Acide gras saturé

composé chimique

Un acide gras saturé (AGS) est un acide gras ayant des atomes de carbone totalement saturés en hydrogène (voir figure). Chaque carbone porte le maximum d'hydrogènes possible. On ne peut pas ajouter d'hydrogène à la molécule : elle est saturée.

L'acide palmitique, 16 atomes de carbone, un exemple d'acide gras saturé. Note : selon les usages en chimie organique (à base de carbone), les atomes de carbone, à l'intersection des segments, ne sont pas représentés

Toutes les liaisons entre les carbones sont simples (pas de liaisons doubles carbone-carbone).

Les acides gras saturés ne font pas partie des acides gras essentiels et ne sont de ce fait pas indispensables à l'alimentation humaine. La limitation de leur consommation est recommandée par la majorité des agences nationales de santé.

Les gras saturés, un type de lipides, sont des triglycérides obtenus par réaction de trois molécules d'acides gras saturés sur une molécule de glycérol.

Sources alimentaires

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Les acides gras[1] saturés se trouvent notamment dans les graisses animales (lait, fromage, beurre, viande, lard, etc.) mais aussi dans l'huile de coco et l'huile de palme. Ils sont pour la plupart solides à température ambiante.

Par le biais de l'hydrogénation, l'industrie agro-alimentaire transforme une partie des acides gras insaturés en acides gras saturés. Un sous-produit de cette transformation est l'acide gras trans produit par isomérisation et provenant des acides gras cis[2].

Dans l'alimentation humaine occidentale, ce sont les matières grasses des viandes et des produits laitiers ainsi que celles introduites dans les produits de panification industrielle et les viennoiseries qui apportent le plus d'acides gras saturés[3] :

Le National Health Service au Royaume-Uni recommande en mars 2020 de ne pas absorber plus de 20 g d'acides gras saturés par jour pour une femme et 30 g par jour pour un homme[4].

Types d'acide gras saturé

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Les acides gras saturés peuvent être :

  • linéaires avec une chaîne de n CH2 liés les uns aux autres (dans l'exemple ci-dessous), et une formule chimique de la forme :

H3C — [CH2]n — COOHn est un nombre entier égal ou supérieur à 2.

  • ou non linéaires. Certains acides gras saturés peuvent être, par exemple ramifiés, notamment chez les bactéries :

Nomenclature

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Chaque acide gras saturé possède en général deux noms :

  • un nom commun qui rappelle souvent son origine. Par exemple, l'acide caproïque (du latin « capra », chèvre) se trouve dans le lait de chèvre ;
  • un nom systématique décrivant sa structure (nombre de carbones, nombre d'insaturation, etc) et issu de la nomenclature chimique :

acide (radical du nombre de carbone) anoïque où :

  • le radical correspond au nombre d'atomes de carbone de l'acide gras ;
  • ane indique qu'il s'agit d'un alcane ;
  • oïque qu'il s'agit d'un acide carboxylique.

À cela s'ajoute une nomenclature souvent utilisée en physiologie et en biochimie :

acide gras Cx:0 où :

  • Cx indique le nombre d'atomes de carbone ;
  • 0 indique qu'il y a zéro double liaison carbone-carbone et par conséquent, que l'acide gras est saturé.

Exemples d'acides gras saturés

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Exemples d'acides gras saturés courants :

Effets sur la santé

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Effets cardiovasculaires

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Une augmentation du taux de cholestérol dans le sang est généralement témoin d'une altération significative de l'intégrité des parois des artères coronaires. Cependant, une corrélation a été souvent observée, sans impliquer une causalité. Or, certains prétendent qu'il existe une relation entre un taux élevé de cholestérol et de LDL dans le sang et l'augmentation du risque de maladie cardiovasculaire. Toutefois, d'autres considèrent que c'est plutôt le ratio entre cholestérol total et le LDL qui importe[6]. Il reste donc à savoir quel impact a la consommation d'acides gras saturés sur le ratio du cholestérol total sur le LDL et le HDL.

Tous les acides gras saturés ne présentent cependant pas le même risque cardiovasculaire : les acides gras à chaîne moyenne (par ex. l’acide laurique C12:0, l’acide myristique C14:0 ou l’acide palmitique C16:0, qui représentent environ 30 % des graisses de bœuf, mouton ou porc) exercent des effets plus délétères que les acides gras saturés à longue chaîne (comme l’acide stéarique C18:0, environ 27 % des graisses de bœuf ou mouton)[7].

Une étude récente montre qu'il n'y aurait pas de preuves de la corrélation entre la consommation de gras saturé et le taux de cholestérol associé aux risques cardiovasculaires, en raison des marges d'incertitude des observations épidémiologiques et essais cliniques[8].

Chez l'humain, les acides gras saturés sont globalement hypercholestérolémiants, mais l'effet de chaque acide gras doit être individualisé. L'acide laurique (12:0) et l'acide myristique (14:0) seraient les plus délétères de ce point de vue, ce dernier étant le plus nocif des deux mais avec un effet moins prononcé lorsqu'il se trouve en position 2 (centrale) du résidu de glycérol du triglycéride, ce qui est souvent le cas dans les matières grasses des produits laitiers[9]. L'acide palmitique (16:0) aurait un effet moins prononcé voire inexistant — avec cependant tendance à accroître le taux sérique de lipoprotéines de basse densité (LDL) lorsqu'il est en position centrale des triglycérides — et les acides gras saturés plus longs (acide stéarique 18:0 et au-delà) seraient neutres quant à la cholestérolémie totale.

En juin 2020, un article du Journal of the American College of Cardiology soutient que les recommandations de limiter l'apport alimentaire en acides gras saturés (AGS) persistent malgré les preuves croissantes du contraire. Les méta-analyses les plus récentes d'essais randomisés et d'études observationnelles n'ont trouvé aucun effet bénéfique à la réduction de l'apport en AGS sur les maladies cardiovasculaires (MCV) et la mortalité totale, et ont plutôt trouvé des effets protecteurs contre les accidents vasculaires cérébraux (AVC). Bien que les AGS augmentent le cholestérol des lipoprotéines de basse densité (LDL), chez la plupart des individus, cela n'est pas dû à des niveaux croissants de petites particules de LDL denses, mais plutôt des LDL plus gros qui sont beaucoup moins fortement liés au risque de MCV. L'article rappelle qu'il est également évident que les effets sur la santé des aliments ne peuvent être prédits par leur teneur dans aucun groupe de nutriments, sans tenir compte de la distribution globale des macronutriments. Les produits laitiers entiers, la viande non transformée, les œufs et le chocolat noir sont des aliments riches en AGS avec une matrice complexe qui ne sont pas associés à un risque accru de MCV. Selon les auteurs, la totalité des preuves disponibles ne permet pas de limiter davantage la consommation de ces aliments. Il est toutefois important de noter qu'il y a conflit d'intérêts pour une partie des auteurs (financement par des lobbies laitiers et de la viande) [10].

Effets cognitifs

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Des effets négatifs sont presque immédiats. Une étude récente (mai 2020) s'est basée sur un « test continu de performance », évaluant l'attention soutenue, la concentration et le temps de réaction, durant 10 minutes d'activités informatiques. L'étude a montré que prendre un seul repas riche en graisses saturées suffit à diminuer notre capacité de concentration, nettement plus que s'il s'agit d'un repas en graisses non-saturées[11]. Dans ce cas, les personnes testées ont mangé des œufs, des biscuits, des saucisses de dinde avec sauce contenant 60 grammes de matières grasses. Un lot de ces repas était fait avec une huile à base d'acide palmitique riche en graisses saturées, et l'autre à base d'huile de tournesol à faible teneur en graisses saturées. Dans les deux cas le repas apportait 930 kilocalories et était fait pour imiter un repas de restauration rapide (type double Whopper Burger King avec fromage, ou un Big Mac McDonald avec portion moyenne de frites)[11].

Références

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  1. « Les acides gras, c'est quoi ? », La Nutrition.fr le 14 janvier 2009
  2. « Les graisses hydrogénées », LaNutrition.fr, le 15 janvier 2009
  3. (en) « Nutrition Fact Sheet: Lipids », Northwestern University, 5 septembre 2002.
  4. (en) « Eat less saturated fat », National Health Service, Royaume-Uni.
  5. Lipid Maps : structure de l'acide isoplamitique, avril 2007
  6. Wang TD et al, « Efficacy of cholesterol levels and ratios in predicting future coronary heart disease in a Chinese population », Am J Cardiol. 2001, Oct 1;88(7) :737-43
  7. Brochure "Viande et santé humaine" de l'Association Royale des Ingénieurs, issue de la Faculté des Sciences Agronomiques de Gembloux, en Belgique, page 11
  8. Émission Allo Docteur « "Des graisses saturées pas si risquées" »
  9. Virginie Dubois, Sylvie Breton, Michel Linder, Jacques Fanni, Michel Parmentier, « Proposition de classement des sources végétales d’acides gras en fonction de leur profil nutritionnel », Oléagineux, Corps Gras, Lipides, vol. 15, no 1,‎ , p. 56-75 (lire en ligne) DOI 10.1684/ocl.2008.0163
  10. Arne Astrup et al. Saturated Fats and Health: A Reassessment and Proposal for Food-based Recommendations: JACC State-of -the-Art Review, Journal of the American College of Cardiology, juin 2020, DOI: 10.1016/j.jacc.2020.05.077
  11. a et b (en) Annelise A Madison, Martha A Belury, Rebecca Andridge et M Rosie Shrout, « Afternoon distraction: a high-saturated-fat meal and endotoxemia impact postmeal attention in a randomized crossover trial », The American Journal of Clinical Nutrition,‎ , nqaa085 (ISSN 0002-9165 et 1938-3207, DOI 10.1093/ajcn/nqaa085, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi

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