud, plusieurs régions se succèdent qui ont livré de nombreux fossiles humains ou préhumains, accompagnés ou non de vestiges lithiques :

Néolithique

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Les régions de la grande faille est-africaine ont été à l'origine de quelques-unes des plus anciennes cultures agraires, agropastorales et pastorales d'Afrique[20]. Elles ont en effet été le foyer de domestication et de diversification de plantes cultivées (café, teff, khat, sorgo, éleusine[21]), comme l'ont montré les travaux du botaniste russe Nikolaï Vavilov depuis les années 1920[22].

Références

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  1. (en) John Walter Gregory, « Contributions to the physical geography of British East Africa », Geogr. J. London, vol. 4,‎ , p. 295
  2. Bernard Roussel, Le Rift est-africain. Une singularité plurielle, IRD Éditions, (lire en ligne), p. 15
  3. (en) Dona J. Stewart, The Middle East Today. Political, Geographical and Cultural Perspectives, Taylor & Francis, , p. 25.
  4. Le Petit Robert
  5. Jacques Debelmas, Georges Mascle et Christophe Basile, Les grandes structures géologiques, Dunod, (lire en ligne), p. 105.
  6. Maxime Lambert, « Vallée du Rift africain : une nouvelle chronologie », sur maxisciences.com,
  7. André Laudouze, Djibouti, nation-carrefour, Karthala, , p. 196.
  8. Bernard Roussel, op. cit. p. 17
  9. (en) « Great Rift Valley Ecosystem – UNESCO World Heritage Centre », sur whc.unesco.org (consulté le )
  10. Gallay, A. (dir.) (1999), Comment l'Homme ? À la découverte des premiers Hominidés d'Afrique de l'Est, Paris, Errance « Géo-Découverte », 408 p.
  11. (en) Gibbons, « Profile : Michel Brunet : One Scientist's Quest for the Origin of Our Species », Science, vol. 298, no 5599,‎ , p. 1708–1711 (PMID 12459568, DOI 10.1126/science.298.5599.1708)
  12. (en) Seward Liz, « Fossils belong to new great ape », BBC News London,
  13. Paulette Déribéré, Maurice Déribéré, L'Éthiopie, berceau de l'humanité, Société continentale d'éditions modernes illustrées, , p. 40
  14. Bernard Wood, « Le buissonnant rameau humain », Pour la Science, no 445,‎ , p. 35
  15. (en) Kortlandt, A. (1972) - New perspectives on ape and human evolution, Amsterdam, Stichting voor Psychobiologie.
  16. Yves Coppens (1983), Le singe, l'Afrique et l'Homme, Paris, Fayard, 148 p.
  17. (en) Yves Coppens (1994), « East Side Story, the origin of Humankind », Scientific American, vol. 270, no 5, p. 88-95.
  18. Michel Brunet (1997), « Origine des hominidés : East Side Story… West Side Story… », Géobios, M.S. no 20, p. 79-83.
  19. Joseph Ki-Zerbo, Méthodologie et préhistoire africaine, UNESCO, , p. 527.
  20. Bernard Roussel, op. cit. p. 230
  21. (en) J. Gozalbez Esteve, D. Cebrian Flores (2002) « The Land of Ethiopia », in Touching Ethiopia, Shama Books, Addis Ababa, Ethiopia.
  22. (en) Vavilov, N.I. (1992), Origin and Geography of Cultivated Plants. Articles and lectures of Vavilov 1924–1940, Cambridge University Press

Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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