Aymeri VI de Narbonne

vicomte de Narbonne (1341-1388) et amiral de France (1369-1373)

Aymeri VI de Narbonne (v. 1328-1388), vicomte de Narbonne de 1341 à 1388 et seigneur de Puisserguier, est un seigneur et homme de guerre français du XIVe siècle. Il a été amiral de France de 1369 à 1373.

Aymeri VI de Narbonne
Image illustrative de l'article Aymeri VI de Narbonne
Portrait imaginaire d'Aymeri VI de Narbonne réalisé entre 1719 et 1722 pour la Galerie des amiraux de l'hôtel du comte de Toulouse à Paris[1],[2],[3].

Titre Vicomte de Narbonne
(1341 - 1388)
Autre titre Baron de Puisserguier
Prédécesseur Amalric III (son demi-frère)
Successeur Guillaume Ier (son fils)
Grade militaire Amiral de France (1369-1373)
Conflits Guerre de Cent Ans
Biographie
Dynastie Famille de Lara
Naissance vers 1328
Décès
Père Aymeri V de Narbonne
Mère Tiburge de Puisserguier
Conjoint Béatrice de Sully
Yolande de Genève
Béatrice d'Arborée
Guillema de Vilademany
Enfants Guillaume Ier de Narbonne

Image illustrative de l’article Aymeri VI de Narbonne
Description du blason : De gueules plein.

Biographie

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Né vers 1328[4], fils du vicomte Aymeri V de Narbonne et de sa seconde épouse, Tiburge de Son, dame de Puisserguier, Aymeri VI devient vicomte de Narbonne en 1341 sous la tutelle de sa mère après la mort de son demi-frère, Amalric III, le [5].

Le , il prête serment de fidélité au nouvel archevêque, Gaubert du Val, pour la moitié occidentale de la cité narbonnaise[6].

Le , au château royal de Perpignan, le vicomte fait hommage au roi d'Aragon Pierre IV le Cérémonieux[7] pour ses terres du Roussillon, à la suite de la conquête de ce territoire quelques mois plus tôt par les Aragonais sur Jacques III de Majorque.

Aymeri VI est fait prisonnier à deux reprises par les Anglais, le , à la bataille d'Auberoche[8], puis le , à la bataille de Poitiers, où il est aussi blessé[9].

Du 8 au 10 novembre 1355, avec 500 hommes d'armes, il résiste dans Narbonne aux assauts des forces menées par le Prince noir lors de sa chevauchée de Bordeaux à la Méditerranée[10].

En 1358, il remplit brièvement la charge de « gouverneur et capitaine général en Languedoc » pour le roi de France[11].

De 1381 à 1384, dans le contexte troublé de la révolte des Tuchins et de l'opposition à la nomination de Jean de Berry comme gouverneur de Languedoc, menée par le comte de Foix Gaston Fébus, Aymeri VI, allié du duc de Berry, mène une violente guerre (la « guerre du vicomte »[12]) contre les consuls et les habitants de Narbonne, partisans du comte de Foix. Le vicomte assiège Narbonne avec ses troupes et fait détruire le barrage sur l'Aude à Moussoulens, ce qui empêche l'écoulement de l'eau dans la robine, privant ainsi les Narbonnais d'eau, empêchant le fonctionnement des moulins et asséchant les fossés des remparts[12]. Selon une plainte des consuls, les hommes d'armes du vicomte auraient mis à mort plusieurs habitants de Narbonne qui travaillaient dans leurs champs et leurs vignes et qui ne purent se racheter, auraient torturé un vieillard en lui arrachant les dents, jeté dans les puits les corps de plusieurs de leurs victimes en les privant de sépulture chrétienne et se seraient emparés de plusieurs femmes de la ville pour les violer[13].

La « guerre du vicomte » arrête durablement le redressement économique et social de Narbonne[12].

Vers 1385, le duc de Berry, alors lieutenant du roi en Languedoc, nomme Aymeri capitaine général dans la sénéchaussée de Baucaire[14].

Le , Aymeri et son héritier, l'aîné de ses fils Guillaume, forment une alliance avec le comte Jean III d'Armagnac, envers tous et contre tous, à l'exception du roi et des princes de France. L'entente, ratifiée par Aymeri et son fils au château de Fabrezan, le 8 mai suivant, prévoyait que le vicomte devenait vassal du comte d'Armagnac, moyennant 400 livres de rente à assigner en Rouergue[15].

Le vicomte Aymeri meurt peu de temps et est inhumé dans l'abbaye de Fontfroide[16].

Son fils Guillaume Ier de Narbonne lui succède.

Mariages et descendance

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Aymeri VI de Narbonne a été marié à quatre reprises.

Il épouse en premières noces Béatrice de Sully, fille de Jean II († 1343), seigneur de Sully et de son épouse Marguerite, fille de Louis Ier, duc de Bourbon.

Veuf, il se remarie au début de l'année 1360 avec Yolande, quatrième fille d'Amédée III, comte de Genève et de son épouse Mathilde, fille de Robert VII, comte d'Auvergne et de Boulogne. Les négociations pour ce mariage avaient été engagées dès novembre 1358. La nouvelle épousée, nièce de l'influent cardinal Guy de Boulogne, apportait une dot de 16 000 florins, promise par son père le , et pour laquelle Aymeri touchait encore des acomptes en novembre 1361[17],[18].

Le vicomte convole une troisième fois en 1363 avec Béatrice d'Arborée (morte en 1377), fille aînée de Mariano IV, juge d'Arborée, sur l'île de Sardaigne et de son épouse Timbor (it), fille de Dalmau VII (ca), vicomte de Rocaberti (ca). Le couple eut de nombreux enfants, dont Guillaume Ier, successeur d'Aymeri VI à la tête de la vicomté. C'est de cette union que son petit-fils Guillaume II tirera ses prétentions sur la Sardaigne en 1407.

En quatrièmes noces, Aymeri épouse après mai 1383[19] Guillema de Vilademany, fille unique du seigneur catalan Bernat de Vilademany (près d'Aiguaviva) et de Blanca de Vallgornera[20], veuve de Pere III Galceran de Pinos[21], mort entre le 4 avril et le 18 mai 1383, seigneur de Bagà et des baronnies de Lucà, de la Portella et autres lieux, qu'elle avait épousé en 1362, alors qu'elle était encore mineure[22]. Désignée héritière universelle par son père dans son testament du , elle avait renoncé à sa succession le en faveur de son oncle Pere de Vilademany, moyennant compensation financière[22]. Veuve une seconde fois et n'ayant eu aucun enfant de ses deux unions[23], Guillema teste le , en demandant à être inhumée dans l'église de Saint-Jean-de-Jérusalem de Barcelone[24].

Références et notes

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Bibliographie

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  • [Histoire générale du Languedoc, t. 10] Claude Devic, Joseph Vaissète, Ernest Roschach et al., Histoire générale de Languedoc, t. 10 : 1271-1443 (notes et preuves), Toulouse, Privat, , 3e éd. (1re éd. 1730-1745) (lire en ligne)
  • (ca) Eduardo de Balle, marquès de Vallgornera, « El testament de Guillema de Villademany, muller del Vescomte de Narbona Eimeric IX », dans 42e Congrès de la Fédération historique du Languedoc méditerranéen et du Roussillon, Perpignan, 1969, Montpellier, , p. 205-219.
  1. « Amaury X, vicomte de Narbonne, amiral de France de 1369 à 1373 », notice de l'objet, sur Collections - Château de Versailles (consulté le )
  2. Pauline Maroteaux, « Catalogue de la série de portraits des amiraux de France conservés au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon », Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, no 23,‎ , catalogue no 23 (ISSN 1958-9271, DOI 10.4000/crcv.28096, lire en ligne, consulté le ).
  3. Pauline Maroteaux, « La Genèse d’une galerie de portraits historiques : l’exemple de la série des amiraux de France », Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles, no 23,‎ (ISSN 1958-9271, DOI 10.4000/crcv.26920, lire en ligne, consulté le ).
  4. Dans un acte du , Aymeri VI se dit « majeur de quatorze ans et mineur de quinze », ce qui indique une date de naissance vers 1328. Histoire générale du Languedoc, t. 9, p. 493.
  5. Histoire générale du Languedoc, t. 9, p. 493.
  6. Marie-Laure Jalabert, « Chapitre I - Gloire et crises de l’archevêché de Narbonne jusqu’au XIVe siècle », dans Le Livre Vert de Pierre de la Jugie : Une image de la fortune des archevêques de Narbonne au XIVe siècle. Étude d’une seigneurie [en ligne], Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, 2009 (page consultée le 15 juillet 2015).
  7. Philippe Araguas, « Châteaux, palais, hôtels et tentes de campagne : notes sur les "itinérances" de Pierre IV le Cérémonieux », e-Spania [En ligne], no 8, décembre 2009.
  8. Histoire générale du Languedoc, t. 9, p. 575-576.
  9. Histoire générale du Languedoc, t. 9, p. 813.
  10. Jacqueline Caille, « Nouveaux regards sur l’attaque du Prince Noir contre Narbonne en novembre 1355 », dans Bulletin de la Société d'études scientifiques de l'Aude, t. CIX, 2009, p. 89-103
  11. Gustave Dupont-Ferrier, Gallia regia ou État des officiers royaux des bailliages et des sénéchaussées de 1328 à 1515, tome 3, Caux - Dauphiné, Paris, Imprimerie Nationale 1947, p. 496, no 13764.
  12. a b et c Gilbert Larguier, « Chapitre II - Un rétablissement spectaculaire, 1355-1400 », dans Gilbert Larguier, Le drap et le grain en Languedoc : Narbonne et Narbonnais, 1300-1789, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, 1999, nouvelle édition [en ligne] (ISBN 9782354121983), [lire en ligne].
  13. Vincent Challet et Guilhem Ferrand, « Villages en guerre : les communautés de défense dans le Midi pendant la guerre de Cent Ans », dans Archéologie du Midi médiéval, tome 25, 2007, p. 113.
  14. Gustave Dupont-Ferrier, Gallia regia ou État des officiers royaux des bailliages et des sénéchaussées de 1328 à 1515, tome 3, Caux - Dauphiné, Paris, Imprimerie Nationale 1947, p. 498, no 13780.
  15. Histoire générale du Languedoc, t. 9, p. 814.
  16. Le 16 août 1397, Guillaume Ier de Narbonne fonde dans l'église abbatiale de Fontfroide deux messes par semaine pour les âmes de son aïeul, d'Aymeri son père et d'Aymeri son frère qui y étaient enterrés, Histoire générale du Languedoc, t. 9, p. 1007.
  17. Pierre Duparc, Le comté de Genève, (IXe – XVe siècles), t. XXXIX, Genève, Société d’histoire et d’archéologie de Genève, coll. « Mémoires et documents » (réimpr. 1978) (1re éd. 1955), p. 302-303.
  18. André Perret, Raymond Oursel, Jean-Yves Mariotte et Jacqueline Roubert, Trésor des chartes des ducs de Savoie (pièces restituées du fonds des Archives de Cour, Archivio di Stato di Torino). Cote : FR.AD073.SA 1-259. Inventaire (édition et nouvelle présentation du 2 septembre 2005), Archives départementales de la Savoie, p. 69 du pdf (S A 67) [télécharger], actes concernant le mariage conservé aux Archives de Haute-Savoie (Fonds du duché de Genevois, SA 67) : Convention relative au mariage (1358, 10 décembre). Deux quittances [...] des paiements reçus sur la dot (1359, 24 février, et 1361, 18 novembre). Contrat de mariage : Première rédaction en français (1358, 26 novembre), texte définitif latin (1359, 17 janvier), avec deux vidimus de la version française.
  19. Le premier époux de Guillema de Vilademany mourut entre le 4 avril et le 18 mai 1383 : Vallgornera 1970, p. 207
  20. Vallgornera 1970, p. 205-207, 209-211.
  21. Sur le personnage et sa famille : « Pere Galceran de Pinós i de Fenollet » et « Pinós », Gran Enciclopèdia Catalana [en ligne], pages consultées les 22 avril 2015 et 4 janvier 2018.
  22. a et b Vallgornera 1970, p. 207
  23. Vallgornera 1970, p. 207, 209
  24. Vallgornera 1970, p. 205, 216-219

Voir aussi

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Bibliographie complémentaire

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  • (it) Maria Antonietta Brandas, « Alcune riflessioni sulla figura di Beatrice de Bas-Serra, viscontessa di Narbona », Aragonensia : Quaderno di studi sardo-catalani, Grafica del Parteolla / AdT Arxiu de Tradicions,‎ , p. 90-94 (ISBN 88-88246-23-1 et 9788888246239).
  • Vincent Challet, « In asperis carceribus et in fame dolore et magna miseria : de quelques violences seigneuriales pendant la « guerre du vicomte » à Narbonne et dans ses environs (1381-1382) », Criminocorpus : revue d'histoire de la justice, des crimes et des peines,‎ (ISSN 2108-6907, lire en ligne).
  • Pierre-Vincent Claverie, « Grandeur et décadence de la communauté narbonnaise de Chypre au Moyen Âge », Επετηρίδα του Κέντρου Επιστημονικών Ερευνών, vol. 39,‎ 2016-2018, p. 9-127 (lire en ligne).
  • Joseph Poux, « Le mobilier de Béatrice d'Arborée, vicomtesse de Narbonne en 1377 », Bulletin de la Commission archéologique de Narbonne, vol. XI,‎ 1910-1911, p. 385-408 (lire en ligne).