Abbaye de Talloires
L'abbaye de Talloires (latin Talgurium, Talgeria, Talueriis, Tallueriæ) est un ancien prieuré bénédictin fondé au XIe siècle, devenu abbaye royale en 1674, situé sur la commune éponyme, dans le département de la Haute-Savoie. Depuis la fin du XIXe siècle, le site a été transformé en hôtel.
Abbaye de Talloires | |||
Présentation | |||
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Type | Abbaye | ||
Rattachement | Abbaye de Savigny | ||
Début de la construction | 1018, agrandissement en 1681, détruite en 1833 | ||
Protection | Inscrit MH (1944) | ||
Site web | https://www.abbaye-talloires.com/ | ||
Géographie | |||
Pays | France | ||
Région | Auvergne-Rhône-Alpes | ||
Département | Haute-Savoie | ||
Ville | Talloires | ||
Coordonnées | 45° 50′ 29″ nord, 6° 12′ 42″ est | ||
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Haute-Savoie
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Géographie
modifierHistoire
modifierFondation
modifierRodolphe III de Bourgogne donne en 1018, sous l'impulsion de sa femme Ermengarde, et les auspices des archevêques Burchard de Lyon et Burchard de Vienne, le domaine de Talloires — église dédiée à cette époque à sainte Marie, saint Pierre et saint Maurice, et ses dépendances — aux moines de Savigny[1],[ReG 1]. Le prieuré installé se situe en bordure du lac d'Annecy — face au prieuré de Saint-Jorioz, fondé lui vers le IXe siècle — dans le pagus de l'Albanais (in pago Albanense Tallueriis villam cum ecclesia). La reine complète la donation en 1030[1],[ReG 1]. Celle-ci l'offre à l'abbé bénédictin Itier ou Itier (1018-1044) de Savigny (attestée en 817), qui envoie quatre moines : Ismius, Ismidon, Ruph et Germain[1],[2]. L'abbaye est investie par des moines de Cluny[3]. Les papes Pascal II en 1107[ReG 2], Calixte II en 1123[ReG 3] et Eugène III en 1146[ReG 4] confirment sa création.
Période médiévale
modifierLe comte de Genève Guillaume Ier donne « une part des dîmes sur la vigne et le pré qu'il possède à Annecy, quatre maisons avec leurs casals au même lieu, le droit de faire paître les porcs dans sa forêt du mont Semnoz, enfin tous les droits de seigneurie sur les églises d'Annecy-le-Vieux et d'Annecy-le-Nouveau[ReG 5]. »
En 1412, le prieuré de Saint-Jorioz est donné à Talloires, par l'antipape Jean XXIII[4],[5],[6]. Il leur impose par ailleurs « une lourde redevance en faveur du nouveau chapitre des Maccabées » de Genève[4]. Malgré une certaine résistance, les moines se soumettent en 1440[4]. Ce contexte marque le déclin du monastère de Saint-Jorioz[4].
Période moderne
modifierAu XVIIe siècle, l'abbaye est soumise à la réforme salésienne. Malgré un passé glorieux, elle ne compte plus qu'un petit nombre de moines qui n'appliquent plus que partiellement les règles bénédictines. Ayant reçu l'aval de Savigny, François de Sales entreprend de réformer le prieuré, mais fait face à des résistances. Il trouve le soutien auprès du Sénat de Savoie dans son action[7]. Il fait ensuite déplacer les ossements (translation) de l'ermite Germain de Montfort, premier prieur, de son lieu d'ermitage à Talloires.
En 1674, le pape Clément X érige le prieuré en abbaye royale. L'ensemble est agrandi en 1681, notamment d'un hôpital et d'une maladrerie sur le site d'Angon.
En 1792, lors de l'entrée des révolutionnaires français dans le duché de Savoie, l'abbaye subit la violence de ceux-ci et fut détruite. Elle fut brûlée avec ses archives. Elle ne se relève pas de cet épisode et sera détruite en 1833.
L'église abbatiale sert d'église paroissiale jusqu'à l'édification de l'église Saint-Maurice dans le bourg, vers la fin du XVIIIe siècle[8].
Période contemporaine
modifierEn 1902, le physicien français Gabriel Lippmann réalise le premier cliché de photographie couleurs dans l'enceinte du cloître[9].
Pendant la Seconde Guerre mondiale les Allemands installèrent leur commandement régional dans cet édifice.
L'abbaye fait l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le [10]. L'abbaye de Talloires est depuis la fin du XIXe siècle un hôtel-restaurant quatre étoiles accueillant en son cadre des personnalités comme Paul Cézanne, Mark Twain, Gabriel Fauré[11], des hommes politiques dont Winston Churchill, Richard Nixon ou du cinéma, Jean Reno[12].
Description et architecture
modifierÀ l'origine, sa conception s'est inspirée de celles des constructions seigneuriales avec une grande salle de prestige (« aula ») et des éléments de fortifications[13].
L'abbaye possède deux annexes, un hospice, situé dans le bourg, de la fin du XIIIe siècle, ainsi qu'une léproserie ou maladière, située à 2 km sur la route en bord de lac en direction d'Angon, « probablement antérieur au XIIIe siècle »[14].
Prieurs et abbés de Talloires
modifierJules Philippe, dans sa Notice historique (1861), propose une liste des prieurs claustraux, abbés réguliers et abbés commendataires connus[ReG 6]. Les trois personnalités suivantes ne sont pas mentionnées dans cette liste :
- saint Germain ;
- 1107 : Iterius[ReG 2] ;
- prieur Ismidus[ReG 7] ;
- prieurs claustraux
- 1126 : Rodolphe
- 1143 : Odilon[ReG 8] ;
- 1192 : Reymond/Raimond[ReG 5] ;
- 1219 : Jean[ReG 9] ;
- 1231/1256 : Vuillerme/Guillaume[ReG 10] ;
- 1267 : Vaultier ;
- 1286/1290 : Jacques de Lullier ou Lully[ReG 11] ;
- 1310 : Jacques de Menthon ;
- 1330/v. 1341 : Thomas Alaman/Alamand, de Saint-Jeoire ou Saint-Jorioz[15] ;
- 1348 : Pierre de Droysier ;
- 1350 : Aimon Alaman ;
- 1379 : Henri des Balmes ;
- 1396 : Dom Dieu-le-Fils ;
- 1420 : François de Metz ;
- 1436/1440 — 1484 : Amédée de Charansonay (Charansonnex), conseiller d'État ducal ;
- 1486 : Louis de la Croix ;
- 1498 : Aimon de Charansonay (Charansonnex) ;
- 1515 : Aimé de Charansonay (Charansonnex), dit Le Jeune ;
- 1525 : D'Alex ;
- 1535 : Jean de Charansonay (Charansonnex) ;
- 1537 : Noble Guigou ;
- 1550 : Pierre de Age ;
- fin 1578 — 1590 : Ange Justinien / Ange Justiniani, ancien évêque de Genève[16] ;
- …
- 1621 : De Quoëx (Claude-Louis-Nicolas de Coëx ?) ;
- 1629 : Benoît-Théophile de Chevron Villette ;
- 1678 : Nicolas de Gémilieux.
- Abbés réguliers
- 1696 : Anselme de Rumilly ;
- 1711 : Dermillioz ;
- : Francesco Serrasin[Note 1] ;
- 1736 : Ildefonse Belly ;
- : Eseri (?) ;
- 1766 : Dom Florentin de Vieux/Devieux ;
- 1770/1773 : Dom Maure de Lannoy ;
- 1778 : Dom Florentin de Vieux/Devieux ;
- 1784 : Dom Florentin de Vieux/Devieux, le même désigné par décret royal.
- Abbés commendataires
- 1397 — 1426 : Jean Allarmet de Brogny, abbé commendataire ;
- 1537 — 1567 (?) : Jacques I dit de Savoie ou l'aîné, fils naturel du comte et duc Philippe de Savoie-Nemours[Note 2],[20] ;
- 7 novembre 1563 — fin 1578/1579 : Claude de Granier, prieur commendataire, puis évêque de Genève[21] (non mentionné par Philippe) ;
- 1580 : Charles de la Tour ;
- 1590 — 1592 : Jacques II, dit de Savoie ou le cadet[16], fils naturel de Jacques de Savoie-Nemours[18],[19] (voir note ci-dessus).
- 1615 : César de Perron ;
- 1645 : Eugène-Maurice de Savoie ;
- 1657 : Charles-Louis de Lances ;
- 1728 : Amé-Philibert de Mellarède ;
- 1784 : Solar.
Notes et références
modifierNotes
modifier- Archives départementales des Alpes-Maritimes, « Mazzo 002 matières ecclésiastiques, clerger régulier ». Il effectue une visite de contrôle du au à l'abbaye de St-Pons hors les murs de Nice, délégué le 26 octobre de l'année précédente par Justin Durand, prieur claustral de l'abbaye de Saint-Victor à Marseille.
- L'abbé et historien Jean-François Gonthier (1847-1913) considère, comme d'autres, que les deux Jacques de Savoie prieur puis abbé de Talloires sont deux personnalités différentes[17]. Ils distinguent ainsi Jacques I, dit l'aîné, fils naturel du comte Philippe de Savoie-Nemours, et Jacques II, dit de Savoie ou le cadet, fils naturel de Jacques de Savoie-Nemours[18]. Matthew Allen Vester, auteur d'un ouvrage consacré à Jacques de Savoie-Nemours (2008) indique que le prieur de Talloires en 1567 est son demi-frère[19].
Références
modifierRégeste genevois (1866)
modifier- Régeste genevois, 1866, p. 44, Acte n°155 entre 1016 et 1018 (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/155).
- Régeste genevois, 1866, p. 68, Acte n°242 du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/242).
- Régeste genevois, 1866, p. 75, Acte n°263 du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/263).
- L'acte énumère certains lieux mais pas Talloires Régeste genevois, 1866, p. 89, Acte n°316 du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/316).
- Acte de l'année 1192 (REG 0/0/1/456).
- Philippe, 1861, p. 75-76 (lire en ligne).
- Régeste genevois, 1866, p. 71, Acte entre 1078 et 1120 (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/258).
- Régeste genevois, 1866, p. 88, Acte du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/308).
- Régeste genevois, 1866, p. 156, Acte du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/576).
- Régeste genevois, 1866, p. 217, Acte du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/880).
- Régeste genevois, 1866, p. 328, Acte du (lire en ligne ou numérique REG 0/0/1/1322).
Autres références
modifier- Histoire des communes savoyardes, 1981, p. 204-210 « Talloires ».
- Michel Germain, Personnages illustres des Savoie, Autre Vue , , 619 p. (ISBN 978-2-9156-8815-3), p. 283.
- Francis Wey, La Haute Savoie. Récits d'histoire et de voyage, 1866, p. 145
- Histoire des communes savoyardes, 1981, p. 191-192.
- Pierre Duparc, Le comté de Genève, IXe – XVe siècle, t. XXXIX, Genève, Société d'histoire et d'archéologie de Genève, coll. « Mémoires et Documents » (réimpr. 1978) (1re éd. 1955), 616 p. (lire en ligne), p. 533.
- Françoise Dantzer, Les Bauges : Terre d'art sacré, La Fontaine de Siloé, coll. « Les Savoisiennes », , 251 p. (ISBN 978-2-8420-6272-9, lire en ligne), p. 22.
- François Pérennès, Histoire de saint François de Sales, Paris : A. Bray, 1864, 2 vol, p. 258
- Roger Devos et Charles Joisten, Mœurs et coutumes de la Savoie du Nord au XIXe siècle : L'enquête de Mgr Rendu, Pringy, Académie salésienne - Centre alpin et rhodanien d'ethnologie, , 502 p. (ISBN 978-2-9011-0201-4, lire en ligne), p. 210.
- « Complément sur l'histoire de Talloire... », Le Dauphiné libéré, (lire en ligne).
- Notice no PA00118445, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
- « Celebrites annecy, Jean Reno , Bruce Willis, Paul Cezanne à l'Abbaye », sur www.abbaye-talloires.com (consulté le )
- Cité sur le site de l'hôtel en tant que « actionnaire de la société d'exploitation de l'Abbaye de Talloires ».
- Marie Rochette, Études historiques et archéologique de la maison du prieur de Talloires, Mémoires de DEA d'histoire et d'archéologie médiévales, université Lumière-Lyon 2, 1997.
- Pierre Duparc, Le comté de Genève, IXe – XVe siècle, t. XXXIX, Genève, Société d'histoire et d'archéologie de Genève, coll. « Mémoires et Documents » (réimpr. 1978) (1re éd. 1955), 616 p. (lire en ligne), p. 530.
- François Mugnier, Histoire documentaire de l'abbaye de Sainte-Catherine (près d'Annecy), CP Ménard, , 170 p. (lire en ligne), p. 48.
- Catherine Santschi, « Justiniani, Ange [Angelo Giustiniani] » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
- vicomte Greyfié de Bellecombe, « Jacques de Savoie. Abbé de Talloires (1563-1595) », Mémoires et documents publiés par la Société savoisienne d'histoire et d'archéologie, Chambéry, no t.62, , p. 259- (lire en ligne).
- (en) Charles Cawley, « Central France — Gâtinais, Orléans, Bourges, Sancerre H. Ducs de Nemours (Foix, Medici, Savoie) — Philippe de Savoie », sur fmg.ac/MedLands (Foundation for Medieval Genealogy) (consulté en ).
- Matthew Allen Vester, Jacques de Savoie-Nemours : l'apanage du Genevois au cœur de la puissance dynastique savoyarde au XVIe siècle, Librairie Droz, , 358 p. (ISBN 978-2-60001-211-9, lire en ligne), p. 56.
- François Mugnier, La vie et les poésies de Jean de Boyssonné, Slatkine, première impression en 1897 (H. Champion), réimprimé en 1971, 508 pages, p. 185 (Lire en ligne).
- Henri Baud, Louis Binz, Le diocèse de Genève-Annecy, Editions Beauchesne, (ISBN 978-2-7010-1112-7), p. 106-107.
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- Henri Baud, Jean-Yves Mariotte, Jean-Bernard Challamel, Alain Guerrier, Histoire des communes savoyardes. Le Genevois et Lac d'Annecy (Tome III), Roanne, Éditions Horvath, , 422 p. (ISBN 2-7171-0200-0).
- Chanoine Vincent Brasier (1819-1895), « Étude sur les origines du prieuré de Talloires », Mémoires et documents de l'Académie Salésienne, t. X, , pp. 29–36 et pp. 101-102
- Jean-Yves Mariotte, « Annecy et ses environs au XIIe siècle d'après le cartulaire de Talloires », Bibliothèque de l'École des chartes, vol. 130, no 1, , p. 5-32 (lire en ligne).
- Paul Lullin et Charles Le Fort, Régeste genevois ou Répertoire chronologique et analytique des documents imprimés relatifs à l'histoire de la ville et du diocèse de Genève avant l'année 1312, Société d'histoire et d'archéologie de Genève, , 542 p. (lire en ligne). .
- Gabriel Pérouse, André Jacques (dessins), L'abbaye de Talloires, Chambéry, Imprimerie Dardel, , 100 p. (lire en ligne)
- Jules Philippe, Notice historique sur l'abbaye de Talloires, Chambéry, Impr. du Gouvernement, , 288 p. (lire en ligne)
Fonds d'archives
modifier- fragment d'un cartulaire de l'abbaye ; ms. du XIIe siècle, sur parchemin, 2 feuillets in-4° (Bibliothèque apostolique vaticane, ms. Regina 450, ff. 122-123)
- La « collection Henri Rodet », Archives départementales de la Haute-Savoie, Répertoire méthodique détaillé 34 J, Document d'archives 98. Cette collection rassemble des documents provenant du prieuré de Talloires (1192-XVIIIe siècle), ainsi qu'entre autres de l'église paroissiale de Talloires (1577-1588), de la communauté de Talloires (XVe siècle), etc.
Articles connexes
modifierLiens externes
modifier
- Ressource relative à l'architecture :
- « Rampe d'escalier », sur Archinoë, portail d'indexation collaborative (consulté en )
- « Cloître », sur Archinoë, portail d'indexation collaborative (consulté en )