JEM-EUSO, acronyme de Joint Exploratory Missions for Extreme Universe Space Observatory ou Extreme Universe Space Observatory onboard Japanese Experiment Module, désigne un ensemble de projets d'observatoires spatiaux de rayons cosmiques à ultra haute énergie (> 5x1019 eV).

JEM-EUSO
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Logo de la Collaboration JEM-EUSO
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Lancement de EUSO-SPB2 (Super Pressure Balloon II) par la collaboration JEM-EUSO, Mai 2023
Données générales
Pays Algérie, Allemagne, France, Italie, Japon, Mexique, Pologne, Russie, Slovaquie, Suède, Tchéquie, USA, Corée du Sud, Espagne, Roumanie, Suisse.
Agence CNES, European Space Agency, NASA, Agence spatiale italienne, JAXA...
Objectifs Détection de Rayons cosmiques d'ultra-haute énergie depuis l'espace.
Nombre de missions 6




Membres

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Les missions sont réalisés conjointement par 12 pays membres (Algérie, Allemagne, France, Italie, Japon, Mexique, Pologne, Russie, Slovaquie, Suède, Tchéquie, USA) et 4 pays associés (Corée du Sud, Espagne, Roumanie, Suisse)[1].

Historique du projet

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JEM-EUSO est la concrétisation de deux projets développés à la fin des années 1990 pour observer les rayons cosmiques d'ultra-haute énergie : respectivement les projets OWL (Orbiting Wide-angle Light-collector)[2] de la NASA et Airwatch[3] de chercheurs italiens.

Au début des années 2000, l'Agence spatiale européenne sélectionne pour son laboratoire spatial Columbus présent sur l'ISS l'expérience EUSO (Extreme Universe Space Observatory) pour l'étude des rayons cosmiques. En 2004, ce projet passe avec succès la phase A mais, à la suite de problèmes financiers rencontrés par l'agence spatiale, les travaux sont interrompus.

Le projet est repris en 2007 par l'Agence spatiale japonaise (JAXA) en collaboration avec 95 institution de 16 pays différents (Algérie, États-Unis d'Amérique, Japon, Russie, Corée du Sud...). Le nouveau projet baptisé JEM-EUSO (JEM : module spatial japonais de la station spatiale internationale) devait être lancé initialement en 2015 par une fusée japonaise H2-B en tant que charge utile externe d'un cargo spatial HTV[4]. Des prototypes à échelle réduite destinés à mettre au point l'instrument ont été testés au sol (EUSO-TA, 2013[5]) puis en vol dans le cadre de missions aéroportées (EUSO-BALLOON, 2014[6]) organisées par le CNES.

Suite aux résultats encourageants de ces missions, la collaboration perçoit des financements successifs pour améliorer et diversifier ses techniques de détections. TUS[7] (Tracking Ultraviolet Setup) est une mission placée en orbite en 2016 à bord du satellite Mikhaïl Lomonossov. Puis suit EUSO-SPB en 2017[8], un vol ballon à 38 km d'altitude. Le module MINI-EUSO est embarqué et installé sur l'ISS en 2019[9] , en 2023, c'est EUSO-SPB2, un second vol ballon, qui décolle.[10]

La prochaine mission de la collaboration, EUSO-SPB3/PBR, est prévue pour 2027.

Principes de détection

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L'observation des rayons cosmiques se fait traditionnellement depuis des observatoires terrestres, soit en détectant et analysant les gerbes de particules produites par la collision du rayon cosmique avec l'atmosphère terrestre, soit en observant la fluorescence de l'atmosphère générée par le rayon cosmique incident. Pour détecter un nombre d'évènement statistiquement significatif, les observatoires terrestres doivent couvrir une très grande surface (à l'instar de l'Observatoire Pierre Auger d'une superficie de  ). JEM-EUSO propose de contourner cette contrainte en observant la fluorescence depuis des observatoires spatiaux. Chaque détecteur embarqué pointant vers le sol possède alors un très grand volume de l'atmosphère dans son champ de vue.

La fluorescence génère un rayonnement ultraviolet. Les photons des gerbes de particules créées par la pénétration des rayons cosmiques dans l'atmosphère sont également observées lorsqu'ils sont réfléchis par le sol. Le télescope ultraviolet enregistre la trace laissée par la gerbe de particules avec une résolution temporelle de 2,5 μs et une résolution spatiale de 0,5 km (correspondant à une résolution angulaire de 0,07° lorsque l'instrument est pointé vers le nadir). En relevant le développement cinématique de la gerbe de particules, JEM-EUSO permet de mesurer l'énergie, la direction d'arrivée et la nature de la particule primaire formant le rayon cosmique incident. Le télescope spatial se déplace avec la Station spatiale internationale sur une orbite qui lui fait survoler la Terre entre les latitudes -51° et °51°, ce qui rend plus difficile l'interprétation des données recueillies que lorsque les observations sont faites depuis le sol : en effet l'arrière-plan des traces est variable (océans, zones terrestres, régions sombres, régions lumineuses) ainsi que les conditions atmosphériques. Pour prendre en compte ces phénomènes, l'instrument est couplé avec une caméra infrarouge et un lidar[11],

Objectifs

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Les principaux objectifs scientifiques de la collaboration sont les suivants[12] :

  • Identifier les sources des rayons cosmiques d'ultra-haute énergie, aujourd'hui inconnues, à partir de l'analyse statistique des directions d'arrivée de ces particules,
  • Mesurer le flux et l'énergie des particules émises par les sources,
  • Préciser le spectre des particules dont l'énergie se situe à la limite de Greisen-Zatsepin-Kuzmin ( ).

La mission tentera également de[12] :

  • Découvrir des neutrinos à très haute énergie,
  • Découvrir des rayons gamma à très haute énergie,
  • Étudier de manière statistiques les champs magnétiques galactique et extra galactique, encore mal connus.

Caractéristiques techniques

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L'instrument JEM-EUSO est constitué d'une partie optique, d'un détecteur et de capteurs destinés à analyser le contexte (atmosphère, arrière-plan au sol). L'ensemble pèse 1 938 kg et consomme environ 1 000 watts lorsqu'il fonctionne de manière active[13] :

  • La partie optique est un télescope doté d'un champ optique de grand angle (30°) permettant d'observer une vaste surface (environ 1,3 105 km²). Elle est constituée de trois lentilles de Fresnel de 2,65 mètres de diamètre qui permettent d'obtenir le champ optique grand angle avec une résolution angulaire de 0,075°. La surface focale (superficie 4,5 m2) est de forme sphérique (rayon de courbure de 2,5 mètres) et d'un diamètre de 2,3 mètres. Les lentilles sont réalisées en polyméthacrylate de méthyle.
  • Le détecteur est constitué de 5000 tubes photomultiplicateurs de type MAPMT (multi-anode photo-multiplier) à 64 bits qui comptent les photons individuellement avec une efficacité quantique d'environ 40%.

Déroulement de la mission

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L'instrument JEM-EUSO doit être lancé vers 2020 par une fusée japonaise H2-B en tant que charge utile externe d'un cargo spatial HTV. Une fois le vaisseau amarré à la Station spatiale internationale, l'instrument qui a été transporté dans une configuration de stockage doit être amarré sur un des points de fixation de la palette EF du module japonais Kibō. Cette opération est réalisée par un membre d'équipage de la station spatiale à l'aide du bras robotisé Canadarm 2. L'instrument doit fonctionner d'abord trois ans en étant pointé vers le nadir (la Terre) pour permettre la détection de particules ayant une énergie moindre. Cette phase permet de recouper les mesures effectuées avec celles des observatoires terrestres. Dans une phase ultérieure, l'instrument est incliné de 35° pour couvrir une surface plus importante et ainsi permettre la détection d'un nombre de particules à haute énergie statistiquement significatif[14].

Références et notes

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  1. « Collaboration | JEM-EUSO », sur www.jemeuso.org (consulté le )
  2. « OWL - Introduction », sur asd.gsfc.nasa.gov (consulté le )
  3. (en) E. Alippi & al., « Airwatch: The fast detector », sur pubs.aip.org (DOI 10.1063/1.56120, consulté le )
  4. Takahashi 2009, p. 2
  5. (en) J. H. Adams, S. Ahmad, J. -N. Albert et D. Allard, « Ground-based tests of JEM-EUSO components at the Telescope Array site, “EUSO-TA” », Experimental Astronomy, vol. 40, no 1,‎ , p. 301–314 (ISSN 1572-9508, DOI 10.1007/s10686-015-9441-6, lire en ligne, consulté le )
  6. (en) J. H. Adams, S. Ahmad, J. -N. Albert et D. Allard, « The EUSO-Balloon pathfinder », Experimental Astronomy, vol. 40, no 1,‎ , p. 281–299 (ISSN 1572-9508, DOI 10.1007/s10686-015-9467-9, lire en ligne, consulté le )
  7. Christer Fuglesang, « The EUSO program: Imaging of ultra‐high energy cosmic rays by high‐speed UV‐video from space », Nuclear Instruments and Methods in Physics Research Section A: Accelerators, Spectrometers, Detectors and Associated Equipment, imaging 2016, vol. 873,‎ , p. 1–4 (ISSN 0168-9002, DOI 10.1016/j.nima.2017.01.047, lire en ligne, consulté le )
  8. « EUSO-SPB: Extreme Universe Space Observatory - Super Pressure Balloon | EUSO-SPB », sur eusospb.uchicago.edu (consulté le )
  9. (en) Laura Marcelli et JEM-EUSO Collaboration, « Mini Euso Experiment », conference scientifique, ICRC2023,‎ (DOI 10.22323/1.444.0001, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Johannes Eser, Angela V. Olinto, Lawrence Wiencke et on behalf of the JEM-EUSO Collaboration, « Science and mission status of EUSO-SPB2 », dans Proceedings of 37th International Cosmic Ray Conference — PoS(ICRC2021), vol. 395, SISSA Medialab, , 404 p. (DOI 10.22323/1.395.0404, lire en ligne)
  11. Santangelo 2013, p. 1-2
  12. a et b Santangelo 2013, p. 2-3
  13. Santangelo 2013, p. 4-5
  14. Santangelo 2013, p. 3-4

Bibliographie

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Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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