369e régiment d'infanterie (États-Unis)
Le 369e régiment d'infanterie, auparavant appelé jusqu'en , 15e régiment de la Garde nationale de New York, est une unité militaire américaine. C'est le régiment le plus connu comportant des hommes noirs durant la Première Guerre mondiale[1]. Ces soldats sont mieux connus sous le surnom des « Harlem Hellfighters », des « Black Rattlers » (« Serpents à sonnette noirs ») en référence à leur insigne, ou encore des « Men of Bronze ».
369e régiment d'infanterie | |
« Harlem Hellfighters » en 1919, décorés de la croix de guerre 14-18. | |
Création | 1913 |
---|---|
Dissolution | 1945 |
Pays | États-Unis |
Allégeance | Armée de terre des États-Unis |
Branche | United States Army |
Type | Infanterie |
Ancienne dénomination | 15e régiment de la Garde nationale de New York |
Surnom | Harlem Hellfighters Black Rattlers Men of Bronze |
Guerres | Première Guerre mondiale |
Décorations | Croix de guerre –, étoile d'argent |
Emblème | |
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Historique
modifierEntre 1917 et 1918, 367 000 soldats afro-américains sont mobilisés[1]. Sur ce nombre, 100 000 débarquent en France et 40 000 vont au front[1]. Ils sont essentiellement dans les 92e (« les Buffles ») et 93e divisions d'infanterie (« les Casques bleus »), dont fait partie le 369e régiment d'infanterie[1]. Ce régiment comporte également des Portoricains[2]. À noter que le 371e régiment et le 372e régiment de la 93e division sont intégrés à la Division Main rouge (Red Hand Division) du général Français Mariano Goybet.
Ces soldats noirs sont moins bien entraînés, habillés et nourris que leurs homologues blancs[1]. L'administration du président des États-Unis Woodrow Wilson étant réticente à les enrôler dans l'armée et ne leur montrant aucune estime, ils sont ainsi à leur arrivée en , relégués à des tâches de soutien[1] (travaux de manutention ou de ravitaillement). Le général John Pershing, commandant en chef des forces américaines, envoie même une note secrète[3] aux militaires français intitulée Secret Information Concerning Black American Troops[4] dans laquelle il évoque le « manque de conscience civique et professionnelle » des soldats noirs, qui constituerait une « menace constante pour les Américains »[5].
Néanmoins, les militaires français ne prennent pas en compte cet avertissement et le maréchal Ferdinand Foch, commandant-en-chef des forces alliées, exige que le régiment soit incorporé aux troupes françaises. Les Français avaient en effet connu beaucoup de succès avec les Africains de leurs colonies et manquaient de troupes[6].
Le régiment qui dépend à l'origine de la garde nationale des États-Unis débarque à Brest le et fait un défilé remarqué lorsque son orchestre d'une soixantaine de membres dirigé par James Reese Europe joue la Marseillaise puis d'autres titres sur un air de jazz[7]. Le , l'orchestre des Harlem Hellfighters, dirigé par James Reese Europe, donne le premier concert de jazz sur le continent européen sur les marches puis dans le théâtre Graslin à Nantes[8],[9].
En , il prend sa nouvelle désignation et, en , coiffés du casque Adrian, les « Harlem Hellfighters » sont ainsi incorporés à la 161e division d'infanterie française (D.I.), sous le commandement direct des Français[10]. Ils opérèrent notamment en Champagne et en Alsace, se battant sur le front pendant 191 jours, soit plus que tous les autres soldats américains[5]. C'est aussi la première unité alliée à franchir le Rhin[5]. Leur surnom de « Harlem Hellfighters » leur est donné par les Allemands, surpris par leur courage[5]. Environ 1 500 d'entre eux périssent au combat[5]. Le régiment quitte la 161e D.I. le [11] en vue de son retour aux États-Unis.
Après la guerre, le gouvernement français décerne au régiment la croix de guerre décorée d'une étoile d'argent[12] pour la prise de Séchault[13]. Ce sont les premiers Américains à avoir été ainsi décorés de la Croix de guerre française[14]. Des distinctions à titre individuel sont également décernées à 171 d'entre eux.
Pourtant, sous la pression des autorités américaines, le régiment n'est pas autorisé à parader dans les rues de Paris. Grâce au colonel William Hayward, et malgré les réticences du commandement américain, les « Harlem Hellfighters » peuvent tout de même défiler sur la Cinquième Avenue de New York à leur retour en [15]. Ils marchent devant une foule immense, au son de leur orchestre de jazz, dirigé par James Reese Europe.
Postérité
modifierUne stèle rend hommage au régiment à Séchault[16],[17].
En , l'auteur américain Max Brooks leur rend hommage dans un récit de fiction en bande-dessinée, The Harlem Hellfighters, illustré par Caanan White. Le sort le jeu vidéo Battlefield 1 dont la campagne rend hommage aux Harlem Hellfighters en les mettant en scène en introduction. Un des membres de l'unité sert de narrateur tout au long de l'aventure[18]. Le groupe de power metal Sabaton leur rend hommage dans leur chanson Hellfighters.
La vision d'une Europe sans ségrégation raciale joue un rôle sur la volonté d'engager une réflexion sur les droits civiques des Afro-Américains[1]. James Reese Europe et son orchestre sont aujourd'hui célèbres pour avoir introduit et popularisé le jazz en Europe[1],[19].
Parmi les membres de ce régiment figurent en outre Henry Johnson, Horace Pippin et les musiciens de jazz Noble Sissle et Eubie Blake.
Certains des soldats sont enterrés au African Cemetery No. 2.
Notes et références
modifier- Ndiaye 2009, p. 55.
- Journal France-Amérique.
- (en) « A French Directive », sur The Gilder Lehrman Center for the Study…, (consulté le ).
- Le document original a été rédigé en français, avec la mention "Confidentiel", sous l'objet "Au sujet des troupes noires américaines". Cf. Benjamin Doizelet, L’intégration des soldats noirs américains de la 93e division d’infanterie dans l’armée française en 1918, (ISSN 0035-3299 et 1965-0779, BNF 34349132, lire en ligne)., contenant : Au sujet des troupes noires américaines (dit Circulaire Linard, 7 août 1918), pdf, version en français. The Crisis, Vol. 58, n° 3, mars 1951, page 176, révèle le document et en donne une traduction en anglais pour son lectorat aux Etats-Unis d'Amérique.
- New York State Military Museum.
- France24.
- « Brest et l'Amérique (5) : le jazz gagne la guerre », Le Telegramme, (lire en ligne, consulté le )
- Ville de Nantes, « 100 ans de jazz à Nantes ! », nantes.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Le centenaire du jazz ou le fabuleux destin du lieutenant James Reese Europe », FIGARO, (lire en ligne, consulté le )
- Journal de marches et des opérations (J.M.O.) de la 161e D.I., cote SHD 26 N 452/1, ministère français de la Défense..
- J.M.O. de la 161e D.I., cote SHD 26 N 452/1, ministère français de la Défense..
- Une citation à l'ordre de la division.
- « Les poilus noirs d'Amérique », leparisien.fr, (consulté le ).
- Consulat Général de France à New York.
- The U.S. National Archives and Records Administration.
- 49° 15′ 53″ N, 4° 44′ 01″ E.
- Dossier de monument.
- (en) Derek Strickland, « Battlefield 1's African American lead is a WW1 Harlem Hellfighter », tweaktown.com, (consulté le ).
- (en) Emmett Jay Scott, Scott's Official History of the American Negro in the World War, Homewood Press, , 308– (lire en ligne).
Liens internes
modifierBibliographie
modifier- (en) Anthony Gero, Black Soldiers of New York State, A Proud Legacy, New York, Université d'État de New York (Presse), , 174 p. (ISBN 978-1-4416-0380-7)
- Pap Ndiaye, Les Noirs américains : En marche pour l'égalité, Paris, Gallimard, , 159 p. (ISBN 978-2-07-036040-6)
- Mamba Point Blues, roman de Christophe Naigeon, Presse de la cité (ISBN 978-2-258-19545-5), 535 p.