Alfred Verwée

peintre belge

Alfred Jacques Verwée, peintre belge né à Saint-Josse-ten-Noode le et mort à Schaerbeek le [1], est un des précurseurs du mouvement naturaliste. Il fut l'un des premiers peintres belges du XIXe siècle à peindre des paysages en plein air et à transposer les codes du réalisme à la peinture animalière.

Biographie

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Il est le fils du peintre de Courtrai Louis-Pierre Verwée (1807-1877), un peintre romantique de paysages d'hiver, lui-même élève de Eugène Verboeckhoven. Son frère Louis-Charles Verwée devient lui aussi peintre.

Il obtient son diplôme d'arpenteur-géomètre, mais ne peut pas terminer ses études d'ingénieur en raison de difficultés financières familiales[2]. Il peignait depuis longtemps en amateur et avec le soutien de son père, qui a contribué à sa formation, il choisit cette carrière.

Formation

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Il commence par peindre des paysages de campagne dans le même style romantique que son père. Puis Eugène Verboeckhoven (1798-1881), peintre animalier belge, qui avait été professeur de son père est devenu le sien. Il l'encourage à adopter une approche minutieuse pour représenter les animaux.

En 1853, il prend des cours auprès du peintre paysagiste et portraitiste François Charles Deweirdt (1799-1855), qui avait été ami et collaborateur de son père. Il s'inscrit plus tard à l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles, mais ne suit que quelques cours.

Sa première exposition a eu lieu en 1857, mais il n'a obtenu une véritable reconnaissance qu'en 1863, à l'occasion du Salon de Bruxelles, où il a reçu une médaille d'or pour son œuvre Attelage flamand (musée royal des Beaux-Arts de Bruxelles). L'écrivain et critique d'art Camille Lemonnier disait que "ce tableau impressionna vivement les artistes français et fut à Bruxelles l'une des grandes séductions de l'exposition rétrospective de 1896".

Il séjourne à Paris vers 1860[3]. Une de ses premières influences est Constant Troyon (1810-1865), peintre animalier français, membre de l'école de Barbizon. Ils partagent un intérêt pour la peinture en plein air et la capture de la lumière. Troyon joue aussi un rôle dans l'attention portée à la représentation réaliste et précise des animaux, en particulier des chevaux et du bétail.

Reconnaissance

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Il participe au courant réaliste belge, une nouvelle manière de représenter la nature en rupture avec les conventions artistiques de son temps, en suivant une démarche scientifique et documentaire. Il remporte sa seconde médaille d'or au Salon de Paris en 1864 pour Attelage de bœufs dans un coin de ferme acheté par le musée de Courtrai. Sur les conseils de connaissances professionnelles, il s'installe à Paris et entre en contact avec d'autres peintres de l'école de Barbizon. Cela n'a cependant pas conduit au succès financier escompté et il est revenu à Bruxelles un an plus tard.

Ensuite, de 1867 à 1868, il vit à Londres, mais, encore une fois, le succès commercial est impossible à obtenir et il doit rentrer. A son retour, il se marie avec Hermina Wilhelmina Vernieuwe (1841-1906) avec qui ils auront deux filles : Émilie Verwée (alias Emma Verwée) qui deviendra peintre et Claire Verwée (1873-1956). Il entreprend une tournée aux Pays-Bas, pendant laquelle il se lie d'amitié avec le peintre de marine de La Haye Hendrik Willem Mesdag.

Cette même année 1868, avec le peintre Louis Artan de Saint-Martin, il fonde la Société libre des beaux-arts[4], une association bruxelloise, à laquelle se joindront vingt-quatre artistes belges pour s'affranchir de l'académisme imposé par les Salons d'arts, et promouvoir leurs œuvres sans contraintes.

Il est fait chevalier de l'ordre de Léopold, le et, en 1873, il obtient une médaille à Vienne pour Récolte dans le Nord de la Flandre.

Le Naturalisme

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Il commence à peindre en plein air pour atteindre un style naturaliste, et de 1875 à 1880 il tente de créer une grande vision de la campagne flamande. En 1876, il participe à la création de La Chrysalide, une association éphémère considérée comme un précurseur du "Groupe des XX". Il participe au salon de Paris en 1877.

Il s'établit à Knokke et s'inspire de cette localité pour peindre la Flandre maritime, ses pâturages et ses troupeaux de bovidés. Vers 1878, il se libère de son réalisme, éclaircit sa palette et se rapproche d'une forme d'impressionnisme. Parmi ses paysages de Flandre : "L'embouchure de l'Escaut" (1880, Bruxelles, M.R.B.A.B.)[4].

Alors qu'il était membre du Jury du Salon de Bruxelles de 1884, il vote contre Ensor[5]. En retour, Ensor s'oppose à ce que Verwée soit membre du "Groupe des XX".

Deux ans plus tard, François Musin, Louis Dubois, Amédée Lynen et d'autres ont été invités par le cabinet d'architectes Naert et Laureys à fournir des décorations pour un nouveau spa à Ostende. La salle qu'il a décorée est maintenant connue sous le nom de "Verwee-zaal"[6].

Cette année là il obtient une médaille à Paris pour Les Chevaux, peints aux environs d'Ostende.

Vie et affaires à Knokke

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La villa Fleur des dunes à Knokke-Heist (Projet d'architecte par J. Baes, 1888).

Vers 1880, il est fasciné par les environs Knokke, et une colonie d'artistes informels y a lentement pris racine. À l'époque, il commence à alterner entre paysage et peinture animalière, faisant des paysages en plein air et posant les animaux dans son atelier.

En 1887, il a vu que Knokke pourrait devenir une attraction touristique majeure, alors il s'est joint à deux hommes d'affaires locaux pour acheter une grande étendue de dunes et de polder à lotir pour les promoteurs immobiliers. En 1888, il construit une villa, la « Fleur des Dunes »[7].

En 1891, il s'associe à son élève et ami Paul Parmentier pour créer "Knokke-Attractions", une entreprise de promotion du tourisme à Knokke.

Après son décès, ses héritiers revendront ses terrains de Knokke.

Fin de vie

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Sa santé a commencé à se détériorer en 1892. D'abord, il a souffert de rhumatismes, puis a reçu un diagnostic de cancer de la gorge.

En 1895, il s'est rendu dans le sud de la France, en Algérie et en Égypte dans l'espoir de trouver un climat chaud et sec qui améliorerait sa santé. Quelques semaines avant sa mort, ses amis l'ont ramené à Knokke car il désirait revoir la mer et les polders qu'il avait tant chéris. Il est décédé d'une phtisie tuberculeuse[8] à son domicile de Schaerbeek.

L'influence de Hendrik Mesdag sur l'évolution artistique d'Alfred Verwée

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Alfred Verwée habite au numéro 278 rue Rogier à Bruxelles quand la famille d'Hendrik Mesdag (1831-1915), peintre de marine hollandais, s'y installe le 5 septembre 1866 au 244. Mesdag se lie d'amitié avec lui[9].

Mesdag fait partie des premiers artistes à adopter la peinture en plein air aux Pays-Bas. Les deux artistes noue rapidement des liens et échangent des idées sur l'art et la peinture. Cette rencontre l'inspire par la manière dont Mesdag utilise la lumière et l'atmosphère pour créer ces paysages marins. Cette influence l'incite à explorer la saisie de la lumière et de l'atmosphère de façon plus réaliste dans ses propres créations.

C'est à partir de cette rencontre que Verwée entame une nouvelle phase dans son travail, où les jeux d'ombres et de lumière et la profondeur deviennent des éléments clés. Mesdag a également influencé la composition de la célèbre œuvre de Verwée, "L'Embouchure de l'Escaut". Ce tableau représente de manière réaliste l'endroit où le fleuve Escaut se jette dans la mer du Nord. À l'instar de Mesdag, Verwée emploie les ombres des nuages et la lumière solaire pour éclairer la scène, donnant naissance à un paysage contrasté et brillant.

On peut observer l'influence de Mesdag dans la manière dont Verwée a représenté la mer et les nuages de façon dynamique et réaliste, ainsi que dans l'utilisation de la lumière pour créer des effets d'ombre et de profondeur. "L'embouchure de l'Escaut" est considérée comme l'une des réalisations les plus abouties de Verwée, témoignant de sa maîtrise de la peinture de paysage et de sa capacité à saisir l'essence de la nature de manière réaliste et touchante.

La vision naturaliste d'Alfred Verwée

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Les créations d'Alfred Verwée se distinguent par une démarche naturaliste, où la nature est dépeinte de manière authentique et conforme à la réalité. Il s'est consacré à la peinture animalière, saisissant avec exactitude les particularités de chaque animal, en mettant l'accent sur leur comportement naturel et leur environnement, sans avoir recours à la mise en scène qui caractérise la peinture classique. Dans les œuvres de Verwée, l'homme est relégué au second plan. Par exemple, même dans son œuvre "La gilde de Saint-Sébastien à Ghistelles", c'est encore le cheval qui est mis en avant, tandis que les hommes ne servent qu'à souligner la présence majestueuse du cheval de trait[10]. Ses paysages témoignent également de cette approche naturaliste, avec un grand souci du détail et une attention portée aux nuances des formes naturelles. Les couleurs y sont souvent éclatantes, mettant en lumière l'importance de la lumière naturelle dans son travail. La technique de Verwée, généralement pratiquée en plein air, se caractérise par un coup de pinceau précis et des détails soignés, démontrant ainsi sa remarquable compétence en tant qu'observateur minutieux de la nature.

Alfred Verwée travaille de préférence dans les environs de Knokke-Heist et peint pratiquement exclusivement dans le plat pays des polders[11].

Dans les collections publiques

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Dates non documentées

Œuvres détruites

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  • Un coin de la prairie ou La vache aux chardons : 1882, huile sur toile, 185 × 110 cm, Acquis à l'exposition de Namur (1883)[35], détruite lors de l'incendie de l'Hôtel de ville de Namur dans la nuit du 25 au 26 août 1914, par l'occupant allemand durant la Première Guerre mondiale[36].

Œuvres principales

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Galerie

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Honneurs

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Buste de bronze réalisé par Léon Mignon. (1896)
 
Monument commémoratif réalisé par Charles Van der Stappen.

Références

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  1. Larousse Universel en 2 volumes, The Librairie Larousse Paris, 1923, tome second, page 1220
  2. Gustave Vanzype, Alfred Verwée, Bruxelles, Nouvelle Société d'éditions, 1933
  3. Dictionnaire des peintres belges, Verwée
  4. a et b Gustave Vanzype, Maîtres d'hier, Bruxelles, La Vie Intellectuelle, 1922
  5. Bulletin - Musées royaux des beaux-arts de Belgique, 1966, page 22
  6. Centenaire Alfred Verwée, 1838-1938 : exposition au Casino-Kursaal, 23 juillet-6 aout 1938 : Ville Balnéaire de Knocke
  7. Danny Lannoy, Frieda Devinck et Thérèse Thomas : De l'atelier à la côte - Knocke & Heyst (1880-1940), Stichting kunstboek, 2012 (ISBN 978-90-5856-417-7)
  8. Revue Britannique | revue internationale, N°12 décembre 1895, page 390
  9. Saskia DE BODT, Hendrik Willem Mesdag en Brussel
  10. Gustave Van Zype, dans Maîtres d'hier, Page 106
  11. « Combat de taureaux », sur Musée de Gand (consulté le )
  12. KMSKA (Musée Royal des Beaux-Arts d'Anvers), Numéro d'inventaire: 1300, https://kmska.be/fr/chefdoeuvre/poulains-dans-la-prairiee
  13. KMSKA (Musée Royal des Beaux-Arts d'Anvers), Numéro d'inventaire: 1407, https://kmska.be/fr/chefdoeuvre/vaches-en-prairie
  14. Hôtel communal de Schaerbeek Collection, Bruxelles, https://www.1030.be/fr/content/verwee-alfred
  15. Hôtel de ville de Tirlemont, article [nl] publié sur dereensteen.be, intitulé Drie-koeien-op-stap, https://www.dereensteen.be/filter/alfred-verwee/Drie-koeien-op-stap
  16. The Mesdag Collection, The Hague, https://www.demesdagcollectie.nl/en/collection/hwm0326
  17. The Mesdag Collection, The Hague, https://www.demesdagcollectie.nl/en/collection/hwm0324
  18. The Mesdag Collection, The Hague, https://www.demesdagcollectie.nl/en/collection/hwm0325
  19. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 2651, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-attelage-zelandais?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  20. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 2886, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-animaux-au-bord-du-fleuve?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  21. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 2981, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-au-beau-pays-de-flandre?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  22. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 3529, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-l-embouchure-de-l-escaut?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  23. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 3060, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-equinoxe?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  24. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 9139, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-les-eupatoires?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  25. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 4401, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-boeufs-en-plaine?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  26. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 9140, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-ciel-tres-nuageux?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  27. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 6356, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-l-etalon-en-liberte?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  28. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 4085, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-letalon-flamand-gris-pommele?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  29. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 4140, https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-la-gilde-de-saint-sebastien-a-ghistelles?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  30. MRMA (Musée Royal des Beaux-Arts de Bruxelles), Numéro d'inventaire: 4084,https://www.fine-arts-museum.be/fr/la-collection/alfred-verwee-paturage-en-flandre?letter=v&artist=verwee-alfred-1
  31. Collection du Musée de Groningue, publié sur https://www.groningermuseum.nl/ [nl], intitulé Ezels, Numéro d'inventaire: 1903.0040, https://collectie.groningermuseum.nl/Details/collect/631 (Catalogue de Camille Lemonnier : ref. n°213, intitulé : Charette avec deux ânes. Paysage d'hiver.
  32. Boeufs près d'un ruisseau, Gand
  33. Le Chanvre, Gand
  34. Etude de cheval, Gand
  35. Camille Lemonnier, Œuvres d'Alfred Verwee ; catalogue d'exposition, musée d'art moderne, Bruxelles, 1896
  36. « L’Hôtel de Ville de Namur se raconte… » (consulté le )
  37. Moniteur, « Nominations », Moniteur belge, no 315,‎ , p. 1 (lire en ligne, consulté le ).
  38. Moniteur, « Nominations », Moniteur belge, no 135,‎ , p. 1 (lire en ligne, consulté le ).

Bibliographie

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  • Danny Lannoy, Frieda Devinck et Thérèse Thomas : De l'atelier à la côte - Knocke & Heyst (1880-1940), Stichting kunstboek, 2012 (ISBN 978-90-5856-417-7)
  • Danny Lannoy, Frieda Devinck et Thérèse Thomas : Impressionisten in Knocke en Heyst (1870-1914), Stichting Kunstboek, 2007 (ISBN 978-90-5856-247-0)
  • Serge Goyens de Heusch, Het Impressionnisme en het Fauvisme in België, Fonds Mercator, 1988 (ISBN 90-615-3420-8)
  • Vlaamse Kunst van de Oorsprong tot Heden; Fonds Mercator, Anvers, 1985 p. 547-548; (ISBN 90-615-3137-3)
  • Danny Lannoy, Harlod Van Eeckhoutte : Schilders van oud-Knokke; Gemeentebestuur knokke-Heist, 1981
  • Norbert Hostyn, Nationaal Biografisch Woordenboek, vol.12, pgs.785-789; Bruxelles, 1981
  • Willem G. Flippo, Lexicon of the Belgian Romantic Painters, Anvers, International Art Press, 1981
  • Alfred Verwee in Knokke; exhibition catalog by J. Van den Heuvel, Stadhuis, Knokke, 1976
  • Marc Eemans, Moderne Schilderkunst in België, Meddens, 1969
  • Pierre Poirier : La Peinture belge d'autrefois (1830-1930), La renaissance du livre, Bruxelles, 1953
  • Gustave Vanzype : Alfred Verwée; Nouvelle Société d'éditions, Bruxelles, 1933
  • Georges Eekhoud, Les Peintres animaliers belges, Bruxelles, Librairie nationale d'art & d'histoire, 1911
  • Œuvres d'Alfred Verwee ; catalogue d'exposition de C.Lemonnier, musée d'art moderne, Bruxelles, 1896

Liens externes

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