Pramana
Pramāṇa (sanskrit IAST; devanāgarī: प्रमाण) « moyen de connaissance valide, légitime[1]», est un terme de philosophie indienne (hindoue, bouddhique, jaïne, etc.) qui correspond dans la philosophie occidentale à l'épistémologie.
Le pramāṇa forme un membre d'un tripode (tripuṭi) orbitant autour de la Pramā (connaissance valide) : Pramātṛ (le connaisseur), Pramāņa (moyen de connaissance), Prameya (objet de la connaissance). Dans les Yoga Sūtra de Patañjali, pramāṇa est l'une des cinq sortes de Vṛtti (modification du mental)[2].
En grammaire, « pramāṇa » désigne « ce qui fait autorité, qui sert de norme ». Ainsi affirme le Mahābhāṣya : « l'usage vivant est nécessairement la norme dans l'emploi des mots »[3].
Hindouisme
modifierDifférents systèmes de philosophie hindoue acceptent différentes catégories de pramāņa.
Advaita Vedānta
modifierL'Advaita Vedānta accepte les cinq moyens de connaissance suivants :
- Pratyakṣa - perception directe au moyen des sens.
- - Les cinq sens ou organes de perception ou de connaissance (Jñānendriya) sont: l'oreille, la peau, l'œil, la langue et le nez;
- - Ceux-ci sont en corrélation avec les cinq objets de perception (Tanmātra) qui sont: le son, la sensation liée au toucher, la forme, la saveur et l'odeur[4].
- Anumāna - inférence qui est basée sur la connaissance découlant de la perception directe;
- Upamāna - analogie;
- Arthāpatti - connaissance subséquente;
- Āgama - les textes (tels les Vedas (aussi appelé Āptavākya, Śabda pramāņa).
Sāṃkhya
modifierLe Sāṃkhya accepte les trois moyens de connaissance suivants :
- Pratyakṣa - perception directe;
- Anumāna - inférence;
- Āptavacana - la parole qui fait autorité, parole digne de foi[5].
Yoga
modifierDans les Yoga Sūtra de Patañjali, pramāṇa est l'une des cinq sortes de Vṛtti (modification du mental)[2]. Il ne s'agit donc pas ici d'un "moyen-de-connaissance-droite", mais d'une "activité de connaissance droite". Il en reconnaît trois[6]:
- Pratyakṣa - perception directe;
- Anumāna - inférence;
- Āgama - défini par Vyasa, le commentateur, comme "l'activité de l'auditeur suscitée par cette parole (d'une personne de confiance, d'un maître) et dont le domaine est cet objet"[7].
Nyāya
modifierLe Nyāya accepte les quatre moyens de connaissance suivants :
- Pratyakṣa - perception directe;
- Anumāna - inférence;
- Upamāna - analogie;
- Śabda - le mot (du maître).
Vaiśeṣika
modifierLe Vaiśeṣika accepte les moyens de connaissance suivants :
Bouddhisme
modifierPour les bouddhistes, il y a deux moyens de connaissance valide : la perception directe (pratyakṣa) et l'inférence (anumāna)[8].
Les deux fondateurs de la théorie bouddhique du pramāņa sont Dignāga et Dharmakīrti.
L'inférence désigne ce qui peut être déduit de la perception directe : elle possède un degré de certitude inférieur à la perception directe[9]. Pour le bouddhisme, il n'y a pas de vérité absolue dans le relatif, ce qui compte est le caractère efficace des vérités relatives, notamment en vue de la libération individuelle.
Notes et références
modifier- Gérard Huet, Dictionnaire Héritage du Sanscrit, version DICO en ligne, entrée « pramāṇa », lire: [1]. Consulté le .
- Y.S, I,6
- Louis Renou, Terminologie grammaticale du sanskrit, Paris, 1896
- (en) The Sánkhya káriká, or Memorial verses on the Sánkhya philosophy. Ishvara Krisna, Gaudapada, traduction et préface de Henry Thomas Colebrooke. Université d'Oxford, 1837, pages 18 et 19.
- Gérard Huet, version DICO en ligne, entrée « āptavacana », lire: [2]. Consulté le .
- pratyakṣānumānāgamāḥ pramāṇāni (Y.S. I,7).
- Le Yoga-Sutra de Patanjali, suivi du Yoga-Bhashya de Vyasa, Les Belles Lettres, 2008, p.807.
- La pensée bouddhiste, Thierry Falissard, éd. Almora, 2016.
- Voir par exemple le Nalanda Sutta (SN 47,12)