Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire

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La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) ou loi no 2020-105 du relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire est une loi française promulguée le [1].

Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire

Présentation
Titre loi no 2020-105 du relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire
Sigle Agec
Référence NOR : TREP1902395L
Pays Drapeau de la France France
Langue(s) officielle(s) Français
Type Loi ordinaire
Adoption et entrée en vigueur
Régime Ve République
Législature XVIe législature
Gouvernement Gouvernement Élisabeth Borne
Promulgation 10 février 2020

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Objectif

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La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) vise notamment à « [interdire] la destruction de matériel invendu, propose d’introduire un « indice de réparabilité » des appareils électriques et électroniques, ou d’obliger les vendeurs à indiquer si les pièces détachées pour les réparer sont disponibles ou non », prévoit « une meilleure organisation des filières de gestion des déchets dans le bâtiment, au cœur de la problématique des décharges sauvages, et crée six nouvelles filières de « responsabilité élargie du producteur » (REP), dont le tabac, les lingettes sanitaires, les articles de bricolage et de jardinage, ou encore de sport, comme les vélos »[2]. The New York Times relève en particulier que la loi prévoit l'interdiction de l'incinération des produits neufs invendus, ce qui fait de la France la première à adopter une telle mesure selon l'ancien Premier ministre Édouard Philippe[3].

Adoption

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En , l'adoption à l'Assemblée nationale d'un amendement au projet de loi ayant pour objectif d’interdire la « mise sur le marché des emballages plastiques à usage unique d’ici 2040 », suscite des critiques sur le délai choisi au sein de la classe politique et de la part de certains journalistes. L'association Zero Waste France déplore le fait que « les amendements qui permettent de tenir l'objectif d'interdiction des plastiques à usage unique pour 2040 n'ont pas été votés en commission par la majorité »[4],[5].

Mise en application

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Le , les confettis en plastiques, les pailles, les couverts en plastiques sont interdits de ventes, alors que les assiettes et les verres en plastique et les coton-tiges étaient interdits un an plus tôt[6].

Le , les produits non alimentaires invendus ne peuvent être détruits par les magasins mais doivent être donnés, réutilisés ou recyclés[7],[8]. Une partie importante des enseignes concernées respectent peu ou pas cette obligation lors de sa mise en place[9],[10]. À la même date, les établissements recevant plus de 300 personnes simultanément ont pour obligation d'être équipés d'une fontaine à eau accessible aux visiteurs. Cette obligation est peu respectée en 2024[11],[12].

Le , les enseignes de la restauration rapide (ainsi que les cafétérias et les restaurants d'entreprises[13]) ont pour obligation d'utiliser de la vaisselle réutilisable et non jetable[14]. À cette date d'entrée en vigueur, une partie significative des enseignes ne sont pas en capacités de respecter cette obligation, donnant lieu à une mise en conformité durant les premiers mois de 2023[13],[15]. La fin de l'impression systématique du ticket de caisse devait être mise en place à la même date, mais est finalement mise en application le , après avoir été repoussée une première fois au [16],[17].

Le , l’obligation inscrite dans la loi de permettre le tri des biodéchets entre en vigueur pour les particuliers et les professionnels[18]. Selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), seuls 20 millions de Français ont la possibilité de trier leurs biodéchets à cette date[19]. Les collectivités qui ne mettent pas en application cette loi ne peuvent pas être l'objet de sanctions[20]. Plusieurs intercommunalités, notamment à Lorient, Lyon et Poitiers, ont au contraire anticipé la mesure[21]. À la même date, les fruits et légumes ne peuvent plus être emballés de film étirable, sauf exceptions comme les fruits rouges, les lots de plus de 1,5 kilogramme, les champignons ou la salade[22]. Cette application entre en vigueur après deux tentatives de décrets d'applications[23].

Le , les lave-linges neufs doivent être équipés de filtres pour les particules de microplastique, qui représentent une part significative de la pollution par le plastique des océans[24].

Selon un premier bilan produit après trois ans par cinq ONG (Zero Waste France, Surfrider Foundation Europe, Les Amis de la Terre, France Nature Environnement et No Plastic in my Sea), par « manque de volonté politique » la loi anti-gaspillage de 2020 est en échec : bien qu'elle ait fixé un objectif de réduction de 15 % des déchets ménagers et assimilés en 2030 par rapport à 2010, la production de déchets a au contraire encore augmenté, passant de 590 kg par habitant en 2010 à 611 kgen 2021 selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe)[25].

Ces ONG reconnaissent deux petites avancées[25] : la généralisation des gobelets réutilisables dans les festivals et la suppression des pailles en plastique et des gobelets en polystyrène expansé. Mais elles dénoncent[25] :

  • le manque d’agents de contrôles et le manque de sanctions (ex. : baisse de la répression des fraudes ; la DGCCRF a perdu 911 agents en 15 ans) ;
  • le manque de moyens : ex. : le volet obsolescence programmée de la loi AGEC se montre peu efficace (le bonus réparation semble encore trop faible pour inciter à faire réparer) ;
  • un lobbying intense des industriels, qui a « détricoté » la loi. Ainsi :
    • un décret d'application, mi-2023 a accordé 29 exemptions à l'interdiction d'emballage plastique pour les fruits et légumes,
    • les ONG en contestent le bien-fondé pour nombre de légumes (carottes, champignons, endives, pommes de terre),
    • gobelets et sacs en plastique à usage unique : bien qu’interdits ils restent omniprésents et facilement disponibles à l'achat,
    • suppression des bouteilles en plastique ? selon ces ONG, seul un quart des établissements recevant du public (ERP) a mis en place un dispositif de distribution gratuite d'eau.
      Et selon l'Ademe, le nombre de bouteilles mises sur le marché a encore crû de 4 % en un an, entre 2021et 2022.

Les ONG demandent en [25] :

  • une instance de contrôle indépendante ;
  • une deuxième loi Agec, alors qu'une mission d'évaluation parlementaire est en train d'évaluer la première ;
  • une obligation pour les entreprises de mettre en place des « plans de prévention d'écoconception »[25].

Références

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  1. « Loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire », sur vie-publique.fr, (consulté le ).
  2. Manon Rescan et Rémi Barroux, « Le retour de la consigne en France rejeté par les sénateurs », Le Monde, (consulté le ).
  3. Louis Nadau, « "Ministre officieuse de la mode" : pour Brune Poirson, le New York Times fait du sur-mesure », Marianne, (consulté le ).
  4. Romain Herreros, « L'interdiction des plastiques à usage unique en 2040 a du mal à convaincre », Le HuffPost, (consulté le ).
  5. Marie-Pierre Haddad, « Fin du plastique à usage unique : pourquoi faudra-t-il attendre 20 ans ? », sur RTL, (consulté le ).
  6. Muryel Jacque, « Environnement : pailles, couverts et touillettes en plastique disparaissent de la circulation »  , Les Échos, .
  7. Florence Bray, « Destruction des invendus non-alimentaire : une interdiction encore méconnue et des pratiques insuffisantes »  , sur Libre Service Actualités, .
  8. Marion Kindermans, « Don, déstockage… les pistes des PME pour ne plus jeter les invendus non alimentaires »  , Les Échos, .
  9. Sarah Dumeau, « Pourquoi les marques textiles continuent-elles à détruire des invendus ? »  , Les Échos, .
  10. Alexandre Le Mer, « Invendus non alimentaires : «Une grande partie part encore à la poubelle», regrette Pierre-Yves Pasquier »  , sur Europe 1, .
  11. « Déploiement de points d'eau dans l'espace public : 75 % des lieux concernés ne respectent pas la loi »  , sur France Info, (consulté le ).
  12. Stéphane Mandard, « Malgré la loi, les points d’eau potable font toujours défaut dans les lieux publics pour réussir à réduire l’usage des bouteilles en plastique »  , Le Monde, (consulté le ).
  13. a et b « Quarante enseignes de fast-food promettent d’utiliser de la vaisselle réutilisable « d’ici fin juin » »  , sur 20 Minutes, .
  14. Stéphane Mandard, « Le jetable dans les fast-foods, c’est (presque) fini »  , Le Monde, .
  15. « Fin de la vaisselle jetable dans les fast-foods : les délicats premiers jours d'une mesure symbolique »  , Le Figaro, .
  16. Julien Lemaignen, « La fin de l’impression systématique des tickets de caisse fait débat : « Le grand gagnant, c’est le commerçant » »  , Le Monde, .
  17. Élisabeth Montaufray-Bureau, « Ticket de caisse : cinq questions sur la fin de l’impression automatique qui s’applique au 1er août »  , Ouest-France, .
  18. Yannick Picard, « Esnandes : quelle solution pour les biodéchets ? », Sud Ouest, .
  19. Christophe Palierse, « Biodéchets : une nouvelle donne délicate pour les villes »  , Les Échos, .
  20. « Loi anti-gaspillage : Seine Normandie Agglomération se prépare au tri des biodéchets »  , sur Actu.fr, .
  21. Marie Astier, « De Lyon à Poitiers, ces villes qui sont déjà passées au compost »  , Reporterre, .
  22. « Alimentation : vers la suppression des emballages plastique pour les fruits et légumes »  , sur France Info, .
  23. « Interdiction des emballages plastiques : un casse-tête pour les fruits et légumes »  , sur Plein Champ, .
  24. Fabienne Loiseau, « Lave-linge : les filtres à microplastiques sont-ils efficaces ? »  , Reporterre, .
  25. a b c d et e « La loi antigaspillage, mal appliquée, n’a pas réduit le volume des déchets », sur 20 Minutes, (consulté le ).