Numa Sadoul

auteur, metteur en scène, acteur

Numa Sadoul, né le (77 ans) à Brazzaville (Congo), est un écrivain, comédien, metteur en scène et spécialiste de la bande dessinée français.

Numa Sadoul
Numa Sadoul
Numa Sadoul sur le tournage de Nuit de veille, en 2010.
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Biographie

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Numa Sadoul naît le à Brazzaville, au Congo, où son père, Numa Sadoul, est gouverneur de la France d'Outre-Mer. Il vit 19 ans en Afrique (Congo, Gabon, Djibouti) et à Madagascar, avant de se fixer à Cagnes-sur-mer en 1966, lorsque son père prend sa retraite. Depuis, il n'a plus quitté cette maison familiale[1]. Il étudie les lettres à l'université de Nice jusqu'à soutenir un mémoire en 1971 titré "Archétypes et concordance dans la bande dessinée moderne" et suit aussi des cours de théâtre.

Ainsi la critique de théâtre Renée Saurel écrit à son propos dans la revue Les temps modernes : « Numa Sadoul n'appartient à la négritude que par l'enfance, le cœur, le sens de la justice[2]. » Son enfance à Madagascar lui vaudra d’être invité d’honneur au salon SO BD 2021 à Paris qui présente un focus sur la littérature dessinée malgache[3]. L'importance d'avoir grandi en Afrique lui inspire en 1973 ces lignes dans un article à propos du personnage Corto Maltese et son créateur Hugo Pratt : « Dans une telle œuvre, on respire la brousse et la savane, les déserts riches de magie, les côtes où vivent des gens sans masque, on entend le rythme d'une existence à l'antipode de nos mesquineries européennes. […] En avons-nous remué des souvenirs communs, brûlants, Hugo et moi, frères d'Afrique, nostalgiques d'une jeunesse extraordinaire[4]. »

Son grand-oncle Jacques Sadoul, avant de finir sa vie comme maire de Sainte-Maxime (dans le Var), s'est rallié à la révolution communiste en Russie, dont il est devenu un participant et un commentateur important. Il est l'un des rares étrangers titulaires du grade de colonel des cosaques et d'instructeur de l'armée soviétique.

En revanche Numa Sadoul n’a pas de lien de parenté avec l'historien du cinéma Georges Sadoul, ni avec l'autre Jacques Sadoul, éditeur de la collection J'ai Lu.

Si le succès du livre Tintin et moi, entretiens avec Hergé le fait connaître du grand public à partir de 1975, la vie artistique bien remplie de Numa Sadoul- qui est insomniaque![1] - se partage depuis plus de cinquante ans entre deux mondes artistiques : celui de la scène (il écrit, met en scène, joue, pour l'opéra, et le théâtre...) et celui de l'écriture (presse, livres d'entretiens avec des auteurs de bande dessinée, mais aussi romans), avec de longues périodes où il délaisse l’une de ces pratiques au profit de l'autre.

En 2024, il continue à donner des cours de théâtre à Nice et à Saint Paul de Vence, à animer la troupe "Les Enfants Terribles"[5] et à publier de nouveaux ouvrages (dont les entretiens avec Riad Sattouf en préparation)[5],[6].

Il dévoile en 2024 son appartenance à la franc-maconnerie. [5]

Dans Franquin et moi,entretiens avec Numa Sadoul[1], paru en 2024, Il se confie à Christelle Pissavy Yvernault sur sa vie et son parcours.

Littérature (hors bandes dessinées)

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Les apprentissages de Numa Sadoul, futur écrivain, auteur dramatique et homme de presse, commencent très tôt en Afrique et à Madagascar.

Il apprend à lire à trois ans avec Tintin au Congo et Tintin en Amérique[5], à écrire à quatre, et rédige ses premiers poèmes et contes à l’âge de neuf ans. Ses poèmes et nouvelles commencent à paraître lorsqu'il a 16 ans dans le journal de son lycée à Tananarive, puis dans des revues spécialisées en poésie, la première étant Points et Contrepoints, en France, en 1964.

Durant les années 1960, certains de ses poèmes sont diffusés sur les ondes de France Culture et France Inter.

En 1970, il publie son premier livre, Oratorio, un recueil de pièces de théâtre, à l’enseigne de Pierre-Jean Oswald — à l’époque, principal éditeur de théâtre en France[1]. Un de ses premiers ouvrages, un livre érotique édité par Régine Deforges, est interdit dés sa sortie[1]. Depuis lors, plus de trente de ses ouvrages paraissent, qui relèvent de différents genres littéraires : romans, récits, théâtre, poésie, essais, entretiens autour de la BD.

Depuis les années 1970 jusqu'aux années 2000, il continue à publier des poèmes dans différentes revues, souvent du secteur de la bande dessinée, telles que : Caractères, Harangue, Métamorphoses, Poésie d’Ici, ainsi que des nouvelles dans Le Canard Sauvage, Circus, Les Cahiers de la bande dessinée, Fiction, Fluide glacial, La Demi-Lune, Métal hurlant, Le Phacochère, Actuel et Lunatique.

Paraissent notamment Le Marcheur d'étoiles (nouvelle de fantasy parue dans Lunatique no 63 à la fin des années 1960), Justice est fête (conte illustré par Gotlib, dans Bazar no 1, repris dans Fluide Glacial no 11), Sous le signe du Cancer (nouvelle publiée dans Fiction no 377), de courtes nouvelles dans Fluide glacial nos 8, 9, 14, 21, 130, Néon rouge (extrait d'un poème fantastique dans Métal hurlant no 36 bis, spécial "Fin du monde" en 1978).

Entre 1973 et 1981, il devient éditeur aux éditions Glénat, où il crée et anime notamment la collection de romans populaires Train d’Enfer qui, durant cette période, publie huit romans de jeunes auteurs, mais cette collection s'interrompt vite faute de succès[1].

Un projet de livre en collaboration avec le chanteur Georges Brassens dont il était proche[1], comportant une analyse de toutes ses chansons, ne verra pas le jour en raison de la disparition prématurée du chanteur[7].

Numa Sadoul est membre de la SGDL (Société des Gens de Lettres), de la SACD (Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques), de la SACEM (Société des Auteurs Compositeurs et Éditeurs Musicaux). Certains de ses ouvrages et articles sont traduits en plusieurs langues : allemand, anglais, chinois, espagnol, italien, japonais, néerlandais, portugais...

Bande dessinée

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À l’âge de trois ans, Numa Sadoul apprend à lire dans les albums de Tintin et de Spirou que sa mère lui montre chaque soir pour l’endormir[5].

Sa passion pour la bande dessinée se concrétise tout d’abord par une maîtrise de lettres sur ce sujet à l’Université de Nice en 1971, avec un mémoire intitulé Archétypes et concordances dans la bande dessinée moderne[8]. Dans le cadre de ce travail, il envoie en 1970 un questionnaire aux plus grands maitres franco-belges de l'époque: Hergé, Roba, Peyo, Fred, Franquin, Vandersteen, Goscinny, Uderzo[5]...

Il rencontre en 1970 le jeune Jacques Glénat, qui vient de créer le fanzine Schtroumpf ( qui deviendra les cahiers de la bande dessinée) à l'âge de 16 ans. Ils deviennent amis et collaborent pour la revue et à d'autres projets, Glénat deviendra l'un des principaux éditeurs des livres de Numa Sadoul[1].

Il interview Hergé une première fois en 1971 à la foire du livre de Nice, ce qui l’amènera à lui proposer 5 mois plus tard de réaliser un livre d'entretiens.

En parallèle avec ses premiers livres d’entretiens s’ensuivent de multiples collaborations aux principaux organes de presse français et européens qui fleurissent alors, du plus petit fanzine amateur au quotidien Le Monde, jusqu’à la fin des années 1980. Pour Les Cahiers de la Bande Dessinée Il réalise de nombreuses interviews d’auteurs — entre autres, dans le numéro 22, un entretien détonnant avec René Goscinny où le scénariste et créateur de Pilote s’insurge d’être traité par ses détracteurs de raciste et nationaliste[9]. Il deviendra pour quelques mois rédacteur en chef de la revue à la fin des années 80.

Il est également le rédacteur en chef du trimestriel Le Canard Sauvage édité par Jacques Glénat dont sept numéros paraissent de 1973 à 1974.

Depuis 1973, Numa Sadoul publie de nombreux recueils d’entretiens avec les plus grands noms de la Bande déssinée et du dessin humoristique. Malgré les réticences initiales des éditeurs, il impose et popularise ce genre dont il n'existait avant lui qu'un seul précédent dans le monde francophone: les entretiens de Phlippe Vandooren avec Jijé et Franquin en 1969. La bande dessinée vient alors d'atteindre au début des années 70 la maturité nécessaire pour qu'on lui consacre enfin ce genre d'ouvrage. Numa Sadoul initie ainsi une nouvelle pratique, plaçant la barre haut pour ceux: Benoit Peeters, Thierry Groensteen et tous les francophones- qui s'y essayeront par la suite[10]. Numa Sadoul peaufinera d'entretiens en entretiens sa méthode, notamment en interrogeant Franquin: « J’ai une façon très insidieuse d’insister, de revenir en arrière. Quand je sens qu’il ne veut pas parler ou qu’il élude, je lui dis que nous y reviendrons et, là, je recommence à pilonner, et il finit toujours par cracher le morceau. La méthode de la police judiciaire ! »[6]

En 1971, il est le premier à être reçu pour quatre jours d’entretiens par le maitre fondateur de la bande dessinée franco-belge Hergé — Numa Sadoul n'a alors que 24 ans. Fanny Rodwell, la veuve d' Hergé, raconte plus tard : « Hergé était un homme secret, pudique, il se livrait donc peu, jusqu’au jour où il m’annonça, avec une certaine excitation, qu’il allait donner une longue interview à quelqu’un qui, pour la première fois, avait le don de le mettre en confiance et de le faire s’exprimer plus profondément que d’ordinaire. Il en paraissait étonné et heureux. Le jeune homme qui réussissait cet exploit s’appelait Numa Sadoul. »[11]. Ce dernier, qui avait répondu à l'invitation d' Hergé de lui rendre visite dans ses bureaux de Bruxelles à la suite de leur première rencontre à Nice venait de lui proposer, sans l'avoir prémédité, le principe d'un livre d'entretiens. Hergé, flatté, avait immédiatement accepté[7], et les entretiens commencèrent sur le champ. "Mon culot a surement plu à Hergé", s'amusera Numa Sadoul[10]. Pourtant en raison du manque d’enthousiasme des éditeurs - il s'agit du premier ouvrage de ce genre- Tintin et moi, ne parait qu’en 1975 chez Casterman , et encore sur l'insistance d'Hergé[1]. Le perfectionnisme et l'obsession du contrôle d’Hergé, qui procède à de nombreuses réécritures, expliquent aussi ce délai. Numa Sadoul, regrettera plus tard de ne pas avoir-faute d'expérience- plus poussé Hergé dans ses retranchement lors de ces entretiens[1].

Tintin et moi , qui connaitra plusieurs rééditions augmentées, est désormais utilisé comme livre de référence par les biographes d’Hergé et les analystes de son œuvre. Le livre donne lieu à un film du même titre réalisé par Anders Østergaard en 2003, incluant des extraits des enregistrements audios de 1971.

Numa Sadoul reviendra en 2024 sur cette expérience dans l'ouvrage collectif de Renaud Nattiez Demain Tintin? Entretiens avec "7 fils de Titin" où sont intérrogés Albert Algoud, Jean-Marie Apostolides, Pierre Assouline , Philippe Goddin , Jacques Langlois, Benoit Peeters, et lui-même[5].

S'ensuivent d'autres livres d'entretiens avec d'autres grands auteurs de bande dessinée francophone : Franquin, Giraud/Moebius, Tardi, Uderzo, Vuillemin, Mordillo… Certains donnant lieu à des rééditions enrichies d'extraits inédits des entretiens originaux (Tintin et moi, Entretiens avec Gotlib) ou de nouveaux entretiens (Entretiens avec Uderzo). Dans le livre d'entretiens avec Christelle Pissavy-Yvernault, [1]Numa Sadoul évoque aussi les occasions manquées, les livres qui ne furent jamais écrits, avec Hugo Pratt, Morris, Roba...

Le premier livre d'entretien à être édité parait en 1973- consacré à l'auteur Gotlib - bien que l'ouvrage ait été entrepris postérieurement aux entretiens avec Hergé. Le ton y est familier et le tutoiement de rigueur. Sur l'exigence de l'éditeur Albin Michel[1], qui estime qu'un essai se vendra mieux qu'un livre d'entretiens, une partie des conversations sont remaniées sous forme d'analyses à caractère souvent psychanalytique. La réédition par Dargaud en 2018 permettra un retour à la forme originellement souhaitée[1]. Il en sera de même pour la première édition des entretiens avec Moebius[1].

Il parait évident à Numa Sadoul de consacrer un livre d'entretiens à Franquin, auteur non moins important et dont il est devenu ami dés 1971[1]. Mais le trop modeste Franquin sera bien plus difficile à convaincre qu'Hergé: il faudra plus de 10 ans d'insistance à Numa Sadoul, et la complicité des proches du dessinateur, pour prendre littéralement le créateur de Gaston Lagaffe et du Marsupilami, par surprise à l'issue d'un déjeuner, de l'amener à se confier devant son magnétophone pour le livre "Et Franquin créa Lagaffe"[11].

Cas unique: Mister Moebius et Docteur Gir parait en 1976 et fait l’objet de deux rééditions augmentées en 1989 et 2015. Cette ultime version de l'ouvrage, Docteur Moebius et Mister Gir, entretiens avec Jean Giraud, parait trois ans après la disparition de l'auteur de BD, et rassemble près de quarante ans d’entretiens, qui embrassent — jusqu’aux tous derniers jours — la vie et l’œuvre du dessinateur de Blueberry et cofondateur de Métal hurlant, figure majeure de la bande dessinée et de l'illustration, du XXe siècle, et proche de Numa Sadoul. Tous les sujets, mêmes personnels, y sont abordés frontalement.

Numa Sadoul rencontre Edmond Baudoin au début des années 1970 et lui suggère de faire de la bande dessinée. L’Intéressé répond qu'il n'aime pas « faire des bulles de mots au milieu des dessins ». Mais en s'y essayant, Baudoin découvre ainsi le plaisir d'écrire. Cette rencontre donne lieu en 1972 à l'une des toutes premières BD de Baudoin sur un scénario de Numa Sadoul : Histoire de bébé François, projet resté inachevé[12].

Numa Sadoul a également écrit quelques autres scénarios de bande dessinée, notamment Petite Annie au pays des songes dessiné par Olivier Lefevre, dont un épisode de six pages parait dans Pilote mensuel no 65 bis () et le second, de huit pages, dans Circus no 65 (). La série devait être reprise avec Paul Cuvelier, qui n'en dessina que des esquisses. Une planche préparatoire de ce 3e épisode inachevé est publiée dans le livre de Philippe Goddin, Paul Cuvelier, les chemins du merveilleux, paru en 2006[13].

Numa Sadoul inspire aussi, à titre amical, des idées de gags aux auteurs de bande dessinée Franquin, Greg, Roba[1].

L'auteur Jacques Martin, rencontré en 1971 lors des entretiens avec Hergé, donne les traits de Numa Sadoul au personnage ambivalent Numa Sadulus dans les épisodes L'Enfant grec (1980) et La Chute d'Icare des aventures d'Alix[14]. Ce Numa Sadulus réapparait 35 ans plus tard dans l'épisode Les Démons de Sparte[15] (2015) d'Alix Senator, série dérivée par Thierry Démarez et Valérie Mangin, qui se déroule plusieurs décennies après les aventures d'Alix : le physique du personnage, désormais chauve, a logiquement suivi l'évolution de celui de son modèle[16].

Entre 1982 et 1984, et s'appuyant sur son expérience de metteur en scène d'opéra, Numa Sadoul adapte la Tétralogie de l'anneau du Nibelung de Richard Wagner[17] à la bande dessinée, en qualité de scénariste, avec la dessinatrice France Renoncé. L'album est préfacé par Wolfgang Wagner, descendant du compositeur et directeur du Festival de Bayreuth. En 2016, dans le cadre d'un séminaire à l'université Paris-Sorbonne consacré aux interactions entre musiques et arts plastiques, l'universitaire Anne-Sophie Tronconi écrit : Dans Comment lire la bande dessinée, Frédéric Pomier pose cette question : « La bande dessinée se lit-elle ou se regarde-t-elle ? » En ce qui concerne la bande dessinée, L’Anneau du Nibelung de Numa Sadoul et France Renoncé, en raison du scénario lyrique, de la composition et de l’éclat chromatique des planches, non seulement elle se lit et se regarde, mais il semblerait qu’en plus, elle puisse s’écouter[18].

En 1989, sur l'instance de l'équipe de Jacques Glénat, Numa Sadoul collabore à nouveau aux cahiers de la bande dessinée en prenant la suite de Thierry Groensteen en tant que rédacteur en chef, pour une nouvelle formule[19] qui se veut plus accessible en prenant comme modèle le magazine Première[1]. Mais cette nouvelle formule ne dure que six numéros, faute de succès public, et en raison des critiques négatives réservées par la rédaction aux publications de la maison d'édition. En 2017, Numa participera enfin au re-lancement de ce magazine par Vincent Bernière, avec une rubrique régulière où il ouvre son carnet de dédicaces de grands de la BD et raconte les anecdotes qui s’y rattachent[20].

En 1989, au festival d’Angoulême, il est commissaire général de l'exposition « André Franquin, Les Rêves monstres ».

A compter de la fin des années 80, Numa Sadoul ressent une lassitude croissante vis à vis de la bande dessinée, qui le monopolise ne serait-ce qu'en raison de la production exponentielle d’œuvres à lire, et qui l’éloigne de ses autres passions[1]. Il décide alors de se consacrer avant tout désormais au théâtre et à l'opéra. Dans ce mouvement, il s'éloigne aussi de la plupart de ses amis du milieu de la bande dessinée, avec une radicalité qu'il se reprochera plus tard[1].

Il consacre néanmoins épisodiquement à de nouveaux ouvrages, et la réédition d'anciens épuisés depuis, avec des mises à jours ou dans l'état. Ces rééditions nécessitent des compromis avec les ayant-droits- ainsi la réédition des entretiens avec Franquin est-elle privée d'entretiens inédits-, et l'on attend depuis des décennies une réimpression des entretiens avec Hergé.

Le recueil Dessinateurs de presse : entretiens avec Cabu, Charb, Kroll, Luz, Pétillon, Siné, Willem et Wolinski est initié en 2006 mais ne paraît qu’en 2014, accueilli froidement par beaucoup des intéressés, notamment en raison des conflits entre Siné et ses anciens confrères de Charlie Hebdo[21]. Après l’attentat du 7 janvier 2015 contre la rédaction de l’hebdomadaire, au cours duquel trois des dessinateurs qui avaient été intérrogés sont assassinés, le livre retrouve une triste actualité et doit être plusieurs fois réimprimé.

En 2015, Numa Sadoul est membre du jury au même festival d’Angoulême.

Numa Sadoul annonce en 2023 un livre d'entretiens à paraitre en 2024 avec Riad Sattouf, à l'initiative de ce dernier[6]. Le dessinateur avait raconté dans son œuvre autobiographique "L'Arabe du futur" (tome 6) l'importance déterminante qu'avait eu la lecture des "Entretiens avec Moebius" par Numa Sadoul dans sa décision de devenir auteur professionnel de bande dessinée[22].

Dans Franquin et moi,entretiens avec Numa Sadoul[1], paru en 2024, Numa Sadoul raconte à Christelle Pissavy Yvernault la genèse du livre "Et Franquin créa la gaffe", parle de sa relation avec Franquin, et revient plus généralement sur sa vie et son parcours. Il y estime que ses 2 livres d'entretien les plus importants ont été ceux réalisés avec Franquin et avec Jean Giraud/ Moebius, l'amitié qui le liait à ses deux auteurs y était pour beaucoup.

Théâtre

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La vocation théâtrale de Numa Sadoul se manifeste dès l’âge de trois ans, à Djibouti, en assistant à des spectacles de l’Alliance française en tournée africaine, et en commençant à interpréter de courtes pièces à l’école primaire. Il décide à l'âge de quatre ans de devenir acteur[1].. et tient parole! Par la suite, il ne cesse de pratiquer en amateur jusqu’au bac. Apprenti comédien au CDN d’Aix-en-Provence, il participe en 1968 à la tournée des « Pièces chinoises » montées par Patrice Chéreau avec sa Compagnie du théâtre de Sartrouville, et devient comédien et metteur en scène professionnel, ainsi que directeur de troupe la même année.

Créé en 1968 par sa compagnie Orbe-Recherche Théâtrale (ORT), Oratorio concentrationnaire — qualifié de pièce du théâtre de l’incantation, où le comédien n’incarne pas de personnage et où le mot est utilisé comme véhicule d’une idée et comme sonorité — est joué en 1970 dans plusieurs villes européennes[23]. Selon la critique théâtrale des temps modernes, Renée Saurel : "L'ORT ayant voulu, en 1969, tenter avec ce texte une expérience dans les foyers ruraux de Normandie, se la vit interdire par les édiles de Rouen qui la qualifièrent de « recherche subversive et dangereuse ». En voilà au moins qui croient au pouvoir révolutionnaire du théâtre !"[2]

La pièce est publiée par l'éditeur de théâtre Pierre Jean Oswald avec dans le même volume Le Sang des feuilles mortes qui inspire à Renée Saurel ces lignes: "C'est une œuvre à la fois ouverte sur une réalité atroce et refermée sur elle-même, intérieure, quasi-onirique (...) On voit mal quels arguments les directeurs pourraient invoquer pour ne pas monter cette belle pièce. À moins que ce cri d'horreur, de colère, lancé par un Blanc non-pourri ne soit de ceux que l'on préfère ne pas entendre ?"[2]

Ses activités théâtrales se ralentissent à partir du début des années 70, et jusqu'au début des années 90, en raison de disputes dans la troupe et en raison du temps qu'il commence à consacrer à la bande dessinée.

Numa Sadoul met en scène et/ou interprète ensuite une vingtaine de pièces (de Jean Genet à Shakespeare[24], ou des œuvres dont il est l’auteur[25]). À partir de 1990, il ajoute à sa palette une fonction de pédagogue pour des jeunes de 7 à 25 ans, des handicapés et des prisonniers.

Tout en continuant ces activités éducatives, il anime sans relâche depuis 1999 la troupe des Enfants Terribles basée à Saint Paul de Vence qui fait vivre à des apprentis comédiens en âge scolaire une expérience de tournées professionnelles pour présenter des pièces d’Anouilh[26], Wilde, Marivaux, Aristophane ou Giraudoux[27],[28].

Avant qu'il ne devienne metteur en scène, l'intérêt de Numa Sadoul- qui a l'oreille absolue[1]- pour l'opéra se manifeste tout d'abord par des activités éducatives et critiques.

C'est ainsi que, dès l'âge de 17 ans, en 1964 et 1965, il anime « Wagner tel qu’il fut », une série de trente émissions à la Radio nationale de Madagascar, puis, de 1967 à 1968, une série de conférences-auditions sur Wagner aux universités de Nice et d’Aix-en-Provence[29].

À partir de 1973, il signe des articles en tant que correspondant de quotidiens étrangers — Madagascar Matin, Le Journal d’Yverdon —, puis, en tant que chroniqueur titulaire, et jusqu’en 1985, aux journaux Humanisme, Circus, Le Nouvel Hebdo de Nice. De 1975 à 1979, il devient membre du comité de rédaction de la revue Opéra International, le seul magazine d’opéra en France, devenu ensuite Opéra Magazine.

À partir de la fin des années 1970, il franchit une nouvelle étape avec la mise en scène des œuvres de Wagner (Parsifal, à l'Opéra de Lyon et à l'Opéra du Rhin, 1977, Lohengrin, à l'Opéra du Nord, 1980), de Strauss (Salomé, à l'Opéra de Lyon, 1978), de Berlioz (La Damnation de Faust, à l'Opéra de Lyon et à l'Opéra du Rhin, 1978 — comme assistant de Louis Erlo), de Landowski (Le Fou, à l'Opéra du Rhin et à l'Opéra de Lyon, 1979), de Tchaïkovski (Eugène Onéguine, à l'Opéra du Nord, 1983, spectacle intégralement filmé par France 3), de Humperdinck (Hänsel und Gretel, à l'Opéra du Rhin, 1990), de Monteverdi (L'incoronazione di Poppea, à l'Opéra de Marseille, 1993), de Gluck (Orphée et Eurydice, à l'Opéra de Toulon, 2007), et de Hahn et Guitry (Ô mon bel inconnu, comédie musicale à l'Opéra de Nantes, 2000).

Après avoir adapté Wagner en bande dessinée[30], il invite les personnages d'Hergé sur scène : en 2000 et 2001, il monte une production à l'Opéra National de Bordeaux d'après ses personnages (Tintin, Milou et Le Récital de… Bianca Castafiore) qui allie le 9ème art avec le 4e art et le 6e[31],[32],[33].

Dans son livre 40 ans à l'opéra; égo-dictionnaire de l'art lyrique[34] , dictionnaire de l'opéra écrit sous un angle biographique[35], il indique que ses auteurs de prédilection et mises en scène préférées restent : Wagner, avec Parsifal (aux opéras de Lyon et du Rhin, 1977) et Lohengrin (à l’Opéra du Nord, Lille, 1980) ; Mozart, avec Don Giovanni (à l'Opéra de Metz, 2009) et La Flûte enchantée (à l'Opéra de Nantes, 1995, l'Opéra de Nice, 2016, et l'Opéra de Marseille, 2019) ; et Puccini, avec Turandot (à l'Opéra de Marseille, 1983 et 1990) et Madame Butterfly[36],[37],[38](à l'Opéra de Marseille, 2002, 2007 et 2016, l'Opéra de Bordeaux, 2003 et 2011, l'Opéra de Toulon, 2004 et 2012, et l'Opéra de Metz, 2005).

Publications

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Théâtre

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  • Oratorio et Le Sang des feuilles mortes, Pierre-Jean Oswald, Collection « Théâtre en France », 1970
  • Bianca Castafiore, Le Récital, magazine des Amis de Hergé no 42,
  • Archétypes et concordances dans la BD moderne, Chez l’Auteur, 1971.
  • Gotlib, Albin Michel, Collection "Graffiti", 1974
  • Mister Moebius et Docteur Gir, Albin Michel, Collection "Graffiti", 1976
  • Histoire de la bande dessinée en France et en Belgique (ouvrage collectif), Glénat, 1979. Réédition refondue, 1984
  • Les Papagalli, bouffons, Glénat, 1992

Récits, romans

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  • Mémoires d'Adam François San Hurcelo Lumneri, pornographe, L'Or du Temps/Régine Deforges, 1971 - ouvrage interdit dès parution. Nouvelle édition en préparation. Extrait in Anthologie de la fessée et de la flagellation, La Musardine, 1998
  • Une soirée gagnée, in collectif Lieux d'écrits, Fondation Royaumont, 1987
  • Carnaval des vampires (pseudonyme Frank Henry), Collection « Gore » no 107, Éditions Vaugirard, 1990
  • La Chatte de la vieille dame (illustrations d’Alfred), Ciel Éther, 1995

Dictionnaire

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40 ans à l'opéra - Égo-dictionnaire de l'art lyrique, Éditions Dumane (20251 Pietraserena), , 710 p.

Entretiens

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  • Tintin et moi, Entretiens avec Hergé, Casterman, 1975 ; Rééditions, 1983, 1989, 2000 et 2004 — En poche chez « Champs », Flammarion, 2003[39]
  • Portraits à la plume et au pinceau, Glénat, 1977
  • Et Franquin créa la gaffe, Distri BD/Schlirf, 1986
  • Entretiens avec Moebius, Casterman, 1991 (réédition augmentée de l'ouvrage de 1976). Prix Max et Moritz de la meilleure publication de littérature secondaire 1993)
  • Le Livre d'or de Mordillo, Glénat, 1999
  • Tardi, Niffle-Cohen, collection « Profession », 2000
  • Vuillemin, Niffle-Cohen, collection « Profession », 2000
  • Astérix et compagnie : entretiens avec Uderzo, Hachette, 2001
  • Les Dessinateurs de presse : entretiens avec Cabu, Charb, Kroll, Luz, Pétillon, Siné, Willem et Wolinski, Glénat, 2014
  • Docteur Moebius et Mister Gir : entretiens avec Jean Giraud, Casterman, 2015. (nouvelle édition revue et augmentée des ouvrages de 1976 et 1991)
  • Entretiens avec Gotlib, Dargaud, 2018
  • Uderzo l'irréductible : entretiens avec Albert Uderzo, Hachette, 2018 (nouvelle édition augmentée de l'ouvrage de 2001 Asterix et compagnie)
  • Et Franquin créa la gaffe : entretiens avec André Franquin, Glénat, 2022 (réédition avec une nouvelle iconographie de l'ouvrage de 1986, épuisé)[40].
  • Franquin et moi - entretiens avec Numa Sadoul de Christelle Pissavy-Yvernaut, Glénat, 2024.
  • L’Arabe du futur et moi - Entretiens avec Riad Sattouf, à paraitre, (en 2025?) aux éditions du Futur.

Bandes dessinées

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  • La Tétralogie de l'Anneau du Nibelung, d'après Richard Wagner, dessins de France Renoncé, Dargaud, collection « Histoires Fantastiques »
    • L'or du Rhin, 1982[41]
    • La Walkyrie, 1982 Médaille d'or de la Ville de Nice au Festival du livre 1982, Grand prix de la Ville de Paris 1982.[42]
    • Siegfried, 1984[43]
    • Le Crépuscule des dieux, 1984[44]

Théâtre (auteur, acteur et metteur en scène)

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Opéra (mises en scène)

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Filmographie

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Notes et références

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  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u et v Numa Sadoul et Christelle Pissavy-Yvernault, Franquin et moi, Glénat, coll. « Les Cahiers de la bande dessinée présentent », (ISBN 978-2-344-06550-1)
  2. a b et c Renée Saurel, « Sang et or, de l'Afrique à la Bretagne », Les temps modernes,‎ .
  3. « Le Salon de la BD à Paris - SoBD 2020 » (consulté le ).
  4. Numa Sadoul, « À propos de Corto Maltese », Phénix,‎ mars 1973 (n° 29), p. 15 à 17.
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  47. "Legs (Le)", de Marivaux par Claude Kraif, Revue Spectacle 09-07-2019
  48. Marivaux, Numa, et Les enfants terribles
  49. Profitons de l’été pour jouer au festivalier !

Annexes

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Documentation

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  • Numa Sadoul (int. par Jean-Marc Vidal), « Magnetic Numa », BoDoï, no 35,‎ , p. 7-9.

Lien externe

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