Hippodrame
L'hippodrame ou théâtre équestre est un genre de spectacle théâtral mêlant l'équitation de cirque et le mélodrame populaire.
Définition
modifierKimberly Poppiti définit l'hippodrame comme « des pièces écrites ou jouées pour inclure un cheval ou des chevaux vivants mettant en scène une action ou des personnages significatifs comme une partie nécessaire de l'intrigue »[1]. Arthur Saxon définit cette forme de la même manière, comme « littéralement une pièce de théâtre dans laquelle des chevaux dressés sont considérés comme des acteurs, avec des affaires, souvent des actions de premier plan, à accomplir »[2]. Ce spectacle évolue à partir du cirque équestre antérieur, lancé par des cavaliers dont, le plus célèbre est Philip Astley dans les années 1760[3]. Le drame équestre s’appuie sur des pièces de théâtre écrites spécifiquement pour le genre, les chevaux spécialement entraînés y sont considérés comme des acteurs à part entière, au même titre que les personnages humains et se voient même attribuer des rôles principaux[4]. Anthony Hippisley-Coxe quant à lui, voit plutôt l'hippodrame comme « un divertissement bâtard né d'une mésalliance entre le cirque et le théâtre […] qui a en fait inhibé le développement du cirque »[5].
Histoire
modifierLes chevaux apparaissent dans le théâtre d'Europe occidentale dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, à la fois sur scène et dans des cascades aériennes notamment comme pégases volants[4]. Les premiers hippodrames en décors extérieurs sont introduits en Angleterre par Philip Astley[6]. Celui-ci adapte des histoires et des pièces de manière que les chevaux en soient les principaux acteurs[7].
Les premiers hippodrames sont présentés à Londres à l'amphithéâtre d'Astley, au Royal Circus et au pavillon olympique, et à Paris au Cirque-Olympique[4] où 36 cavaliers pouvaient se produire simultanément[3]. Le premier drame équestre est présenté aux États-Unis pendant la saison 1802-1803 au Park Theatre de New York[8]. Le cirque de Pépin et Breschard présente une adaptation de Don Quichotte « à cheval et à pied, avec combats » à New York le 12 août 1809[9]. La compagnie équestre de Pépin et Breschard présente des hippodrames aux États-Unis entre 1809 et 1815. Christoph de Bach a produit un divertissement similaire à Vienne[4]. Le succès financier d'Astley en 1810 avec The Blood Red Knight a peut-être influencé la décision des théâtres Covent Garden et Drury Lane de rejoindre une entreprise devenue lucrative[4]. Le premier hippodrame dans un théâtre autorisé de Londres est le conte de Perrault, Barbe Bleue, à Covent Garden, en .
La première pièce écrite spécifiquement pour inclure des chevaux, Timour the Tartar, est également créée à Covent Garden en 1811, puis à New York l'année suivante[10]. Les hippodrames, destinés à une diffusion populaire, reprennent des thèmes connus comme Tamerlan, un conquérant d'Asie centrale, ou le chef militaire ukrainien Ivan Mazepa, ou encore le passé militaire européen avec Marlborough[4]. Mazeppa, or the Wild Horse of Tartary,mis en scène en Angleterre en 1823, est repris dans l'amphithéâtre d'Astley en 1831 puis en tournée aux États-Unis à partir de 1833[11]. D'autres spectacles concernent des adaptations de William Shakespeare (Richard III)[3], des bandits de grand chemin réels et fictifs (Ride to York de Dick Turpin[12], et Paul Clifford[13].
Le théâtre équestre est devenu populaire aux États-Unis, ainsi qu'en Angleterre et en France, et le Cirque Lafayette à New York, inauguré en 1825, est le premier bâtiment de théâtre américain spécialement conçu pour l'hippodrame, suivi de l'Amphithéâtre de Philadelphie et du Baltimore Roman Amphithéâtre[3]. Les spectacles d'hippodrame ont attiré un public de la classe ouvrière qui comprenait des ouvriers et des marins[14], « prêts à l'émeute à la moindre provocation »[15] : en effet, le plus grand « rowdyism » connu du milieu des années 1820 à New York a lieu au Lafayette Circus[14].
Le cirque américain de Hengler a prospéré dans les années 1850 sous le titre de Hengler's Colossal Hippodrama[16] mais la popularité du genre s'est estompée au milieu du XIXe siècle[4]. Il renaît en France sous Napoléon III, notamment avec la mise en scène en 1863 de la Bataille de Marengo et en 1880 de Michel Strogoff[4]. Les États-Unis connaissent un bref renouveau du genre à la fin des années 1880 et 1890, aidés par l'invention de machines de scène spécialement conçues pour la production de drames équestres.
L'hippodrame Ben-Hur de 1899 est notable comme créant l'illusion optique de la célèbre course de chars. La production scénique créée au Broadway Theatre parcourt ensuite les États-Unis jusqu'en 1920, avec des chevaux vivants et de vrais chars roulant sur des tapis roulants[17],[18],[19].
Au XXIe siècle, la société Cavalia (et d'autres sociétés similaires) ont produit une forme moderne bien accueillie qui peut être considérée comme un hippodrame, qui tourne à l'échelle internationale, utilisant jusqu'à 30 chevaux par spectacle[20].
Une reconstitution équestre de Ben Hur, réalisée par Franz Abraham, est proposée au Dôme du Millénaire de Londres en . Le spectacle emploie cent animaux (dont trente-deux chevaux) et quatre cents personnes[21].
Références
modifier- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Hippodrama » (voir la liste des auteurs).
- Poppiti, Kimberly. A History of Equestrian Drama in the United States: Hippodrama's Pure Air & Fire. New York: Routledge, 2018.
- Saxon, Enter Foot and Horse: A History of Hippodrama in England and France. Yale University Press, 1968.
- McArthur, p. 21
- Banham, p. 488
- Hippisley-Coxe, A Seat at the Circus (1951, rev. ed. 1980), cité par Stoddard, p. 17.
- (Saxon, “Circus as Theatre” 301)
- (Saxon, Enter 6-7)
- Poppiti, p. 99 and Odell, 2:179–180.
- New York Mercantile Advertiser, August 12, 1809
- Poppiti, p. 50.
- McArthur, p. 21-22
- The Oxford Companion to Theatre and Performance, p 22.
- Gary Kelly, Newgate Narrative vol 4, Routledge, (ISBN 9781138112957)
- Gilje, p. 252
- Gilje, p. 251
- Stoddard, p.39-40.
- Boomhower, p.140-141.
- Samantha Ellis, « Ben-Hur, London, 1902 », The Guardian, (consulté le )
- John Swansburg, « The Passion of Lew Wallace », The Slate Group, (consulté le )
- « Big-top horse show 'Cavalia' gallops into Chicago », Chicago Tribune, (lire en ligne, consulté le )
- « Chariots of fire as Ben Hur comes to The O2 » [archive du ], thelondonpaper.com, (consulté le )
Bibliographie
modifier- Banham, Martin (1995), « Hippodrama », in The Cambridge Guide to Theatre. Cambridge University Press, (ISBN 978-0521434379).
- Fotheringham, Richard (1992), Sport in Australian Drama, Cambridge University Press.
- Gilje, Paul A. (1987), « Lafayette Circus », in The Road to Mobocracy: popular disorder in New York City, 1763-1834, UNC Press, (ISBN 978-0807841983) p. 251.
- McArthur, Benjamin (2007), The Man who was Rip van Winkle: Joseph Jefferson and nineteenth-century American theatre, Yale University Press, (ISBN 978-0300122329).
- Poppiti, Kimberly (2018) A History of Equestrian Drama in the United States: Hippodrama's Pure Air & Fire. Routledge, (ISBN 1138503029).
- Saxon, Arthur Hartley (1968), Enter Foot and Horse; a history of hippodrama in England and France, Yale University Press.
- Saxon, Arthur Hartley (1975), "The Circus as Theatre: Astley's and Its Actors in the Age of Romanticism". Educational Theatre Journal. 27 (3): 299–312. JSTOR:3206456 3206456.
- Stoddard, Helen (2000), Rings of Desire: circus history and representation, Manchester University Press, (ISBN 978-0719052347).