Les chants de harpistes sont, dans la littérature de l'Égypte antique, des textes profanes comme les contes, les lettres, les chants d'amour et autres chants de banquet. On en connaît plusieurs, retrouvés dans les tombes. Ils font pour l'essentiel l'éloge de la vie après la mort et sont souvent utilisés dans des contextes funéraires. Ces textes affichent divers degrés d'espoir dans une vie après la mort qui vont du scepticisme aux expressions de confiance plus traditionnelles[2]. Ces textes sont accompagnés de dessins de harpistes aveugles et on pense donc qu'ils ont été chantés[1]. Thématiquement, ils ont été comparés à l'immortalité des écrivains (un texte du papyrus Chester Beatty IV (BM 10684)) dans leur expression du scepticisme rationnel[3].

Durant le Moyen Empire (v. 2040–1640 av. J.-C.) des harpistes aveugles sont décrits sur les murs des tombeaux[1].

Analyse

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La distinction entre chants, hymnes et poésie dans les textes égyptiens anciens n’est pas toujours claire. La convention est de traiter comme chansons les textes poétiques représentés avec des instruments de musique. Si les chants semblent avoir un lien clair avec les cultes des temples et les festivals, alors ils sont communément décrits comme des hymnes[4]. Les textes poétiques présentés avec des scènes de travail sont comparés aux chansons chantées par les ouvriers égyptiens de l'époque moderne et sont donc également classés comme chansons. D'autres chants se rapportent au culte des morts et sont presque toujours représentés avec des harpes d'où est dérivé le nom de « chant du harpiste »[4]. Puisque ces chants sont des réflexions sur la mort, plutôt que de faire partie des rituels associés à l’enterrement, on retrouve dans ces textes une expression plus libre de la pensée. Les chansons cherchent à rassurer le propriétaire de la tombe sur son sort après la mort en guise d'éloge[4]. La plus grande liberté, dans le cas du chant du harpiste aveugle dans la tombe d'Antef, est même allé jusqu'à douter de la réalité d'une vie après la mort, déplorant la mort et conseillant de profiter de la vie[4]. Miriam Lichtheim considère cela comme introduisant un courant de pensée plus sceptique qui se reflète dans des œuvres telles que Dialogue du désespéré avec son bâ et d'autres chansons de harpistes[4].

Exemples

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Chant du harpiste dans la tombe d'Antef

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Ce chant, supposément gravé sur les murs d'une tombe d'un des rois Antef (on ne sait lequel) d'après ce qui est indiqué en introduction « Le Chant qui est dans la demeure d'Antef », est parmi les plus connus :

«  Que reste-t-il des tombeaux de nos constructeurs ?

J'ai écouté les paroles d'Imhotep et de Dedefhôr,
devenues : règles et conseils "qui ne passeront jamais"...
Les murs sont tombés et les tombeaux n'existent plus...
Mon cœur reste en paix, seul l'oubli te donnera la sérénité.
Mon cœur sois joyeux et ne te laisse pas abattre
habille-toi de lin fin et met de la myrrhe sur la tête
Accomplis tes destinées sur Terre et ne te tourmente pas
Car les plaintes ne sauvent personne du tombeau
et personne ne peut emporter avec lui son bien ... »

Chant du harpiste dans la tombe d'Inherkhâou

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Harpe égyptienne, v. 1390–1295 av. J.-C.

Ce texte est dans le caveau de la tombe d'Inherkhâou (TT359) à Deir el-Médineh. C'est une peinture murale sur la paroi sud. Il est rédigé en hiéroglyphes orientés de droite à gauche sur seize colonnes[note 1] :

colonne 1
I10
D46
N35
G40V28W14S29M17 A2
Z2
N35D4
Q2
O29
Y1
N35
M40X1 Z1
Z2
Aa15Q1X1
O1
Aa11
X1
W25S3N1
N28
D36
Y1
Z7 Z1 Z1
ḏd.n pȝ ḥsjw n wsir ˁȝ n jsw.t m s.t mȝˁ.t Jn-ḥr-ḫˁ.wy
Le chanteur a dit à l’Osiris, le grand de l'équipe de la Place de Vérité, Inherkhâou(y)
colonne 2
A40H6P8I10
D46
A40W24
V31
A1A21Q3
Z7
O34
A1 Z1
Q3Z7E34
N35
U5
D36
X1
Aa11
Y1
Aa15M16G1Z7
D40
F35I9
D21
mȝˁ-ḫrw ḏd=j jnk sr pw s pw wn mȝˁ.t m ḥȝ.w nḫt nfr
juste de voix. Je dis : « Je suis ce dignitaire, cet homme qui se trouve dans la Maât, dans la puissante et bonne profusion
colonne 3
D4
N35
R8A40D21
I9
G1
N29
M17A53Y1L1D21
Aa15
F32
X1 Z1
D2Z1O35D58D54M36
D21
D21
V31
R8A40G1U28Aa15A17
Z2
Z1 Z1 D54
Z7
jr(w) n nṯr r.f ȝḳ(.w) ḫpr(.w) m ẖ.t ḥr sbj ḏr rk nṯr ḏȝm.w jw.w
faite par le dieu lui-même, les formes périssent depuis le corps, en mourant, depuis le temps du dieu. Les jeunes viennent
colonne 4
D54
D21
Q1X1
O1
O34
N35
Z2
R7
G29
Z1
R7
Z2
G25
Aa1
A51Z3N35
X1 Z1 Z1
Aa15N14X1
O1
O34G1Aa18V28A53Z3Aa15W19X1
X1
Y1M17D21
Z1 Z1
A35D40
Z2
r s.t=sn bȝ.w ȝḫ.w nty(.w) m dwȝ.t sˁḥ.w m mjt.t jr.y jḳd(w).w
à leur place, (de même que) les baou et les akhaou qui sont dans la Douat, à la suite des momies. Il en va de même pour ceux qui ont construit
colonne 5
O6X1
G43
O1
Z2
M17M40S29Z1 Z1 O1
Z2
Aa15W19X1
X1
Y1O34
X1
Aa15
A1Z3R4
X1 Q3
Aa15U23Aa15
D21
O24O1
Z2
O34
N35
Z2
D4
N35
V31
O6X1
O1
Aa15
N16
ḥw.wt pr.w js.w m mit.t stm.w=sn ḥtp m mr.w=sn ir n=k ḥw.t m tȝ
les monuments funéraires et les tombes ; de même, ce sont eux qui reposent dans leurs pyramides. Fais-toi un monument dans la Terre
colonne 6
D45
D21
X1
N25
Y5
N35
U32Y1vD21
N35
V31
M17Aa15
O34
M17Q3 X1
Y1
D28 X1 A9Y1
Z2
V31N35
X1
R10Y5
N35
Aa1X1U22Y1Q1X1
O1
V31N35
X1
ḏsr mn rn=k jm.s jp.t kȝ.t=k n(y).t ẖrt-nṯr mn ḫ.t mnẖ s.t=k n(y).t
Sacrée, où ton nom sera pérennisé. Dans celle-ci, tes travaux seront comptabilisés dans la nécropole et feront partie des choses stables tandis qu'excellente sera ta place dans
colonne 7
R14X1
X1
N25W24 W24 W24
N1
N35
N35
N35
Aa1
D46
P1V23V28M17M17P5Z7Z2W17N35
X1 Z1 Z1
U33M17M17P1O34A1Z1V30
D21
E34
N35
W24 X1
N14N5
Z1
I9
D4
Jmn.t nnw ḫḏi mḥty ṯȝw ḫnty s nb wnw.t=f jr
l’Occident. L’Océan Primordial coule vers l’embouchure et le vent du nord vers la source. Tout homme aura son heure. Fais
colonne 8
O4
D21
N5
Z1
F35I9
D21
D4Q1A40O29
Y1
N35
Aa28X1 Z1
Z2
Aa15Q1X1
O1
Aa11
X1
W25S3N1
N28
D36
Y1
Z7 Z1 Z1
Aa11
P8
Aa15
G36
D21
D46
A7G37
ḥrw nfr Wsir ˁȝ n jsw.t m s.t mȝˁ.t Jn-ḥr-ḫˁwy mȝˁ ḫrw m wrd
un jour heureux, l’Osiris, le chef d’équipe dans la Place de Vérité, Inherkhâouy, juste de voix. Ne laisse pas se lasser
colonne 9
F34 Z1
V31
D21G36
D21
O50Z1 Z1 V28N35
D36
Z11Aa15
Z1 Z1
F34 Z1
V31
Aa15D4T5Z9
G37
F34 Z1
V31
Aa15X1
D21
M17M7N5E34
N35
N35
V31
ib=k r wr sp 2 ḥnˁ jmy ib=k m jr(w) ḥḏ ib=k m tr wnn=k
ton cœur, grandement deux fois, avec ce qui est dans ton cœur, ne laisse pas languir ton cœur pendant ton temps de vie.
colonne 10
D4O4
D21
N5 Z1
F35I9
D21
D21G36
D21
O50Z1 Z1 M17G17Aa15
D36
N29W19M17M17W22Z2D1Q3W22Z1 Z1
Z1
X1G43A53Y1X1 Z7
D21
Aa16 Z1
V31
U2
Fais un jour heureux, grandement deux fois, place des onguents et des huiles mélangées à ton côté des guirlandes de
colonne 11
G1V28Z1 Z1
M2
Z2O34
N37
N35
Z1 Z1
M9M2Z3D21
D21
I10M2Z2
D21
V7
N35
D58X1
F51
V31O34X1A1Q3Z7Z11Aa15
Z1 Z1
F34 Z1
V31
O34
lotus et des fleurs sur ton sein. Cette dame qui est dans ton cœur est
colonne 12
M29Aa15
Y1
X1 Z7
D21
Aa16 Z1
V31
V28I10
N35
W24 W
Z9
G36F34 Z1
V31
D2Z1L1
D21
X1 Z2
V30
M17Aa15
Aa15
D36V28W14S29M17A2M17Z2D21Aa1 X1
I9
douce et elle est à tes côtés. Ne fâche pas ton cœur au sujet de tout ce qui devient. (Place) sur ta main les louanges et ses connaissances
colonne 13
D2 Z1
V31
Aa15
D4
S29M12G1A2N26
Z7 X1
G37
Z2
D58G43Z7X1K2
Z2
R8A40S29M12G1A2N35
V31
D21
N37
sur ta tête. Ne pense pas au mal et à l’abomination du dieu. Souviens-toi des joies,
colonne 14
Z7X1F63
Y1
Z2
G40D36
N29
D50 D50
Y1
F34Z1G40O34A1Z1D53
X1
T14 T14
Y1
U5
D36
Aa11
X1
N29D58V28W15Y1
Z2
cet homme équitable, cet homme juste, celui qui rafraîchit la Maât
colonne 15
V29 V28
Y1
F34Z1O4
D21
Y1
O34
D21
I9
A2
Z2
E34
N35
I9
F18
A2X1
U15
Aa15
Y1
I10
D46
D58M17N35
G37
M17Aa15
Aa15
D36
X1 Aa1
W22
généreux, plaisant, rafraîchit et réjouit, qui ne parle jamais en mal. Enivre
colonne 16
D40
N35
F34 Z1
V31
Aa15W11
D21
Z4
Y1
Z2
O4
D21
N5Z1D21M18M17Z1 Z1 D54O4
D21
N5Z1G40I9
Z1 Z1
N31
N35
Y5
N35
M17T14P1M17Aa15
I9
ton cœur tout au long du jour jusqu’à ce que vienne ce jour où tu devras amarrer. »

Notes et références

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  1. Certains hiéroglyphes n'existant pas dans le logiciel Wikihiero ont été remplacés par le hiéroglyphe le plus ressemblant.

Références

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  1. a et b Allen 2000, p. 343.
  2. Lichtheim 1976, p. 115.
  3. Lichtheim 1976, p. 175-178.
  4. a b c d et e Lichtheim 1975, p. 193.

Bibliographie

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