Disulfure de molybdène
Le disulfure de molybdène, ou sulfure de molybdène(IV), est un composé chimique de formule MoS2. Il s'agit d'un solide noir cristallisé diamagnétique et semiconducteur, semblable au graphite par son apparence et son toucher, et de ce fait utilisé comme lubrifiant, parfois à température élevée. Sa forme minérale est la molybdénite, principal minerai dont est extrait le molybdène.
Disulfure de molybdène | |
__ Mo4+ __ S2− Structure cristalline du disulfure de molybdène |
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Identification | |
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No CAS | |
No ECHA | 100.013.877 |
No CE | 215-263-9 |
PubChem | 14823 |
SMILES | |
InChI | |
Apparence | solide noir |
Propriétés chimiques | |
Formule | MoS2 [Isomères] |
Masse molaire[1] | 160,09 ± 0,03 g/mol Mo 59,94 %, S 40,06 %, |
Propriétés physiques | |
T° fusion | 450 °C sublim. |
Solubilité | pratiquement insoluble dans l'eau à 20 °C |
Masse volumique | 5,06 g·cm-3[2] |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |
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Structure
modifierLe disulfure de molybdène cristallise à température ambiante dans le système hexagonal (forme 2H-MoS2) selon le groupe d'espace P63/mmc (no 194) avec un gap indirect de 1,2 eV, tandis qu'une monocouche de MoS2 présente un gap direct de 1,8 eV. Il existe également une forme 3R-MoS2 de symétrie rhomboédrique dans le groupe d'espace R3m (no 160)[3]. Dans le MoS2 cristallisé, chaque Mo4+ est lié à six ligands S2− occupant les sommets d'un prisme trigonal au sein duquel la couche d'atomes de molybdène est prise en sandwich entre deux couches d'atomes de soufre[4]. Deux couches d'atomes de soufre adjacentes étant liées par des forces de van der Waals, elles présentent un faible coefficient de frottement entre elles, à l'origine de leurs propriétés lubrifiantes.
La forme bidimensionnelle du disulfure de molybdène fait de lui une alternative prometteuse au graphène pour des applications en micro-électronique[5].
Propriétés chimiques
modifierLe disulfure de molybdène est stable à l'air et à l'oxygène aux conditions normales, mais réagit à chaud avec O2 pour former du trioxyde de molybdène MoO3 :
Le chlore Cl2 attaque le disulfure de molybdène à haute température pour former du chlorure de molybdène(V) MoCl5 :
Le disulfure de molybdène réagit aux conditions normales avec les organolithiens pour donner des composés d'intercalation LixMoS2. Avec le n-buthyllithium C4H9Li, il donne LiMoS2.
Applications
modifierComme lubrifiant solide
modifierLe disulfure de molybdène sous forme de particules de 1 à 100 μm de diamètre est un lubrifiant solide couramment employé. Il existe peu d'alternatives ayant à la fois de bonnes propriétés lubrifiantes et une bonne stabilité thermique jusqu'à 350 °C en milieu oxydant. Les tests de friction réalisés à l'aide d'une pointe sur un disque donnent comme coefficient de frottement à faible charge (0,1 à 2 N) des valeurs inférieures à 0,1.
Le disulfure de molybdène entre souvent dans la composition de mélanges ou de matériaux composites dont les surfaces doivent présenter une friction faible. C'est par exemple le cas des matières plastiques, pour lesquels l'addition de MoS2 conduit à la formation de composites à la résistance et aux propriétés de friction améliorées. Le nylon, le polytétrafluoroéthylène et le Vespel (en) comptent parmi les polymères organiques susceptibles d'être chargés de MoS2. On utilise également des revêtements auto-lubrifiants appliqués par dépôt chimique en phase vapeur pour les applications à haute température.
Des lubrifiants à base de disulfure de molybdène sont utilisés par exemple avec les moteurs à deux temps, les freins à rétropédalage de bicyclette, les joints de transmission, les cardans et les balles d'armes à feu.
Comme catalyseur
modifierLe disulfure de molybdène est utilisé comme cocatalyseur de désulfuration (hydrodésulfuration) en pétrochimie. Son efficacité comme catalyseur est accrue par dopage avec de petites quantités de cobalt et de nickel. L'alumine Al2O3 est fréquemment employée comme support de ces catalyseurs. Ces derniers sont produits in-situ en traitant de l'alumine imprégnée de molybdène et de cobalt ou de nickel avec du sulfure d'hydrogène H2S ou un réactif équivalent. La catalyse ne se déroule pas à la surface des régions cristallisées en feuillets réguliers, mais plutôt le long des bords de ces feuillets[6].
Le disulfure de molybdène est également utilisé comme catalyseur d'hydrogénation dans les synthèses organiques. Il est issu d'un métal de transition commun du 6e groupe, à la différence de nombreux autres catalyseurs équivalents, qui sont plutôt issus de métaux du 10e groupe, plus rares, de sorte que le MoS2 est retenu lorsque le prix du catalyseur ou sa résistance à l'empoisonnement au soufre sont des critères déterminants. Il est efficace pour l'hydrogénation de groupes nitro en groupes amine et peut être employé pour produire des amines secondaires par amination réductrice[7]. Il peut également catalyser l'hydrogénolyse de composés organosulfurés, d'aldéhydes, de cétones, de phénols et d'acides carboxyliques pour donner leur alcane correspondant ; il n'est cependant pas très actif, et a souvent besoin de pression d'hydrogène supérieure à 95 atm et des températures supérieures à 185 °C.
Comme semi-conducteur
modifierComme d'autres dichalcogénures de métaux de transition (TMD), les propriétés électroniques et optiques du disulfure de molybdène bidimensionnel[8] diffèrent de celles du matériau massif[9]. Le MoS2 massif est un semiconducteur à gap indirect avec une bande interdite large de 1,2 eV[10],[11] tandis qu'un TMD 2D comme le MoS2 monocouche est à gap direct de 1,8 eV[12], ce qui permet de réaliser des transistors[13] et des photodétecteurs[9],[14],[15]. Il est également étudié pour des applications d'électronique flexible (en)[16],[17]
Notes et références
modifier- Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- Entrée « Molybdenum(IV) sulfide » dans la base de données de produits chimiques GESTIS de la IFA (organisme allemand responsable de la sécurité et de la santé au travail) (allemand, anglais), accès le 28 août 2011 (JavaScript nécessaire)
- (en) Shanmin Wang, Jianzhong Zhang, Duanwei He, Yi Zhang, Liping Wang, Hongwu Xu, Xiaodong Wen, Hui Ge et Yusheng Zhao, « Sulfur-catalyzed phase transition in MoS2 under high pressure and temperature », Journal of Physics and Chemistry of Solids, vol. 75, no 1, , p. 100-104 (DOI 10.1016/j.jpcs.2013.09.001, Bibcode 2014JPCS...75..100W, lire en ligne).
- (en) Wells, A.F., Structural Inorganic Chemistry, Oxford, Clarendon Press, , 5e éd., 1382 p. (ISBN 978-0-19-855370-0, LCCN 82018866)
- (en) David L. Chandler, « One-molecule-thick material has big advantages : Researchers produce complex circuits from molybdenum disulfide », sur phys.org, (consulté le ).
- (en) Henrik Topsøe, Bjerne S. Clausen et Franklin E. Massoth, « Hydrotreating Catalysis », Catalysis-Science and Technology, vol. 11, , p. 1-269 (DOI 10.1007/978-3-642-61040-0_1, lire en ligne)
- (en) Frederick S. Dovell et Harold Greenfield, « Base-Metal Sulfides as Reductive Alkylation Catalysts », The Journal of Organic Chemistry, vol. 29, no 5, , p. 1265-1267 (DOI 10.1021/jo01028a511, lire en ligne)
- (en) Qing Hua Wang, Kourosh Kalantar-Zadeh, Andras Kis, Jonathan N. Coleman et Michael S. Strano, « Electronics and optoelectronics of two-dimensional transition metal dichalcogenides », Nature Nanotechnology, vol. 7, no 11, , p. 699-712 (PMID 23132225, DOI 10.1038/nnano.2012.193, Bibcode 2012NatNa...7..699W, S2CID 6261931, lire en ligne).
- (en) Rudren Ganatra et Qing Zhang, « Few-Layer MoS2: A Promising Layered Semiconductor », ACS Nano, vol. 8, no 5, , p. 4074-4099 (PMID 24660756, DOI 10.1021/nn405938z, lire en ligne).
- (en) Wenjuan Zhu, Tony Low, Yi-Hsien Lee, Han Wang, Damon B. Farmer, Jing Kong, Fengnian Xia et Phaedon Avouris, « Electronic transport and device prospects of monolayer molybdenum disulphide grown by chemical vapour deposition », Nature Communications, vol. 5, , article no 3087 (PMID 24435154, DOI 10.1038/ncomms4087, Bibcode 2014NatCo...5.3087Z, arXiv 1401.4951, S2CID 6075401, lire en ligne ).
- (en) Jinhua Hong, Zhixin Hu, Matt Probert, Kun Li, Danhui Lv, Xinan Yang, Lin Gu, Nannan Mao, Qingliang Feng, Liming Xie, Jin Zhang, Dianzhong Wu, Zhiyong Zhang, Chuanhong Jin, Wei Ji, Xixiang Zhang, Jun Yuan et Ze Zhang, « Exploring atomic defects in molybdenum disulphide monolayers », Nature Communications, vol. 6, , article no 6293 (PMID 25695374, PMCID 4346634, DOI 10.1038/ncomms7293, Bibcode 2015NatCo...6.6293H, lire en ligne ).
- (en) Andrea Splendiani, Liang Sun, Yuanbo Zhang, Tianshu Li, Jonghwan Kim, Chi-Yung Chim, Giulia Galli et Feng Wang, « Emerging Photoluminescence in Monolayer MoS2 », Nano Letters, vol. 10, no 4, , p. 1271-1275 (PMID 20229981, DOI 10.1021/nl903868w, Bibcode 2010NanoL..10.1271S, lire en ligne).
- (en) B. Radisavljevic, A. Radenovic, J. Brivio, V. Giacometti et A. Kis, « Single-layer MoS2 transistors », Nature Nanotechnology, vol. 6, no 3, , p. 147-150 (PMID 21278752, DOI 10.1038/nnano.2010.279, Bibcode 2011NatNa...6..147R, lire en ligne).
- (en) Oriol Lopez-Sanchez, Dominik Lembke, Metin Kayci, Aleksandra Radenovic et Andras Kis, « Ultrasensitive photodetectors based on monolayer MoS2 », Nature Nanotechnology, vol. 8, no 7, , p. 497-501 (PMID 23748194, DOI 10.1038/nnano.2013.100, Bibcode 2013NatNa...8..497L, S2CID 5435971, lire en ligne).
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- (en) Hsiao-Yu Chang, Maruthi Nagavalli Yogeesh, Rudresh Ghosh, Amritesh Rai, Atresh Sanne, Shixuan Yang, Nanshu Lu, Sanjay Kumar Banerjee et Deji Akinwande, « Large-Area Monolayer MoS2 for Flexible Low-Power RF Nanoelectronics in the GHz Regime », Advanced Materials, vol. 28, no 9, , p. 1818-1823 (PMID 26707841, DOI 10.1002/adma.201504309, S2CID 205264837, lire en ligne).