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Politiques monétaires
modifierLorsque les États-Unis sont entrés dans la grande récession à la fin 2007, le taux d'escompte de la FED se situait à 6,25 %. En décembre 2008, il a été réduit à 0, 5 % avec un taux des fonds fédéraux de zéro[1]. Ainsi, pour injecter des liquidités supplémentaires dans l'économie, avec des taux d'intérêt très bas, voire négatifs, les banques centrales se sont tournés vers des méthodes dites "non-orthodoxes". Basé sur l'expérience japonaise en 1995[2], en novembre 2008 la FED a lancé QE1 (("quantitative easing", en anglais) ou d'assouplissement quantitatif) en achetant 100 milliards de $ des titres adossés à des hypothèques par mois pendant 17 mois[3]. Selon la Banque d'Angleterre, cette mesure est l'équivalent moderne de la planche à billet[4]. Ainsi, la Banque centrale se met à acheter des bons du trésor (ce qui revient à prêter à l'État) et d'autres titres financiers :
- elle met donc de l'argent en circulation dans l'économie
- elle augmente ainsi les réserves du secteur bancaire
QE1 a été considéré comme un succès en soutien des politiques de relance et en facilitant le recours à l'emprunt par les États. Ainsi, il a été suivi par trois autres programmes, qui ont pris fin avec QE4 en Octobre 2014, après l'achat cumulatif des obligations d'une valeur de $ 4,5 trillions de dollars (25 % du PIB par rapport de 5 % en moyenne)[5]. À ce date, la FED a annoncé qu'il était approprié de maintenir la fourchette cible de son taux directeur entre 0 % à 0,25 % "pour un temps considérable" après la fin de son programme d'achat d'actifs des fonds fédéraux ..., surtout si l'inflation projetée continue à fonctionner en dessous de 2 % -- l'objectif à plus long terme du comité, et à condition que les anticipations d'inflation à long terme restent bien ancrées.
Des programmes de QE similaires ont été lancés par la Banque d'Angleterre (2009), la Banque du Japon (2013) et de la BCE (mars 2015). Ces mesures ainsi que des taux de dépôt de la banque centrale négative en mars 2016 (au Danemark, le Japon, la Suède, la Suisse et la BCE[6]) ont donné lieu à des rendements faible records, voire par fois négatifs, sur les obligations d'État.
Bien que la reprise dans les économies développées a amélioré modestement depuis 2009-10, de nombreux pays (surtout en Europe et les pays producteurs de matières premières) sont toujours face à des forts obstacles de l'héritage de la crise financière mondiale. De plus, la faible performance de l'économie mondiale au cours des dernières années a soulevé des préoccupations d'une "nouvelle normalité" de croissance plus faible[7],[8]. La faiblesse généralisée de l'investissement dans le monde entier, non seulement retient la croissance actuelle, mais réduit également le potentiel de croissance dans l'avenir[9]. Pourtant, en Décembre 2015, la FED a relevé son taux d'intérêt de référence entre 0,25 et 0,50 pour cent - marquant la première augmentation de près d'une décennie, marquant peut-être le "début de la fin"[10],[11].
Les effets de QE
modifierPour juger les effets, sans parler du succès de QE est extrêmement difficile. En effet, le QE est une partie de la politique monétaire, dans un mix d'autres politiques (y compris la politique budgétaire, les réformes structurelles et la régulation prudentielle) qui doivent être combinées intelligemment pour atteindre le succès[12]. De plus, à en juger le succès dépend de quels critères on utilises, y compris les résultats par rapport à un scénario "de base de politique inchangées", et leurs effets sur la confiance et les anticipations d'inflation du public[13].
Par exemple, en 2001 la Banque du Japon a été la première Banque centrale à attaquer les forts pressions déflationnistes et un taux de change réel surévalué par des politiques monétaires "non orthodoxes". Dans l'éventualité, ces mesures se sont avérées insuffisantes pour empêcher une décennie perdue[14]. Avec le recul, ces mesures «non orthodoxes» étaient trop peu et trop tard. En effet, pour ressusciter une économie moribonde, une politique budgétaire beaucoup plus expansionniste était nécessaire, complétée par des réformes structurelles difficiles mais nécessaires[15].
En fait, basé sur l'expérience japonaise, la politique QE plus agressive de la FED a été jugé par le FMI[16],[17], la Banque d'Angleterre, la FED et la BCE, d'avoir réussi à arrêter la crise financière de 2009. Cela dit, d'autres objectifs de la FED d'inverser les pressions déflationnistes et ramener "l'inflation de base" à environ 2 pour cent n'a pas encore été atteint après 6 ans - bien que le taux de chômage a chuté à des niveaux avant la récession. Ce paradoxe est en grande partie un reflet du rebond timide dans l'investissement privé et des taux de croissance de l'économie réelle, bien inférieurs à la moyenne post-récession. Au même temps, en dépit de ces améliorations, la taille du bilan de la FED en 2015 a quintuplé à 4,5 trillion de dollars, soit 25 pour cent du PIB et la dette publique totale[18]. Bien que les taux d'intérêt extrêmement bas réduisent les frais de service de la dette publique, ils soulèvent au même temps des questions difficiles sur la solvabilité des compagnies d'assurance-vie, les fonds de pension et les systèmes de sécurité sociale, sans parler de la question épineuse d'une stratégie de sortie éventuelle et l'augmentation des risques systémiques[19].
Avec le recul, le QE offre un plancher implicite (un "put" en anglais) aux prix des actifs - soulevant des inquiétudes importantes sur l'aléa moral[20],[21]. En effet, la création monétaire massive a largement coulé dans l'augmentation forte des prix des actions et immobilier, qui a bénéficié de façon très disproportionnée les plus riches de la société, en aggravant considérablement les écarts de revenus d'après-guerre. Par conséquent, le QE soulève de sérieuses questions concernant la façon dont cette situation atypique sera normalisée sans grands effets sociaux-économiques[22]. Finalement, dans le cas d'une future récession mondiale, une nouvelle relance budgétaire ou monétaire sera limitée par la forte augmentation de la dette des pays de l'OCDE entre 2008 à 2015 (de 79,9 % à 111,2 % du PIB)[23]. Ces exemples illustrent la complexité de l'assouplissement quantitatif, et la difficulté d'évaluer les points de vue très divergents sur ses succès et échecs, mentionné ci-dessous.
D'abord, les liquidités injectées n’ont pas toujours été utilisées de façon appropriée. Lorsque l’État américain a fourni de nouveaux capitaux aux banques en échange d’actions privilégiées une partie de cet argent a été utilisée pour financer des bonus, des rachats d’action et des dividendes au risque d’aggraver nettement le risque de futurs problèmes[24]. Cette politique a aussi des points plus négatifs. Par exemple Patrice Blanc le directeur de Newedge, un des leaders mondiaux du courtage des dérivés, craint « la formation d'une nouvelle bulle sur les marchés »[25] à la suite d'une part des taux très bas et d'autre part d'opérations de carry trade sur le dollar.
Toutefois, pour l'économiste Daniel Cohen l'excès de liquidités ne viendrait pas principalement des politiques monétaires et notamment celle d'Alan Greenspan qui est souvent vue comme à l'origine de la présente crise financière. Elle tiendrait surtout à deux facteurs plus structurels : le fort excédent commercial chinois et les pays producteurs de matières premières qui placent une très grande part de leurs excédents sur les marchés financiers[26]. D'autres, comme Paul Grignon, auteur de L'Argent Dette, considèrent que les banques privées ont pris le contrôle de la quasi-totalité de l'émission de l'argent. La crise proviendrait donc, dans un système basé sur l'usure, du caractère impayable de la dette, les banquiers ne créant que l'argent du prêt, et pas l'argent nécessaire pour rembourser les intérêts. Par conséquent, le système serait condamné dès le départ à la faillite. Il serait donc nécessaire pour les États de mettre fin à l'indépendance des banques centrales et de reprendre le contrôle de la création monétaire.
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- Massimo Prandi, « Newedge identifie la formation d'une nouvelle bulle sur les marchés », Les Échos du 21 octobre 2009.
- Voir Article de Claire Gatinois dans Le Monde du 3 novembre 2009.