Abbaye de la Sainte-Trinité de Morigny

abbaye située dans l'Essonne, en France

L'abbaye de la Sainte-Trinité de Morigny est une ancienne abbaye bénédictine du Gâtinais, fondée à la fin du XIe siècle, et qui relevait du diocèse de Sens. Elle a été fermée en 1743[1]. Ses vestiges se trouvent sur l'actuelle commune de Morigny-Champigny, dans le canton d'Étampes (Essonne).

Abbaye de la Sainte-Trinité de Morigny
Présentation
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Histoire

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Sous les cinq premiers abbés (jusqu'en 1148)

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L'histoire du monastère nous est assez bien connue sous ses cinq premiers abbés réguliers, Renaud, Hugues, Thomas, Macaire et Thouin, grâce au témoignage de la Chronique de Morigny, complété par quelques chartes qui nous ont été conservées dans le Cartulaire de Morigny.

Ce fut d'abord un prieuré de l'abbaye Saint-Germer-de-Fly (diocèse de Beauvais), installé dans un premier temps, en 1082, à Étréchy, puis transféré à Morigny sans doute pendant les années 1095 ou 1096[2]. C'est un certain Anseau, fils d'Arembert, possesseur de biens importants dans l'Étampois, qui donna aux moines de Saint-Germer-de-Fly, d'abord sa villa d'Étréchy, ensuite son domaine de Morigny (Mauriniacense prædium)[3]. Le premier « abbé » (au moins élu sur place) fut Renaud, élu en 1099, mort en 1109[4]. Morigny se libéra de toute sujétion à l'égard de Saint-Germer-de-Fly en 1106[5].

À la mort du premier abbé (après le ) fut élu son prieur Thiou, qui ne put se maintenir que quelques mois, puis quitta Morigny pour Saint-Crépin de Soissons (dont un ancien moine de Morigny, Odon, alias Eudes, était devenu abbé). Hugues fut alors élu pour le remplacer (avant la fin de l'année 1109), mais mourut au bout d'un an. Ensuite, Thomas fut élu entre le et le et resta abbé jusqu'en 1140[6]. Il fut remplacé par Macaire, qui quitta à son tour Morigny en 1144 pour devenir abbé de Saint-Benoît-sur-Loire avec la mission d'y restaurer la discipline.

Début octobre 1119, le pape Calixte II, qui venait de Fontevraud et d'Orléans et était en route pour le concile de Reims (20-), s'arrêta inopinément à Étampes, où il fut logé dans le palais royal, et il y fut rejoint par le roi Louis VI, la reine Adélaïde et tous les hauts dignitaires de la cour. L'abbé Thomas obtint du cardinal-légat Conon de Préneste que le pape lui-même vienne à Morigny consacrer l'église de la nouvelle abbaye, ce qui fut fait le en présence du roi, de la reine et de toute la cour, et d'autres personnalités comme Thurstan, archevêque d'York. Quelques années plus tard, le (n. st.), un autre pape, Innocent II, vint à Morigny consacrer un autel à Laurent et tous les martyrs ; parmi les nombreuses personnalités qui assistèrent à la cérémonie, la chronique de l'abbaye cite Bernard de Clairvaux (« tum temporis in Gallia divini verbi famosissimus prædicator ») et Pierre Abélard (« monachus et abbas, et ipse vir religiosus, excellentissimarum rector scholarum, ad quas pæne de tota Latinitate viri litterati confluebant »).

En 1106, le roi Philippe Ier ordonna par lettres patentes la suppression du chapitre de la collégiale Saint-Martin d'Étampes (dont le chef portait le titre d'abbé) et l'attribution de l'édifice et des prébendes à la nouvelle abbaye de Morigny (au fur et à mesure de la mort des chanoines alors en fonction). Mais les chanoines, soutenus par l'archevêque de Sens, refusèrent cette décision, et lorsque l'abbé Thomas, peu après son élection, se présenta dans cette église pour y prêcher, ils lui en interdirent l'accès. L'affaire fut déférée devant le roi Louis VI et devant l'archevêque Daimbert, ce dernier faisant beaucoup de difficultés, mais consentant finalement à la donation par un acte de 1112. L'abbé Thomas partit ensuite pour Rome où il fit confirmer solennellement par le pape Pascal II les donations faites à son abbaye. Mais Boson, abbé de Saint-Benoît-sur-Loire, y mit de nouveaux obstacles, avec l'appui du chancelier Étienne de Garlande, en soutenant que la collégiale avait été attribuée antérieurement à son abbaye. Cette affaire traîna en longueur par toutes sortes de contestations, et il fallut attendre 1142 pour que l'abbé Macaire obtienne du pape Innocent II l'expulsion des derniers chanoines survivants.

L'abbaye eut aussi dans le même temps une querelle avec les chanoines de la collégiale Notre-Dame également d'Étampes (dont était le chancelier Étienne de Garlande) : c'était à propos du droit de sépulture, car beaucoup d'habitants de la ville voulaient se faire enterrer à Morigny (le principe de la liberté de choix pour les fidèles étant alors de droit commun). L'abbé Thomas obtint là-dessus une lettre du pape Pascal II, mais elle fut âprement contestée par les chanoines. Calixte II, de retour du concile de Reims en novembre 1119, tint sur cette affaire une audience en l'abbaye de Ferrières. On a conservé deux lettres de l'abbé Thomas qui y sont consacrées, insérées dans la Chronique de Morigny : l'une adressée à l'archevêque de Sens Daimbert, et l'autre au cardinal Crisogono Malcondini[7]. Cette querelle se poursuivit aussi plusieurs décennies.

Sous abbés réguliers suivants (1148-1479)

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L'histoire du monastère reste à écrire sous les vingt-cinq abbés suivant, qui sont élus régulièrement par les moines. On ne dispose pour l'instant que de notices dans lesquelles dom Basile Fleureau[8] a réuni, vers 1668, ce qu'il a pu savoir sur chacun d'eux.

Sous les abbés commendataires (1560-1743)

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Le monastère tombe ensuite progressivement en commende, c'est-à-dire que le roi s'arroge le droit de lui donner des abbés de son choix. Il s'en sert pour récompenser ses serviteurs fidèles qu'il dote ainsi d'une source appréciable de revenus. Le monastère ne se relèvera pas de cette grave décadence institutionnelle. Deux abbés commendataires successifs sont signalés de 1479 à 1489, puis, après un retour à la normale au moins de 1491 à 1559, le monastère retombe en commande cette fois définitivement à partir de 1560 jusqu'à sa suppression en 1743. L'histoire du monastère pendant cette période ne nous est pour l'instant connu que par la suite des notices de dom Basile Fleureau[9], où il a réuni, vers 1668, ce qu'il a pu savoir de chacun de ces abbés, jusqu'à sa propre époque, c'est-à-dire vers 1668.

Vestiges actuels

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Clocher de l'ancienne abbatiale.

L'ancienne église abbatiale est aujourd'hui l'église paroissiale de Morigny-Champigny. De l'église d'origine, consacrée le par le pape Calixte II, il ne subsiste qu'une travée de l'édifice actuel, avec des colonnes à chapiteaux romans. La tour du clocher est du XIVe siècle, le chœur gothique et l'arc-boutant surmontant le premier contrefort du bas-côté droit correspondent à des travaux exécutés entre 1525 et 1540 à l'initiative des abbés Jean de Salazar et Jean Hurault II. Les voûtes des quatre premières travées de la nef s'effondrèrent encore en 1575 ; on se contenta de boucher l'ouverture béante par un mur qui sert depuis de façade, et l'emplacement de la partie effondrée est aujourd'hui occupé par une place plantée de tilleuls, sur le bord sud de laquelle on peut voir les traces des anciennes colonnes. L'église contient quelques dalles funéraires datant de l'époque de l'abbaye, dont la plus remarquable est celle de Galéas de Salazar († 1522) et de son épouse ; c'est le frère de l'archevêque de Sens Tristan de Salazar et le père de l'abbé Jean de Salazar. En dehors de cette église, classée depuis 1862, il ne subsiste rien de l'abbaye.


Liste des abbés de Morigny

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Bibliographie

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  • Monique Chatenet, Julia Fritsch (dir.), Dominique Hervier (dir.) et al., Étampes un canton entre Beauce et Hurepoix, coll. « Cahiers du patrimoine » (no 56), 312 p. (ISBN 9782858223015, OCLC 42933725) (Jean-Marie Pérouse de Montclos, L'abbaye de la Sainte-Trinité de Morigny , p. 100-107)
  • Dom Basile Fleureau, Histoire de la ville et du duché d'Étampes avec l'histoire de l'abbaye de Morigny et plusieurs remarques considérables qui regardent l'histoire générale de la France, Paris, J.-B. Coignard, 1683.
  • Ernest Menault, Morigny (village monacal), son abbaye, sa chronique et son cartulaire ; suivis de l'histoire du doyenné d'Étampes, Paris, A. Aubry, 1867 ; réimpr. 2008.

Notes et références

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  1. À cette date, il ne restait que deux moines. Les revenus de l'abbaye furent affectés par l'archevêque au séminaire de Sens.
  2. Voir Léon Mirot, op. cit., p. I-II. L'installation à Morigny se fit du vivant de Richer II, archevêque de Sens, mort au cours de l'année 1096. Le roi Philippe Ier racheta pour cent livres les droits féodaux pesant sur le domaine à Évrard III du Puiset, fils de Hugues Ier (ce dernier mort un 23 décembre, 1094 selon L. Mirot, 1096 selon des données plus récentes). Évrard utilisa cet argent pour partir en croisade.
  3. Mirot, p. 2 et 10.
  4. Mirot, p. 11. La Chronique est contradictoire sur ce point, désignant explicitement Renaud comme le premier abbé, mais parlant aussi d'un « abbé » Albert qui aurait présidé à l'installation à Morigny vers 1095.
  5. Reproduction de l'accord daté de 1106 entre les deux abbayes dans Fleureau, p. 475-76.
  6. L'abbé Thomas, natif d'Épernon, fit ses études à Étampes, puis entra à Morigny avant 1099. En 1099 ou 1100, il accompagna l'« abbé » Albert (qui avait présidé au transfert d'Étréchy à Morigny) à l'abbaye Notre-Dame de Coulombs où celui-ci se retira, et il y prononça ses vœux avec la permission du chapitre de Morigny. Élu abbé de Morigny fin 1110 ou début 1111, il gouverna l'établissement pendant près de trente ans, mais avec beaucoup de difficultés et de controverses. En (1140), il baissa les bras, quitta l'abbaye et se réfugia à Saint-Martin-des-Champs près de Paris. Souhaitant apparemment revenir à Morigny, où certains le regrettaient, il consulta Bernard de Clairvaux dans une lettre postérieure à 1144. Mais son retour ne se fit pas, et finalement il retourna à Notre-Dame de Coulombs où il mourut peu après. On conserve de lui deux sermons et trois lettres.
  7. Crisogono Malcondini : vice-chancelier de l'Église romaine en 1114, créé cardinal-diacre de S. Nicola in Carcere en 1117, puis chancelier et bibliothécaire. Il accompagna Calixte II en 1119 pendant son voyage à travers la France. Il mourut vers 1123.
  8. Les Antiquitez de la Vville et du duché d'Estampes, Paris, Coignard, 1683, pp. 513-546.
  9. Les Antiquitez de la Vville et du duché d'Estampes, Paris, Coignard, 1683, pp. 546-555.
  10. Quittances de rachat par François Assadé, procureur en Parlement, à Jean de Gueribalde, chevalier, en l'acquit de la succession de défunt Louis d'Archambault, en présence et consentement de Jean Des Moulins, bourgeois de Paris, procureur de Madeleine d'Archambault, veuve de Tristan de Tapereau, héritière du défunt Louis d'Archambault, avril-juin 1645 Minutes et répertoires de maître Charles François de Saint-Vaast, étude LXXIII, Paris

Voir aussi

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