Nourrice
Une assistante maternelle, aussi appelée nourrice ou nounou, est une personne qui s'occupe contre rémunération d'un ou plusieurs jeunes enfants qui ne sont pas les siens sur une durée limitée dans le temps.
Il ne faut pas confondre « garde d'enfant à domicile » et « Assistante Maternelle agréée ». La première exerce au domicile des parents tandis que la seconde accueille les enfants à son propre domicile. L'assistante maternelle agréée reçoit une formation par le département, un agrément et un contrôle régulier par les services de la Protection maternelle et infantile. Les deux métiers donnent droit aux familles qui les emploient à une allocation par la Caisse d'allocations familiales (France).
Historiquement, les nourrices allaitaient les enfants qui leur étaient confiés, d'où leur nom.
Lorsque la garde est de courte durée et ponctuelle au domicile des parents (quelques heures par jour, notamment en soirée), on emploie l’anglicisme baby-sitter ou gardienne.
Histoire
modifierIssu du latin, nutrix, nutricis, le mot nourrice désigne la femme ou la mère qui allaite l’enfant.
L'existence des nourrices est attestée depuis l'Antiquité. L’image de la nourrice était déjà très présente avec les mythes grecs et romains. Ainsi, Thémis, une titanide, avait déjà le rôle de nourrice auprès d’Apollon. De plus, les fondateurs de Rome, Remus et Romulus ont été allaités par une louve. Dès l’Antiquité, on assiste aux prémices de cette profession. En effet, à la naissance de l’enfant, la mère était entourée d’une sage-femme et d’assistantes. Celles-ci donnaient les premiers soins à l’enfant. Par la suite, le nourrisson était gardé par une esclave qui était spécialisée aux soins de la petite enfance.
Il était courant de faire appel à une nourrice, si la mère ne pouvait pas, ou ne souhaitait pas allaiter, par exemple en cas de naissances multiples ou de maladie (les morts en couche étant extrêmement fréquentes). Les nourrices étaient soit logées chez leur employeur, soit restaient chez elles, où elles accueillaient l'enfant.
Au Moyen Âge, dans la noblesse, confier l'enfant à une nourrice permettait aussi à la mère d'enfanter de nouveau plus tôt et de s'assurer un héritier. Certaines légendes avançaient aussi que l'allaitement maternel était néfaste pour l'enfant. Par ailleurs, l'allaitement pour les aristocrates renvoyait à une animalité mal acceptée, les besoins affectifs du bébé étaient largement ignorés, la proximité mère-enfant étant juste bonne pour les familles du « bas peuple »[1]. Au Moyen Âge, pour les familles nobles, il existait même des berceresses. Leur rôle était de bercer l’enfant. De plus, c’est au Moyen Âge que la bourgeoisie a commencé à apparaître. Par conséquent, il était plus demandé à la mère d’être une femme que d’assurer son rôle maternant. De ce fait, les nourrissons étaient confiés à des femmes issues de milieux populaires ayant pour rôle d’allaiter. Néanmoins, les conditions de garde sont précaires. Si par chance, le bébé a survécu au voyage, sur place, il est logé avec plusieurs autres enfants et dort dans des sacs suspendus ou encore avec la nourrice qui peut l’écraser dans son sommeil.
Les enfants allaités par la même nourrice étaient appelés frères ou sœurs « de lait » (par opposition aux frères ou sœurs « de sang »).
Au XVIIIe siècle, l'allaitement par nourrice était qualifié d'allaitement mercenaire[2]. Si jusqu'alors, la mise en nourrice constituait une pratique réservée à l’aristocratie et à la bourgeoisie urbaine, elle explose et se développe dans les classes populaires urbaines où les femmes placent leurs enfants pour pouvoir travailler à plein-temps[3]. La mise en nourrice a été une des plus grandes causes de la mortalité infantile. En effet, un bébé sur quatre mourait avant d’avoir atteint sa première année. Le plus grand facteur étant le manque d’hygiène très répandu à cette époque, ainsi que le manque d’attention pour le nourrisson. Celui-ci n’était considéré comme une personne à part entière tant qu’il n’avait pas acquis la faculté de langage. Cependant, c’est à partir de cette époque que les personnes ont pris conscience que l’alimentation du bébé était à revoir.
À l'époque moderne, les mères qui ne pouvaient pas allaiter leurs bébés les confiaient à une nourrice à domicile pour les familles les plus aisées ou les envoyaient chez des nourrices à la campagne pour les classes sociales moins favorisées. Moins fréquemment elles donnaient aux nourrissons des laits artificiels préparés par elles-mêmes, le plus souvent à base de lait de vache non stérile, ce qui provoquait la mort de nombreux bébés, mortalité également fréquente chez les bébés allaités par les nourrices de campagne qui louaient souvent leurs services à plusieurs familles pour gagner plus d'argent. Le développement du lait infantile à la fin du XIXe siècle a amorcé le déclin de l'emploi de nourrices[4].
Époque contemporaine
modifierAux États-Unis
modifierAux États-Unis, il n’y a pas forcément d’équivalent au métier de nourrice. Afin de faire garder ses enfants, les parents doivent faire appel à des baby-sitters ou bien placer leurs enfants en « Daycare ». Ces sont des sortes de crèches privées où travaillent des jeunes filles au pair et des baby-sitters.
Au Québec
modifierAu Québec, on parle de « gardienne d'enfants »[5] ou, plus officiellement, de « garde en milieu familial » (Service de garde en milieu familial)[6]). Ce service est un service où les enfants sont supervisés par un ou des adultes toute la journée. Ceci peut prendre place dans le foyer de la personne (garderie en milieu familial) ou dans un centre de la petite enfance (CPE), qui est un établissement ou plusieurs groupes de jeunes passent leurs journées. Ces services sont disponibles et utilisés par les enfants trop jeunes pour aller à l'école. Les employés de ces centres et garderies sont appelés éducateurs/trices.
Secteur réglementé dans cette province canadienne par le Ministère de la Famille, ce dernier a établi des bureaux coordonnateurs de la garde en milieu familial qui sont responsables de coordonner, contrôler et soutenir les services de garde éducatifs offerts par les responsables d’un service de garde (RSG) en milieu familial[7].
Au Canada, les nourrices peuvent en recevoir 6 enfants au maximum. Cependant, cette profession n’est pas aussi réglementée qu’en France.
En Belgique
modifierEn Belgique, on les appelle les accueillantes.
Elles dépendent de l’ONE (Office de la naissance et de l'enfance). Cet organisme donne l’autorisation d’exercer le métier. Concernant le statut social d’assistant maternelle en Belgique, celui-ci est assez proche des travailleurs salariés.
En France
modifierEn France, les nourrices ont un statut particulier qui s'appelle assistante maternelle et qui nécessite un agrément et une formation professionnelle obligatoire. Une assistante maternelle accueille chez elle ou en regroupement (maison d'assistantes maternelles) de manière non permanente (11 h par jour maximum sauf dérogation), et moyennant rémunération, de un à quatre enfants maximum (quelle que soit la situation professionnelle des parents). C'est en France le mode de garde le plus employé, par choix ou par nécessité mais ce n'est que récemment que cette profession a été organisée dans un cadre statutaire précis. L'association la plus ancienne s'appelle l'UFNAFAAM. Elle a été créée en 1983, par fusion de plusieurs associations.
En France, les assistantes maternelles sont contrôlées par la Protection maternelle et infantile. L'assistante maternelle est l'un des cinq modes de garde d'enfant subventionné par l'État (voir PAJE). Le Centre National Pajemploi est l'organisme public de référence en matière de relation entre les assistantes maternelles et les parents employeurs. C'est lui qui verse par exemple le complément de libre choix du mode de garde aux parents-employeurs. Des dispositifs existent pour aider les parents à payer le salaire de leur assistante maternelle, notamment ceux de la Caf, qui peut prendre en charge une partie de la rémunération. En France, les assistantes maternelles sont rémunérées sous forme de salaire horaire par enfant. En 2019, celui-ci est de 3,52 € net par heure par enfant en moyenne, bien que de fortes variations existent selon les régions[8]. La France est le pays le moins cher d'Europe pour les assistantes maternelles, grâce à un système d'aides efficace : 119 € par mois pour une famille au revenu médian[9].
Statut professionnel
modifierIl est maintenant défini par la loi du [10] relative aux assistants maternels et aux assistants familiaux. Auparavant, il était régi par les lois 77-505 du puis 92-642 du .
Concernant les assistantes maternelles directement employées par les parents, une convention collective nationale[11] a été signée le , un an avant la parution de la dernière loi. Une nouvelle convention collective est en place depuis le 1er janvier 2022[12].
Les articles L.421-1 et suivants du code de l'action sociale et de la famille[13] définissent la profession d'« assistant maternel » comme « la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon non permanente des mineurs à son domicile ». Cette personne relève de l'emploi à domicile, même si elle travaille chez elle et non pas chez la famille qui l'emploie. L'agrément du président du conseil départemental est désormais obligatoire ; ce n'est pas le cas pour une garde d'enfant au domicile des parents.
Évolution
modifierL'intitulé de la loi de 2005 ne rend pas compte d'une réalité : cette profession est essentiellement féminine, c'est celle des « nounous », anciennement « nourrices » ou « gardiennes » (c'est toujours leur nom en Belgique). Elle distingue maintenant nettement 2 professions :
- les assistants maternels, qui accueillent des enfants confiés par leurs parents à la journée, salariés par eux ou par des organismes privés ou des collectivités territoriales (crèches familiales) ;
- les assistants familiaux, qui accueillent les enfants qui ne peuvent demeurer dans leur propre famille et qui sont placés soit à la demande des parents, soit par décision judiciaire.
Depuis 2008, les assistants maternels peuvent recevoir à leur domicile un maximum de quatre enfants de manière simultanée.
En 2010, une loi autorise le regroupement de plusieurs assistants maternelles (au maximum quatre) dans un même local et hors du domicile. Ces regroupements se nomment des maisons d’assistants maternelles (MAM).
Situation dans l'ensemble des dispositifs
modifierLa profession d'assistante maternelle s'articule avec les autres pratiques d'Accueil du Jeune Enfant - PAJE.
En Suisse
modifierEn Suisse la profession est nommée populairement maman de jour mais plus professionnellement "accueil familial de jour"[14].
Nourrices célèbres
modifierHistoire
modifier- Maïa (ou Maya), « nourrice royale » du pharaon Toutânkhamon (XIIIe siècle av. J.-C.).
- Audierne (ou Hodierna) de Saint Albans (XIIe siècle), nourrice conjointement de Richard Cœur de Lion et du philosophe Alexandre Neckam.
- Dame Kasuga (1579-1643), nourrice de Iemitsu, troisième shogun Tokugawa.
- Mrs. Pack, nourrice du souffreteux Guillaume de Danemark et de Norvège (XVIIIe siècle), considérée par les Britanniques comme l’archétype de la « nanny ».
Religions contemporaines
modifier- Déborah, personnage biblique (Genèse 35:8.) qui fut la nourrice de Rébecca, épouse d’Isaac et mère des jumeaux Esaü et Jacob.
- Bithiah, nom donné dans le Midrash rabbinique à la fille de Pharaon qui sauva Moïse des eaux (Exode 2:6).
- Agathe de Catane (IIIe siècle), vierge martyrisée devenue sainte patronne des nourrices pour l'Église catholique, fêtée le .
- Thuwaybah, puis surtout Halimah al-Sa‘diyah, nourrices du prophète Mahomet (VIe siècle).
- Joséphine Bakhita (1869-1947), esclave noire qui travailla comme nourrice auprès du consul d’Italie avant de devenir religieuse catholique et d’être canonisée en l'an 2000 par le pape Jean-Paul II.
Mythologie antique
modifier- Caieta (ou Caiete), nourrice troyenne d’Énée selon Virgile (L’Énéide) et Ovide (Les Métamorphoses).
- Euryclée, nourrice d’Ulysse puis de Télémaque, dans l’Odyssée.
- Ino, princesse thébaine de la mythologie grecque, nourrice de Dionysos.
- Plusieurs femelles animales auraient également servi de nourrices à des personnages mythologiques ou romanesques (ainsi, à l'époque contemporaine, qu'à des « enfants sauvages »). On peut citer la chèvre (ou la nymphe, selon les traditions) Amalthée pour Zeus, les colombes pour Sémiramis, la biche pour Télèphe, l'ourse pour Atalante ou pour Pâris, la simiesque femelle mangani pour Tarzan, la louve palatine pour Romulus et Rémus ou la Mère Louve de Mowgli. Selon Pseudo-Apollodore, le héros thessalien Achille (dont le nom viendrait du fait « que jamais il n’avait approché ses lèvres d’un sein ») fut nourri enfant par le centaure Chiron avec des abats de bêtes fauves. En outre, selon certaines légendes, le souverain achéménide Cyrus Ier fut allaité enfant par une chienne, tandis que les futurs rois Crésus (Lydie) et Xerxès Ier (Perse) ainsi que le futur général macédonien Lysimaque le furent par des juments.
Fictions littéraires et artistiques
modifier- Bécassine, héroïne bretonne de bande dessinée créée en 1905 (le neuvième album de la série, paru en 1922, s'intitule Bécassine nourrice).
- Iphigénie Doubtfire (Daniel Hillard, sous sa véritable identité), personnage principal du roman Quand papa était femme de ménage d'Anne Fine publié en 1987, de son adaptation cinématographique de 1993, Madame Doubtfire (Mrs. Doubtfire), réalisée par Chris Columbus avec Robin Williams dans le rôle titre, et de son adaptation théâtrale par Albert Algoud en 2003 (avec Michel Leeb).
- Fran Fine, personnage interprété par Fran Drescher dans la série télévisée américaine Une nounou d'enfer (The Nanny) créée en 1993.
- Nanny McPhee (Nounou McPhee au Québec), héroïne du film du même nom sorti en 2005 et de Nanny McPhee et le Big Bang en 2010 (avec Emma Thompson dans le rôle-titre), inspirés de la série de romans Nurse Matilda (1964-1975) de Christianna Brand.
- Mary Poppins, personnage éponyme issu du roman de Pamela L. Travers (1934), puis héroïne d'un film produit par les studios Disney (1964), avec Julie Andrews dans le rôle-titre, d'une comédie musicale créée en 2004 et d'un second film Disney (2018) avec Emily Blunt dans le rôle-titre.
- Jessie Prescott, héroïne de la série télévisée américaine Jessie, créée en 2011 sur Disney Channel, avec Debby Ryan dans le rôle titre.
- Super Nanny (Supernanny, dans sa version britannique originale), éducatrice de l'émission de téléréalité du même nom, créée en 2004 et diffusée dans de nombreux pays. En France, le rôle fut tenu par Cathy Sarraï sur M6, puis par Sylvie Jenaly, sur TFX (anciennement NT1) et TF1.
- Julie Toronto, personnage incarné par Mimi Mathy dans le téléfilm français Une nounou pas comme les autres réalisé par Éric Civanyan en 1994.
- Dans son roman Chanson douce paru en 2016, Leïla Slimani retrace le récit inspiré d'une histoire vraie d'une nourrice schizophrène, qui sera ensuite interprétée au cinéma par Karin Viard en 2019[15].
Bibliographie
modifier- Fanny Faÿ-Sallois: Les nourrices à Paris au XIXe siècle. Payot, Paris 1980 (ISBN 2-228-12760-4).
- Paulette Guigal, Michel Guigal, « Les enfants mis en nourrice en Vivarais au XVIIIe siècle : dans cahier intitulé Histoires de famille, Mariage et parenté autrefois en Ardèche », Cahier de Mémoire d'Ardèche et Temps Présent, no 28,
Notes et références
modifier- Histoire de l'allaitement en France
- Emmanuel Le Roy Ladurie, « L'allaitement mercenaire en France au XVIIIe siècle », La nourriture. Pour une anthropologie bioculturelle de l'alimentation, (lire en ligne)
- Clyde Plumauzille, « L’allaitement nourricier des petits Parisiens : naissance d’un service public au xviiie siècle », dans Paris et ses peuples au xviiie siècle, Éditions de la Sorbonne, coll. « Histoire moderne », (ISBN 979-10-351-0769-7, lire en ligne), p. 39–48
- (en) Andrew J. Schuman, « A concise history of infant formula (twist and turns included) », Contemporary Pediatrics, no 20, , p. 91-103
- Grand Dictionnaire Terminologique
- Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance
- Ministère de la Famille et des Aînés
- Chloé Barbaux, « Quel est le prix de la garde d’enfants ? », sur leparisien.fr, (consulté le )
- « Garde d’enfants: la France bien lotie », sur lefigaro.fr, (consulté le )
- Loi 2005-706 du relative aux assistants maternels et aux assistants familiaux sur Légifrance
- Légifrance : détail de la Convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur du
- Légifrance : Convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur du 1er juillet 2004. Etendue par arrêté du 17 décembre 2004 JORF 28 décembre 2004 - Remplacée par la convention collective nationale des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile du 15 mars 2021 résultant de la convergence des branches des assistants maternels et des salariés du particulier employeur (IDCC 3239)
- Voir les articles L.421-1 et suivants du code de l'action sociale et de la famille sur Legifrance
- « Accueil familial de jour (anciennement maman de jour) dans le canton de Vaud », sur vaudfamille.ch (consulté le ).
- Huffingtonpost [1]
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifier- Mode de garde d'enfant : la liste des modes de garde d'enfant
- Crèche : la crèche, un autre mode de garde d'enfant
- Enfance
- Garde d'enfant à domicile : la garde d'enfant à domicile, ou garde partagée, un autre mode de garde d'enfant
- Allaitement
- Nourrisseur
- Nourrisson
- Lactarium
- Accueil familial
- Nourrice morvandelle
Liens externes
modifier- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Ressource relative à la santé :