Jeanne Jugan
Sainte Jeanne Jugan, en religion sœur Marie de la Croix, née à Cancale (Ille-et-Vilaine) le [2], et morte à Saint-Pern le [2], est une religieuse française, fondatrice de la congrégation des Petites Sœurs des pauvres. Humble fille du peuple, simple servante, émue de pitié à la vue des vieillards qui mouraient dans l'abandon, elle fonda à Saint-Servan un institut qui, depuis, n'a cessé de prospérer.
Jeanne Jugan | |
Sainte Jeanne Jugan, tableau de Léon Brune (1855)[1]. | |
Sainte , fondatrice | |
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Naissance | Cancale, Première République |
Décès | (86 ans) Saint-Pern, Troisième République |
Nationalité | Française |
Béatification | par Jean-Paul II |
Canonisation | Rome par Benoît XVI |
Vénéré par | Église catholique |
Fête | 29 août |
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Elle a été béatifiée en 1982 par Jean-Paul II, et a été canonisée par Benoît XVI le [2]. Sa fête est le 29 août[3].
Biographie
modifierLe , Jeanne Jugan naît près de Cancale, au hameau des Petites-Croix, un petit port de pêche sur la Manche, au sein d'une famille de pêcheurs. Elle est baptisée le jour de sa naissance en l'église Saint-Méen de Cancale, son nom est orthographié Joucan sur son acte de baptême dans le registre paroissial[4]. Son parrain est Guillaume Cléreaux et sa marraine Marie Blanchet. Elle est le sixième enfant de Joseph Jugan et de Marie Horel. Son père disparaît en mer alors qu'elle n'a que 4 ans. Elle fait sa première communion peu après la signature du concordat de 1801[5]. Puis après la disparition en 1806 de l'aîné des enfants disparu lui aussi en mer, elle part aider sa famille en se mettant au service de la vicomtesse de la Chouë à Saint-Coulomb comme aide-cuisinière[6].
En 1810, un jeune marin la demande en mariage : elle souhaite réfléchir. Six ans plus tard, à la suite d'une mission prêchée dans la paroisse et prête à « coiffer sainte Catherine »[7], elle décline définitivement la demande du marin :
- « Dieu me veut pour lui. Il me garde pour une œuvre qui n'est pas connue, pour une œuvre qui n'est pas encore fondée[8] ».
En 1817, en dépit de son attachement à sa famille, elle quitte Cancale pour Saint-Servan (commune alors indépendante de Saint-Malo). Elle entre comme aide à la pharmacie de l'hôpital du Rosais. En 1823, à cause d'une trop grande fatigue, elle se met au service de Mlle Lecoq, avec qui elle s'était liée d'amitié. Ensemble, elles visitent les nombreux pauvres de la paroisse, récitent le chapelet, fréquentent l'église régulièrement. C'est à cette époque qu'elle obtient son affiliation au tiers-ordre eudiste[9]. Mais en 1835, Mlle Lecoq meurt. Jeanne Jugan devient journalière.
Deux ou trois ans plus tard, avec une amie, Françoise Aubert, dite « Fanchon », elle loue un appartement au no 2 de la rue du Centre, à Saint-Servan.
Au début de l'hiver 1839, acte fondateur de ce qui allait devenir les Petites Sœurs des Pauvres[10], elle recueille une vieille femme aveugle et infirme, Anne Chauvin, qu'elle aide et à qui elle donne son lit. Elle-même s'installe au grenier ; elle a alors 47 ans.
Dans les années qui suivent, quelques jeunes femmes viennent l'assister dans sa nouvelle tâche, les personnes recueillies étant de plus en plus nombreuses. Une petite communauté se forme. Deux ou trois années plus tard, elle commence la quête. En mai 1842, la petite association précise son règlement de vie et de travail hospitalier, inspiré de la règle des Frères de Saint-Jean-de-Dieu. Jeanne Jugan en est élue la supérieure religieuse, en présence de l'abbé Auguste Le Pailleur, vicaire à Saint-Servan. Le nom de « Servantes des Pauvres » est adopté.
En décembre 1843, Jeanne Jugan est réélue supérieure. Quelques jours plus tard, de sa propre autorité, l'abbé Le Pailleur, commence à prendre le contrôle sur la congrégation[11], annule l'élection et choisit Marie Jamet, sa fille spirituelle, une des trois autres membres, pour la remplacer.
En 1844, les « Servantes des Pauvres » deviennent les « Sœurs des Pauvres ». L'année suivante, l'Académie française décerne à Jeanne Jugan, pour son œuvre, le prix Montyon[12]. Elle devient célèbre, les journalistes s'intéressent à elle.
En 1846, elle fonde deux nouvelles maisons à la Piletière, à Rennes, et à Dinan. D'autres maisons sont ouvertes en France. Le romancier anglais Charles Dickens vient visiter une des maisons. En 1849, la congrégation adopte définitivement le nom de Petites Sœurs des pauvres.
En 1852, Jeanne Jugan est définitivement écartée par l'abbé Le Pailleur de toute responsabilité dans la congrégation. Il lui signifie qu'elle doit « cesser toute relation suivie avec les bienfaiteurs ». Elle doit « se considérer comme une simple sœur, sans autorité ni responsabilité ». Jeanne Jugan est reléguée au noviciat de Saint-Pern. Aux novices, on enseigne que l'abbé Le Pailleur est le fondateur de la congrégation.
Les dernières années de Jeanne Jugan se passent là avec elles ; et elle meurt le .
En 1890 l’abbé Le Pailleur, après une enquête demandée par le Saint-Siège, est destitué et appelé à Rome où il acheva sa vie dans un couvent[11],[13]
Béatification et canonisation
modifierJeanne Jugan est béatifiée le par le pape Jean-Paul II[14],[15]. S'ouvre alors la procédure en vue de sa canonisation.
Le Dr Edward Erwin Gatz, médecin américain du Nebraska, est reconnu guéri d'un cancer de l'œsophage à la suite d'une neuvaine à la bienheureuse Jeanne Jugan, en 1989[12]. Ce miracle est retenu pour le dossier de canonisation.
Le , le décret de la congrégation pour les causes des saints reconnaissant le miracle par l’intercession de la Bienheureuse Jeanne Jugan est promulgué et le , cinq bienheureux, dont Jeanne Jugan, sont canonisés lors d'une messe présidée par le pape Benoît XVI place Saint-Pierre au Vatican, portant à 28 le nombre de saints proclamés depuis le début du pontificat.
Postérité
modifierEn 2009, 2 710 religieuses accueillaient plus de 13 000 résidents dans deux cents maisons sur les cinq continents[16]. La congrégation a une branche de laïcs associés.
À Saint-Servan, elle a donné son nom (liste non exhaustive) à une rue et à un cimetière et à Lyon, à un parc. Dans plusieurs autres villes elle a également donné son nom à d'autre rues Jeanne-Jugan (Saint-Étienne, Villefranche-sur-Saône, Marseille, Clermont-Ferrand, Nevers, Rennes[17], Angers, Granville), à deux avenues (Colayrac-Saint-Cirq, Nantes. Des maisons de retraite portent également son nom : Un EHPAD à Laval ainsi qu'à Angers dans la rue à son nom, une Maison de Famille à Dunkerque dans la rue à son nom, une résidence Jeanne Junan à La-Ville-Aux-Dames.
Sa maison natale à Cancale a été aménagée en musée, géré par Les Petites Sœurs des Pauvres.
Notes et références
modifier- Le tableau de Jeanne Jugan, réalisé par Léon Brune en 1855, Petites Sœurs des pauvres.
- « Dossier de presse », sur www.eglise.catholique.fr (consulté le )
- Ste Jeanne Jugan, vierge et fondatrice († 1879), fête le 29 août, L'Évangile au Quotidien.
- Registre paroissial de l'église Saint-Méen de Cancale, archives départementales d'Ille-et-Vilaine.
- Helleu 1938, p. 1-3.
- Jeanne Jugan, une sainte cancalaise au service des pauvres, article du Télégramme (20/03/2022).
- Coiffer sainte Catherine, La France pittoresque.
- Cité par Helleu 1938, p. 6.
- Helleu 1938, p. 10.
- « Site internet actuel des Petites Sœurs des Pauvres »
- « L’abbé Le Pailleur – « Vous m’avez volé mon œuvre » (1852-1856) »
- Benoît XVI canonise une Bretonne Article du Figaro 10/2009
- Eloi Leclerc (premier ouvrage cité) ; Paul Milcent (deuxième ouvrage), "Sainte Jeanne Jugan - Tendresse de Dieu pour la Terre, DDB, p. 24-27" et "Jeanne Jugan - Fondatrice des Petites Sœurs des Pauvres, p. 45-48"
- Discours du pape Jean-Paul II aux pèlerins de la bienheureuse Jeanne Jugan, deux mois avant sa béatification
- La Documentation Catholique N° 19 : La béatification de Jeanne Jugan, 1982
- quotidien Le Figaro,
- « Rue Jeanne Jugan (à Rennes) La rue Jeanne Jugan a été dénommée par délibération du conseil municipal du 11 décembre 1931 » [Rennes Métropole], sur Wiki-Rennes métropole,
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- Arsène Helleu, Une grande bretonne, Jeanne Jugan (Sœur Marie de la Croix), fondatrice des Petites Sœurs des pauvres 1792-1879, Rennes, H. Riou-Reuzé, (lire en ligne)
- Ombline de La Villéon, Jeanne Jugan, Fondatrice des Petites Sœurs des pauvres, La Bonne Presse, Paris, 1939.
- Agnès Goldie, Jeanne Jugan, 1959
- (en) Cardinal Gabriel-Marie Garrone, Poor in spirit - the spirituality of Jeanne Jugan, foundress of the Little Sisters of the Poor, Darton, Longmann & Todd, 1975.
- Paul Milcent, Jeanne Jugan, humble pour Aimer, Le Centurion, Paris, 1978.
- Claude Langlois, « « Je suis Jeanne Jugan ». Dépendance sociale, condition féminine et fondation religieuse », Archives de sciences sociales des religions, t. 52, no 1, , p. 21-35. (lire en ligne)
- Mgr André-M. Cimichella, Bienheureuse Jeanne Jugan, fondatrice des Petites Sœurs des pauvres, Éditions Jésus-Marie et notre temps, Montréal, 1983.
- Les Archives départementales d'Ille-et-Vilaine possèdent un Fonds Jeanne Jugan (1 J 354), provenant d'un don de la congrégation. Les 35 articles sont principalement des ouvrages de Paul Milcent, Francis Trochu, Maria Winowska, entre autres.
- Mgr Francis Trochu, Jeanne Jugan, éditions Via Romana, Versailles, 2009. (ISBN 978-2-916727-56-1)
- Éloi Leclerc, Jeanne Jugan, le Désert et la Rose, Desclée de Brouwer, 2000
- Éloi Leclerc, Sainte Jeanne Jugan, Tendresse de Dieu pour la Terre, DDB, 2009
- Film documentaire Jeanne Jugan - La première Petite Sœur des Pauvres, réalisé par Yves-Marie Geffroy et Marc Bellay - durée 26 min
Liens externes
modifier
- Ressource relative à la religion :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- [audio] [vidéo] Pages consacrées à Jeanne Jugan, Petites Sœurs des pauvres
- Site officiel de la congrégation des Petites Sœurs des pauvres
- [vidéo] Présentation d'un DVD consacré à Jeanne Jugan et à son œuvre
- Site des Petites Sœurs des pauvres de Belgique