La France a peur
« La France a peur » est la phrase d'ouverture du journal télévisé de TF1 du , prononcée par le présentateur Roger Gicquel le lendemain de l'arrestation du meurtrier de Philippe Bertrand dans l'affaire Patrick Henry.
La phrase est souvent tronquée et utilisée hors de son contexte original, ce qui la détourne de son sens initial (cette phrase n’est en effet que le début d’une longue tirade disant que justement, il ne faut pas s’adonner à la peur : c'est une argumentation contre toute tentative de vengeance et de justice expéditive).
Contexte
modifierLe 30 janvier 1976, vers 12 h, à Troyes, Patrick Henry enlève Philippe Bertrand[1], âgé de sept ans, à la sortie de son école. Suspecté de l'enlèvement, Patrick Henry est placé en garde à vue le mais, faute de preuves, la police le remet en liberté, le . Interrogé par les médias lors de sa sortie, Patrick Henry déclare qu'il est « innocent » et que « le véritable criminel mérite la peine de mort pour s'en être pris à un enfant »[2]. Après enquête, la police arrête de nouveau Patrick Henry le dans une chambre d'hôtel qu'il louait. Dans cette chambre, sous le lit, se trouve le corps de Philippe Bertrand enroulé dans un tapis. Patrick Henry confesse alors le meurtre au juge d'instruction.
La citation
modifierLe , Roger Gicquel ouvre le journal télévisé de TF1 par les propos suivants :
« Bonsoir. La France a peur. Je crois qu'on peut le dire aussi nettement. (...) Oui, la France a peur et nous avons peur, et c'est un sentiment qu'il faut déjà que nous combattions je crois. Parce qu'on voit bien qu'il débouche sur des envies folles de justice expéditive, de vengeance immédiate et directe, et comme c’est difficile de ne pas céder à cette tentation quand on imagine la mort atroce de cet enfant. (…)[3] »
Interprétation
modifierLa phrase « la France a peur » est bien souvent interprétée à contresens car, prise seule et hors du contexte de la phrase entière, elle semble anxiogène. En réalité, cette phrase n'avait pas d'autre but que d'introduire une argumentation contre toute tentative de vengeance et de justice expéditive[4],[5].
Elle fait polémique à l'époque, alimentant le climat de peur[6].
Notoriété de la phrase
modifierL'expression a été réutilisée dans plusieurs contextes :
- Mickey 3D en 2000. Cette chanson est le premier single du groupe[7]. Elle attaque le conformisme représenté par le journal télévisé[6] ;
- La France a peur de Nic Oumouk est le deuxième album de la série de bande dessinée Nic Oumouk de Manu Larcenet, publié en avril 2007 ;
- L'auteur Laurent Bonelli a écrit un livre intitulé La France a peur, qui a pour sous-titre Une histoire sociale de « l'insécurité » et dont le sujet a fait l'objet d'une thèse universitaire par l'auteur.
- Elle a été utilisée par le Joueur du Grenier dans son épisode 11 ans de JDG - Partie 2.
- La phrase est samplée dans la chanson Jazz trash assassin du groupe Lofofora, première chanson de leur second album Peuh !
Notes et références
modifier- « La demande de grâce de Patrick Henry rejetée par Hollande ». Article publié le 17 juillet 2014 dans Le Parisien.
- Paul Cassia, Robert Badinter : un juriste en politique, Fayard, , p. 121.
- Institut National de l’Audiovisuel- Ina.fr, « Roger Gicquel et l'affaire Patrick Henry : "la France a peur" », sur Ina.fr (consulté le ).
- « Plateau Roger Gicquel : La France a peur », Institut national de l'audiovisuel, France (consulté le ).
- « Roger Gicquel, la France en pleurs », Libération.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- « «La France a peur» : la phrase historique de Roger Gicquel lors de l'affaire Patrick Henry », sur tvmag.lefigaro.fr, (consulté le ).
- Sébastien Bataille, Mickey 3D : de A à Z, Paris, Express Éditions, , 114 p. (ISBN 2-84343-368-1), p. 113.
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- Christian Delporte, « De l'affaire Philippe Bertrand à l'affaire Patrick Henry. Un fait-divers dans l'engrenage médiatique », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, no 58, , p. 127-143 (lire en ligne)