Rapport Obin
Le rapport Obin, officiellement titré « Les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires », est remis au gouvernement français en par Jean-Pierre Obin, inspecteur général de l'Éducation nationale. Il pointe l'influence grandissante de l'islamisme dans les écoles françaises[1],[2],[3].
Rapport Obin | |
Titre original | Les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires |
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Rédigé le | |
Auteur(s) | inspection générale de l’Éducation nationale |
But | Évaluer l'état de la laïcité dans les établissements scolaires |
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Le rapport est remis un an après le livre de témoignages de Georges Bensoussan, Les Territoires perdus de la République, et trois mois après la promulgation de la loi sur les signes religieux dans les écoles publiques françaises, qui vise notamment à interdire le voile dans les écoles françaises[4] ; il est rapidement « enterré »[1].
En , la suite de l'assassinat de Samuel Paty, un professeur d'histoire-géographie, par un islamiste, ce rapport est à nouveau régulièrement cité dans les médias[5],[6],[7],[8],[9],[10].
Contenu du rapport
modifierAperçu général
modifierLe rapport décrit le phénomène de séparatisme religieux, notamment chez les jeunes musulmans français. Ainsi, il pointe que « les manifestations d'appartenance religieuse, individuelles ou collectives », ont tendance « à se multiplier et à se diversifier, avec une rapidité et une dynamique fortes » ; que « dans certains quartiers », elles peuvent « affecter tous les domaines de la vie personnelle, familiale et sociale ». Mais aussi que l'institution scolaire est « impliquée dans ce mouvement d'ensemble », au-delà de « l'émotion médiatique » suscitée par la prolifération du voile islamique dans l'espace public[1],[2],[11].
Le rapport donne de nombreux exemples de dérives constatés dans les salles de cours.
Laïcité contestée et propos négationnistes
modifierDans certains cours d'histoire-géographie, certains élèves musulmans « refusent d'étudier l'édification des cathédrales, ou d’ouvrir le livre sur un plan d’église byzantine, ou encore d’admettre l’existence de religions préislamiques en Égypte ou l’origine sumérienne de l’écriture ». Le rapport pointe également que « la laïcité est contestée comme antireligieuse en éducation civique » ; « les propos négationnistes sont fréquents » concernant la Shoah[12],[13].
En cours de mathématiques, certains élèves refusent « d'utiliser tout symbole ou de tracer toute figure (angle droit, etc.) ressemblant de près ou de loin à une croix »[1]. Dans un lycée professionnel, « des élèves, la totalité parfois, refusent de cuisiner du porc et de manipuler et goûter la viande non consacrée »[1]. Vestimentairement, « les cas les plus nombreux concernent des élèves souhaitant affirmer leur appartenance à la religion musulmane[11],[14]. »
D'un point du vue territorial, le rapport pointe que certains quartiers français sont « “tombés aux mains” des religieux et des associations qui les contrôlent »[15].
Autocensure et connivence du corps enseignant
modifierLe rapport constate que « la réaction la plus répandue des enseignants est sans doute l’autocensure » ; ce qu'il estime « largement sous-estimée » par le manque de communication de ces derniers. Le rapport prend par l'exemple des cours de reproduction en biologie, parfois plus enseigné car jugé trop impudique par les élèves[16],[14],[15],[17],[18].
De manière surprenante, certains professeurs, « devant l'abondance des contestations d'élèves s'appuyant sur le Coran [recourent] au livre sacré pour tenter de légitimer l'enseignement. » Ainsi, certains professeurs s'appuient sur des élèves inscrits en école coranique pour faire cours, les utilisant comme « garants de l'orthodoxie musulmane, afin d'invalider les contestations venant d'autres élèves[19]. » Dans un autre exemple, le rapport affirme que certains professeurs utilisent directement le Coran :
« le comble est sans doute atteint avec ce professeur enseignant avec le Coran sur son bureau […] et qui y recourt dès que des contestations se manifestent. On peut alors parler d'une véritable théologisation de la pédagogie[19]. »
Réception
modifierD'après Le Monde[20], le rapport Obin est enterré à la suite d'un conseil de Dominique Borne au nouveau ministre de l'Éducation nationale, François Fillon :
« J’ai signalé au cabinet du ministre que ce rapport n’était pas un bon travail. Il tirait des conclusions générales d’une soixantaine de cas particuliers, ce qui est très peu. »
Le rapport n'est publié qu’en , à la suite de fuites dans la presse.
François Fillon, interrogé en 2020 par Le Parisien, se défend au contraire d'avoir enterré le rapport, mais juge les préconisations de l'ouvrage « assez minces » et déclare que celles-ci ont été mises en oeuvre, citant en exemple « l'interdiction des signes religieux et la circulaire sur la laïcité de mai 2004 »[21].
Jean-Pierre Obin déclare pour sa part à BFM TV que le rapport a bel et bien été laissé de côté par François Fillon, qui « avait d’autres chats à fouetter », comme la « loi sur les symboles religieux à l'école publique » et l’épisode des otages de Bagdad. D'après lui, les ravisseurs des journalistes français exigeaient l'abrogation de cette loi et « il fallait donc faire profil bas »[22].
Notes et références
modifier- Jules Pecnard, « Repli identitaire dans les écoles: qu'y avait-il dans le rapport Obin de 2004? », sur BFMTV (consulté le ).
- Jean-Paul Brighelli, « Brighelli - Le projet Aladin : les Lumières contre l'extrémisme », sur Le Point, (consulté le ).
- « Islamisme à l’école : retrouver le sens des proportions », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- Jean-Paul Brighelli, « Brighelli : refaisons de l'école un sanctuaire laïque ! », sur Le Point, (consulté le ).
- Vincent Mongaillard et Modifié Le 19 Octobre 2020 À 21h35, « Islamisme à l’école : l’histoire du rapport ignoré », sur leparisien.fr, (consulté le ).
- Clément Pétreault, « Attentat de Conflans – Jean-Pierre Obin : « D'autres séismes sont à venir » », sur Le Point, (consulté le ).
- Laureline Dupont et Eric Mandonnet, « François Fillon : "Nous sommes dans une guerre de longue durée" », sur LExpress.fr, (consulté le ).
- claude lelièvre, « Guerres scolaires et faux-monnayeurs de la laïcité », sur Club de Mediapart (consulté le ).
- Guillaume Erner, « Où s’apprend la laïcité ? Avec Michel Winock et Jean-Paul Delahaye », sur France Culture (consulté le ).
- « Bernard Ravet : "A force de tolérer l'intolérable, la République engendre l'intolérable" », sur LExpress.fr, (consulté le ).
- Céline Pina, « Céline Pina : “Une note pointe le communautarisme à l'école… quel scoop !” », sur Le Figaro.fr, (consulté le ).
- Marc-Olivier Bherer, « L’inquiétude des spécialistes face à l’antisémitisme en France », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- « Intolérable antisémitisme! », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- Marie-Estelle Pech, « À l'école, les conflits liés à la religion s'étendraient », sur Le Figaro.fr, (consulté le ).
- « Laïcité à l’école : les enseignants en première ligne », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- Le Point magazine, « Laïcité : ce que l'école ne veut pas savoir », sur Le Point, (consulté le ).
- Marie Caroline Missir, « Laïcité: "Les enseignants sont démunis" », sur LExpress.fr, (consulté le ).
- « Compliqué d'enseigner la Shoah quand on trouve n'importe quoi sur le net », sur L'Obs (consulté le ).
- Jean-Pierre Obin, Les Signes et Manifestations d'Appartenance Religieuse dans les Etablissements Scolaires, , 38 p. (lire en ligne).
- Samuel Blumenfeld et Dominique Perrin, "Les Territoires perdus de la République, retour sur près de vingt ans de polémique autour de la laïcité à l’école", Le Monde, .
- Par Vincent Mongaillard Le 19 octobre 2020 à 21h17 et Modifié Le 20 Octobre 2020 À 07h51, « Le rapport sur les signes d’appartenance religieuse à l’école «n’a pas été enterré», se défend Fillon », sur leparisien.fr, (consulté le )
- « Repli identitaire dans les écoles: qu'y avait-il dans le rapport Obin de 2004? », sur BFMTV (consulté le ).