Longnü

Acolyte du bodhisattva Guanyin dans le bouddhisme chinois

Longnü (chinois simplifié : 龙女 ; chinois traditionnel : 龍女 ; pinyin : Lóngnǚ ; sanskrit : nāgakanya; vietnamien : Long nữ), traduit par Fille du Dragon, est considérée, avec Sudhanakumâra, comme une acolyte du bodhisattva Avalokiteśvara dans le bouddhisme chinois. Cependant, il n'existe pas de sources scripturaires reliant ensemble Sudhana et Longnü à Avalokiteśvara. Il est suggéré que ces acolytes sont des représentations de deux grands textes du bouddhisme mahāyāna, le Sūtra du Lotus et l'Avatamsaka Sutra, dans lesquels Longnü et Sudhana apparaissent, respectivement.

Avalokiteśvara avec Longnü (à sa gauche) et Sudhana (à sa droite).

La représentation du couple Longnü et Sudhana avec Avalokiteśvara peut avoir été influencée par la petite fille de jade (chinois : 玉女 ; pinyin : Yùnǚ) et le jeune garçon d'or (chinois simplifié : 金童 ; chinois traditionnel : 金僮 ; pinyin : Jīntóng) qui apparaissent dans l'iconographie de l'Empereur de jade. Elle est présentée comme étant la fille du Roi-dragon[note 1] de la Mer Orientale, âgée de huit ans[1].

Dans le Sūtra du Lotus

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La fille du roi-dragon présente son joyau inestimable pour le Bouddha ; frontispice du XIIe siècle dans le Sūtra du Lotus Heike Nokyo[2].

Longnü est présentée dans le douzième chapitre du Sūtra du Lotus (Skt. Saddharma Puṇḍarīka Sūtra) comme étant pleine de sagesse, ce qui lui permet d'atteindre l'illumination instantanée[3],[4]. Dans le Sūtra du Lotus, le bodhisattva Manjushri parle de lui-même, disant[3] :

« Il y a la fille du roi nāga Sāgara qui a seulement huit ans. Elle est sage ; ses facultés sont aiguisées ; elle est également bien pourvue de toutes les facultés et des actes des êtres sensibles. Elle a acquis le pouvoir de recueillement[note 2]. Elle conserve tout le profond secret des trésors des Bouddhas, pénètre profondément dans la méditation, et est tout à fait capable de discernement de tous les dharmas. Elle a immédiatement produit la pensée des lumières (Skt. bodhicitta) et a atteint le stade de non-régression, etc. Elle a de l'éloquence sans entrave et pense aux êtres sensibles avec beaucoup de compassion, comme s'ils étaient ses propres enfants. Ses vertus sont parfaites. Ses pensées et ses explications sont subtiles et vastes, miséricordieuses et compatissantes. Elle a un esprit harmonieux et a atteint l'illumination »

Cependant, le disciple de Bouddha nommé Śāriputra, un Shravakayana[7], ne pense pas qu'une femme puisse atteindre l'état de bouddha[8],[3],[note 3]. En réponse, la fille du dragon offre une perle au Bouddha, symbole de sa vie et de l'ego, qu'il accepte[10]. Elle se transforme ensuite instantanément en un parfait bodhisattva de sexe masculin, puis atteint l'illumination complète[10],[11],[12].

Selon Schuster, le propos du Sūtra du Lotus « est dirigé contre la notion que certains corps (de sexe masculin) seraient adaptés pour les plus hautes destinées, et d'autres corps (féminins) ne le seraient pas »[13].

Dans le bouddhisme Chán, cette histoire a été considérée comme un exemple pour souligner le potentiel de l'éveil soudain[12],[14]. Dans certains autres sutras, elle offre la perle au Bodhisattva Avalokiteśvara.

Dans les contes populaires

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Conte des Mers du Sud

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Un chapitre des Contes d'Avalokiteśvara et des Mers du Sud (chinois : 南海觀音全傳 ; pinyin : Nánhǎi Guānyīn Quánzhuàn), un roman du seizième siècle, paru sous la Dynastie Ming, est le premier texte qui cite Longnü et Sudhana comme étant les acolytes d'Avalokiteśvara. Quand le troisième fils du Roi-dragon va nager dans la mer sous la forme d'une carpe, il est capturé par un pêcheur. Incapable de se transformer en dragon car piégé sur terre, il est vendu et sur le point d'être massacré sur le marché local. Lorsqu'Avalokiteśvara apprend sa situation. Elle donne alors tout son argent à Shancai et l'envoie acheter la carpe sur le marché pour la libérer. La carpe est encore en vie plusieurs heures après avoir été prise, ce qui attire une grande foule, et bientôt des enchères violentes commencent, les gens croyant que la consommation de ce poisson leur accordera l'immortalité. Shancai n'arrive pas à surenchérir, et demande le poisson vivant au vendeur en échange de la somme apportée, mais en vain, s'attirant le mépris de la part des gens sur le marché. C'est alors qu'Avalokiteśvara fait entendre sa voix, de loin, en disant : « Une vie n'appartient qu'à celui qui tente de la sauver, non pas à celui qui essaie de la prendre ». La foule se rend compte de son erreur et se disperse aussitôt. Shancai ramène la carpe à Avalokiteśvara, et le fils du Roi-dragon retourne à la mer.

En gage de gratitude, le Roi-dragon demande à Ao Guang d'apporter la Perle de la Lumière à Avalokiteśvara, mais la petite-fille se porte volontaire pour le faire à sa place. Après avoir offert la perle à Avalokiteśvara, elle décide de rester avec elle et de devenir sa disciple dans l'apprentissage du Dharma bouddhiste[15].

Elle est souvent assimilée à la forme féminine du bodhisattva Guanyin des Mers du Sud (南海 Nanhai Guanyin).

Notes et références

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  1. chinois simplifié : 龙王 ; chinois traditionnel : 龍王 ; pinyin : Lóng Wáng ; sanskrit: nāgarāja
  2. Watson et Kato laissent le terme dhāraṇī (Kubo: souvenir) non-traduit.[5],[6]
  3. Ueki states, "Although Hinayana Buddhism denied lay believers, especially women, the ability to attain Buddhahood, the Lotus Sutra affirmed the ability of all living beings to do so, including women. This teaching seems to be the original intent motivating the creation of the Lotus Sutra." [9]

Références

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  1. Wilt 2008, p. 30.
  2. Abe 2015, p. 29.
  3. a b et c Kubo 2007.
  4. Meeks 2010, p. 68.
  5. Kato 1975, p. 134.
  6. Watson 2009, p. 226.
  7. Levering 2013, p. 149.
  8. Peach 2002, p. 56.
  9. Ueki 2003, p. 278.
  10. a et b Kubo 2007, p. 193.
  11. Murano 1967, p. 46.
  12. a et b Levering 1982.
  13. Schuster 1981, p. 44.
  14. Meeks 2010.
  15. Chinese Customs - Avalokiteśvara.

Bibliographie

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  • [Abe 2015] (en) Ryuchi Abe, « Revisiting the Dragon Princess: Her Role in Medieval Engi Stories and Their Implications in Reading the Lotus Sutra », Japanese Journal of Religious Studies, vol. 42, no 1,‎ , p. 27–70 (lire en ligne)
  • Bunno Kato, Yoshirō Tamura et Kōjirō, trans. Miyasaka, The Threefold Lotus Sutra : The Sutra of Innumerable Meanings; The Sutra of the Lotus Flower of the Wonderful Law; The Sutra of Meditation on the Bodhisattva Universal Virtue, New York/Tōkyō, Weatherhill & Kōsei Publishing, (lire en ligne)
  • (en) Tsugunari Kubo et Akira Yuyama (trad. du chinois), The Lotus Sutra, Berkeley, Calif., Numata Center for Buddhist Translation and Research, , 2, révisée éd., 362 p. (ISBN 978-1-886439-39-9, lire en ligne)
  • [Levering 1982] (en) Miriam L. Levering, « The Dragon Girl and the Abbess of Mo-Shan: Gender and Status in the Ch'an Buddhist Tradition », Journal of the International Association of Buddhist Studies, vol. 5, no 1,‎ , p. 19–36 (lire en ligne)
  • [Levering 2013] (en) Miriam L. Levering, « The Dragon Daughter », dans Little Buddhas : Children and Childhoods in Buddhist Texts and Traditions, Oxford ; New York, Oxford University Press, (lire en ligne)
  • Lori Rachelle Meeks, Hokkeji and the reemergence of female monastic orders in premodern Japan, Honolulu, University of Hawaii Press, (lire en ligne)
  • (en) Senchu Murano, « An Outline of the Lotus Sūtra », Contemporary Religions in Japan, vol. 8, no 1,‎ , p. 16-84 (lire en ligne)
  • (en) Lucinda Joy Peach, « Social responsibility, sex change, and salvation: Gender justice in the Lotus Sūtra », Philosophy East and West, vol. 52,‎ , p. 50-74 (lire en ligne)
  • (en) Nancy Schuster, « Changing the Female Body: Wise Women and the Bodhisattva Career in Some Maharatnakutasutras », Journal of the International Association of Buddhist Studies, vol. 4, no 1,‎ , p. 24–69 (lire en ligne)
  • (en) Masatoshi Ueki, « The Story of the Dragon King´s Daughter », dans Images of women in Chinese thought and culture, writings from the pre-Qin period through the Song dynasty, Indianapolis, Hackett Pub., (ISBN 0872206521)
  • (en) Burton Watson, The Lotus Sutra and Its Opening and Closing Chapters, Tokyo, Soka Gakkai, (ISBN 978-4-412-01409-1, lire en ligne)
  • (en) Wilt L. Idema, Personal salvation and filial piety : two precious scroll narratives of Guanyin and her acolytes, Honolulu (Hawaii), University of Hawaii Press, , 227 p. (ISBN 978-0-8248-3215-5, lire en ligne)
  • (en) Bernard Faure, The Power of Denial : Buddhism, Purity, and Gender, Princeton University Press, , 91–99 p. (ISBN 978-0-691-09171-6, lire en ligne)
  • (en) Paul Groner, « The Lotus Sutra and Saicho´s Interpretation of Realization of Buddhahood with This very Body », dans The Lotus Sutra in Japanese culture, Honolulu, University of Hawaii Press, (ISBN 0824811984, lire en ligne), p. 53–74