Stagire
Stagire (en grec ancien d'abord Στάγειρος / Stágeiros puis τὰ Στάγειρα / tà Stágeira) est une ancienne cité grecque située en Chalcidique, sur le golfe Strymonique (actuellement située au nord-ouest du territoire de la municipalité de Stagira-Akanthos). Elle est principalement connue pour être le lieu de naissance d'Aristote.
Stagire | ||
Reste d'un mur. | ||
Localisation | ||
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Pays | Grèce | |
Périphérie | Macédoine-Centrale | |
Dème | Aristotélis | |
Région antique | Chalcidique | |
Type | Ville | |
Coordonnées | 40° 31′ 45″ nord, 23° 45′ 12″ est | |
Géolocalisation sur la carte : Grèce
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Stagire est désormais un village du dème d'Aristotélis, district régional de Chalcidique, en Macédoine-Centrale, Grèce.
Selon le recensement de 2011, la population du village s'élève à 352 habitants[1].
Histoire
modifierSelon la tradition rapportée par Thucydide, Stagire est une des quatre colonies fondées par Andros, une île des Cyclades[2],[3], vers 650 av. J.-C. ; les trois autres[4] sont Argilos[5],[6], Acanthos[7],[8] et Sane[9],[10]. Eusèbe de Césarée donne la 2e année de la XXXIe olympiade[11] — soit l'an [5] — comme année de fondation de Stagire et d'Acanthos[12].
Dès le VIe siècle, Stagire frappe des statères d'argent[13]. En , elle est occupée par le roi achéménide Xerxès Ier. Elle entre dans la Ligue de Délos[2]. Elle relève du district de Thrace[2] et s'acquitte d'un tribut annuel de 1 000 drachmes[2]. En , suivant l'exemple d'Acanthos[14], Stagire et Argilos[15],[16] se révoltent et rejoignent le Spartiate Brasidas[2],[17] ; Sane, la quatrième colonie andrienne, reste fidèle à la ligue[15]. En , Athènes envoie le démagogue Cléon comme stratège pour prendre la cité, mais celui-ci échoue[2],[18]. À la paix de Nicias, Stagire figure — avec Argilos, Acanthos, Skolos, Olynthe and Spartolos — au nombre des six poleis membres de la ligue de Délos dont le traité définit les conditions de leur adhésion[19] : elle est déclarée autonome[2].
Selon Dion Chrysostome, Stagire est membre de la Ligue chalcidienne, fondée en -432[2].
Le célèbre philosophe Aristote y est né en 384 av. J.-C.
Philippe II, alors aux prises avec les Chalcidiens, réussit à prendre la cité en 348 et la fait détruire[20],[21]. En hommage à Aristote, natif de Stagire et précepteur de son fils Alexandre, Philippe restaure la cité quelques années plus tard.
À l'époque de Strabon, Stagire est active mais a été déchue de son rang de cité[22].
Localisation
modifierLa cité a été localisée à 40° 35′ 25″ N, 23° 47′ 36″ E[23] au lieu-dit Liotopi, au sud-est de l'actuelle Olympiada[23],[24],[25].
Sa localisation a été rendue possible grâce à un fragment de la Géographie de Strabon[23],[26]. Cependant, elle est longtemps restée incertaine.
William Martin Leake et Esprit-Marie Cousinéry la plaçaient à Stavrós[27]. George Ferguson Bowen avait proposé de la localiser à l'actuel village de Stagira[28]. Adolf Struck (en)[29] et Eugen Oberhummer (de) l'y avait cherchée[28]. Michael Zahrnt (de) avait proposé de la localiser à Olympiáda[28].
Emblème
modifierLe sanglier (κάπρος) est l'emblème de la cité[30]. Il apparaît sur son monnayage[30]. Le linteau de la porte principale du rempart de la cité est orné d'un relief représentant un lion et un sanglier[30]. Le sanglier rappelle le nom de son port et de la petite île qui lui fait face[31].
Stagire et Aristote
modifierAristote est né à Stagire en 384 av. J.-C. Le philosophe est surnommé pour cette raison le « Stagirite » ou le « philosophe de Stagire ». Selon la tradition rapportée par la Vita Marciana, après la mort d'Aristote à Chalcis, les habitants de Stagire ramenèrent le corps ou les cendres de leur bienfaiteur[32],[33],[34] ; érigèrent un autel sur sa tombe[32],[33] ; appelèrent le lieu de sa sépulture Aristoteleion[32] qu'ils utilisèrent ensuite comme lieu de réunion de leur conseil[32],[35],[33] ; appelèrent un mois de l'année en son honneur[32],[36],[37],[38] ; et célébrèrent un festival annuel à sa mémoire[32],[36],[37],[38]. La cité abrite peut-être son tombeau[39].
Site archéologique
modifierLe site archéologique est situé sur un promontoire composé de deux collines séparées par une dépression[40].
La ville est entourée d'un mur construit en différents types de maçonnerie[40] : d'environ 2 mètres d'épaisseur, sa longueur est de 1,5 à 2 kilomètres[40] ; le début de sa construction est daté de vers [40].
Sur la colline septentrionale, trois sanctuaires archaïques ont été découverts[40] : le premier, proche de la mer, pourrait avoir été dédié à Déméter[40] ; le second est probablement un Thesmophorion[40] ; le troisième, proche du sommet de la colline, est un temple dédié à une divinité qui n'a pas été identifiée[40]. La colline septentrionale abrite aussi les vestiges d'un complexe de l'époque byzantine dans lequel ont été découverts les restes du mur archaïque avec un linteau daté du VIe siècle av. J.-C. et portant une inscription, elle-même datée du IVe siècle av. J.-C.[40].
Dans la dépression entre les deux collines, l'agora a été découverte[40]. S'y trouve un portique (stoa) en appareil pseudo-isodome et daté du IVe siècle av. J.-C.[40]. Près de l'agora, se trouve une voie pavée de 3 mètres de large[40].
Au sommet de la colline méridionale se trouvent les vestiges de l'acropole triangulaire[40].
Sur les deux collines, des vestiges d'habitations ont été découverts[13].
Galerie
modifier-
Murs de la fin de la période classique
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Porte ouest des remparts
-
Vestiges d'une stoa de la période classique
Notes et références
modifier- (grk) ELSTAT, « Απογραφή Πληθυσμού - Κατοικιών 2011. ΜΟΝΙΜΟΣ Πληθυσμός » [« Recensement de la population et des logements de 2011. Population permanente »] [xls], sur www.statistics.gr [lien archivé] (consulté le ).
- Flensted-Jensen 2004, no 613, p. 844, col. 1.
- Thucydide, 4.88.2 et 5.6.1.
- Reger 2004, no 475, p. 737, col. 1.
- Flensted-Jensen 2004, no 554, p. 820, col. 2.
- Thucydide, 4.103.3.
- Flensted-Jensen 2004, no 559, p. 823, col. 1.
- Thucydide, 4.84.1.
- Flensted-Jensen 2004, no 600, p. 839, col. 2.
- Thucydide, 4.109.3.
- Tiverios 2008, p. 53.
- Eusèbe de Césarée, 95b.
- Flensted-Jensen 2004, no 613, p. 845, col. 1.
- Flensted-Jensen 2004, no 559, p. 823, col. 2.
- Flensted-Jensen 2004, no 554, p. 821, col. 1.
- Thucydide, 4.103.4.
- Thucydide, 4.88.2.
- Thucydide, 5.6.1.
- Hansen et Nielsen 2004, p. 56, col. 1.
- Diodore de Sicile, XVI, 52, 9.
- Plutarque, 7.
- Counillon 1998, notes, no 15, p. 58.
- Parisot 2015, 3e partie, chap. 1er, I, D, no 102, p. 433.
- Tiverios 2008, p. 61.
- Tsigarida 2011, p. 151.
- Strabon, VII, frag. 35E.
- Papazoglou 1988, p. 435, n. 140.
- Papazoglou 1988, p. 436, n. 140.
- Struck 1907.
- ChronARG 2005, no 07.23, p. 495.
- BE 1998, no 275, p. 623.
- Chroust 1965, p. 116.
- VL, 19.
- VM, 18.
- Haake 2020, p. 189.
- VL, 17.
- VM, 17.
- VV, 17.
- https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/archeologie/20160527.OBS1370/le-tombeau-du-philosophe-aristote-a-t-il-ete-decouvert.html
- Flensted-Jensen 2004, no 613, p. 844, col. 2.
Voir aussi
modifierSources littéraires antiques
modifier- [Diodore de Sicile] Diodore de Sicile, Bibliothèque historique [détail des éditions] (BNF 12008253, LCCN n85057476).
- [Eusèbe de Césarée] Eusèbe de Césarée, Chronique (BNF 13778122, LCCN n85012921).
- [Plutarque] Plutarque, Vies parallèles [détail des éditions] (BNF 12008377, LCCN n79031980), Alexandre-César (BNF 12351678), Alexandre.
- [Strabon] Strabon, Géographie [détail des éditions] (BNF 12194250, LCCN n84007209).
- Thucydide, La Guerre du Péloponnèse [détail des éditions] [lire en ligne] (IV, 882, 2 ; V, 6, 1 et 18,5)
- Vies d'Aristote :
- [VL] Vita Latina
- [VM] Vita Marciana
- [VV] Vita Vulgata
Bibliographie
modifier- [Chroust 1965] (en) Anton-Hermann Chroust, « A brief analysis of the Vita Aristotelis of Diogenes Laertius (DL, V, 1-16) », L'Antiquité classique, t. XXXIV, no 1, , p. 97-129 (OCLC 1006207223, DOI 10.3406/antiq.1965.1432, JSTOR 41649132, lire en ligne ).
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- [Tiverios 2008] (en) Michalis Tiverios, « Greek colonisation of the northern Aegean », dans Gocha R. Tsetskhladze (éd. et préf.), Greek colonisation : an account of Greek colonies and other settlements overseas, Leyde et Boston, Brill, coll. « Mnemosyne / supplementum » (no 193 / 2), , 1re éd., XVIII-566 p., 16,2 × 24,6 cm (ISBN 978-90-04-15576-3, EAN 9789004155763, OCLC 494261970, BNF 40927672, DOI 10.1163/ej.9789004155763.i-566, SUDOC 131417150, présentation en ligne, lire en ligne), chap. 1er, p. 1-154.
- [Tsigarida 2011] (en) Bettina Tsigarida, « Chalcidice », dans Robin J. Lane Fox (éd. et introd.), Brill's companion to ancient Macedon : studies in the archaeology and history of Macedon, BC – AD, Leyde et Boston, Brill, coll. « Brill's companions to classical studies », (réimpr. ), 1re éd., XIII-642 p., 15,5 × 23,5 cm (EAN 9789004206502, OCLC 800642661, BNF 45550862, DOI 10.1163/9789004209237, SUDOC 154372617, présentation en ligne, lire en ligne), chap. 7, p. 137-158.
- [BE 1998] « Bulletin épigraphique », Revue des études grecques, t. 111, , p. 566-713 (DOI 10.3406/reg.1998.4341, lire en ligne [PDF]).
- [ChronARG 2005] « Chronique archéologique de la religion grecque (ChronARG) », Kernos, no 18, , p. 475-530 (DOI 10.4000/kernos.1835, lire en ligne [PDF]).
- [Struck 1907] (de) Adolf Struck, Makedonische Fahrten, t. Ier : Chalkidike, Vienne et Leipzig, A. Hartleben, coll. « Zur Kunde der Balkanhalbinsel : Reisen und Beobachtungen » (no 4), , 1re éd., 88-[1] p., 24 cm (OCLC 494458117, BNF 31415044, SUDOC 130881368, lire en ligne ).
Articles connexes
modifierLiens externes
modifier- (en) Kostas Sismanidis et Kostas Papastathis, « Stageira » , ministère de la Culture (Grèce).
- (en) « Ancient Stagira » , dème d'Aristotélis.
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Ressource relative à la géographie :