Jean-Baptiste Pergolèse

compositeur italien
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Giovanni Battista Draghi dit Pergolesi en italien, Jean-Baptiste Pergolèse sous sa forme francisée, né le à Jesi, dans la province d'Ancône, dans les Marches italiennes alors partie des États pontificaux et mort le à Pouzzoles près de Naples, est un compositeur italien de la période baroque. Il est considéré comme l'un des plus grands musiciens italiens de la première moitié du XVIIIe siècle et l'un des grands représentants de l'école napolitaine de musique.

Giovanni Battista PergolesiJean-Baptiste Pergolèse
Description de cette image, également commentée ci-après
« Pergolèse compositeur de musique qui est venu à Rome le 20 mai 1734 » (Pier Leone Ghezzi - The British Museum)[1].
Nom de naissance Giovanni Battista Draghi
Naissance
Jesi,
 États pontificaux
Décès (à 26 ans)
Pouzzoles,
Drapeau du Royaume de Naples Royaume de Naples
Activité principale compositeur, maître de chapelle
Style Musique baroque
Lieux d'activité Naples
Années d'activité 1732 - 1736
Formation Conservatoire dei Poveri di Gesù Cristo
Maîtres Francesco Durante, Gaetano Greco

Œuvres principales

Portrait supposé de Pergolèse (Domenico Antonio Vaccaro ? - Museo Storico Musicale du Conservatoire San Pietro a Majella de Naples)[2].

Compositeur au talent précoce, il a réussi, malgré sa courte vie et sa brève activité, à créer des œuvres de haute valeur artistique et d'importance historique, parmi lesquelles La serva padrona, référence fondamentale pour le développement et la diffusion de l'opera buffa en Europe, L'Olimpiade, considéré comme l'un des chefs-d'œuvre des opera seria de la première moitié du XVIIIe siècle[3], et le Stabat Mater, parmi les plus importantes compositions de musique sacrée[4],[5],[6].

Biographie

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Vue des remparts de Jesi.

Si son nom lui vient de Pergola, ville de la région des Marches italiennes d’où sa famille était originaire, Giovanni Battista Pergolesi naît à 45 km plus au sud, dans la ville de Jesi, ville dont est également originaire Frédéric II, empereur du Saint-Empire romain germanique.

Enfant très doué, il est envoyé dès l’âge de douze ans au célèbre Conservatoire dei Poveri di Gesù Cristo à Naples où il est l’élève de professeurs réputés et exigeants dont Francesco Durante et Gaetano Greco.

Il y reçoit une solide formation musicale centrée sur l’apprentissage de la beauté et des difficultés, à la fois de la polyphonie utilisée dans la musique d'église et de l’opéra napolitain.

Son chef-d'œuvre de fin d'étude au conservatoire, Li prodigi della divina grazia nella conversione e morte di san Guglielmo duca d’Aquitania, donné en 1731, le rend célèbre.

Sa jeune renommée lui fait recevoir immédiatement la commande de son premier opéra pour la saison du Theatro San Bartolomeo qui commence alors : Salustia. Il aurait dû être joué en hiver de la même année, mais il est retardé à la seconde moitié du mois de à cause de la mort subite du protagoniste (le fameux castrat Nicolò Grimaldi) et ne connaît guère de succès. L'année suivante, sa comédie en musique, Lo frate 'nnamorato (Le Frère amoureux), a beaucoup plus de succès. En 1732, il devient maître de chapelle du prince Ferdinando Colonna Stigliano, écuyer du vice-roi de Naples.

Pergolèse écrit aussi des œuvres religieuses. Il compose ainsi, pour la ville de Naples qui vient d’être victime d’un violent séisme en 1732, sa grande Messe solennelle à dix voix, pour double chœur, deux orchestres et deux orgues, ainsi que des Vêpres solennelles à cinq voix. Ces allers et retours entre la musique profane et la musique sacrée sont alors fréquents pour les compositeurs de l’époque. Les compositeurs italiens font en effet jouer leurs œuvres profanes et religieuses pour un même public et avec le soutien des mêmes mécènes. Ils adaptent ainsi régulièrement leurs œuvres profanes en œuvres religieuse ou l’inverse, ce qui crée une proximité entre elles. Le jeune compositeur compose ensuite plusieurs opéras et autant d’intermezzos. En effet, ces intermèdes dans le goût napolitain sont de petites farces fort en vogue jouées pendant les entractes des opere serie pour distraire le public. Il fait jouer ainsi en 1733 La serva padrona Intermezzo per musica (La Servante maîtresse), pendant les entractes de son opéra principal, Il Prigionier' superbo. Cet intermède deviendra une œuvre autonome qui connaîtra un succès exceptionnel, tout comme Livietta e Tracollo, joué en 1734, qui connaît également une carrière indépendante de son opéra principal.

En 1735, la santé du jeune musicien commence à décliner et l’oblige à se retirer au début de l’année suivante au monastère des Capucins de Pouzzoles, près de Naples.

Il écrit pour les bons Pères du couvent des Cappuccini di Pozzuoli, et c’est vraisemblablement dans leur monastère que Pergolèse compose son Salve Regina et son célèbre Stabat Mater, qui lui avait été commandé par son mécène, le duc de Maddaloni, et qui deviendra, à titre posthume, son œuvre la plus populaire. Atteint de la tuberculose, Pergolèse meurt en 1736, à l’âge de 26 ans.

Postérité

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La Mort de Pergolèse, après avoir écrit le Stabat Mater
Dessin de Domenico Morelli - Galerie municipale d'art moderne et contemporain de Turin.

Malgré sa courte vie, la carrière de Pergolèse a été active — son œuvre comporte entre autres dix opera seria, comédies en musique et intermezzi — mais elle n’a duré que six années et ne suscita, du vivant du compositeur, qu’un intérêt modeste.

Mais, comme l’indique l’historien et voyageur Charles Burney : « … dès l’instant où sa mort fut connue, toute l’Italie manifesta le vif désir d’entendre et de posséder ses œuvres ». En effet, le mythe qui est né dans toute l’Europe autour de sa vie et de son œuvre après sa disparition représente un phénomène exceptionnel dans l’histoire de la musique. Mozart connaîtra après sa mort un engouement similaire.

Ainsi, plus de trois cents numéros d’opus lui ont été attribués dont seulement une trentaine a été reconnue par la critique moderne comme étant réellement de lui, phénomène qui témoigne de la réputation du compositeur.

Johann Sebastian Bach a adapté le fameux Stabat Mater sous le titre de « Tilge, Höchster, meine Sünden », (BWV 1083).

Plusieurs années après la disparition de Pergolèse, la représentation à Paris, le , de La Serva padrona par une troupe d’opéra comique italien déclencha la fameuse « Querelle des Bouffons » opposant les défenseurs de la musique française « ramistes » (coin du Roi) et les « rousseauistes » (coin de la Reine), partisans d’« italianiser » l’opéra français. Pour Jean-Jacques Rousseau justement, la « fraîcheur » et la « grâce » de sa musique était l’éclatante démonstration de la supériorité de l’opéra italien sur la tragédie lyrique française. Le compositeur André Grétry quant à lui déclara : « Pergolèse naquit, et la vérité fut connue ! ».

Dans son ballet Pulcinella, écrit en 1919, Igor Stravinsky s’est inspiré de certaines sonates en trio qui passaient alors pour être de Pergolèse, mais qui, depuis 1980, sont attribuées à Domenico Gallo.

Le romancier de science fiction Robert Silverberg lui a consacré une nouvelle intitulée Gianni[7] en 1982 dans laquelle il imagine que le compositeur est récupéré à son époque et transporté dans le Los Angeles du XXIe siècle, où il meurt très précocement des conséquences d'une vie dissolue…

 
« Signor Pergolèse, compositeur napolitain de musique, lequel est très bon et est mort à Naples le 7 février 1736, et avait beaucoup souffert de sa jambe gauche qui le faisait marcher en boitant »[8] (Pier Leone Ghezzi - Bibliothèque apostolique vaticane)[9].

Œuvres

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Œuvres instrumentales

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  • Coi Cappuccini di Pozzuoli
  • Concerto pour violon en si bémol (posthume)
  • Concerto pour flûte en sol majeur

Œuvres lyriques

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Œuvres religieuses

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Autographe du Stabat Mater.

Hommages

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L'astéroïde (7622) Pergolesi est nommé en son honneur[11].

À Paris, la rue Pergolèse porte son nom.

Notes et références

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  1. Cette caricature de Pergolèse est la première des deux réalisées par Pier Leone Ghezzi durant la dernière période de la vie du musicien (la seconde, illustrée ci-dessous, est évidemment dérivée de celle-ci). « Ce sont les seuls portraits authentiques qui nous soient parvenus » conviennent Toscani et Dorsi, ce dernier notant également que « les traits marqués du visage sont très éloignés des idéalisations successives » (p. 126).
  2. Ce portrait a été offert en 1874 à l'ancien Collegio di musica San Sebastiano de Naples par le musicologue napolitain Francesco Florimo (en), ami de toujours de Vincenzo Bellini depuis leur jeunesse ensemble au Conservatoire. Le tableau a longtemps été qualifié de portrait de Pergolèse et a récemment été parfois attribué à Domenico Antonio Vaccaro (e.g. De Simone, p. 6), ce qui le ferait effectivement remonter à l'époque de Pergolèse. Jusqu'à présent, cependant, cette attribution n'a pas été partagée par le site du musée du Conservatoire de Naples, où le tableau est conservé [(it) « Ritratti », sur Conservatorio di musica San Pietro a Majella (consulté le )]. D'ailleurs, en tant que portrait de Pergolèse, il n'apparaît guère compatible avec les deux caricatures de Ghezzi (également présentées dans cet article), qui sont certainement authentiques, quoique Radiciotti le juge le moins incompatible de tous les nombreux portraits imaginatifs du musicien qui nous sont parvenus (p. 260).
  3. "...one of the finest opere serie of the early eighteenth century" (Grout & Williams, p. 229).
  4. Richard Will, « Pergolesi's Stabat Mater and the Politics of Feminine Virtue », The Musical Quarterly, vol. 87, no 3,‎ , p. 570–614 (DOI 10.1093/musqtl/gdh021, lire en ligne).
  5. Michael Steinberg, Choral Masterworks: A Listener's Guide, (ISBN 9780198029212, lire en ligne), p. 115.
  6. Barry S. Brook « Pergolesi: research, publication and performance » () (lire en ligne)
    The present state of studies on Pergolesi and his times. November 18–19, 1983, Jesi, Italy
    .
  7. publiée en français dans Compagnons secrets, traduit par Jacques Chambon, Denoël, Présence du futur no 490, 1989, (ISBN 978-2-207-24933-8).
  8. Carrozzo & Cimagalli, p. 326.
  9. Il s'agit de la seconde des deux caricatures esquissées par Pier Leone Ghezzi. Fabrizio Dorsi met en évidence la « contraction prononcée de la jambe gauche, signe d'antécédents probables de poliomyélite », qui obligeait le musicien à boiter.
  10. Texte selon la publication tenue en 1737 [lire en ligne] (site Varianti all'opera par 3 universités).
  11. (en) « (7622) Pergolesi », dans Dictionary of Minor Planet Names, Springer, (ISBN 978-3-540-29925-7, DOI 10.1007/978-3-540-29925-7_6580, lire en ligne), p. 606–606.

Bibliographie

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Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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Bases de données et dictionnaires

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