Shas

parti politique israélien religieux de droite
(Redirigé depuis Shass)

Le Shas (en hébreu : ש"ס) est un parti politique israélien traditionnellement séfarade et religieux ultra-orthodoxe créé en 1984. Le président du Shas est Aryé Dery.

Shas
(he) ש״ס
Image illustrative de l’article Shas
Logotype officiel.
Présentation
Président Aryé Dery
Fondation 1984
Siège Jérusalem, Israël
Positionnement Extrême droite[1],[2],[3]
Idéologie Conservatisme religieux
Populisme[4]
Économie mixte
Défense des intérêts des Juifs Mizrahim et Séfarades[5],[6]
Affiliation internationale Organisation sioniste mondiale
Couleurs Noir, azur et blanc
Site web http://shas.org.il/
Représentation
Députés
11  /  120

Le nom Shas vient des initiales de Sefardim Shomréi Tora (Séfarades orthodoxes pour la Torah).

Histoire

modifier

L'essor du parti Shas s'inscrit dans une tendance sensible à partir des années 1980 en Israël, la "communautarisation", ou "la mobilisation politique de l’ethnicité[7]", dont on trouve un autre exemple dès les années 1990 avec le succès des partis russophones, porté par les Juifs originaires de l’ex-URSS. "De tels phénomènes auraient été inimaginables dans les années de fondation de l’État où la puissance de l’idéologie de la fusion nationale disqualifiait toute entreprise de mobilisation sur une base ethnique. Il n’en va plus de même désormais, à l’heure où la stratégie d’absorption dans un creuset commun a montré d’évidentes limites[7]" écrit Alain Dieckhoff.

Les séfarades sont traditionnellement assez attachés à la pratique religieuse du judaïsme. Depuis l'indépendance, une partie de cet électorat a émis des votes de contestation face aux appareils politiques dominés par les ashkénazes, en soutenant des listes ethniques telles que l'Association yéménite, l'Union séfarade ou le Tami marocain. En effet, les candidats séfarades étaient très rares dans l'ensemble des partis politiques. Ces partis ethniques furent cependant éphémères et durèrent rarement plus d'une législature.

Une partie des immigrants séfarades a placé ses enfants dans le système scolaire ultra-orthodoxe. En conséquence, une population séfarade ultra-orthodoxe est apparue, qui votait généralement pour l'Agoudat Israel, parti ultra-orthodoxe d'origine européenne. Le refus de ce parti de présenter des candidats séfarades a conduit à la création du Shas en 1984, avec la bénédiction d'un des rabbins mitnagdim les plus influents de l'époque, le rav Elazar Shach.

Les dirigeants du Shas ont su élargir leur électorat au-delà des cercles ultra-orthodoxes pour attirer les séfarades de tout niveau de pratique religieuse[8]. Il est rapidement devenu une sorte de parti de la fierté séfarade, implanté dans tout le pays mais particulièrement puissant dans les petites villes périphériques.[réf. nécessaire]

Le Shas a été victime d'importants scandales. Aryé Dery, dirigeant du parti, a même purgé une peine de prison après une condamnation pour corruption.

Par ailleurs, le rabbin Ovadia Yosef, ancien dirigeant spirituel du parti, était familier des déclarations controversées : il affirma ainsi lors d'un cours hebdomadaire que les jeunes victimes juives de la Shoah étaient des âmes réincarnées qui avaient ainsi expié les fautes commises dans des existences antérieures[9]. En , Ovadia Yossef a déclaré : « Le Seigneur retournera les actions des Arabes contre eux-mêmes, épuisera leur semence et les exterminera. » son porte-parole précisant qu'il ne parlait que des Arabes terroristes et non des Arabes en général[10] et a réitéré en 2010 envers les Palestiniens et Mahmoud Abbas[11] et en 2012 envers l'Iran[12].

Structure

modifier

Depuis le décès du Rav Ovadia Yosef en 2013, Shas est dirigé par un conseil des sages dominé par le rabbin Shalom Cohen (en) jusqu'à sa mort le 22 août 2022[13].

La gestion courante du parti est dévolue à son chef politique qui est Aryé Dery depuis 2013[14].

Le succès du Shas s'explique par l'efficacité de son réseau d'organisations caritatives, sociales et scolaires qui soutiennent les populations séfarades démunies. Ces populations constituent la majorité des habitants des villes de développement du Néguev et de Galilée. Le Shas a ainsi développé un réseau scolaire destiné aux Séfarades originaires des anciens pays soviétiques.

Programme politique

modifier
 
Aryé Dery, président du parti depuis 2013.

Le Shas se définit comme un parti religieux, attaché à la pratique religieuse et à la souveraineté juive en Israël[15].

Il défend aussi une certaine politique sociale. Il insiste sur la sauvegarde des services sociaux et au fonctionnement des Yeshivot. Il souhaite réduire le chômage et encourager les employeurs à créer de nouveaux emplois. Shas souhaite apporter une aide particulière aux femmes ou à toute personne par l'octroi d'aide aux entreprises pour leur promotion professionnelle. Shas projette d'établir une charte sociale et économique afin de créer sur le marché un dénominateur commun. Le parti souhaite aussi corriger ce qu'il considère comme « les discriminations socio-économiques continues contre les séfarades d'Israël »[16].

Au niveau constitutionnel, le Shas se base sur le principe selon lequel l'État d'Israël est l'État du peuple juif. Ainsi, Shas veille au respect de l'identité juive dans toutes ses décisions, et refuse l'instauration d'un État laïc, et du mariage civil.

L'adhésion au sionisme, historiquement très réservé comme chez tous les haredim, n'a cessé de se renforcer, jusqu'à l'annonce en 2010 de la volonté d'adhérer à l'Organisation sioniste mondiale[17]. À cette occasion, un représentant du Shas, Yaakov Margi, a déclaré « nous nous définissons comme un parti sioniste, en tant que Juifs pratiquants qui aiment Israël[17] ».

Concernant le rapport aux Palestiniens, le Shas est ambivalent. En effet, la loi religieuse lui impose de lutter pour le maintien de l'ensemble de la terre d'Israël sous souveraineté juive[8]. Elle lui permet cependant d'appuyer des concessions territoriales si ces dernières permettent de sauver des vies[18]. Le Shas est formellement opposé à la construction et à l'habitation de colonies d'implantations juives dans les territoires conquis lors de la Guerre des Six Jours, hormis dans Jérusalem-Est mais il est opposé à l'établissement d'un État palestinien[8]. Sa position sur la question des Territoires occupés varie souvent en fonction de ses intérêts politiques et des coalitions gouvernementales dans lesquelles il se trouve[15].

Résultats électoraux

modifier
Année Chef de file Voix % Sièges Rang Gouvernement
1984 Yitzhak Haim Peretz 63 605 3,1
4  /  120
6e Peres I (1984-1986), Shamir II (1986-1988)
1988 107 709 4,7
6  /  120
3e Shamir III (1988-1990), Shamir IV (1990-1992)
1992 Aryé Dery 129 347 4,9
6  /  120
6e Rabin II (1992-1993), Opposition (1993-1996)
1996 259 796 8,7
10  /  120
3e Netanyahou I
1999 430 676 13,0
17  /  120
3e Barak (1999-2001), Sharon I (2001-2003)
2003 Eli Yishaï 258 879 8,2
11  /  120
4e Opposition
2006 299 054 9,5
12  /  120
3e Olmert
2009 286 300 8,5
11  /  120
5e Netanyahou II
2013 331 868 8,7
11  /  120
5e Opposition
2015 Aryé Dery 241 613 5,7
7  /  120
7e Netanyahou IV
04/2019 258 275 6,0
8  /  120
3e Pas de gouvernement
09/2019 330 199 7,4
9  /  120
4e
2020 352 842 7,7
9  /  120
4e Netanyahou V
2021 316 008 7,2
9  /  120
3e Opposition
2022 392 964 8,2
11  /  120
5e Netanyahou VI

Députés

modifier

25e Knesset (depuis 2022)

modifier
  1. Aryé Dery
  2. Ya'akov Margi
  3. Yoav Ben-Tzur
  4. Michael Malchieli
  5. Haim Biton
  6. Moshe Arbel
  7. Yinon Azulai
  8. Moshe Abutbul
  9. Uriel Buso
  10. Yossi Taieb
  11. Avraham Betzalel

Notes et références

modifier
  1. (en) « Religiously Oriented Parties and Democratization », sur Google Books (consulté le ).
  2. (en) « The Hebrew Republic », sur Google Books (consulté le ).
  3. (en) « Queer Theory and the Jewish Question », sur Google Books (consulté le ).
  4. (en) Dani Filc, The Political Right in Israel : Different Faces of Jewish Populism, London/New York, Routledge, coll. « Routledge Studies on the Arab-Israeli Conflict », , 168 p. (ISBN 978-0-415-48830-3), p. 79.
  5. (en) « Guide to Israel's political parties », BBC News, (consulté le ).
  6. (en) Ishaan Tharoor, « A guide to the political parties battling for Israel’s future », sur 2015/03/13, The Washington Post, (consulté le ).
  7. a et b Alain Dieckhoff. Israël : la pluralisation de l’identité nationale In : Nationalismes en mutation en Méditerranée orientale [en ligne]. Paris : CNRS Éditions, 2002 (généré le ). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/editionscnrs/2402>. (ISBN 9782271078131). DOI : 10.4000/books.editionscnrs.2402
  8. a b et c Encyclopædia Britannica Online, « Shas », Encyclopædia Britannica
  9. Alexandra Schwartzbrod, « Le rabbin Yossef dérape sur la Shoah », sur Libération,
  10. (en) pour l'anéantissement des Arabes
  11. « Le chef spirituel du parti Shass souhaite l'anéantissement des Palestiniens », Radio France internationale, .
  12. (en) « Shas spiritual leader calls on Jews to pray for annihilation of Iran », sur Haaretz, .
  13. « Décès du rabbin Shalom Cohen, chef spirituel du parti Shas, à l’âge de 91 ans », sur The Times of Israel,
  14. (en) Aryeh Deri restored as Shas leader, Eli Yishai is out
  15. a et b « L’extrême droite en Israël », sur www.lesclesdumoyenorient.com
  16. (en) « Shas », Knesset (consulté le ).
  17. a et b Haviv Rettig Gur, « Consternation surrounds Shas joining Zionist group », The Jerusalem Post, 28 mai 2010.
  18. (en) Michael Berenbaum, Encyclopaedia Judaica, vol. 18, , p. 419–420.

Voir aussi

modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie

modifier
  • (en) Peter Hirschberg, The world of Shas, American Jewish Committee, 1re éd., 36 p. (ASIN B0006E8M50)
  • Richard Zrehen, « Le Shas : une révolution culturelle et politique », Outre-Terre, no 4,‎ (ISBN 2-7492-0374-0, OCLC 5531063255, lire en ligne, consulté le )
  • Marc Hecker, « Les déterminants du poids des partis religieux en Israël », Confluences Méditerranée, no 57,‎ , p. 177-190 (ISBN 9782296012660, lire en ligne)

Articles connexes

modifier

Liens externes

modifier