Escadrons druzes
Les escadrons druzes sont des unités de cavalerie druze recrutés en Syrie pour l'Armée française entre 1926 et 1945. Initialement troupes supplétives créées pour défendre le mandat français à la fin de la grande révolte syrienne, les escadrons druzes sont régularisés en 1930 au sein des troupes spéciales du Levant.
Escadrons druzes | |
Le fanion du groupe des escadrons druzes. | |
Création | 1926 |
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Dissolution | 1945 |
Pays | État des Druzes (1926-1930) République syrienne (1930-1945) |
Origine | Druzes |
Allégeance | France |
Branche | Troupes spéciales du Levant |
Type | Escadrons léger du Levant |
Rôle | Cavalerie |
Effectif | 1 700 (en 1942) |
Guerres | Grande révolte syrienne Seconde Guerre mondiale |
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Historique
modifierFormation
modifierLes deux premiers escadrons druzes sont recrutés en avril 1926, à l'origine sous le nom de « gardes mobiles »[1]. Dès mars un groupe d'une vingtaine de partisans est mis au service des Français, qui décident de jouer sur les antagonismes entre Druzes afin de mettre un terme à leur révolte[2].
Quatre nouveaux escadrons sont formés jusqu'en septembre, lorsque les trois premiers escadrons (29e, 31e et 35e escadrons de Garde mobile) deviennent les 1er à 6e escadrons de cavalerie druze[2].
Les six escadrons forment le le groupement d'escadrons druzes[1] tandis que les escadrons druzes deviennent officiellement les 1er à 6e escadrons légers du Levant (les autres escadrons légers du Levant étant tcherkesses ou recrutés dans d'autres minorités)[2].
La solde des 750 cavaliers des escadrons druzes (représentant alors probablement 1/7e de la population masculine druze en âge de porter les armes) permet d'enrichir la région du Djebel el-Druze ravagée par la guerre[2],[3].
De 1927 à 1939
modifierAprès la fin de la révolte, les escadrons druzes sont chargés de la patrouille à la frontière jordanienne, du maintien de l'ordre dans les villes syriennes et de la lutte contre les pillards dans l'est syrien[1].
Un peloton méhariste est créé au sein du groupement en 1936. Le 6e escadron druze est dissous le [1].
Campagne de Syrie
modifierAu début la campagne de Syrie, les forces alliés choisissent de contourner le Djebel el-Druze. Mais le groupement d'escadrons druzes et les forces du régime de Vichy contre-attaquent depuis le Djebel vers Izra[4], où les cavaliers druzes du lieutenant Simons parviennent le 15 juin à déloger la Légion arabe de ses positions[5]. Le lendemain, les forces anglo-britanniques se replient jusqu'à la frontière jordanienne. Les cavaliers tcherkesses ralliés à la France Libre par le colonel Collet reçoivent alors l'ordre d'attaquer les positions des cavaliers druzes. Malgré les haines intercommunautaires, les Tcherkesses indiquent qu'ils ne souhaitent pas combattre leurs « compatriotes » et ce sont finalement les cavaliers druzes qui résolvent la situation en refusant les ordres d'attaques vichystes. Se repliant vers leurs foyers, ils entraînent avec eux la plupart des Druzes déployés face aux Alliés. La mutinerie des Druzes désorganise les positions vichystes et les Tcherkesses de Collet parviennent devant Damas, prise peu après par les troupes indiennes[4].
Période de la France libre
modifierLes Britanniques gardent initialement le contrôle du Djebel Druze et tentent de rallier les Druzes syriens dans une Légion druze[6] mais la formation de celle-ci est abandonnée en novembre 1941. Les 6e, 7e, 8e et 9e escadrons druzes sont alors formés au sein des troupes spéciales[1].
Vers 1942, les plus de 1 700 cavaliers druzes sont répartis en deux groupe (au sein du groupement d'escadrons druzes)[7] :
- le 1er groupe avec les 2e, 3e et 5e escadrons
- le 2e groupe avec les 1er, 4e et 7e escadrons et le peloton méhariste.
Vers 1944, les escadrons druzes commencent à être motorisés[1].
Lors de l'insurrection syrienne de 1945, la France perd le 21 mai le contrôle du Djebel druze et évacue complètement la zone après l'arrivée des Britanniques le [8]. Les troupes spéciales passent officiellement à l'Armée syrienne le . Fin 1946, un rapport du Central Intelligence Group indique que les forces de l'Armée syrienne dans le Djebel druze sont constitués de 200 à 300 cavaliers, anciens des unités françaises[9].
Commandants du groupement druze
modifier- 1927 - 1929 : capitaine Antoine Desideri[2]
- 1929 - 1939 : capitaine Desmaires[5]
- 1941 - 1942 : commandant Rémond Monclar[10]
- 1943 - 1944 : commandant Rémond Monclar[10]
Équipement et uniforme
modifierSymboles et insignes
modifierL'étoile à cinq branches des Druzes est présente avec ses cinq couleurs vert-rouge-jaune-bleu-blanc sur le tablier des trompettes du groupement druze[11]. Sous forme ajourée (semblable à l'étoile marocaine), elle est présente sur les pattes de col et l'insigne du groupement marocain.
L'insigne du groupement druze reprend donc l'étoile à cinq branches ajourée, traversée par un cavalier au galop. L'étoile repose sur une queue de comète portant l'inscription « groupement druze ». Au dos sont indiqués le fabricant, Chobillon, et la date, 1931[1].
Dans les années 1930, les fanions des escadrons sont bleu clair (1er escadron), rouge (2e), vert (3e), bleu foncé (4e), jaune et rouge (5e) et noir (6e)[12].
Uniforme
modifierLes cavaliers et sous-officiers druzes portent la vareuse en drap kaki des sous-officiers de cavalerie française, les officiers des vestes d'officiers[1],[11]. Sur la vareuse est portée une gandourah en toile kaki clair. Vers 1944, les Druzes reçoivent une tenue plus moderne, en toile HBT (en) à l'américaine[1].
La coiffure est le keffieh, tenu par un agal noir. Pour le service courant, le keffieh est en coton tissé rouge et blanc (blanc pour les officiers) mais il est rouge (avec deux ou trois bandes de couleur vert, blanche ou noir sur les bords) en tenue de cérémonie[12].
Les pattes de col portent le numéro de l'escadron surmonté de l'étoile druze (parfois remplacée par une grenade pour les officiers) avec deux soutaches dorées[1],[12]. Pour les quatre premiers escadrons, la couleur de fond est la même que leur fanion : respectivement bleu clair, rouge, vert et bleu foncé. Celles des 5e et 6e escadrons ont la couleur noir[12].
L'insigne du groupement est porté à la poitrine ou sur le keffieh[1]. Les galons des officiers et les boutons sont dorés[12].
Les officiers français conservent en théorie l'uniforme de leur dernier corps, avec des pattes de col bleu clair avec deux soutaches et une grenade argentées[12]. Certaines photos les montrent portent un keffieh blanc[11].
Équipement
modifierLes cavaliers druzes de l'Armée française sont initialement armés de la carabine Mauser Kar 98A, remplacée ensuite par des mousquetons modèle 1892[13], avec baïonnette[11]. Chaque peloton dispose d'un fusil-mitrailleur modèle 1915, remplacé ensuite par un fusil-mitrailleur modèle 1924[13].
Le harnachement des chevaux ressemble à celui de la cavalerie française modèle 1874 mais simplifié. Le bissac est en tissu locale, en laines multicolores. En tenue de parade, les chevaux reçoivent un tapis de selle multicolore[11].
Annexes
modifierNotes et références
modifier- Jacques Sicard, « Les cavaliers du Levant et leurs insignes », Armes Militaria Magazine, Histoire & Collections, no 68, , p. 46-51
- Jean-David Mizrahi, « Chapitre XI. Hésitations et stabilisation du pouvoir mandataire (1925-1931) », dans Genèse de l’État mandataire : Service des renseignements et bandes armées en Syrie et au Liban dans les années 1920, Éditions de la Sorbonne, coll. « Internationale », (ISBN 979-10-351-0372-9, lire en ligne), p. 369–414
- Jean-David Mizrahi, « Armée, état et nation au moyen-orient:La naissance des troupes spéciales du Levant à l'époque du mandat français, Syrie, 1919-1930 », Guerres mondiales et conflits contemporains, vol. 207, no 3, , p. 107–123 (ISSN 0984-2292, DOI 10.3917/gmcc.207.0107, lire en ligne, consulté le )
- (en) N.E. Bou‐Nacklie, « The 1941 invasion of Syria and Lebanon: the role of the local paramilitary », Middle Eastern Studies, vol. 30, no 3, , p. 512–529 (ISSN 0026-3206 et 1743-7881, DOI 10.1080/00263209408701009, lire en ligne, consulté le )
- Yves Salkin, « La minorité Druze en Syrie de 1920 à 1955 », Guerres mondiales et conflits contemporains (en), no 151, , p. 93–102 (ISSN 0984-2292, lire en ligne, consulté le )
- Maurice Albord, « Chapitre IV. La période de la relève gaulliste », dans L’Armée française et les États du Levant : 1936-1946, CNRS Éditions, coll. « Moyen-Orient », (ISBN 978-2-271-07859-9, lire en ligne), p. 203–271
- Bernard Le Marec, Les Français libres et leurs emblèmes, Lavauzelle, (ISBN 978-2-7025-0367-6, lire en ligne), p. 78
- Henri de Wailly, « La Honte », dans 1945, l'Empire rompu: Syrie, Algérie, Indochine, Éditions Perrin, (ISBN 978-2-262-04032-1, lire en ligne)
- (en) Central Intelligence Group, Attitude and plans of the Druzes, (lire en ligne)
- « Rémond MONCLAR | L'Ordre de la Libération et son Musée », sur www.ordredelaliberation.fr (consulté le )
- Éric Dagnicourt, « L'officier français des années 1920: V - La grande tenue et la tenue des ville des troupes spéciales du Levant », Armes Militaria Magazine, no 163, , p. 38-41
- Éric Dagnicourt, « L'officier français des années 1920: VI - La grande tenue et la tenue des ville des troupes spéciales du Levant », Armes Militaria Magazine, no 166, , p. 12-15
- « Les cavaliers du Levant et leurs insignes (2) », Armes Militaria Magazine, Histoire & Collections, no 69, , p. 47-51
Liens externes
modifier- « Chez les Druzes », sur ina.fr, (consulté le ).
- ECPAD, « Photographies du groupement druze », sur imagesdefense.gouv.fr (consulté le ).