Anneaux de (10199) Chariclo
Le centaure (10199) Chariclo est entouré d'un système d'anneaux constitué de deux étroits anneaux denses de 7 et 3 kilomètres de large, séparés de seulement 14 kilomètres, à 391 et 405 kilomètres du centre de l'astéroïde respectivement.
Découverte
modifierLes deux anneaux ont été découverts grâce à l'observation par huit télescopes situés à sept endroits en Amérique du Sud[N 1], dont le télescope danois de 1,54 mètre et TRAPPIST situés à La Silla (partie de l'Observatoire européen austral) au Chili, de l'occultation de l'étoile 2UCAC 15096659, située dans la constellation du Scorpion, le . Lors de cet événement, la magnitude observée est passée de 14,7 (étoile + Chariclo[N 2]) à 18,5 (Chariclo seul), soit une augmentation de magnitude de 3,8, ce qui équivaut à une baisse de luminosité d'un facteur 32,5, pendant environ 19,2 secondes[1]. Cependant, cette principale baisse de luminosité a été accompagnée de quatre autres baisses intermédiaires, deux de quelques secondes avant l'événement principal et deux de quelques secondes après, de façon symétrique, signalant que quelque chose d'autre avait aussi partiellement occulté l'étoile. La symétrie des occultations secondaires et les multiples observations des différents sites terrestres ont permis de reconstituer la forme du compagnon occultant, révélant qu'il s'agit de deux anneaux.
Particularités et intérêt de la découverte
modifierCes anneaux étaient, au moment de leur découverte, les seuls connus autour d'une planète mineure, tous les autres connus à l'époque se trouvant autour des quatre planètes géantes (Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune)[N 3]. Avec ses 250 kilomètres de diamètre, Chariclo est ainsi le plus petit corps autour duquel des anneaux ont été trouvés. Cette découverte, annoncée officiellement le , était inattendue étant donné que jusqu'à présent on pensait que des anneaux ne pouvaient être stables qu'autour d'objets beaucoup plus massifs[2],[3],[4].
Désignations
modifierL'équipe ayant fait la découverte a désigné les anneaux sous les noms provisoires 2013C1R (désignation provisoire normalisée de l'UAI : R/2013 (10199) 1) et 2013 C2R (désignation provisoire UAI : R/2013 (10199) 2) et les a surnommés respectivement Oiapoque et Chuí d'après les rivières Oyapock (Oiapoque est la forme portugaise du nom) et Arroio Chuí qui forment les frontières côtières septentrionales et méridionales du Brésil. Ces noms font écho à l'expression « do Oiapoque ao Chuí », utilisée pour parler de tout le Brésil. Felipe Braga-Ribas, le premier auteur de l'article, est en effet brésilien. Les noms formels seront soumis à l'UAI à une date ultérieure[2].
Anneaux
modifierLa largeur et la profondeur de C1R varie de 21 % et la variation pour C2R est peu significative au vu de la qualité des données. Des asymétries similaires ont été observées lors d'une occultation par les anneaux d'Uranus, qui sont à peu près aussi étroits[4].
Nom provisoire[4] |
Surnom | Rayon optique (km) |
Largeur (km) |
Profondeur optique |
---|---|---|---|---|
(Chariclo) | 124 | 1,0 | ||
2013C1R | Oiapoque | 396 | 7 | 0,4 |
2013C2R | Chuí | 405 | 3 | 0,06 |
2013C1R, alias Oiapoque
modifier2013C2R, alias Chuí
modifierOrigine
modifierLes anneaux sont probablement les restes d'un disque de débris qui aurait pu se former à la suite d'un impact sur Chariclo, d'une collision avec ou entre une ou plusieurs lunes préexistantes, de la désintégration d'une ancienne lune sur une orbite rétrograde à cause des effets de marée ou de matériel relâché de la surface par l'activité cométaire ou par une rupture due à la rotation[4]. Dans tous les cas, ils sont probablement confinés par de petites lunes (de l'ordre du kilomètre) situées dans les anneaux ou bergères de ces derniers[3] ; on présume l'existence de ces lunes en raison de l'effet Poynting-Robertson. L'orientation des anneaux est compatible avec le fait qu'ils étaient vus par la tranche depuis la Terre en 2008. Ceci explique probablement la baisse de luminosité de Chariclo observée entre 1997 et 2008 ainsi que la disparition progressive de la glace d'eau et d'autres matériaux du spectre pendant cette période, ce qui suggère que les anneaux sont composés au moins pour partie de glace d'eau[4].
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifier- « Le télescope James-Webb a scruté les anneaux de Chariklo, un astéroïde aux confins du Système solaire », Futura Science, Adrien Coffinet, 31 janvier 2023.
Notes et références
modifierNotes
modifier- Les huit télescopes étaient situés à Foz de Iguaçu, Ponta Grossa, La Silla (télescope danois et TRAPPIST), au Cerro Tololo (PROMPT), au Cerro Pachón (SOAR), à Bosque Alegre et à Santa Martina. Cf. Braga-Ribas et al. 2014.
- La magnitude de l'étoile est elle-même estimée à 14,7 en lumière visible. La variation due à la présence ou l'absence de l'astéroïde n'est que de 0,03 magnitude, inférieure à la précision des données ici indiquées.
- Des anneaux non confirmés auraient néanmoins peut-être déjà été détectés autour de certains satellites de Jupiter et Saturne, Rhéa par exemple, et la présence d'anneaux autour de Pluton est également envisagée.
Références
modifier- « RASNZ Occultation Section - Chariklo Occultation Update », sur www.occultations.org.nz
- « First Ring System Around Asteroid », European Southern Observatory, (consulté le )
- DOI 10.1038/nature.2014.14937
- (en) F. Braga-Ribas, B. Sicardy, J. L. Ortiz et col, « A ring system detected around the Centaur (10199) Chariklo », Nature, (DOI 10.1038/nature13155)