Royaume mossi
Les royaumes mossi désignent plusieurs royaumes africains qui se sont succédé dans le bassin versant de la Volta Blanche (actuel Burkina Faso) et ont dominé le cours supérieur de la Volta à partir du XIe siècle ou entre les XVe siècle et XVIe siècle, selon l'historien Michel Izard, jusqu'à l'arrivée des Français en 1896 et à la création de la Haute-Volta en 1919.
Histoire
modifierLe territoire du Burkina Faso actuel a été parcouru par de nombreuses migrations. À partir du XIe ou du XIIe siècle, les premiers royaumes mossis se sont constitués : le Gourma, le Mamprousi, le Dagomba, le Yatenga, le royaume de Boussouma et le royaume de Ouagadougou. Ce dernier devint rapidement le plus influent. Il était dirigé par le Mogo Naba Kouda, à la fois roi et magicien, descendant de la princesse Kouda Yennenga, mère mythique du peuple mossi.
Au XIIIe et au XIVe siècles, ces royaumes s'opposèrent aux grands empires de la boucle du Niger (Mali et Songhai) dont ils n'hésitaient pas à attaquer et razzier les marges, quand ils ne s'enfonçaient pas plus profondément. La puissance de leurs armées permit aux royaumes mossis de préserver l'essentiel de leur indépendance. Toutefois, à la fin du XVe siècle, l'Empire songhaï établit sa suprématie sur la boucle du Niger, mettant fin aux chevauchées des Mossis.
Jaloux de leur pouvoir, les rois mossis s'opposèrent toujours à une unification du pays mossi. Mais ces royaumes présentaient une remarquable cohésion sociale et religieuse et une stabilité politique exceptionnelle, se maintenant jusqu'à la conquête française, à la fin du XIXe siècle.
Les Mossis participèrent peu au commerce transsaharien, car les grands flux d'échanges contournaient la région. Les Mossis furent donc beaucoup moins touchés que leurs voisins par la traite des esclaves et l'islam ne s'implanta pas. À la veille de la colonisation française, le centre du territoire était contrôlé par la confédération des royaumes mossis regroupant quatre ensembles politiques, le Yatenga, le Wogodogo (Ouagadougou), le royaume de Boussouma et le royaume de Tenkodogo. À l'est avait été édifié le royaume de Gourma, et l'ouest, dominé par les souverains dioulas de Kong au XVIIIe siècle, était disputé entre plusieurs royaumes.
À l'heure actuelle, il existe toujours cinq royaumes traditionnels mossi distincts : Tenkodogo, Fada, Ouahigouya, Ouagadougou et Boussouma.
Mossi / Moosse / Moose
modifierEn français on utilise plutôt le terme « mossi », alors qu'en langue moré (mooré), on dit « moosse » (pluriel de « moaga »). Le vocable a connu une évolution sémantique. « Mooro » ou « Mogho » a d'abord désigné l'herbe ; puis les gens qui habitent la brousse c'est-à-dire loin de chez eux pour qualifier les descendants de la princesse Yennenga qui a fui son royaume pour habiter loin ; ensuite les incirconcis qu'étaient les Mossis par opposition aux musulmans.
Liste des Moro Nabas de Ouagadougou
modifierN° | Roi | Filiation | Période | Règne |
---|---|---|---|---|
1 | Ouédraogo | fils de Rialé et de Yennenga | vers 1132 | Fondateur |
2 | Zoungrana | fils de Naba Ouédraogo | 1132–1182 | 50 ans |
3 | Oubri | fils de Naba Zoungrana | 1182–1244 | 62 ans |
4 | Naskiemdé | fils d'Oubri | 1244–1286 | 42 ans |
5 | Nasbiré | fils d'Oubri | 1286–1307 | 21 ans |
6 | Soarba | fils d'Oubri | 1307–1323 | 16 ans |
7 | Gninemdo | fils de Soarba | 1323–1337 | 14 ans |
8 | Koudoumié | fils de Gninemdo | 1338–1358 | 21 ans |
9 | Kouda | fils de Naba Koudoumié | 1358–1401 | 43 ans |
10 | Dawegma | fils de Naba Kouda | 1401–1409 | 8 ans |
11 | Zoetre Bousma | fils de Naba Kouda | 1409–1441 | 32 ans |
12 | Niandfo | fils de Naba Zoetre Bousma | 1441–1511 | 70 ans |
13 | Nakiem (dit Nakiembzanga) | fils de Naba Niandfo | 1511–1541 | 30 ans |
14 | Namegué | fils de Naba Nakiem | 1541–1542 | 1 ans |
15 | Kiba | fils de Naba Namegué | 1542–1561 | 19 ans |
16 | Kimba | fils de Naba Kiba | 1561–1582 | 21 ans |
17 | Coabga | fils de Naba Kimba | 1582–1599 | 17 ans |
18 | Guirba | fils de Naba Coabga | 1599–1605 | 6 ans |
19 | Zanna | fils de Naba Guirga | 1605–1633 | 28 ans |
20 | Ouri | fils de Naba Zanna | 1633–1659 | 26 ans |
21 | Motiba | (usurpateur) | 1659–1666 | 7 ans |
22 | Warga | fils de Naba Ouri | 1666–1681 | 15 ans |
23 | Zombré | fils de Naba Warga | 1681–1744 | 63 ans |
24 | Kom Ier | fils de Naba Zombré | 1744–1762 | 18 ans |
25 | Sagha Ier | fils de Naba Kom Ier | 1762–1783 | 21 ans |
26 | Doulougou | fils de Naba Sagha Ier | 1783–1802 | 19 ans |
27 | Sawadogo | fils de Naba Doulougou | 1802–1834 | 32 ans |
28 | Karfo | fils de Naba Doulougou | 1834–1842 | 8 ans |
29 | Baongo Ier | fils de Naba Doulougou | 1842–1850 | 8 ans |
30 | Koutou | fils de Naba Baongo 1er | 1850–1871 | 21 ans |
31 | Sanem | fils de Naba Koutou | 1871–1889 | 18 ans |
32 | Wobgho | fils de Naba Koutou | 1889–1897 | 8 ans |
33 | Siguiri | fils de Naba Koutou | 1897–1905 | 8 ans |
34 | Kom II | fils de Naba Sigiri | 1905–1942 | 37 ans |
35 | Sagha II | fils de Naba Kom II | 1942–1957 | 15 ans |
36 | Kougri | fils de Naba Sagha II | 1957–1982 | 25 ans |
37 | Baongo II | fils de Naba Kougri et de Koudpoko | 1982– | 41 ans |
La durée des règnes des Moro Nabas n'est connue d'une façon certaine que depuis 1897. Toutefois les griots de la cour impériale sont détenteurs d'une tradition qui attribue à une année près la durée de chaque règne depuis l'origine comme repris dans le tableau ci-dessus. Cependant on estime désormais que le légendaire Nédéga vivait vers 1400 et que l'union de sa fille Yennenga avec un chasseur mandé est l'illustration de l'acculturation encours à cette époque. Dans ce contexte les règnes des premiers Moro Nabas se placent dans le XVe siècle[2] :
- vers 1435–1465 : Naba Ouedraogo ;
- vers 1465–1480 : Naba Zoungrana ;
- vers 1495–1517 : Naba Oubri ;
- vers 1517–1540 : les fils d'Oubri dont Nasbiré ;
- vers 1540–1566 : Naba Koudoumié ;
- vers 1566–1593 : Naba Kouda.
Moro Naba Wobgho, alors connu sous le nom de Boukary, selon un dessin publié dans le Voyage de Binger de 1887 à 1889, une somme de près de 1000 pages, publiée en 1892 par la Société des Africanistes (fac-similé disponible sur le site de la BNF)
Liste des Rois (Dima) du royaume de Boussouma
modifier- 1 : Naaba Nabigswẽndé, fils de Naaba Koudoumié
- 2 : Naaba Tirita, frère de Naaba Koudoumié
- 3 : Naaba Maando, Rimbila (prince) de Wogdogo
- 4 : Naaba Pakãndé, Rimbila de Wogdogo
- 5 : Naaba Nakẽedba, Rimbila de Wogdogo
- 6 : Naaba Tiri, Rimbila de Wogdogo
- 7 : Naaba Tirit Yamba, Rimbila de Wogdogo
- 8 : Naaba Komba, Rimbila de Wogdogo
- 9 : Naaba Pasindi, Rimbila de Wogdogo
- 10 : Naaba Pasind Yamba, Rimbila de Wogdogo
- 11 : Naaba Namonogdo, Rimbila de Wogdogo
- 12 : Naaba Kuka, Rimbila de Wogdogo
- 13 : Naaba Komisgma, Rimbila de Wogdogo
- 14 : Naaba Koomdaogo, Rimbila de Wogdogo
- 15 : Naaba Réẽgré, Rimbila de Wogdogo
- 16 : Naaba Roobo, Rimbila de Wogdogo [3].
Les souverains de cette dynastie œuvrent pour l'agrandissement du riungu. Les villages de Yimiugu, de Nungu et de Kõkẽ à Saburi deviennent des vassaux de Busma. Successivement Busma étend sa domination sur Pensa vers 1515, Guibtẽnga vers 1670, Piuktẽnga vers 1670, Digilla vers 1723.
L'année 1723 marque un tournant dans l'histoire du riungu de Busma avec le déplacement du siège du pouvoir politique à Wayugiya. Contrairement à la première vague des nanambsé sur lesquels les informations sont rares, celle des rimdamba de Wayugiya, plus récente, est mieux connue. Elle compte 15 nanambsé allant de 1723 à nos jours dont 9 qui n'ont pas connu la pénétration coloniale. La liste des rimdamba de Wayugiya se présente comme l'indique le tableau suivant :
Les rimdamba de Wayugiya
modifier- 17 : Naaba Kẽega, fils de Naaba Roobo
- 18 : Naaba Pugla, fils de Naaba Kẽega
- 19 : Naaba Gègemdé, fils de Naaba Pugla
- 20 : Naaba Tãnga, fils de Naaba Pugla
- 21 : Naaba Piiga, fils de Naaba Tanga
- 22 : Naaba Saaga, fils de Naaba Tanga
- 23 : Naaba Karfo, fils de Naaba Piiga
- 24 : Naaba Sigri, fils de Naaba Saaga
- 25 : Naaba Ligdi, fils de Naaba Sigri
Les rimdamba de la pénétration coloniale à nos jours :
- 26 : Naaba Koom, fils de Naaba Ligidi
- 27 : Naaba Sanem, fils de Naaba Sigri
- 28 : Naaba Koabga, fils de Naaba Sigri
- 29 : Naaba Kutu, fils de Naaba Koabga
- 30 : Naaba Wobgo, fils de Naaba Kutu
- 31 : Naaba Sõõré (ou Naaba Sonré), fils de Naaba Wobgoo
- 32 : Naaba Sigri, fils de Naaba Sonré
Royaumes traditionnels
modifierIl a existé jusqu'à 19 royaumes traditionnels mossi, dont :
- Royaume mossi de Gurunsi (en)
- Royaume mossi de Gwiriko (en)
- Royaume mossi de Liptako (en), Émirat du Liptako
- Royaume mossi de Tenkodogo (en) (Tenkodogo) depuis 1120
- Royaume mossi de Wogodogo (Wogodogo / Ouagadougou) depuis 1441
- Royaume mossi du Yatenga depuis 1333
- Royaume gurma mossi de Bilanga (en)
- Royaume gurma mossi de Bilayanga (en)
- Royaume gurma mossi de Bongandini (en)
- Royaume gurma mossi de Con (en)
- Royaume gurma mossi de MacaKoali (en)
- Royaume gurma mossi de Piela (en)
- Royaume gurma mossi de Nungu (en)
Notes et références
modifier- Yamba Tiendrebeogo dit Naba Abgha, « Histoire traditionnelle des Mossi de Ouagadougou », Journal de la Société des Africanistes, t. 33, fasc. 1, , p. 7-46 (ISSN 0399-0346, e-ISSN 1957-7850, DOI 10.3406/jafr.1963.1365).
- Sous la direction d'Hubert Deschamps Histoire de l'Afrique noire Presses universitaires de France, Paris 1970, tome I p. 295-296.
- SAWADOGO (D.S), 1994, op. cit., p. 62.
Annexes
modifierBibliographie
modifier- Benoit Beucher, Manger le pouvoir au Burkina Faso. La noblesse mossi à l'épreuve de l'Histoire, Karthala, 2017, 348 p. (ISBN 978-2-8111-1693-4).
- Y. Tiendrebeogo, Histoire traditionnelle des Mossi de Ouagadougou, article, Journal des Africanistes, 1963, 33-1, pp. 7-46.
- Michel Izard, Introduction à l'histoire des royaumes mossi, 476 p., CNRS-CVRS, Paris Ouagadougou, 1970, Gallica (BNF).
- Madiega Yénouyaba Georges, NAO, Burkina Faso : Cent ans d'histoire, 1895–1995, 2 tomes.
Articles connexes
modifier- Histoire du Burkina Faso
- Empire du Mali
- Civilisations et cultures antiques
- Royaumes sahéliens (entre 700 et 1900)
- Émirat du Liptako (1809–1897)