Chatbot
Un chatbot[1],[2], aussi nommé dialogueur[3] ou agent conversationnel[2],[4], est un agent logiciel conçu pour interagir avec des utilisateurs par des échanges textuels ou vocaux.
Des chatbots comme ELIZA existent depuis la fin des années 1960. Conçus principalement pour des applications spécifiques, ils reposaient sur des règles prédéfinies programmées par des humains. Leurs capacités étant limitées, ils échouaient face à des interactions plus complexes. Au fil des décennies, leur utilisation s’est étendue, notamment avec leur intégration dans des sites web et des services clients, ainsi que dans les années 2010 avec des assistants personnels intelligents tels que Siri ou Cortana.
Les performances des chatbots se sont rapidement améliorées au début des années 2020 avec les grands modèles de langage. Ces chatbots apprennent d'eux-mêmes à générer du texte en étant entraînés sur de vastes quantités de texte issu d'internet. ChatGPT a connu une forte popularité dès son lancement en novembre 2022, atteignant 100 millions de comptes enregistrés en seulement deux mois, la croissance la plus rapide de l'histoire pour une application logicielle. Des modèles concurrents sont rapidement apparus, comme Claude ou Gemini.
Historique
modifierLes premiers chatbots ont été ELIZA, PARRY (en), et SHRDLU.
ELIZA fut créé en 1966[5]. Elle avait été créée par Joseph Weizenbaum, du Massachusetts Institute of Technology (MIT), et ne prenait que trois pages en langage SNOBOL. Elle faisait grand usage de la technique de l'écholalie[réf. souhaitée] :
- elle commençait par poser une question neutre (Bonjour. Pourquoi venez-vous me voir ?) à la personne testée, puis analysait à chaque fois la réponse pour tenter de reposer une question en relation avec celle-ci ;
- si une question lui était posée, elle demandait pourquoi on lui posait la question ;
- si une phrase contenait le mot computer, elle demandait : Dites-vous cela parce que je suis une machine ? ;
- etc.
Des concours de chatbots sont organisés chaque année pour promouvoir l'émulation dans ce domaine. De nombreux chatbots ont été développés, en partie grâce au Prix Loebner, une compétition basée sur le test de Turing. Lors de ces concours, afin d'évaluer les chatbots, le jury peut dialoguer soit avec un humain soit avec un chatbot à travers une interface clavier/écran. Au bout d'un certain temps, le jury doit évaluer si le candidat testé est une machine ou un humain[6].
Au début du XXIe siècle, le programme ALICE est probablement le plus avancé dans ce domaine. En 2016, le chatbot Tay de Microsoft a provoqué une controverse en adoptant des propos racistes et insultants sous l'influence de ses interactions avec les utilisateurs sur Twitter[7].
Les premiers chatbots ont été développés pour effectuer des notifications améliorées. Toutefois, par la suite, les nouveaux chatbots déployés répondent à des demandes plus complexes comme le conseil financier, l'épargne ou la planification de réunions[8].
Applications commerciales
modifierDans les années 2010, les chatbots se multiplient sur le web et les sociétés sont de plus en plus nombreuses à les utiliser. L'après-vente et le télémarketing sont les cibles privilégiées de ces nouveaux outils[9]. En 2107, les chatbots ne se limitent plus à des questions de base, mais intègrent désormais des algorithmes plus évolués permettant une gestion des échanges d'un niveau de complexité plus élevé qu'auparavant[10],[11].
Un utilisateur est invité à formuler sa demande, elle est affinée par un échange convivial, dont le logiciel interprète une requête opérationnelle pour son système d'information. Les chatbots débordent donc la recherche ou le divertissement, ils mettent en œuvre des connaissances linguistiques, psychologiques, et bien sûr des bases de programmation[réf. nécessaire].
Cependant, ces agents ne veulent pas leurrer les utilisateurs. Ils sont spécialisés dans un sujet particulier (vente d'un produit particulier, support client d'une entreprise particulière) et se contentent de recentrer la conversation dès que celle-ci s'en éloigne. Ils sont néanmoins dotés, dans la plupart des cas, d'un protocole social qui les rend plus « humains ».
On distingue deux types de chatbots :
- les bots simples, construits à partir d'éléments graphiques comme les boutons ou les carrousels ;
- les bots intelligents, intégrant une technologie de compréhension du langage naturel construit sur des cadres logiciels complexes.
Depuis l'arrivée des chatbots sur Facebook Messenger en 2016, les annonceurs cherchent à créer des expériences conversationnelles visant à capter leurs utilisateurs, clients ou clients potentiels différemment. Dans cette démarche, le temps a mis en valeur quelques écueils à éviter dans la conception de l'expérience utilisateur (UX conversationnel). Cette composante de l'expérience conversationnelle est souvent négligée. Ce problème freine la prolifération et la démocratisation des bots de marques dans l'écosystème numérique européen[réf. souhaitée].
Dans le secteur de la musique, Universal Music et Digitick ont développé des chatbots sur Facebook Messenger pour assurer un service d'information et de vente de billets pour les concerts et autres événements culturels[12].
Dans le secteur des transports, en France, la RATP a développé en décembre 2017 un chatbot permettant de guider les passagers au fur et à mesure de leurs besoins de trajets[13],[14].
En novembre 2022, OpenAI a lancé son chatbot ChatGPT, exploitant le modèle GPT-3.5 de l'entreprise. ChatGPT a connu une forte popularité dès son lancement, atteignant 100 millions de comptes enregistrés en seulement deux mois et devenant ainsi l'application ayant eu la croissance la plus rapide de l'histoire[15]. Le modèle a été entraîné sur de grandes quantités de texte issues d'internet, et peut communiquer avec les utilisateurs de manière naturelle et humaine. ChatGPT entre autres été utilisé à des fins de service client et est capable de répondre à des questions sur une large gamme de sujets.
Atouts et inconvénients
modifierL'agent conversationnel est censé fournir des réponses rapides, pertinentes et personnalisées aux clients. Il a l'avantage d'offrir un service accessible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Le robot pouvant traiter les requêtes simples, les agents humains sont plus disponibles pour traiter les situations complexes[16].
Cependant, comme toute technologie suffisamment aboutie pour opérer des transformations dans les modes de production, les chatbots soulèvent des questions portant sur la place de l'humain dans l'entreprise.
En mars 2016, en France, le Crédit mutuel CIC a sollicité ses salariés pour alimenter le robot conversationnel d'IBM Watson. Cette décision a suscité une levée de boucliers de la part des syndicats, s'inquiétant des conséquences à moyen et long terme sur l'emploi en général[17],[18].
Ce remplacement des humains par des chatbots représente une inquiétude. Tout comme l'automatisation robotisée des processus (RPA), les chatbots permettent de diminuer les tâches répétitives pour laisser uniquement des tâches à réelle valeur ajoutée à réaliser. Ces tâches répétitives engendraient cependant de l'emploi qui risquerait d'être supprimé[19] — pour être remplacé par d'autres types d'emplois (data scientist, UI designer, directeur social et chatbots, etc.)[20].
Selon une enquête réalisée auprès de 2041 consommateurs français, 59 % des répondants apprécient de pouvoir poser leurs questions à un chatbot mais 67 % préférèrent cependant être mis en relation avec un conseiller lorsqu'il s'agit de résoudre une problématique complexe. L'étude rapporte aussi que 84% des utilisateurs considèrent l'incompréhension des questions posées aux chatbots comme le frein n°1 à leur adoption. Néanmoins, 75 % apprécient tout de même de ne pas avoir à attendre qu'un conseiller humain soit disponible[21].
Utilisation internationale
modifierEn 2019 en Chine, les chatbots sont principalement utilisés pour les paiements et achats en ligne, et le réseau social WeChat en est l'applicable la plus significative[8].
En Chine, les chatbots BabyQ et Xiaobing du groupe Tencent ont contraint la censure à s'adapter. La chatbot BabyQ répondait « non » lorsqu'on lui demandait s'il aimait le Parti communiste chinois. Ces chatbots ont été rapidement supprimés[22].
Cas spécifiques de l'informatique décisionnelle et des mégadonnées
modifierL'informatique décisionnelle ou en anglais Business Intelligence est une branche de l'informatique qui consiste à l'analyse de données en entreprise[23].
L'arrivée de chatbot dans ces deux domaines de compétences permet désormais aux non-informaticiens d'interroger des grands volumes de données en langage naturel sans se soucier de la technicité[24].
Applications médicales
modifierEn 2015, une équipe de l'université de Bordeaux crée un agent conversationnel animé capable de poser des questions pertinentes à un patient dans le but de diagnostiquer une somnolence diurne excessive[25].
Tess est un chatbot en santé mentale créé par Michel Rauws, fondateur de X2 AI, une startup du secteur de l'intelligence artificielle basée dans la Silicon Valley. Tess est formé spécifiquement pour aider les soignants, la principale valeur de Tess est l'accessibilité. En 2018, le chatbot Tess est utilisé au Canada par Saint Elizabeth Health Care qui fournit principalement des soins de santé aux personnes à domicile[26].
Fictions philosophiques
modifierLe philosophe Pascal Chabot a élaboré une courte fiction mettant en scène un chatbot auquel un groupe de programmeurs « apprennent » la philosophie. Ce chatbot est auditionné par un jury de cinq philosophes professionnels qui dialoguent avec la machine pour évaluer s'il peut ou non être qualifié de « philosophe ». À cette occasion, les relations personnes-machines, le mimétisme, la reconnaissance et les modifications sociales engendrées par la construction de ces intelligences artificielles sont abordés. Voir ChatBot le robot. Drame philosophique en 5 questions et 6 actes (PUF, 2015)[27][source insuffisante].
Le philosophe Vincent Cespedes, lui, imagine le dialogue entre un chatbot du futur (Imlac) capable de dépasser l'intelligence humaine dans tous les domaines, et sa créatrice, Alice Moreau. Il interroge : « Imlac doit-il être traité comme une chose dont nous sommes propriétaires, comme une personne morale assujettie (esclave), ou comme une personne morale libre (bien que non humaine) ? ». L'émotion y est décrite comme la marque spécifiquement humaine, qui peut être singée par des IA « émomimétiques », mais non connectée à un corps, ce qui augmenterait le « flou » de la connaissance engendrée. « Sans émotions, pas de raisons à la raison. » L'auteur fait de l'« intelligence connective », ou « Inex », la clé pour composer avec la machine sans se départir de notre humanité. Voir Le Monde est flou. L'avenir des intelligences (Plon, 2021)[28][source insuffisante].
Notes et références
modifier- « chatbot », dictionnaire Larousse (consulté le ).
- « chatbot », sur Le Robert (consulté le ).
- Commission d’enrichissement de la langue française, « dialogueur », sur FranceTerme, ministère de la Culture (consulté le ).
- « agent conversationnel », Grand Dictionnaire terminologique, Office québécois de la langue française (consulté le ).
- (en) « Eliza Chatbot » [archive du ], sur nlp-addiction.com (consulté le )
- Sébastien Delahaye, « Les machines ne pensent pas, mais presque... », sur Libération, (consulté le )
- « A peine lancée, une intelligence artificielle de Microsoft dérape sur Twitter », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Chatbot, enfin l'âge adulte ? », sur questionsdetransformation.ey.com (consulté le )
- François Krug, « E-commerce : des androïdes au service des clients », sur Rue89, nouvelobs.com, .
- « Mais à quoi servent donc les chatbots ? », sur Challenges, .
- « Qu'est-ce qu'un chatbot ? », ChatbotCanada.com, (lire en ligne, consulté le ).
- Thomas Horst, Digitick lance son chatbot, Strategies.fr, (consulté le ).
- (en) « How a Bot is Resolving 84% of Support Requests », sur Mindsay (consulté le ).
- « Chatbot Messenger, robot Pepper : la RATP teste de nouvelles interfaces », sur L'Usine digitale (consulté le ).
- Florian Bayard, « ChatGPT : OpenAI a battu un record grâce à son chatbot », sur 01net.com, (consulté le )
- « Améliorer la relation client avec un agent virtuel intelligent ».
- « Entendez-vous ces bruits de bots ? Une réflexion sur la robomorphisation du web et de l'emploi par les chatbots », sur maisouvaleweb.fr (consulté le ).
- Maryse Gros, « L'arrivée de Watson au Crédit Mutuel suscite des inquiétudes pour l'emploi », sur Le Monde informatique (consulté le ).
- « Banque Casino : un chatbot qui réalise le travail de 3 personnes du service client », La Revue du digital, .
- (en-US) « Why chatbots may hold the future of tech jobs in their (nonexistent) hands », sur Monster Career Advice (consulté le ).
- Laurent Delattre, « Saperlipopette ! Les chatbots ont la cote ! », sur IT for Business, (consulté le ).
- Kai Strittmatter, Dictature 2.0: Quand la Chine surveille son peuple (et demain le monde), Tallandier, (ISBN 979-10-210-4319-0, lire en ligne), p. 104.
- « Informatique décisionnelle », sur Définitions Marketing (consulté le ).
- (en) « Chatbots Will be the Next Evolutionary Step in Business Analytics », sur Dataversity, (consulté le ).
- « L’E-médecine, antidote à la pénurie médicale? », sur CNRS Le journal (consulté le ).
- (en-GB) Kylie Gionet, « Meet Tess: the mental health chatbot that thinks like a therapist », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
- Pascal Chabot, ChatBot le robot : drame philosophique en quatre questions et cinq actes, Paris, PUF, , 70 p. (ISBN 978-2-13-073505-2)
- Vincent Cespedes, Le Monde est flou : L'avenir des intelligences, Paris, Plon, , 256 p. (ISBN 978-2259-28067-9)
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifier- Social bot
- Intelligence artificielle
- Analyse conversationnelle
- Test de Turing
- Agent virtuel
- Jasmine Anteunis
Programmes
Liens externes
modifier- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- « Chatbot : parle à ma fenêtre », La Méthode scientifique, France Culture, 4 mai 2022.
- Emmanuel Beillaud, « Pas de Chatbot sans Intelligence Artificielle et Machine Learning ! », Onepoint x Nexworld, 28 juillet 2017.
- Jean-Baptiste Berthelin, « Dialogueurs artificiels : précurseurs ou illusoires ? », bulletin de l'AFIA, no 46-47, novembre 2001.