Utilisateur:Kokoyaya/"Au temps pour moi" vs. "Autant pour moi"
je recherche une expression que j'ai vu écrite de deux façons
Au temps pour moi Autant pour moi.
Quelqu'un sait il comment on l'écrit et dans le cas où c'est "au temps" quelle est son origine ?
Merci
- --Kokoyaya 26 oct 2004 à 14:36 (CEST)
Au temps pour moi! C'est ainsi que l'on s'excuse parfois auprès des autres pour avoir fait une erreur, et c'est ainsi que l'on doit l'écrire cette expression. "Au temps" fait partie du vocabulaire équestre, militaire, sportif et musical; cela signifie qu'il faut revenir au temps où devait commencer un mouvement. (source: "le petit livre du français correct" de Jean-Joseph Julaud , édition First, prix 2€90)
- Voici l'avis de Claude Duneton, un expert s'il en est des expressions françaises, paru dans sa rubrique "le plaisir des mots" du Figaro littéraire.
- Je lis dans un petit ouvrage (*) - utile et fort bien fait, mais non sans faille de Jean-Pierre Colignon, préfacé par Bernard Pivot, l'injonction suivante: « Il faut écrire au temps pour moi! » (et non « autant pour moi ») parce que cette expression fait référence au commandement militaire, ou bien à l'ordre donné par un professeur de gymnastique, par un chef d'orchestre, par un maître de ballet, et incitant à revenir - parce qu'il y a erreur- au premier mouvement d'une suite de positions, de mouvements. » Logique, is not it ? Très satisfaisant pour l'esprit !... L'ennui c'est qu'il s'agit d'une information complètement fantaisiste, une pure construction de l'esprit, justement.
- Trente ans passés à décortiquer les expressions françaises m'ont appris à me méfier des « explications » brillantes d'allure, des assauts de logique qui ne sont fondés sur aucun texte, aucune pratique réelle de la langue. On ne trouve nulle part cette histoire imaginaire de commandement « Au temps! », ni à l'armée (qui a pourtant donné « En deux temps trois mouvements ») ni dans les salles de gym.
- Surtout pas chez les chefs d'orchestre : des musiciens qui travaillent reprennent à telle mesure, pas au « temps », c'est saugrenu! Colignon a rêvé cela, ou l'a cru avec beaucoup de logique apparente, en effet, donc de vraisemblance. Il ajoute du reste avec cohérence, dans une déduction impeccable: « Au sens figuré, très usuel, on reconnaît par là qu'on a fait un mauvais raisonnement », etc. Belle édification, qui repose sur un mirage.
- Autant pour moi est une locution de modestie, avec un brin d'autodérision. Elle est elliptique et signifie: « Je ne suis pas meilleur qu'un autre, j’ai autant d’erreurs que vous à mon service: autant pour moi. » La locution est ancienne, elle se rattache par un détour de pensée à la formule que rapporte Littré dans son supplément: « Dans plusieurs provinces on dit encore d'une personne parfaitement remise d'une maladie: il ne lui en faut plus qu'autant (...) elle n'a plus qu'à recommencer. »
- Par ailleurs, on dit en anglais, dans un sens presque analogue, so much for... « Elle s'est tordu la cheville en dansant le rock. So much for dancing! (Parlez-moi de la danse !) So much, c'est-à-dire autant. C'est la même idée d'excuse dans la formulation d'usage: « Je vous ai dit le « huit » ? Vous parlez d'un imbécile! Autant pour moi : c'est le dix qu'ils sont venus, pas le huit. » Le « temps » ici n'a rien à voir à l'affaire. Du reste on dit très rarement « autant pour toi », ou « autant pour lui », qui serait l'emploi le plus « logique » s'il y avait derrière quelque histoire de gesticulation. Par les temps qui courent, j'ai gardé pour la fin ma botte secrète, de quoi clore le bec aux supposés gymnastes et adjudants de fantaisie dont jamais nous n'avons eu nouvelles.
- Dans les Curiositez françoises d'Antoine Oudin publié en l'an de grâce 1640, un dictionnaire qui regroupe des locutions populaires en usage dès le XVIe - soit bien avant les chorégraphes ou les exercices militaires- on trouve: Autant pour le brodeur, « raillerie pour ne pas approuver ce que l'on dit ». Aucune formule ne saurait mieux seoir à ma conclusion :
- M. Colignon, qui fait la pluie et le soleil auprès des correcteurs professionnels, devrait bien publier un correctif ad hoc sur le mauvais temps qu'il nous fait par le biais de ce canular orthographique. Perseverare serait en l'occurrence proprement démoniaque!
- (*) L'orthographe, c'est logique de Jean-Pierre Colignon, Col. Les dicos d'or de Bernard Pivot
Spedona 27 oct 2004 à 00:36 (CEST)
- Grevisse, dans Le Bon usage mentionne cette histoire de mannoeuvres millitaires (pas musicales) comme une hypothèse plausible et considère les deux orthographes comme valables bien qu'il les distingue : Je me suis trompé, au temps pour moi - servez lui une bière et autant pour moi. Finalement, "je me suis gourré, au temps pour moi" est inutilement pédant mais "je me suis gourré, autant pour moi" fait ignare. Il veut mieux utiliser la forme : "je me suis gourré, ça arrive à tout le monde" ou "je me suis gourré, chiotte" :-D Jean-no
- D'instinct (ou par logique de sens), j'utilisais autant pour moi, et je trouve l'explication de Claude Duneton cité par Spedona bien plus convaincante (et logique) que toutes celles qui poussent pour un au temps pour moi. --Pontauxchats | ✉ 27 oct 2004 à 09:33 (CEST)
- Je n'y connais rien au sujet, mais l'explication de Claude Duneton me semble limpide et tellement logique. Le fameux "Au temps pour moi", qui revient très souvent comme sujet de débat, ressemble énormément à un canular. Dans les forums de littérature, c'est souvent un jeu de trouver des explications humouristiques et décalées à des expressions courantes. J'imagine qu'avec la perte du contexte, un ancien document de ce type pourrait bien induire en erreur un linguiste, et transformer un canular en une explication "plausible". À mes yeux ignares, l'origine de "autant pour moi" tombe tellement sous le sens que toute autre tentative d'explication relève de la sodomie diptérienne... 157.136.33.105 27 oct 2004 à 13:12 (CEST)
- Je ne trouve pas l'explication de Dunneton très limpide, ni ses références : en 1640, les gens écrivaient n'importe comment, quand aux anglo-saxons, la liste de faux amis qu'ils ont crée est ahurissante... Est-ce que nous devons considérer que "éventuellement" doit avoir le sens de "finalement" parce que "eventually" signifie "finalement" en anglais ? Je veux bien qu'on conteste "au temps" et même, que l'on refuse la locution parce qu'elle a une explication un peu trop nette, ceci dit le vocabulaire millitaire a eu une influence sur la langue (voir l'origine du "pas" de "ne...pas") mais cette influence est mal documentée (les millitaires ne sont pas des écrivains). Grevisse considère "au temps" comme la forme correcte mais signale que ce "au temps" est peut-être une altération de "autant". Bref on s'en sort pas ;-) Jean-no
- En général, les ordres sont listés dans un manuel ; les militaires ne sont pas des écrivains, mais ils adorent les manuels de toute sorte. Si un ordre au temps avait existé, il doit être possible d'en retrouver la trace, soit dans ces manuels, soit dans la littérature. archeos 27 oct 2004 à 19:56 (CEST)
- Mais si on se fie à l'origine officielle, ce n'est pas un truc qui s'écrit, même dans les manuels !
- Je n'y connais rien au sujet, mais l'explication de Claude Duneton me semble limpide et tellement logique. Le fameux "Au temps pour moi", qui revient très souvent comme sujet de débat, ressemble énormément à un canular. Dans les forums de littérature, c'est souvent un jeu de trouver des explications humouristiques et décalées à des expressions courantes. J'imagine qu'avec la perte du contexte, un ancien document de ce type pourrait bien induire en erreur un linguiste, et transformer un canular en une explication "plausible". À mes yeux ignares, l'origine de "autant pour moi" tombe tellement sous le sens que toute autre tentative d'explication relève de la sodomie diptérienne... 157.136.33.105 27 oct 2004 à 13:12 (CEST)
Il est vrai que cette théories des origines militaires de l'expression ressemble beaucoup à un canular, une légende fumeuse justifiannt une orthographe incorrecte, et qui a été prise au sérieux a posteriori. Il est curieux de voir l'académie française se ranger derrière cette etymologie!!! peut être que reconnaitre qu'ils se sont trompés serait pour eux un aveu d'échec insupportable?
- "Au temps pour les crosses" est une expression militaire signifiant qu'un des soldat n'était pas dans le temps en faisant un mouvement, et l'opération doit être reprise depuis le début. Cette expression est reprise par Georges Courteline dans Le train de 8h47 en 1888 (malheureusement, ce livre n'est pas encore sur wikisource). Au sens figuré, "au temps pour moi" signifie que celui qui parle, reconnaît que la faute vient de lui. L'expression apparaîtrait dans pas mal de livres de soldats de la 1ère guerre mondiale. Par contre l'orthographe la plus constatée est "Autant pour moi" bien qu'elle soit fause. --Vspaceg (d) 13 mars 2008 à 11:59 (CET)
- Je suis tombé par hasard sur cette sous-page et je dois avouer que je n'ai pas lu tous les débats ci-dessus. Mais il me semble que les deux sont acceptés. --TwøWiñgš Boit d'bout 7 avril 2008 à 12:32 (CEST)