Marie Catherine Josephe de Merode

aristoctrate des Pays Bas méridionaux

Marie Catherine Josephe, comtesse de Merode et princesse de Rubempré et d'Everberg (Louvain, 10 avril 1743Bruxelles, 26 mars 1794 ), était une aristocrate des Pays-Bas méridionaux qui a dirigé la noble famille de Merode pendant de nombreuses années.

Marie Catherine Josephe de Merode
Titres de noblesse
Comtesse
Princesse
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 50 ans)
Père
Maximilien Leopold de Merode (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Mère
Catherine Ocreman (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conjoints
Philippe Maximilien de Merode (d)
Chrétien Joseph Ernest Grégoire de LannoyVoir et modifier les données sur Wikidata
Enfants
Honorine Leopolde Ghislaine de Merode (d)
Charles de Merode
Marie Philipinne Felix Ghislaine de Merode (d)
Josephine Leopoldine Ghislaine de Merode (d)
Marie Anne Pauline van Lannoy (d)Voir et modifier les données sur Wikidata

Origine et enfance

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Marie Catherine est née le 10 avril 1743 au Couvent des Soeurs Noires de Louvain. Elle est le fruit d'un mariage d'amour et sa naissance suscite un certain émoi dans les milieus nobles. En effet, sa mère, Catherine Ocreman (1701-1770), n'a pas séjourné volontairement au Couvent des Soeurs Noires. Elle y fut mise sous séquestre après que son mari Maximilien Léopold (1710-1769), comte de Merode et prince de Rubempré et d'Everberg, eut été imprisonné dans la citadelle d'Anvers par l'impératrice Marie-Thérèse (1717-1780). La raison de cet emprisonnement était le «mariage scandaleux du siècle». Maximilien Léopold, membre respecté de la noblesse de cour bruxelloise, avait épousé la lingère de sa famille dont il était amoureux depuis quatorze ans. Cette mésalliance fut immédiatement combattu par la famille du prince, ce qui aboutit finalement à l'emprisonnement de Maximilien Léopold et Catherine Ocreman pendant sept mois. L’enquête ayant révélé la validité juridique de leur mariage, l’impératrice n’eut d’autre choix que de les libérer. Malgré toutes les pressions exercées sur le prince, le mariage non conventionnel a survécu. Le 20 décembre 1745, la famille s'agrandit d'une deuxième fille, Honorine Catherine Joséphine (1745-1768).

En 1751, Marie Catherine devient pensionnaire au couvent du Berlaymont à Bruxelles. Le pensionnat du Berlaymont était l'une des institutions éducatives pour filles les plus prestigieuses de la capitale. Les filles de l'aristocratie et de la haute bourgeoisie y recevaient une éducation soucieuse de leur classe. Outre l'instruction religieuse nécessaire, Marie Catherine y apprend à lire, à écrire et à calculer. Ces matières de base étaient complétées par des cours d'espagnol, de français, d'histoire, de géographie et de mythologie. Une attention particulière a également été accordée aux sujets artistiques. Marie Catherine apprend à jouer du clavecin et reçoit des cours de danse et de théâtre. Les connaissances qui lui sont transmises, visent à la préparer à son futur rôle dans la société. Marie Catherine devra être capable de se comporter correctement dans les cercles les plus élevés, de gérer son ménage et d’assister son mari et ses fils[1].

Mariage et enfants

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Le 31 mars 1759, Marie Catherine épouse un parent éloigné, Philippe Maximilien, comte de Merode et du Saint-Empire romain germanique, baron d'Harchies et seigneur de Grandglise (4 juillet 172925 janvier 1773). Héritier universel de son frère Jean Guillaume Augustin de Merode (1722-1763), Philippe Maximilien hérite en 1763 de tous les biens mobiliers et immobliers de la famille Merode-Westerlo et devient ainsi le septième marquis de Westerlo. Ce mariage réunit deux branches de la Maison de Merode: la branche principale Merode-Westerlo et la branche secondaire riche Merode-Rubempré.

La famille s'agrandit bientôt. Après une fausse couche en août 1759, Marie Catherine, dix-sept ans, donne naissance à un fils, Maximilien Léopold (1760-1761), le 19 juin 1760. A peine âgé de huit mois, le petit comte de Mérode décède. Quelques mois plus tard, le 18 juillet 1761, elle donne naissance à une fille, Honorine Léopolde Ghislaine (1761-1829). La grossesse suivante ne s'est pas fait attendre, mais elle a été extrêmement difficile. Au cours de l'été 1762, la comtesse tomba gravement malade et son mari craignit à plusieurs reprises pour sa vie. Elle finit par se rétablir et donne naissance à un fils tant attendu, Guillaume Charles Ghislain (1762-1830), le 16 septembre 1762. Suivront deux autres filles: Marie Philipinne Félix Ghislaine (1764-1815) et Joséphine Léopoldine Ghislaine (1765-1824).

Le 25 janvier 1773, Philippe Maximilien meurt à l'âge de 43 ans. Marie Catherine se retrouve avec quatre enfants mineurs. Le fils et héritier Charles avait à peine dix ans et donc bien trop jeune pour bien gérer l'héritage de son père[2].

A la tête de la famille

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Après le décès de son mari, Marie Catherine devient chef de la famille de Merode. Initialement, fin 1769, en tant qu'héritière universelle de son père, elle avait hérité de tous la patrimoine de la branche Mérode-Rubempré. Tant que son mari était en vie, il avait géré cet héritage pour elle. En effet, une femme mariée était incapable sous l’ Ancien Régime. Cela a changé après la mort de Philippe Maximilien. En tant que veuve, elle avait beaucoup plus de droits et pouvait gérer elle-même son héritage. De plus, jusqu'à la majorité de son fils, elle était également responsable de la gestion du patrimoine de la branche Merode-Westerlo. En tant que tutrice et régente, elle pouvait gérer ces domaines comme bon lui semblait. En tant que femme, Marie Catherine se retrouve soudain à la tête d'un gigantesque patrimoine nobiliaire dont les domaines s’étendent sur les Pays-Bas méridionaux, les Provinces-Unies , la France et le Saint-Empire romain germanique . La comtesse veilla à ce que l'héritage de son fils soit assuré et passe les années suivantes à exploiter intensivement les domaines de la famille de Merode.

 
Portrait de Marie Catherine de 1761

Le veuvage a également changé beaucoup de choses dans la vie privée de Marie Catherine. Au cours de l'été 1774, un an et demi après la mort de son mari, la comtesse découvre qu'elle est enceinte. La grossesse fut gardée secrète et Marie Catherine donna finalement naissance à une fille Marie Anne Pauline (1774-1826) à Strasbourg le 24 décembre 1774. Quelques mois après la naissance, Marie Catherine retourne à Bruxelles. La petite Pauline resta à Strasbourg et son existence fut tenue secrète pendant quelques années. Le père de l'enfant était Chrétien Louis (1731-1822), comte de Lannoy de la Motterie. Bien que le comte soit un partenaire idéal, Marie Catherine choisit de ne pas l'épouser immédiatement. Elle savait qu'un mariage aurait de graves conséquences sur sa position comme chef de famille et comme gestionnaire du patrimoine. En tant que veuve, elle pouvait agir de manière indépendante et active sans avoir à en répondre. Elle ne voulait pas renoncer à ce pouvoir. C'est probablement pour cette raison qu'elle n'avait pas prévu de se remarier, mais la grossesse avait mis des bâtons dans les roues. Ce n'est que le 22 avril 1776, près d'un an et demi après la naissance de sa fille Pauline, que Marie Catherine épouse Chrétien Louis. Là encore, le mariage se fait dans le plus grand secret. Le 5 mars 1777, le mariage fut finalement rendu public et ensuite solennellement célébré dans la Cathédrale Saint-Jacques-sur-Coudenberg à Bruxelles. Marie Catherine avait inscrit dans son contrat de mariage qu'elle restait responsable en dernier ressort de la gestion du patrimoine de la famille de Merode. Elle s'assurait ainsi de conserver sa capacité juridique en tant que femme mariée et de pouvoir continuer à gérer elle-même son patrimoine et celui de ses enfants.

En 1785, Marie Catherine fait déclarer majeur son fils Charles. Il est désormais à la tête du patrimoine de Mérode-Westerlo et peut le gérer comme il l’entend. Marie Catherine reste responsable de la gestion des domaines hérités de son père. Son fils n'en hériterait qu'après sa mort[3],[4].

Un maître d'oeuvre passionné

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Château d'Everberg

Dès la mort de son père fin 1769, Marie Catherine avait prévu de moderniser sa résidence d'été, le château d'Everberg . Des plans ont été élaborés, mais n'ont pas abouti. Après la mort de Philippe Maximilien début 1773, Marie Catherine relance ce projet. Elle souhaitait transformer le château existant en un bâtiment moderne de style néoclassique. Pour ce faire, elle engageait l'architecte parisien Philippe Jérôme Sandrié de Morcourt (†1789). L'architecte a inspecté et coordonné les travaux qui ont eu lieu entre 1773 et 1780. Les bâtiments existants ont été conservés dans la mesure du possible, bien qu'une nouvelle façade en pierre blanche ait été placée devant eux. Le nouveau château de style Louis XVI était en forme de U et formait un bel ensemble architectural. Jusqu'au milieu du XIXe siècle, le chateau était entourée d'eau sur les côtés et à l'arrière; à l'avant, il donnait sur une grande cour. Ce n’est pas seulement le château lui-même qui a été rénové. La comtesse fit aussi démolir l'ancienne cour avec les bâtiments de ferme et la remplaça par deux grands pavillons, également de style Louis XVI. Le jardin du château a ensuite été pris en charge avec la création de plusieurs allées en d’un jardin à la française avec tous les éléments caractéristiques de cette époque, comme une orangerie et des serres.

 
Hôtel de Lannoy dans la rue Royale à Bruxelles

La rénovation du château d'Everberg n'est pas le seul grand projet de Marie Catherine. La création de la Place Royale à Bruxelles a eu des conséquences importantes pour l'Hôtel de Rubempré, le luxueux hôtel particulier qui appartenait à la famille Rubempré depuis des générations. Marie Catherine n'étant pas d'accord avec les modifications qu'elle devrait apporter à son hôtel selon les plans de la nouvelle Place Royale, elle vendit son hôtel de ville à la Guilde des Brasseurs de Bruxelles en 1779. Elle achète ensuite quatre maisons dans la Rue Royale , qu'elle fait transformer en un nouveau hôtel de ville, l'Hôtel de Lannoy. Les travaux qui se déroulent de l'automne 1779 au début 1781 sont à nouveau dirigés par l'architecte Sandrié[5].

La révolution brabançonne et les États belgiques unis

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Après la mort de  l'impératrice Marie-Thérèse, le 29 novembre 1790, son fils l'empereur Joseph II (1741-1790) lui succède. Contrairement à sa mère, souhaitait redessiner complètement les Pays-Bas sur les plans politique, judiciaire, administratif et religieux. Ses réformes ont été introduites rapidement et sans consultation et n'ont pas tenu compte des privilèges séculaires. Les différentes provinces qui composaient les Pays-Bas autrichiens n’avaient pas l’intention de l’accepter simplement. Marie Catherine et son mari Chrétien Louis ont été impliqués dans ces protestations dès le début. Dans une lettre du ministre plénipotentiaire français de 1789, Marie Catherine est décrite comme quelqu'un qui ne mâchait pas ses mots, qui avait des idées politiques claires et qui agissait en conséquence. Son rôle précis ne peut pas être entièrement révélé en raison du manque de matériel source nécessaire. Pourtant, il est clair qu'elle s'est impliquée dans les débats politiques. Elle a participé, avec sa famille, à la résistance contre l'empereur Joseph II qui a conduit à l'éviction du gouvernement autrichien à l'automne 1789 lors de la Révolution brabançonne et à la création des États belgiques unis au début de 1790. La famille Merode-Lannoy était très attachée les États belgiques unis, mais elle dû se rendre à l’évidence: les conflits internes, les problèmes financières et l’évolution du contexte international  firent que la confédération n’eut pas un longue durée de vie. Dès décembre 1790, les Pays-Bas furent reconquis par les Autrichiens[6],[7].

Les dernières années mouvementées

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Pour Marie Catherine et sa famille, le retour des Habsbourg était problématique. Ils avaient investi aux États belgiques unis jusqu’au bout. Bien sûr, les Autrichiens le savaient aussi. Marie Catherine et Chrétien Louis craignent des représailles et n'osent donc plus se montrer à Bruxelles. Ils se retirèrent au château d'Everberg pendant l'hiver 1790. Comme la famille Merode-Lannoy ne s'y sentait plus en sécurité et que Chrétien Louis craignait également d' être exclu de l'amnistie par le nouvel empereur Léopold II (1747-1792), la famille décida de fuir les Pays-Bas. Au printemps 1791, Marie Catherine s'installe avec sa famille à Mannheim , capitale de l' Electorat du Palatinat . À l'automne 1792, elle se sentit suffisamment en sécurité pour retourner à Everberg. Le séjour aux Pays-Bas fut de courte durée. Début novembre 1792, Marie Catherine doit à nouveau quitter Everberg pour se rendre à Maastricht à cause de l'invasion française le 1er novembre 1792. Mais à Maastricht, Marie Catherine et sa famille n'étaient pas en sécurité. La France avait également déclaré la guerre aux Provinces Unis au début de l’année 1793, ce qui entraîna le siège de Maastricht (24/3-3/3/1793). Maastricht fut bombardée pendant 10 jours et Marie Catherine, son mari, ses enfants et petits-enfants furent terrifiés. Au printemps 1793, les Autrichiens parviennent à ramener les Pays-Bas méridionaux. Marie Catherine et sa famille se réconcilient enfin avec les Habsbourg autrichiens et retournent à Bruxelles.

Marie Catherine Josephe, comtesse de Merode et princesse de Rubempré et d’Everberg est décédée le 26 mars 1794 dans son hôtel particulier à Bruxelles. Elle avait un peu moins de 51 ans. Malade depuis un certain temps, elle avait reçu les derniers sacrements et la sainte onction en février 1794. Le 28 mars, elle a été enterrée avec tous les honneurs dans l' église Saint-Martin d’Everberg puis inhumée dans la crypte de la famille Rubempré dans la chapelle Saint-Hubert de la même église[8].

Notes et références

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  1. Freeke De Meyer, Hoog geboren, ambitieus en eigenzinnig. Marie Catherine Josephe, gravin van Merode en prinses van Rubempré en Everberg (1743-1794), Gorredijk, Uitgeverij Sterck & De Vreese, , 472 p. (ISBN 9789464711141), p. 14-42
  2. Freeke De Meyer, « Marie Catherine van Merode, edelvrouw, prinses van Rubempré en Everberg », Nationaal Biografisch Woordenboek, vol. 25,‎ , p. 853-859
  3. Freeke De Meyer, « Een gedreven patrimoniumbeheerder. Marie Catherine Josephe, gravin van Merode en prinses van Rubempré en Everberg (1743-1794) », Historica. Tijdschrift voor Gendergeschiedenis, vol. 47, no 1,‎ , p. 8-14 (lire en ligne  )
  4. Freeke De Meyer, « Ook vrouwen beheerden in de achttiende eeuw adellijke familiebezittingen »  , sur historiek.net,
  5. Freeke De Meyer, Hoog geboren, ambitieus en eigenzinnig. Marie Catherine Josephe, gravin van Merode en prinses van Rubempré en Everberg (1743-1794), Gorredijk, Uitgeverij Sterck & De Vreese, , 472 p. (ISBN 9789464711141), p. 275-291
  6. Freeke De Meyer, « Een steenrijke, autonome en ambitieuze gravin. Marie Catherine Josephe, gravin van Merode en prinses van Rubempré en Everberg (1743-1794) », Eigen Schoon & de Brabander. Tijdschrift voor Brabantse Geschiedenis, vol. 107, no 1,‎ , p. 68-69
  7. Freeke De Meyer, Hoog geboren, ambitieus en eigenzinnig. Marie Catherine Josephe, gravin van Merode en prinses van Rubempré en Everberg (1743-1794), Gorredijk, Uitgeverij Sterck & De Vreese, , 472 p. (ISBN 9789464711141), p. 320-350
  8. Freeke De Meyer, « Een steenrijke, autonome en ambitieuze gravin. Marie Catherine Josephe, gravin van Merode en prinses van Rubempré en Everberg (1743-1794) », Eigen Schoon en de Brabander. Tijdschrift voor Brabantse Geschiedenis, vol. 107, no 1,‎ , p. 69-72

Bibliographie

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