Das Buoch von guoter Spise
Das Buoch von guoter Spise, en français « le livre de la bonne cuisine », aussi appelé Würzburger Kochbuch (« le livre de cuisine de Wurtzbourg »), est le premier livre de cuisine en langue allemande[1] parmi les livres de cuisine de la cuisine médiévale.
Histoire du livre
modifierLe recueil de recettes a été composé vers la fin des années 1340 par le protonotaire Michael de Leone, né vers 1300 à Wurtzbourg[2],[1].
Ce réceptaire figure dans plusieurs manuscrits, et notamment dans le Würzburger Liederhandschrift, en français le « manuscrit de chants de Wurtzbourg » appelé aussi Hausbuch des Michael de Leone (« chronique de Michael de Leone »). Cette chronique est composée de deux volumes, dont seul le deuxième est bien conservé. Dans ce deuxième volume, une petite partie (allant des feuilles 156recto à 165verso), soit une dizaine de feuilles sur un total de près de 300, contient le Buoch von guter Spîse[3].
Le manuscrit, sur parchemin, est déposé à la bibliothèque de l'université de Munich. Une autre transcription de texte se trouve dans la bibliothèque de Dessau (de). La section XXI contient les recettes qui ont été copiées de manière plutôt imprécise par un copiste inconnu.
Public
modifierLe texte permet de cerner facilement le public visé : la petite noblesse et de la bourgeoisie aisée urbaine. L'économie des villes a créé, à cette époque, une nouvelle forme de mobilité, ce qui a entraîné un transfert d'éléments culturels et d'usages culinaires. En effet, à l’époque, la cuisine sert de signe du statut social[4]. En conséquence, on ne consomme plus seulement des produits régionaux, mais aussi des produits exotiques qui ont un grand succès. Le repas devient ainsi un des plus importants symboles de statut social[5]. Cette distinction se manifeste aussi au niveau de la langue ; on distingue ainsi la nourriture commune des couches inférieures de la bonne nourriture des couches moyennes et supérieures. L'une est composée de brouet et de pain, l'autre de rôtis, volaille et gibier. Le manuel doit donc être perçu comme un recueil de recettes pour les plus aisés[6].
Contenu
modifierLe manuel contient 96 recettes de cuisine bourgeoise. Il s'agit en effet principalement de plats faciles à préparer ; par ailleurs lait, beurre et épices et herbes courantes comme gingembre, persil, livèche, poivre et sauge sont souvent mentionnés, alors que des condiments utilisé à la cour comme sel, cannelle, anis vert, noix de muscade et safran le sont beaucoup moins souvent. Les plats conviennent donc à des cuisinières moyennement expérimentées, et aux moyens financiers raisonnables. Les épices sont partout très apprécies, surtout dans l'art culinaire du Moyen Âge ; plus de 80 pour cent de toutes les recettes comportent plusieurs épices[7].
Un exemple de recette
modifierLa recette que voici est la traduction et adaptation de la recette no 35 du recueil, telle que transcrite par Hans Hajek :
« Wilt du machen einen agraz.
Nim wintruebele vnd stoz sur ephele. diz tuo zvo sammene, menge
ez mit wine vnd drueckez vz. dise salse ist guot zvo scheffinen braten
vnd zvo huenren vnd zvo vischen vnd heizet agraz. »
Cela peut se traduire en français moderne approximativement comme suit :
« Si tu veux faire un agraz.
Prends des grappes de raisin et ajoute des pommes acides. Mets ces deux ensemble, puis
mélange avec du vin et presse le tout. Cette sauce est bonne pour les rôtis de porc
et pour les poulets, et les poissons et s'appelle agraz. »
Comme on peut voir, il n'y a pas d'indications de quantité, ni de détails de préparation. Le agraz dont il est question est peut-être emprunté à l'espagnol, où il se rapproche de verjus (raisins ou pommes pas mûrs)[8],[9].
Cet exemple est repris dans le livre de Trude Ehlert[10] sous une forme plus contemporaine :
- Si tu veux faire un agraz
- 250g de raisin blanc ou noir
- 2 pommes boscop (ou Granny Smith)
- ¼ l vin rouge
- 1 pincée de poivre
- Préparation : éplucher les pommes, enlever l'intérieur, couper en lamelles, mixer les lamelles de pommes et le raisin en une purée, mélanger avec le vin, passer au chinois et servir froid.
- La sauce a un goût légèrement acide, rafraîchissant, et convient parfaitement avec un gigot d’agneau, un rôti de chevreuil en croûte, un poulet au four ou un pâté de viande.
Notes et références
modifier- Hajer Gerold: Daz Buoch von guoter spȋse. Abbildungen zur Überlieferung des ältesten deutschen Kochbuches (=Göppinger Beiträge zur Textgeschichte 45) Göppingen, 1976, p. 3.
- Bernhard Schnell: Das "Hausbuch" als Überlieferungsträger. Zu Michael de Leone und zum 'Iatromathematischen Hausbuch' , dans: Würzburger Fachprosa-Studien, édité par Gundolf Keil et rédigé par Johannes Gottfried Mayer, Würzburg 1995, p. 121ff.
- Hajek Hans: Daz Buoch von guoter spise. Aus der Würzburger-Münchner Handschrift.(=Texte des späten Mittelalters 8). Berlin 1958, p. 7.
- Hajer Gerold, Daz Buoch von guoter Spise. Abbildungen zur Überlieferung des ältesten deutschen Kochbuches, Göppingen, 1976, S.3, 114 (Göppinger Beiträge zur Textgeschichte, 45).
- Hajer Gerold: Daz Buoch von guoter spȋse. Abbildungen zur Überlieferung des ältesten deutschen Kochbuches (=Göppinger Beiträge zur Textgeschichte 45) Göppingen, 1976, p. 3 et 114.
- Lutz Peter: Herrenspeis und Bauernspeis. In: Karfunkel. Küche im Mittelalter 1,Osterburken 2008, p. 12-18.
- Laurioux Bruno: Tafelfreuden im Mittelalter. Kulturgeschichte des Essens und Trinkens in Bildern und Dokumenten. Stuttgart/Zürich 1992, p. 24-36.
- Des amateurs de la cuisine médiévale ont fait des essais de fabrication d'agraz dont ils présentent les résultats ici en allemand.
- Dans la version éditée en 1844, agraz est en revanche traduit par jus de groseilles à maquereaux, et considéré comme dérivant du moyen allemand Agrossolier qui signifie groseillier à maquereaux.
- Trude Ehlert a étudié avec soin les recettes du manuel et a résumé ses expériences dans le livre « Das Kochbuch des Mittelalters. Rezepte aus alter Zeit, eingeleitet, erläutert und ausprobiert von Trude Ehlert. » Zurich 1990. La recette est à la page 28.
Bibliographie
modifier- Bibliothek des Litterarischen Vereins in Stuttgart (de) 1844 vol IX, 2e partie.
- (it) Laura Mancinelli : De Charlemagne à Luther : La littérature allemande médiévale, éd. Bollati Boringhieri, Turin, 1996 (ISBN 978-8-83390-963-9)
- Melitta Weiss Adamson: Daz buoch von guoter spise (The Book of Good Food). A Study, Edition, and English Translation of the Oldest German Cookbook. Krems 2000 (Medium Aevum Quotidianum, Sonderband IX).
- Hans Hajek (Éd.): Das buoch von guoter spise. Aus der Würzburg-Münchener Handschrift. Berlin 1958. Texte source en ligne.
- Thomas Gloning (de), Monumenta Germaniae Culinaria 1350-1800. Livres allemands anciens traitant de cuisine et d'alimentation.